Je l'ai commencé, soit ce soir, soit demain
Chapitre 61 : La traque
Port de la Cité Impérial, 15 Soufflegivre.
Aerin savoura la sensation du liquide brûlant descendant le long de sa gorge, enflammant son corps tout entier dans un brasier revigorant. Il reposa doucement le verre sur le bois gondolée de la petite table ronde qui lui faisait face, la tête encore retournée par le breuvage qu’il venait de boire.
-C’est…. assez bon, lâcha-t-il.
-Assez bon ? La cuisine du Gourmet est assez bonne. Ça, c’est….. sublimement excellent.
-Sublimement ? Je savais bien que les elfes ne tenaient pas l’alcool…. Surtout l’hydromel nordique.
Drell se rapprocha de lui, en désignant le pichet d’alcool qui se tenait entre eux deux.
-Allons allons, j’ai passé vingt ans en service commandée en Bordeciel. Crois moi, quand tu te fais chier à mourir dans une auberge miteuse à attendre ta cible, l’hydromel nordique s’impose de lui-même. C’est ça ou la hache dans le crâne.
-La hache dans le crâne ?, repéra Aerin, dubitatif.
-Oui, les ivrognes sont très susceptibles là-bas. Pauvre Galatar…
Aerin leva les yeux au ciel, puis observa rapidement la salle. L’auberge du bouclier ivre était aussi animée que son nom était énigmatique. De nombreux ouvriers du port large comme deux barriques s’esclaffaient bruyamment autour des tables, en faisant vibrer les tables en bois massif avec leur bras musculeux. Une lourde odeur de viande grillée et d’alcool flottait dans l’air, et les murs étaient brunis par la fumée qui s’amassait au plafond, en particulier au-dessus des deux massifs grills où deux sangliers rôtissaient lentement.
-Onzième fois, fit Drell.
-Quoi ?
-Onzième fois que tu essaie de voir s’ils sont là. Je te l’ai déjà dit, ils se feront bien assez remarqués quand ils arriveront.
-Tu penses ?
-Evidemment. Cessez de croire que vous êtes discret lorsque vous faites des enquêtes dans la Cité Impériale. Tout le pays est au courant avant même que vous n’arriviez.
Un éclat de rire gras attira l’attention des deux hommes. Un groupe de marins racoleurs essayaient d’attirer à leur table une pauvre mendiante assez jeune, qui serrait pitoyablement les rares Septims qu’elle avait pu glaner dans les tables. L’aubergiste se contenta d’un rapide coup d’œil inexpressif vers elle, mais ne réagit pas. L’un des marins se leva, et la saisit par la taille, mais reçut une gifle monumentale en travers de son visage. La mendiante se recula, comme horrifiée par ce qu’elle venait de faire, alors que un autre marin se levait, cette fois une dague à la main.
-C’est elle ?, demanda Aerin.
-Oui.
-Alors qu’est-ce qu’on attend pour…, commença-t-il.
Il fut interrompu par un hurlement de douleur. Le marin agressif pressait son bras ensanglanté, alors que quatre hommes en vêtement de cuir l’entouraient, le menaçant de leurs armes.
-Pas la peine, se contenta de lui répondre l’Altmer.
La mendiante s’esquiva en vitesse, pendant que les marins s’étaient levés pour une rixe mémorable avec leurs quatres agresseurs, dans l’indifférence générale. L’aubergiste se contenta de noter les noms des coupables, tout en s’annonçant bruyamment comme caisse pour les paris sur ce combat. Pendant que les divers clients de l’auberge s’agglutinaient autour du combat, la jeune femme en guenille s’approcha de Drell.
-Ils sont en train de fouiller le port. Ils essaient de ne pas se faire remarquer, mais la guilde des voleurs préparent déjà sa réplique. Ils vont arriver.
-Combien.
-Ils sont par groupe de quatre. Sans uniformes, et avec un armement limité. Je n’ai pas vu d’officier haut-gradé.
-Raxle n’est donc pas là, tant mieux pour moi, nota Aerin. Il aurait pu me reconnaître.
-Mmmhh, ça veut aussi dire qu’ils ne sont pas près du but. Il serait venu en personne sinon. Merci Rena.
La mendiante fit un petit signe de tête vers Drell, puis quitta l’auberge sans se faire remarquer, dérobant au passage la bourse d’un parieur. Le combat continuait toujours entre les marins et ceux qui semblaient être des membres de la guilde des voleurs. Aerin et Drell sirotèrent calmement leur hydromel en attendant que la situation se tasse, commentant d’une simple phrase de temps à autre les diverses évolutions du combat.
Au bout de plusieurs minutes, les marins battirent en retraite, visiblement pas uniquement touché par les poings adverses, comme le montraient leurs bras couverts d’entailles. Leurs adversaires lancèrent plusieurs piques peu gracieuses à leur encontre, puis vinrent auprès de l’aubergiste pour partager les gains des paris, avec l’argument imparable qu’étaient leurs dagues ensanglantés et qu’ils maniaient nonchalamment devant le tenancier, pas dupe.
-Comment tu connais ces mendiants ?, voulut savoir Aerin.
-J’ai passé de long moments ici, tu sais, et ils sont très utiles dans les renseignements. Les personnages de la haute-société devraient faire plus attention à leur concitoyen moins heureux.
-Tu as opéré ici pour le compte du domaine ?
-Pendant plusieurs années, durant la Deuxième Guerre. Mais j’ai surtout agi ici après ma … mort.
-Qu’est-ce que tu y faisais ?
-Des choses et d’autres, répondit évasiment l’Altmer. Le travail ne manque pas pour quelqu’un comme moi.
-Personne ne t’a reconnu ?
-Un faux nom et un peu de maquillage aident beaucoup, tu sais.
Aerin piocha dans le plat de gâteau fourrée, pas fameux mais nourrissants, qui se tenait entre eux d’eux, puis reprit :
-Pourquoi tu as voulu passer de notre côté, à la fin de la guerre ?
-J’ai été recruté très jeune chez les Justiciars. Et pas totalement de mon plein gré. Evidemment, à l’époque, je n’étais qu’un gamin, et j’étais manipulable. Avec le temps, j’ai appris à identifier qui étaient réellement mes ennemis. Malheureusement, il était trop tard pour faire machine arrière, j’étais piégé. J’ai commencé à agir en marge du service Justiciar, profitant du fait que mes supérieurs me laissaient agir à ma guise, pensant que j’étais totalement acquis à leur cause. Je suivais les ordres quand bon me semblaient, puis j’ai… fait le ménage chez nous comme chez vous. Une fois cela fait, j’ai sauté sur la première occasion pour m’en aller. Ça ne s’est pas tout à fait passé comme je le voulais, mais ça à marcher.
-Le… ménage ?
-Tu n’imagines pas combien d’agents doubles il y avait, et surtout combien d’hommes qui voulaient se mettre en travers de mon chemin à l’époque. En les abattants, je me suis en quelque sorte…. affranchi du service Justiciar, et j’ai réduit les menaces externes qui pesaient sur moi.
Les conversations se turent subitement. Aerin porta immédiatement son regard vers la porte, qui venait de s’ouvrir dans un grincement sonore. Quatre hommes aux pièces d’armures mal dissimulées sous leurs habits venaient d’entrer dans l’auberge. L’un d’eux fit glisser son regard sur chacun des clients, même sur Drell et Aerin qui venait de rabattre leur capuche sur leurs visages trop peu communs. Puis il fit un signe à ces camarades de le suivre, et s’engagea au travers des tables, vers un escalier au fond de la salle principale. Aerin eut un mal fou à ne pas les suivre du regard, ce qui aurait été beaucoup trop suspect.
Les quatre nouveaux venus disparurent à l’étage supérieur, et les conversations reprirent de plus belle. Aerin observa Drell, attendant qu’il se lance à leur suite, mais l’Altmer continuait de siroter son hydromel. Une fois fini, il posa le verre sur la table, s’essuya la bouche, et, enfin, se leva. L’Impérial le suivit, tout en tâchant de garder un air détaché, et tout d’eux empruntèrent l’escalier, à la suite de leurs cibles.
Si la salle principale de l’auberge était plus ou moins accueillante, les chambres l’étaient nettement moins. Les murs étaient couverts de crasse, le sol fait de planches qui n’étaient même pas toute fixées, et l’odeur… l’odeur était atroce. Drell fit un signe à Aerin, et tous d’eux avancèrent prudemment, pour éviter d’attirer l’attention.
-Mais qu’est ce vous faites putain !, hurla une voix au bout du couloir.
Un gémissement de douleur s’éleva, suivi d’une série de coups sourds. Drell s’avança jusqu’à la chambre, et Aerin se plaça juste derrière lui. Il osa un rapide coup d’œil, et aperçut leurs quatre cibles, qui entouraient un homme à terre, le visage en sang et le nez brisé. L’un des hommes s’abaissa à ses côté, le saisit par le col, et demanda :
-Alors, tu ne sais toujours rien ?
-Mais non, putain de taré ! Comment voulez-vous que je le sache. Et vous ne connaissez même pas son nom où à quoi il ressemble ! Laissez-moi, bordel de m.. Aaaahhh !
Le pauvre homme regarda avec des yeux horrifié sa main tranché en deux temps trois mouvements par l’un de ses agresseurs.
-Mais je sais rien ! Je vous jure ! Personne ne nous a contactés, on n’a vu personne arriver ici depuis le bordel que vous avez foutu, à part des marins et des voyageurs de passage, j’en sais rien de qui est votre espion !
Son bourreau leva les yeux vers celui qui menait le groupe, attendant les ordres. Ce dernier passa une main sur sa gorge, et l’homme à terre n’eut pas le temps de supplier qu’une dague lui traversait déjà la gorge de part en part. Dans un gargouillement insoutenable, il s’écroula au sol, répandant du sang et des morceaux de chair sur le plancher.
Drell et Aerin s’écartèrent prestement de la porte, et rentrèrent dans une chambre vide. Leurs cibles sortirent de la chambre, et passèrent devant leur porte sans les remarquer.
-C’est le combientième qu’on zigouille pour rien ?, grogna l’un d’eux.
-J’en sais rien, mais ça commence à devenir chiant. Si Crito veut des réponses, il aura qu’à flinguer toute la cité lui-même.
Leurs deux poursuivants attendirent un instant qu’ils s’éloignent dans l’escalier, puis quittèrent la chambre. Drell se caressa pensivement le haut des lèvres, puis Aerin lâcha :
-Ils en savent foutrement rien en fait. Qu’est que tu penses que ça veut dire ?
-Même s’ils ne savent pas s’y prendre, ils devraient avoir des pistes. Or, visiblement, ils frappent au hasard chez tous les malfrats de la ville. L’espion ne vient pas d’organisation habituelle, et ne vit visiblement pas dans la ville.
-Merde. Ça veut dire…
-Que l’espion est dans l’entourage direct de l’état-major. Fait chier.
Chapitre 62 : Tout prédateur a son prédateur.
Longsanglot, 18 Soufflegivre
-Quand est-ce que vous avez reçu ce message ?
-Ce matin même général Velnor. Il vient de la Tour d’Or Blanc. Il est authentique, nos experts en sont sûrs.
-Et ce qu’il dit, c’est authentique aussi ?
-Affirmatif, mon général. Les faits annoncés corroborent malheureusement avec les rapports de nos agents…
-Hmmm. Laissez-moi.
Le jeune officier Dunmer s’inclina légèrement devant Kalaïn, assis derrière son bureau, puis s’effaça en silence. Le silence retomba dans la pièce. Le général Dunmer parcourut plusieurs fois du regard la lettre que lui avait donnée son aide de camp, son expression s’aggravant à chaque relecture. Ces doigts se crispaient sur la feuille, la froissant de plus en plus, pour qu’elle ne finisse au final comme une simple boulette de papier distordue dans la main crispée du général.
Le Domaine avait rejoint les rebelles Lames du nord de Tamriel. D’après ce qui suivait cette nouvelle, les Elfes avaient déjà pris Anvil et Leyawiin, soit toute la côte Sud de Cyrodiil, et ne rencontrait pour l’instant qu’une faible opposition, mis à part un carnage étrange au sud de Kvatch, prochaine étape sans doute des armées Altmers.
S’il avait d’abord éprouvé de la colère et de l’inquiétude à cette nouvelle, il se rendait maintenant compte qu’il ne savait pas trop quoi en penser. Evidemment, il commandait toute une armée de cinquante mille hommes qui devrait maintenant affronter un ennemi de plus, et cette nouvelle était donc mauvaise pour lui. Mais une victoire de sa part signifierait une victoire du triumvirat Dunmeri que Kalaïn vomissait.
Il fit quelque pas, et s’appuya sur le rebord de sa fenêtre. La cour du palais était encore sillonnée par des patrouilles multiples, mais était aussi traversé par des messages et des officiers qui parcouraient le palais de longs en larges. La guerre était proche, et il n’était pas sur de souhaiter la gagner.
Son père adoptif lui avait toujours appris la loyauté envers sa maison. Il avait vécu dans l’idée qui chaque Dunmer doit rester fidèle à sa « famille », peu importe ses agissements, parce que apporter gloire et honneur à sa maison signifiait se plier aux ordres de ceux qui se trouvaient tout en haut de l’échelle hiérarchique de la maison. Mais maintenant qu’il y était, il se rendait compte qu’il ne se battait plus vraiment pour les Hlaalus.
Les récents évènements n’étaient pas non plus parfaits pour l’aider à croire en la sécurité que lui inspirait auparavant sa maison. Le roi était mort, assassiné avec l’aide sans doute de plusieurs dignitaires Hlaalus, et un de ses propres soldats le faisaient chanter. Ce dernier évènement l’avait plongé dans le doute profondément. Il avait toujours vu les derniers soldats Hlaalus qui parcouraient encore les couloirs au milieu des Indorils comme des preuves qu’il était encore chez lui. La trahison de l’un d’eux, pour de l’argent qui plus est, avait pulvérisé ce dernier espoir.
Et en plus, il ne pouvait se plier aux exigences de son maître chanteur. Celui-ci l’avait recontacté une deuxième fois après le message qu’il avait reçu, et lui avait demandé une somme d’argent bien trop conséquente. Bien des jours s’étaient écoulés depuis, et plus le temps passait, plus les chances pour qu’il aille livrer son secret au triumvirat pour encore plus d’argent augmentaient. Kalaïn l’avait croisé de nombreuses fois, mais toujours dans des lieux trop exposés et fréquentés pour qu’il puisse l’abattre.
La porte s’ouvrit dans son dos. Le massif battant de bois pivota sur ses gonds, révélant un Dunmer aux habits pourpres et ornés de coutures dorées, à l’embonpoint assez prononcé. L’Elfe rentra dans la pièce, refermant la porte derrière lui sans lâcher Kalaïn du regard.
-Ralyn, salua ce dernier sobrement.
-Général Velnor, lui rendit le conseiller Dunmer. Votre armée est-elle prête ?
L’officier elfe se retourna complètement, et dévisagea Ralyn. Celui-ci semblait assez nerveux par rapport à d’habitude, et des gouttes de sueur commençait à perler sur son front, tandis que ses doigts se serraient de manière imperceptibles et irrégulières. Le conseiller Dunmer ne cessait d’ailleurs de faire balancer son regard de la fenêtre à la porte.
-Depuis plusieurs jours, répondit simplement Kalaïn.
-Bien. Vous partez dans dix jours, à destination de Faillaise.
Kalaïn haussa les sourcils, observant Ralyn qui dansait d’un pied sur l’autre sans rien dire. Le souffle du notable Dunmer était assez irrégulier, notait-il, et sa bouche s’ouvrait sans cesse comme pour dire quelque chose, puis se refermait de suite, comme s’il n’arrivait pas à trouver ses mots.
-Quoi ?, lâcha enfin Kalaïn.
-Je… Les souterrains… Allez voir les souterrains. Zainat les a fait boucler, je ne sais pas ce qui s’y passe, mais moi-même je n’y ai même pas accès.
Une fois cela dit, Ralyn écarquilla les yeux, puis quitta la pièce précipitamment, visiblement au comble de la confusion. Kalaïn l’avait bien vu, le conseiller sentait la peur à plein nez. Et pas la peur de ce qu’il faisait, non, une peur qui avait sa source autre part. Une visite part les souterrains s’imposaient.
~~~~
Souterrains de Longsanglot, quelques heures plus tard.
Deux Ordonnateurs bloquaient le passage, barrant l’entrée des souterrains à quiconque souhaitait y entrer. Leurs masques graves scrutaient les rares passants qui s’aventuraient dans cette partie du palais. Kalaïn savait bien que la manière forte ne serait pas très conseillée s’il voulait rester en vie après son excursion.
Il saisit la fiole qui pendait à sa ceinture, et la regarda un instant, caché dans l’ombre d’une des alcôves du palais. Elle renvoya un éclat d’un verre intense, presque appétissant. Kalaïn fit sauter le bouchon, et fit descendre dans son gosier tout le contenu de la fiole. Il la raccrocha à son ceinturon, vide, pour éviter de laisser des traces, puis leva sa main devant son visage.
D’abord, rien ne se passa, puis un léger frémissement secoua sa peau. Les vaisseaux sanguins gonflèrent d’un coup et apparurent distinctement sous sa peau. Puis, très vite, tout se troubla, sa main sembla perdre de sa consistance, tandis qu’elle disparaissait peu à peu. Au bout de quelques secondes, tout ce que l’on pouvait voir de Kalaïn, c’était un mince frémissement brumeux.
Profitant de l’obscurité, il s’approcha de deux gardes en faction. Il eut toutes les peines du monde à ne pas faire de bruit, puis se glissa entre les deux hommes, qui ne bronchèrent pas, gardant leur masque d’impassibilité. Une fois passé, Kalaïn vérifia une dernière fois qu’ils n’avaient pas réalisé, puis continua son chemin dans les souterrains.
Plus il s’enfonçait dans les couloirs sombres, plus les lieux devenaient inquiétants. Un liquide trop gluant pour être de l’eau suintait des murs sombres et couverts d’une mousse rouge. Du sang séchés commençaient à tacher les murs çà et là, on pouvait presque entendre les cris des suppliciés qui avaient été trainé ici au fil des années, répandant leur entrailles sur le sol de pierre froid.
Kalaïn se guidait aux voix, et aux Ordonnateurs. Ceux-ci étaient positionnés de manière à ne laisser aucun embranchement dans les souterrains sans surveillance. Au début, ceux qu’ils avaient croisé bavaissaient tranquillement, s’interrogeant sur la nature de leur mission et sur ce pourquoi ils bloquaient les souterrains, mais très vite, Kalaïn avait croisé des Ordonnateurs froids, raides comme des piquets, qu’on aurait pu prendre pour des statues sans le calme mouvement de leur respiration. Très vite, il n’entendit plus de voix, et ne voyait que des Ordonnateurs immobiles. Il approchait.
Au détour d’un couloir, il se plaqua machinalement contre le mur. Dans une pièce devant lui, se tenait Gilvas Nelodren, entouré de plusieurs soldats, toujours silencieux. Une porte massive, d’architecture visiblement Dwemer, se tenait devant eux, ouverte. Quatre soldats semblaient tirer quelque chose derrière celle-ci. Kalaïn se rapprocha pour mieux discerner ce qu’ils tiraient, mais cela se trouvait toujours dans l’ombre. Gilvas s’approcha lui aussi de la porte, le visage fermé.
Dans un dernier effort, les quatres soldats tractèrent leur fardeau devant le général Indoril. Tous les soldats présents dans la pièce reculèrent d’un pas, écœuré. Une forme reptilienne s’étalait devant eux, mais pas en bon état. Elle était couverte de blessures, et l’un de ses bras se terminait par un moignon difforme, qui avait dû être auparavant un main. Malgré cela, elle possédait tout de même un aspect redoutable.
-Que s’est-il passé ?, demanda Gilvas d’une voix sombre.
-Il a été blessé au bras. Il était très énervé quand on l’a trouvé, et on n’a pu le calmer qu’après avoir perdu dix des notres. Paradoxalement, sa blessure le rend encore plus dangereuse.
-Bien. Mettez-le dans la même cage que notre nouvel arrivant. Il a fait un long voyage, et a besoin de se nourrir. Mais réveillez le avant, qu’il se défoule un peu en même temps.
-Selon votre plaisir, répondit l’Ordonnateur en s’inclinant.
Kalaïn fut interpellé par le comportement du soldat. Il ne s’exprimait pas comme un subalterne à un supérieur, mais presque d’égal à égal. Il l’aurait fait fouetter directement s’il avait été à la place de Gilvas. Mais autre chose l’inquiétait. La bête morte au sol était suffisamment dangereuse pour abattre dix Ordonnateurs, et Gilvas la donnait à manger à une autre bête, visiblement beaucoup plus dangereuse.
Il aurait voulu continuer son enquête, mais un frémissement incontrôlé lui parcourut le corps. La potion commençait à cesser de faire son effet. Il s’esquiva en vitesse, pour profiter de ses dernières minutes invisibles pour s’en aller, laissant Gilvas et ses hommes seuls avec le prédateur endormi.
"Jamais vu autant vu un passage aussi rapide "
What ?
"Par contre, j'ai du rater le moment de l'alliance Altmer et des Lames"
T'as rien raté, j'l'annonce dans ce chap, même si Nayliin en a donné l'ordre quelque chapitres plus tôt
Merde ! J'ai encore laissé passer un chapitre
Comme l'a dit mon VDD, bons chapitres
Au fait, la bête reptilienne, c'était un Daedroth ?
Yep, c'était un Daedroth
Pour le passage rapide, c'était une sucession d'actions très enchaînées, je m'attendais à une bagarre générale
Aaaahhh.
Ouais, c'était juste un petit élément d'ambiance.
Sweet ?
Chapitre 63 : The Bear Hunter
Kvatch, 20 Soufflegivre au soir.
Dans un lourd et plaintif grincement, les deux massives portes de chênes qui bloquaient l’accès à la ville fortifiée de Kvatch pivotèrent sur leurs gonds, laissant la faible lumière du crépuscule s’étaler sur le sol de pierre de la cité. Un cavalier se tenait devant la porte, la cape au vent, devançant de quelques mètres, un régiment de lanciers en armures à l’arrêt, surplombés pas des massifs étendards sur lesquels flottaient l’Arbre de Chorrol et les deux Croissants de Lune de Skingrad.
Debout, sur le chemin de ronde, dominant la masse ordonnée de nouveaux venus qui attendaient devant la ville sur la route tortueuse qui s’élevait du sol jusque au corps de garde imposant, les gardes de la cité, arborant fièrement le Loup de Kvatch, étaient alignés, armes présentés, côte à côte sur le long et terriblement écrasant mur d’enceinte. Tous leurs regards portaient au loin, devant eux, mais leur attention était focalisée sur les nouveaux venus.
-Au nom du Comte de Kvatch, déclinez votre identité et ceux de vos compagnons !, clama l’un des sergents sur le corps de garde.
-Grand Commandeur Caldwyn Marsh. J’apporte renfort et expertise à la ville de Kvatch, par ordre du Commandant-Régent Nelenius Nuccius, répondit le cavalier d’une voix forte, mais calme.
-Attendez-ici que…, commença le factionnaire.
-Au nom des divins, soldat, laissez les rentrer, et qu’on en finisse, l’interrompit une voix trainante.
Un groupe de cavalier fendit la foule qui s’était amassée, curieuse, devant les portes de la cité, encadré par un groupe de soldats à pieds qui écartaient les passants devant les montures. Au milieu de chevaliers aux aguets, qui examinaient d’un œil méfiant les soldats postés devant la ville, un vieil homme aux chevaux aussi rares que grisonnant, montés sur un destrier imposant et ornés de l’emblème de la ville, répéta encore.
-Laissez les entrer. Il se fait tard, et l’heure n’est pas aux vaines discussions.
-A vos ordres, monseigneur.
Sans même attendre un signe des soldats sur le corps de garde, le cavalier au-dehors s’avança, dévoilant sa simple armure de cuir et sa cape rapiécé à la foule curieuse. Les soldats derrière lui s’avancèrent aussitôt, dans un sourd grondement, alors que le soleil disparaissait définitivement derrière les montagnes au loin. La longue colonne de soldats s’engagea dans la ville, telle un serpent dans sa tanière, et fendit la foule à son tour, pour atteindre le château. Leur chef s’écarta du gros de ses troupes, et rejoignit le comte de Kvatch.
-Comte, fit-il simplement en s’inclinant.
-Caldwyn Marsh. Je vois que ce cher Nelenius n’a pas pris à la légère mes avertissements.
-Nous verrons bien.
L’un des chevaliers en armure qui accompagnait le comte releva sa visière, dévoilant un visage presque chérubin, et des yeux naïfs qui contrastaient avec le regard dur de Marsh.
-Ce n’est pas assez d’hommes. Comment voulez-vous nous défendre contre cinquante milles elfes ?, intervient-il.
-Caldwyn, embraya le comte avant que celui-ci ne réponde, voici mon petit-fils, Lucian.
-Il n’y a pas cinquante milles elfes. Tout au plus dix milles.
-Nos espions sont…
-Vos espions ont tort. Je parie qu’ils se sont renseignés auprès des paysans locaux, et n’ont même pas pris la peine de vérifier leurs dires.
-Tout de même, vous nous amenez trop peu de soldats, ils…
-Mille hommes, plus les milles que vous avez ici. Si les elfes déploient toute leurs troupe, on est à cinq contre un. Largement suffisant.
Le chevalier s’approcha un peu plus de l’Impérial, et le toisa de haut en bas. S’il avait été plus imposant, et avait surtout une meilleure prise sur sa monture, cela aurait pu être intimidant. Vu son manque d’équilibre flagrant, c’était au mieux ridicule.
-Sans doute pour des lâches qui se cachent derrière des remparts, bafouant l’honneur de leur maison et…
-A force de pavoiser comme un paon, derrière tes lourdes plaques d’acier, tes discours perdent de crédibilité, gamin. L’honneur et la gloire n’ont plus de sens quand tu gis éventré sur le sol, pleurant ta mère et maudissant les dieux, le coupa Caldwyn.
-Grand-père, vous n’allez pas le laisser…, s’insurgea le jeune homme.
-Tais-toi, imbécile, tu me couvres de honte, soupira le comte.
Le pseudo-chevalier observa son grand-père avec une mimique d’incompréhension, puis lança un regard qui aurait dû être noir vers Caldwyn Marsh, mais qui se changeait en regard fuyant quand il croisa le regard de l’Impérial.
-Excusez mon petit-fils, sa mère l’a trop bercé d’histoire de héros des anciens temps. Il tarde à comprendre que le monde actuel est beaucoup plus sombre. Où comptez-vous établir votre camp ?
-Dans votre cour et devant le château, sur la place Pinder. Les laisser dehors serait trop hasardeux.
-Hmmm, vous ne vous gênez pas. Enfin, ça m’apprendra à appeler à l’aide à Nuccius. Bien, faites comme bon vous semble, au point où j’en suis, conclut le vieil homme.
Le Commandeur s’inclina, et partit rejoindre le cortège de soldats qui défilaient dans les rues de Kvatch, laissant le comte et sa garde seul devant les portes. La cape de l’Impérial se déploya suite à un coup de vent, et tous purent voir son emblème : une tête d’ours rouge, traversé par une épée ensanglanté.
-Je ne peux croire que nous confions la sécurité de la cité à cette homme…, se désola Lucian.
-Dis-moi, est-ce que tu sais pourquoi tout le monde l’appelle le Chasseur d’Ours ?, le coupa son grand-père.
Le jeune chevalier réfléchit quelques instants, puis reprit :
-Bien sûr, cette histoire est connue. Il y a de cela bien des années, il a abattu à lui seul cinq ours pour défendre…
-Ce n’est pas celle-là. Celle-ci est celle que tous les ignorants racontent. Non, je vais te dire. Il y a dix ans, alors qu’il n’était que capitaine de la légion, Marsh a du réprimer une révolte en Bordeciel, initié par un des bâtards de Sombrage. Lorsqu’il arriva au lieu de refuge des rebelles, une grotte de la Faille, il débusqua tout le monde avec l’aide d’un mage et un sortilège d’empoissonnement. Puis il les aligna tous sur un mur, femme et enfant compris, et fit tirer ses arbalétriers. Puis il hurla : « Ceux qui sont encore en vie sont graciés par l’Empire ». Alors certains Sombrages se relevèrent, et s’approchèrent de légionnaires, heureux d’être en vie, mais Marsh ordonna de les abattre de nouveau. Comme ça, il était sur de les avoir tous tué.
-C’est horrible. Et le bâtard ?
-Marsh fit couper toute les têtes, et les ramena à la Solitude, pour qu’elles soient identifiées. Marsh ne reculera devant rien pour obtenir ce qu’il veut, mais le pire des massacres. C’est un Chasseur, et il n’échoue jamais.
~~~~
Mur de Kvatch, vers minuit.
-Au rapport capitaine.
L’officier Impérial posté sur le mur sursauta à l’appel de son grade, et se retourna pour identifier celui qui s’approchait. Il se mit immédiatement au garde à vous.
-Commandeur.
-Alors ? Quelles sont les nouvelles ?
-Regardez par vous-même, Commandeur, ils sont là.
En contrebas des murs et la colline où était Kvatch, dans la pénombre d’une nuit sans lune, des feux parsemaient les alentours de la ville, clignotant irrégulièrement dans la nuit. Près de la forêt au Sud, des feux plus imposants éclairaient la lisière des arbres, tandis que des elfes s’affairaient apparemment à découper des arbres, qu’ils trainaient vers leur camp.
-Ils construisent des armes de sièges, constata Marsh, combien sont-ils ?
-Dix milles, Commandeur, huit milles elfes et deux milles Lames.
-Qu’est-ce que foutent les Lames ici ?
-Ce ne sont pas tous de vrais Lames. Il y aussi des soldats volontaires d’Anvil et sa région. Les autres ont dû passer par Lenclume.
Marsh acquiesça lentement, observant les bivouacs elfes en contrebas. Puis il ordonna :
-Préparez la ville pour un siège, capitaine, un très long siège.
Suffis de demander, c'est ça ?
Je lis !
Raaah ! Je suis partagé entre les deux camps, d'un côté on a un Impérial vachement charismatique et de l'autre on a les forces de l'alliance "rebelle"
En tout cas, ça fait plaisir de te lire à nouveau
Merde, j'ai fait une erreur dans mes fichiers, j'ai pris une version pas fini de corriger du chap.
Je grille ça que maintenant, désolé, il y a sans doute des erreurs d'inattention débiles, etc...
Encore désolé
bien d' accord avec moulin! depuis le debut je suis pour les rebelles mais la j'ai vraiment envie de voir Marsh à l' oeuvre!! ;)
Bon,sa fait longtemps que je n'ai pas commenté,toujours aussi bien Ol,continue comme ça mon jeune ami.
" Caldwyn Marsh "
Mon Dieu, mais quelle honte !
Ce plagiat
Ce plagiat éhonté de Bowen Marsh de GOT !
Yeah, bon chapitre qui introduit un bon connard comme je les aime.
Toutefois, j'ai remarqué quelques (nombreuses ?) fautes qui relevèraient de l'innattention. Mais si c'est dérangeant, cela n'arrête toutefois pas la lecture du chapitre.
Par contre, je n'ai pas très bien compris pour l'histoire du batard qui avait organisé la révolte ; sa tête aurait si méconnaissable que le très méticuleux Marsh n'hésita pas à expédier toutes les têtes devant lui pour identification ?
En tout cas, il ne fait pas les choses à moitié et ça j'aime bien
Putain, enfin quelqu'un qui me dit d'où viens ce "Marsh" que j'avais en tête.
Je répétais à toute ma famille et mes potes : "Vous savez d'où ça vient, Marsh ?", mais il me répondait jamais.
Merci, merci Roch
En fait, j'ai pris le prénom sur la GBT, puis je voulais prendre le nom aussi, puis j'ai pensé à ce nom que je n'arrivais pas à mettre sur un personnage, donc....
Pour les fautes, comme je l'ai dit plus haut, j'ai fait une erreur dans le C/C C/V, en gros je me suis gourré de truc, du coup.....
J'ai vérifié que ça ne changeait pas le sens de chap, et je me suis dit que le reposter et supprimer l'ancien ruinerait la mise en page pour pas grand chose, donc....
Enfin, pour l'histoire du bâtard, je me suis dit que ça faisait un peu pas très pro de pas vérifier qu'il avait flingué le bâtard, et aussi, je me suis dit que le bâtard avait passé dix ans sans problèmes avant de sortir se révolter, il devait pas être très connu. De plus, comme tu le vois, sa révolte est petite, il se planque dans une grotte quand même.
Donc j'ai tenu à faire très méticuleux là dessus, peut être trop, en effet
Sérieux pour ta famille et tes potes ? Brule les.
En tout cas, très bon chapitre qui n'augure que du bon pour ce fameux Chasseur d'Ours.