Entre parodie de mangas…

Le concept de Rose & Camellia ne sort pas totalement de nulle part. Développé en 2007 avec la technologie Flash, le premier volet affichait déjà sa volonté de parodier les manga shôjo rétro, c’est-à-dire les mangas conçus dans les années 70-80 à destination du jeune public féminin. En France, il faut penser à des titres désormais culte tels que La Rose de Versailles (Lady Oscar), Ace o Nerae (Jeu, Set et Match), Glass no Kamen (Laura ou la passion du théâtre) ou même Princesse Sarah.

À travers son titre, Rose & Camellia parodie ouvertement ce qui faisait précisément la force de ces mangas : la victimisation d’une jeune fille naïve, maltraitée par des « grandes sœurs » malveillantes prêtes à toutes les bassesses pour traîner l’héroïne dans la boue. Mais parce que la violence reste généralement proscrite dans les œuvres shôjo, elle était alors bien souvent simplement suggérée par un regard foudroyant, une humiliation publique ou pire… une gifle bien sentie !

… et simulation de gifles !

Dès ses débuts, la série de jeux Rose & Camellia imagine une haute société aristocratique qui voit d’un très mauvais œil l’arrivée d’une jeune parvenue dans son milieu social. La beauté extérieure de ses membres n’a d’égal que leur laideur intérieure et leur détermination à rabaisser au maximum celle qui ose prétendre leur voler leur gloire, leurs titres et leur héritage.

Au fil des différents chapitres, le symbole de la « Rose » s’incarne à travers une galerie de jeunes filles naïves et bienveillantes à qui l’on explique que le respect ne se gagne que par la force. Le « Camélia » représente l’adversaire de la Rose, celle que l’on ne doit avoir aucun scrupule à battre pour triompher des injustices subies par notre protagoniste. Le genre de pestes définitivement sournoises qui prolifèrent telle de la mauvaise herbe dans les mangas shôjo.

S’ensuit une improbable « simulation de gifles » où les claques s’enchaînent telles un sport que l’on oserait presque comparer à de la boxe tant il est présenté ici tel un art. Et pour mieux gagner en crédibilité, Rose & Camellia Collection peut compter sur un atout de poids : le motion gaming autorisé par la Nintendo Switch.

Plus technique que la boxe ?

Il y a bien des façons de gifler son adversaire dans Rose & Camellia Collection. Armé d’un simple Joy-Con fermement serré dans la main, on peut jouer « petit bras » en manquant d’amplitude, ce qui se concrétise par une claque gentillette, trop peu cinglante pour entamer la jauge de vie de sa rivale. Mais une gifle bien frappée n’aboutit pas forcément à tous les coups. L’adversaire peut la contourner habilement en réalisant une esquive. Il suffit pour cela d’opérer un bref mouvement de recul qui peut être suivi d’une contre-attaque.

Les deux demoiselles jouent à tour de rôle car ce sport implique des règles que l’on doit scrupuleusement respecter. Ce qui ne nous empêche en rien de placer quelques feintes en simulant le déclenchement de la gifle avant de stopper son geste au tout dernier moment. Il est amusant de constater que l’adversaire réagit lorsqu’on bouge simplement la main, se préparant à esquiver le coup à venir.

Il existe même une technique spéciale consistant à claquer du plat de la paume de la main pour surprendre la rivale. Le fait de prendre l’ascendant peut même donner droit à un combo délirant baptisé « farandole de claques » qui permet de se lâcher complètement. Avant de conclure le duel par un coup de grâce réservé aux plus méritants.

Pour être complet, il faut préciser que le titre reste tout de même jouable sans le motion gaming si vous jouez par exemple en mode portable ou avec une Switch Lite. Les coups de Joy-Con sont alors remplacés par un simple balayage de l’écran tactile avec l’index mais le titre en perd clairement tout son intérêt. Nous vous déconseillons donc fortement ce type de prise en main qui est à la fois moins précis et moins intuitif.

De Princesse Sarah à Saint Seiya

Mais le vrai point fort du jeu réside dans sa façon de parodier honteusement les mangas shôjo les plus célèbres à travers une galerie de rivales au design immédiatement reconnaissable. Sachant que cela concerne toutefois des œuvres largement passées de mode dans notre pays, cela ne peut évidemment fonctionner qu’auprès d’un public très ciblé. En clair, si vous n’avez jamais entendu parler de « Miss Papillon » (la joueuse de tennis aux bouclettes de Ace o Nerae / Jeu, set et Match) ou que le martyre subit par l’héroïne de Glass no Kamen (Laura ou la passion du théâtre) vous laisse de marbre, passez votre chemin !

On trouve certes aussi un clin d’œil marqué à Saint Seiya via le personnage de Seiko, « ambassadrice de la Grèce et chevalier du Baffitaire » dont il faut faire tomber le masque, mais le délire s’arrête là côté shônen mangas. Chaque scénario justifie bien sûr ces règlements de comptes violents par des quiproquos absurdes et de la mauvaise foi permanente. Résultat, le titre s’inflige un PEGI 16+ alors qu’il s’agit franchement d’une expérience tout public.

Le chapitre La-Mulana et le mode Versus

Soyons honnête, si l’expérience est fun, elle n’a pas non plus la profondeur d’une simulation de boxe. Le jeu est également très court et les duels ne sont pas bien difficiles à remporter, ce qui fait que l’on boucle les 4 épisodes en même pas deux heures. C’est pourquoi la compilation s’efforce de rallonger un peu sa proposition via deux éléments inédits.

Le premier est un chapitre bonus à débloquer dans les options pour accéder à une véritable parodie de La-Mulana. On ne s’en étonnera pas lorsqu’on sait qu’il s’agit de la série la plus connue du développeur Nigoro. Ce chapitre remet d’ailleurs en question la légitimité de l’héroïne de La-Mulana 1 et 2 en obligeant toutes les stars féminines de la franchise à s’étriper.

Le second ajout est un mode VS bienvenu qui permet de gifler un autre joueur sur un même écran en local. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire de se procurer une deuxième paire de Joy-Con pour en profiter car chaque joueur n’a besoin que d’une seule manette pour infliger une raclée à son adversaire. En contrepartie, le second joueur est obligé de s’accommoder de la perspective miroir pour agir, même lorsque c’est à lui d’attaquer, mais cet ajout reste appréciable.

Enfin, pour ceux qui n’aiment pas faire les choses à moitié, il faut mentionner l’existence d’une édition deluxe chez Limited Run dont les précommandes sont déjà lancées. De nombreux goodies sont inclus à l’intérieur, notamment l’OST, ce qui se justifie par la présence d’un excellent générique parodique très convaincant en version japonaise. Une chanson d’opening que vous pouvez justement retrouver en vidéo sur le trailer qui ouvre cet article. Cette édition boîte comprend aussi un fourreau collector, des cartes, un double poster ainsi qu’un Standee acrylique à l’effigie de l’une des héroïnes du jeu.