Bourré de talent, le cinéaste Steven Spielberg n’en est pas moins rempli de sagesse. Il y a dix ans de cela, il avait tenu des propos quasiment prophétiques à une poignée d’étudiants. Si, à l’époque, cela avait pu paraître terrifiant et quelque peu alarmiste, le constat actuel rend le tout d’autant plus saisissant. Une décennie plus tard, le discours de Spielberg semble se concrétiser au vu des résultats de certains longs-métrages au box-office.
Les spectateurs en ont marre, Spielberg avait anticipé le ras le bol du public
Parmi les grands noms du septième art, il paraît impossible de ne pas citer celui de Steven Spielberg. Prolifique depuis le début de sa carrière, au début des années 1970, le réalisateur américain pourrait être aisément qualifié de visionnaire, et pas seulement d’un point de vue cinématographique. Au-delà de ses talents de metteur en scène, le natif de Cincinnati aurait également une sorte de don de prescience. C’est lors d’une masterclass au sein de l’Université de Californie du Sud, en 2013, que le réalisateur avait mis les jeunes pousses de l’industrie du cinéma en garde. Si ses avertissements avaient fait froid dans le dos de son audience, les voir se réaliser ne fait qu’accentuer l’épouvante.
Déjà à cette époque, le cinéma laissait entrapercevoir des difficultés particulièrement compliquées à gérer telles que l’accroissement des montants de production, le prix des places qui grimpe en flèche ou encore l’élargissement des écrans et des offres de diffusion. Connaissant on ne peut mieux l’envers du décor, Steven Spielberg avait rappelé aux étudiants que « les studios font des films pour l’argent », ce qui pouvait les restreindre à « des points de vue de plus en plus étriqués » à même de lasser les spectateurs. En oracle, Spielberg clôturait même sa « prophétie » avec la déclaration suivante : « Il y aura une implosion le jour ou trois-quatre, voire une demi-douzaine, de ces films aux budgets énormes vont se planter, et le modèle va encore changer ».
Des films de super-héros pas si « super » que cela ? les bides actuels donnent raison à Spielberg
Steven Spielberg a-t-il anticipé la déchéance des films de super-héros ou de ces blockbusters bas du front qui parviennent tout juste à rentrer dans leurs frais ? Au vu de ses précédentes déclarations et du climat actuel, du côté de Marvel et DC Comics, on aurait tendance à répondre par l’affirmative. À force d’imposer un calendrier soutenu en matière de super-héros, obligeant parfois à visionner chacun d’entre eux pour comprendre les tenants et les aboutissants de la trame qui se dessine, Marvel et DC Comics ont gavé les spectateurs jusqu’à l’indigestion. Résultat des courses, on se retrouve avec Shazam! La Rage des Dieux (125 millions de coût de production, quasiment 134 millions de recettes), Black Adam (quasiment 200 millions pour la production, sans compter le marketing, et un peu moins de 400 millions de recettes), Ant-Man 3 (200 millions de production contre 476 millions de recettes) et d'autres programmes sur la plateforme Disney+ (Avalonia, Buzz l’Eclair, Secret Invasion, …) qui ont l'allure d'un pétard mouillé.
Certes, il y a eu quelques soubresauts et des chiffres exemplaires au niveau mondial (Spider-Man : No Way Home, Les Gardiens de la Galaxie Vol.3, …) mais l’on sent que cette formule, comme l’avait prédit Spielberg, s’essouffle peu à peu. Ce n’est pas faute d’avoir prévenu, en 2015, lorsqu’il comparait le destin des films de western à ceux des super-héros, tout en sous-entendant que leur fin n’était pas irréversible mais que l’âge d’or était très certainement derrière eux. Un changement qui va amener de nouveaux modèles, une nouvelle forme de blockbusters ? À côté de ces échecs commerciaux, il y a des films qui font état d’un succès insolent tels que Top Gun : Maverick, il y a quelques mois, ou encore Barbie de Greta Gerwig qui vient de dépasser le milliard de dollars de recettes.