Dans une année 2023 très chargée en jeux vidéo, Baldur's Gate 3 la joue plutôt discret. Entre Zelda : Tears of the Kingdom, Diablo 4, Final Fantasy 16 ou encore Starfield, le titre de Larian Studio ne fait pas l'objet d'une communication dévergondée. Pourtant, il s'affiche très clairement comme l'un des prétendants au titre de jeu de l'année. On vous explique pourquoi.
La rédaction de JV a pu voir plusieurs extraits de Baldur’s Gate 3 (mais aussi y jouer quelques heures) lors d’un press tour organisé par Larian. C'est également à cette occasion que l'on a pu poser quelques questions à Sven Vicke, directeur du studio Larian et réalisateur du jeu.
Baldur’s Gate 3 fait partie de ces longues arlésiennes du jeu vidéo. Après deux tentatives ratées de la part de Wizards of the Coast (détenteur des droits de Donjons et Dragons, dont dépend le jeu), la troisième semble la bonne. En développement depuis 6 ans chez Larian Studio, le troisième opus d’une licence plus que culte du jeu vidéo s’approche d’une sortie mondiale. Peu bavard sur son nouveau bébé, le studio belge préfère la discrétion. En témoignent les rares prises de paroles de leur part. Alors lorsque que l’on a l’opportunité de jouer en avance à une version pas encore déployée (une première depuis 2020), on s’y accroche !
La mouture en question intégrait alors les nouveautés officialisées il y a peu par Larian. La classe de moine, la race Drakonïde ou encore les sorts intégrés pour l’occasion. Un build plus avancé donc que l’actuel à la disposition des joueurs via l’accès anticipé. L’occasion pour nous de mesurer les progrès du soft depuis notre aperçu à la fin de l’année 2020. De quoi également mesurer, trop rapidement selon nous, la partie émergée de l’iceberg en termes de contenu qu’a à offrir Larian avec Baldur’s Gate 3.
Au-delà du contenu en plus, la version de Baldur's Gate 3 partagée à la presse affiche de nombreuses améliorations par rapport au build testé en octobre 2020. L'interface a été repensée, la prise en main est naturelle sur PC ou PlayStation 5 tandis qu'un travail colossal a été abattu en termes de stabilités. Des bugs subsistent mais sont bien moins nombreux qu'il y a trois ans. Il faudra tout de même s'intéresser à l'optimisation du titre à sa sortie tant le jeu semble dense graphiquement. Par ailleurs, on vous conseille de lire également le test effectué il y a trois ans pour revoir en détail ce que propose Baldur's Gate 3 puisque tout n'est pas abordé dans cet article.
Une histoire taillée sur mesure
À l’instar de notre preview d’octobre 2020, il nous a été donné le loisir de commencer une partie selon nos critères. Deux choix majeurs sont alors possibles. Il y a l’option de créer un personnage Custom : un avatar qui se fera l’étendard de nos choix et de nos actions lors de la campagne. Il est possible de choisir sa propre classe, sa race, sa sous-race mais aussi ses attributs ou ses caractéristiques. Des choix importants puisqu’ils définissent comment votre héros interagit avec le monde. Mais on verra ça plus tard. En tout état de cause, c’est un choix recommandé puisqu’il vous permet de participer (ou non, c’est vous qui décidez) en tant qu’observateur aux scénarios des personnages de type Origine. Ce sont des protagonistes dont l’écriture a été particulièrement soignée. Et comme vous l’aurez deviné, il est également possible de les incarner directement.
Dans tous les cas, tous partagent le même sort. Dans des circonstances inconnues, vous êtes fait prisonnier sur un vaisseau appelé le Nautiloïde. Ce sont les flagelleurs mentaux (et plus précisément le culte de l’Absolu), des créatures aux visages tentaculaires directement inspirées des récits de H.P. Lovecraft, qui sont les responsables. La trame principale s’articule donc d’abord autour de notre quête pour se faire soigner sans pour autant chercher à comprendre qui sont les responsables.
Bien sûr, cette campagne a bien plus à offrir et a le mérite de s’adresser à tous. Nul besoin d’avoir joué aux premiers Baldur’s Gate pour comprendre tenants et aboutissants. Si Sven Vicke assure avoir glissé de multiples références aux deux premiers épisodes, la saga de Bhaal est bel et bien terminée. C’est l’univers des Royaumes Oubliés qui est repris mais aussi une thématique commune : celle de la germe du mal.
Dans Baldur’s Gate 1 et 2, le joueur incarne l’un des fils du Seigneur du Meurtre dont il possède un fragment de son âme. Dans Baldur’s Gate 3, c’est un parasite injecté dans le cerveau qui lui donne, entre autres, différentes capacités. À chaque fois donc, l’embryon du mal est planté dans le joueur. De quoi donner l’opportunité au studio de mettre en place une narration riche dans laquelle le joueur pourra s’immerger selon ses propres choix : tout le monde ne réagit pas de la même manière en se sachant infecté et proche de la mort…
Un contenu colossal avec des situations sans cesse renouvelées
Or, les choix dans Baldur’s Gate 3 sont nombreux. Ils peuvent être issus de la simple volonté du joueur (comme celui ou non d’aider telle ou telle personne) mais sont parfois forcés par des jets de dés. Par exemple, convaincre son interlocuteur de quelque chose en particulier demande de la persuasion. Outre les bonus liés à la classe et aux attributs de son personnage, c’est un lancé d’un dés 20 qui va conditionner la réussite de la persuasion. Et selon le succès (ou non) du jet, des choses différentes peuvent avoir lieu. Un bon jet de dés peut vous assurer de l’équipement tandis qu’à l’inverse, un affrontement peut avoir lieu. De ce combat peut résulter le décès de personnages non-joueurs. Comme vous l’aurez deviné, la mort de certains affectera aussi votre partie, surtout si ces derniers jouissent d’une place importante dans le jeu.
Tout cela sans compter les protagonistes qui accompagnent le joueur dans son aventure. Chacun d’entre eux dispose d’un objectif personnel à accomplir. En découle une histoire qui leur est propre, ainsi qu’une personnalité et des motivations bien affirmées. Chaque choix que vous réalisez reçoivent la validation ou la désapprobation de ces alliés, qui peuvent du jour au lendemain décider de s’en aller. C’est par ailleurs cette approbation que se déroule le système de romance mis en avant il y a quelques jours par Larian. Il est quasiment possible de tout faire, et même de passer la nuit avec un druide sous sa forme d’ours…
Pour en ajouter encore plus à l’équation, il est également possible d’interagir de différentes manières avec les habitants. Lors de sa présentation, Sven l’a montré de manière bien efficace avec un marchand djinn. Ce dernier vous propose de tourner la roue afin de gagner le "jackpot" mais vous vous rendez vite compte (surtout si vous disposez d’un personnage à l’intelligence développée) que la manœuvre est truquée. Vous pouvez alors l’exposer mais le marchand, en colère, va alors vous transformer en fromage. Une situation comique que vous pouvez empêcher en lui volant (avec un personnage taillé pour la discrétion l’anneau magique dissimulé dans sa barbe. Une fois ceci fait, vous pouvez lui demander de tourner la roue qui va vous faire gagner le dit jackpot : un voyage à Jurassic Park commandité par le djinn qui s’est aperçu de votre supercherie. Mais si vous arrivez au bout de la jungle de dinosaures, c’est bien une arme magique très intéressante qui fera office de récompense pour vos efforts.
En bref, mille et une histoires coexistent et il est également impossible De ces derniers découlent de nombreuses conséquences, cinématiques et milles et une histoire dont il est quasiment impossible de voir la totalité en une seule partie. J’en veux pour preuve la longue présentation effectuée par Sven où l’improvisation a été le maître-mot : tout se passe rarement comme prévu même pour le directeur du studio qui découvre encore des choses aujourd’hui.
Depuis notre test, pas de grande nouveauté à signaler. Ils se déroulent au tour par tour et exigent des joueurs, même en mode normal, de faire travailler leurs cellules grises. Il faudra s'y reprendre à plusieurs fois (sauvegarder très régulièrement ne peut pas être un mauvais conseil pour Baldur's Gate 3) avant de réussir certains affrontements. Mais après tout, les joutes peuvent souvent être évitées, même sur certains boss.
Vivre sa propre aventure
170 heures de cinématiques, plus de lignes de dialogue que de texte dans les livres Le Seigneur des Anneaux… Quelque chose rendu possible par l’enthousiasme des développeurs de Larian. Sortis respectivement par Bioware (sous l’égide d’Interplay) en 1998 et 2000, Baldur’s Gate Iet Baldur’s Gate 2 ont façonné le monde du jeu de rôle sur PC. Alors quand Larian récupère les droits d’exploitation sur la licence pour un troisième épisode, l’équipe est forcément aux anges. "Tout le monde était super enthousiaste, ce qui a fait émerger avantages et désavantages" explique Sven. Les développeurs, habitués de Donjons & Dragons, sont doublement motivés par la tâche à faire. Dans un autre sens, chacun à sa propre vision pour créer le titre ce qui ralentit probablement le processus. Un mal pour un bien puisque c’est ce qui donne aujourd’hui une richesse folle au jeu via la variété des routes possibles.
Pour illustrer une nouvelle fois ces propos, l’équipe de Larian a montré que certains choix à l’importance certaine avaient des conséquences sur le monde. Sans rentrer trop dans les détails, le joueur est rapidement confronté à un problème d’immigration dans un village. Trois choix s’offrent alors à lui. Décider que ce n’est pas son problème et qu’il passe juste pour qu’on résolve son problème, soit s’allier avec l’un des deux camps. Quelque soit sa décision, il peut être certain qu’elle aura un impact plus tard sur son aventure. Il est même possible de mesurer sa popularité selon ses actions grâce aux journaux locaux !
Encore une fois, il existe mille et une possibilités (pour ne pas dire une infinité) et toutes les découvrir en une partie est strictement impossible. Quelque chose qui peut frustrer les plus impatients mais qui peut se révéler salvateur pour ceux acceptant qu’il s’agit d’un jeu qui demande plus d’implication que la moyenne. À ce niveau-là, Larian fait tout pour immerger le joueur au maximum. La quasi-totalité des personnages affichent un doublage d’excellente qualité, les choix de dialogues renforcent évidemment l’engagement du joueur et j’aimerai souligner la gestion de la caméra particulièrement soignée. On peut décider d’être en vue à la troisième personne avec la caméra qui suit le dos du joueur lors de l’exploration d’autant que les environnements sont sublimes. Avec un simple coup de roulette, il est possible de prendre de la hauteur avec une vue du dessus idéale pour les combats ou le repérage.
Par ailleurs, Baldur’s Gate 3 s’apprécie seul mais surtout à plusieurs. À l’instar d’une partie de Donjons & Dragons (ou de n’importe quel jeu de rôle plateau), l’aventure est toujours plus folle accompagné. Vos compagnons de route vont prendre leurs propres décisions, complexifiant encore plus le monde que vous parcourez mais générant dans la majorité des cas une émulation forte, une envie de découvrir. À ce sujet, Sven Vicke explique que c’est la force du jeu :
Les joueurs essayent et ils restent. Ils ne comprennent peut-être pas tout, ils découvrent plusieurs trucs qu’ils ne pensaient pas aimer alors ils s’accrochent.
Lui-même espère que les joueurs se diront "ok, j’ai vécu une aventure à laquelle j’ai vraiment cru, avec de vraies personnes, qui ont de vrais problèmes". De ce que l'on a vu, difficile d'imaginer le contraire. En plus d'être probablement la meilleure transposition de l'univers de Donjons & Dragons en jeux vidéo, Baldur's Gate 3 offre tous les outils pour que le joueur se fasse sa propre aventure sans être pris par la main. De quoi être un prétendant au titre de jeu de l'année 2023 ? Assurément, mais la réponse définitive sera donnée le 03 août prochain avec la sortie du jeu sur PC.