Le phénomène Baldurs’ Gate 3 n’en est qu’à ses débuts. Sorti dans un premier temps sur PC, le RPG développé par Larian Studios débarque (enfin) sur consoles de salon, et plus précisément sur PlayStation 5. Cette nouvelle version est-elle à la hauteur de cette légende naissante du jeu vidéo ou au contraire accuse-t-elle un certain retard ? La rédaction de JV s’est replongée dans les Royaumes Oubliés pour répondre à la question qui brûle les lèvres des fans de jeux de rôle.
Une version PlayStation 5 sans défaut
Baldur’s Gate III sur PlayStation 5 est à quelques détails près identique à la version PC qui intégrait d’ores et déjà une interface et des contrôles dédiés aux aventuriers désireux de profiter du jeu manette en mains, et non avec un clavier et une souris. Les quelques défauts mineurs inhérents à ce type de périphériques sont de nouveau présents, à commencer par la navigation dans certains menus, mais pour le reste l’expérience est toujours aussi agréable et intuitive. Le pad avait fait ses preuves sur PC, il aurait été étonnant que ce ne soit pas le cas sur PS5.
Le système de sauvegarde reste sensiblement le même avec ses sauvegardes automatiques après la découverte d’une nouvelle zone, un long repos ou une séquence de gameplay précise ainsi que ses sauvegardes manuelles. Il est à noter que seules 5 “saves” sont conservées en ligne par Larian Studios. Cela permet de commencer l’aventure sur PS5, puis de poursuivre sur PC avant de terminer sur la machine de Sony. Il est toutefois nécessaire d’activer l’option pour profiter de ce système de cross-save.
Techniquement parlant, la version console de Baldur’s Gate 3 est tout aussi solide et fluide que l’est celle PC. Divinity : Original Sin II témoignait du savoir-faire des studios belges dans ce domaine, et ce nouveau RPG en est une preuve supplémentaire. Exception faite du premier temps de chargement au lancement du jeu, l'aventure ne souffre d’aucun ralentissement et d’aucun bug sur PS5. Les consoles de salon n’ont rien à envier aux PC en ce qui concerne ce jeu de rôle, et c'est une excellente nouvelle.
Le meilleur de “Donjons & Dragons”
L’aventure débute in media res dans les geôles d’un étrange vaisseau survolant une région située sur le rivage occidental de Féérune. Prisonnier d’un Flagelleur Mental - une créature anthropomorphe inspirée du mythe lovecraftien de Cthulhu - qui vous a implanté un mystérieux parasite, vous parvenez à vous enfuir avec d’autres victimes d’expérimentation et provoquez le crash du vaisseau. Désormais libre mais toujours sous la menace de ce parasite qui finira par prendre le contrôle, vous partez en quête d’un remède au cœur des Royaumes Oubliés. Concis et redoutablement efficace, ce postulat de départ n’est en réalité qu’une graine narrative qui ne demande qu’à éclore et s’épanouir.
L’une des principales forces de ce RPG réside dans sa capacité à vous surprendre, et cela passe en premier lieu par ses intrigues qui s’enrichissent, s’entrechoquent, interfèrent les unes avec les autres pour au final créer une histoire unique… votre histoire. Les scénaristes puisent ouvertement dans le lore de Donjons & Dragons, mais pas uniquement, et font preuve d’un profond respect pour cet univers pionnier de l’Heroic-Fantasy. Inutile d’être un érudit de D&D pour profiter de cette épopée fantastique qui exige toutefois un haut niveau d’engagement pour se savourer pleinement. La plume des studios belges vous régale durant les 75 à +150h que dure votre épopée par une finesse et une créativité qui semblent être sans limite.
Larian Studios transcende l’histoire de Baldur’s Gate 3 avec une mise en scène qui a fait ses preuves, notamment sur Divinity : Original Sin II. Après une introduction qui restera longtemps gravée dans vos mémoires de par ses visuels et son intensité dramatique, une structure narrative de RPG plus traditionnelle s’installe. Les discussions et autres tirades d’exposition sont légion et sont susceptibles de dérouter les non-initiés, mais BG3 n’oublie jamais de souligner par des cinématiques dignes de ce nom les grands événements qui jalonnent votre destinée d’élu.
Ce respect du matériau source (le jeu de rôle papier Donjons & Dragons) se retrouve dans la direction artistique qui ne cherche jamais à atteindre le photoréalisme, mais préfère conserver une approche plus colorée qui lui sied à merveille. Baldur’s Gate III brille par la richesse de ses environnements, le soin apporté à la modélisation des personnages, la finesse de ses textures et ce sens du détail qui imprègne le moindre élément affiché à l’écran. De plus, ce RPG fait preuve d’une solidité technique sans faille, et offre une expérience fluide sur PlayStation 5.
Un RPG dont vous êtes le héros
Baldur’s Gate 3 vous invite à écrire votre histoire, une histoire qui n’appartient qu’à vous. Évidemment, la trame principale reste sensiblement la même et encore… Larian Studios aurait concocté pas moins de 17 000 fins différentes, et cette déclaration prend tout son sens après plusieurs dizaines d’heures passées sur Féérune. La moindre conversation, le combat le plus anodin, la décision la plus minime en apparence peut avoir des conséquences inattendues à court - moyen - long terme et impacter durablement le monde. Dans BG3, vous présidez à votre destinée et vous assumez jusqu’à la fin… telle est la promesse faite par les développeurs et cette promesse est tenue haut la main.
Cette approche “dont vous êtes le héros” est une réussite totale. Les possibilités narratives donnent par instant le vertige tant elles sont nombreuses, parfois imprévisibles, et surtout entrelacées dans plusieurs intrigues qui prendront des chemins différents et vous mèneront à un dénouement façonné par des centaines de choix. Votre destin et par extension celui des Royaumes Oubliés est entre vos mains et celui de vos alliés, et ce sentiment d’être à la fois le moteur de l’histoire et le jouet d’une certaine causalité est grisant au dernier degré.
Tout commence avec la création de votre héros. Moins de 10 minutes après le lancement de BG3, Larian Studios fait déjà étalage de ses ambitions. L'éditeur d’avatar s’avère extrêmement complet et offre une multitude d’options (race, classe, historique, apparence, etc.) vous permettant d'élaborer le personnage de vos rêves et ce n’est que le début. La personnalisation est au cœur de l’expérience et affecte aussi bien le visuel que le gameplay. Jeu de rôle oblige, l’aventure se vit au rythme de la montée en puissance de l’élu et de ses compagnons, à savoir le gain d’expérience, l’apprentissage et l’obtention d’équipements toujours plus puissants.
Rien de révolutionnaire à l’horizon, si ce n’est la maîtrise totale de ces mécaniques RPG qui donnent cette saveur si particulière au genre. Les développeurs savent ce qu’ils font et cela se ressent à chaque seconde. Cependant, le manque de variété loot pourrait en décevoir certains tant il n’est pas rare de tomber sur des items (trop) similaires. Le déroulé de votre épopée dépend aussi des alliés que vous décidez ou non de recruter. En effet, ces derniers influent sur l’histoire et vous influencent, ne serait-ce que par leur présence et l’attachement que vous finissez par avoir pour eux. Prendre une décision ne se fait pas sans heurt, surtout lorsque celle-ci peut faire souffrir un allié qui vous tient à coeur et avec qui vous avez développé une relation plus intime.
Les "dés" karmiques sont jetés
Baldur’s Gate III troque l’historique “temps réel” (avec Pause Active) de la saga pour importer son système de combat au tour par tour qui n’a plus rien à prouver, et qui surtout convient parfaitement à D&D. Cela permet entre autres d’intégrer le plus fidèlement possible les affrontements du jeu de rôle papier et d’accentuer la dimension tactique. Larian Studios reprend à la lettre près (ou presque) les règles de Donjons & Dragons (la 5e édition pour être précis), et le résultat est tout bonnement saisissant. BG3 se transforme alors en un jeu de stratégie exploitant à merveille les caractéristiques des personnages ainsi que le level design pour gagner en complexité. Seule ombre au tableau, la caméra pourtant virtuose la majorité du temps présente malheureusement quelques difficultés à appréhender la verticalité des zones.
Les amateurs de jeu de rôle sur table le savent, la vie d’un personnage tient parfois à un jet de dés chanceux. Sans surprise, le RPG de Larian Studios place au centre de son expérience ces fameux D20 (pour dés de 20) qui ont traumatisé des générations entières de rôlistes. En résumé, toutes vos actions dans Baldur’s Gate 3 se résolvent avec des lancers de dés qui déterminent vos chances de réussite. Bien entendu, les caractéristiques de vos personnages permettent d’influencer les résultats, ce qui peut avoir son importance dans certaines situations. Les développeurs ont tout de même intégré une variante afin d’encadrer cette dimension “aléatoire”. Les “dés karmiques” réagissent à vos précédents lancers, et favorisent (ou non) votre camp. Enchaîner les succès critiques risque de vous coûter cher dans un avenir proche, et inversement.
L’exploration est elle aussi sujette à ces D20 qui régissent les Royaumes Oubliés, même si dans les faits, un personnage s’avère souvent apte à débloquer la situation. La découverte de Féérune se fait à l’envie en suivant un chemin, puis un autre pour au final tomber sur un monastère en ruines, un tombeau et bien plus exotique encore. Baldur’s Gate III encourage la curiosité et récompense les audacieux à la mesure de leurs exploits. Larian Studios fait aussi appel à votre intelligence et vos capacités de déduction via des puzzles qui scellent certains lieux et qui ont le mérite de renouveler l’expérience. Enfin, BG3 est intégralement jouable à plusieurs en ligne ligne de 2 à 4 joueurs. Il est même possible de partager le même écran à 2 et de s’offrir une aventure unique sur canapé en compagnie d’un ami. Pour cela, il suffit de brancher une seconde manette. La suite appartient à votre histoire.
Conclusion
Points forts
- Une aventure unique à chaque nouvelle partie (des milliers de fins différentes)
- Une adaptation fidèle de Donjons & Dragons
- Un univers à la richesse insoupçonnée
- Un contenu vertigineux (durée de vie : +100h)
- Les combats tactiques au tour par tour
- La création et la personnalisation des héros
- Le multijoueur en ligne et hors-ligne (écran partagé)
- Une oeuvre d’art visuelle et musicale
- Une expérience "manette" satisfaisante
Points faibles
- Le manque d’accessibilité générale du jeu pour les non-initiés à D&D et aux RPG
- Certaines imprécisions dans l’interface “manette”
- Une caméra parfois confuse en combat
Note de la rédaction
Baldur’s Gate 3 sur PlayStation 5 n’a rien à envier à Baldur’s Gate 3 sur PC. Larian Studios n’a pas sacrifié son RPG pour le faire tourner sur la console de Sony. Ce jeu de rôle conserve l’intégralité du contenu de la version PC (même la coopération en local via écran partagé) et propose une expérience optimale manette en mains. Les quelques défauts de BG3 sont encore présents (notamment l’interface “pad”), mais pour le reste, c’est un sans faute.