Vous saviez que Game Freak ne fait pas que du Pokémon ? Récemment, le célèbre studio japonais a annoncé une collaboration avec l'éditeur Private Division : Project Bloom, un jeu d'action-aventure prévu pour 2026 sur PS5 et Xbox Series. Pour l’instant, nous n'avons qu'un concept art, où l’on peut voir un samouraï seul au milieu d’une gigantesque forêt. Une image qui contraste beaucoup avec ce que l’on connaît de l’esthétique de Pokémon. Dans un communiqué de presse, Kota Furushima, directeur de Game Freak, s'est dit "ravi" du projet :

Nous sommes ravis d’avoir l’opportunité de créer une nouvelle licence qui se veut audacieuse et différente de nos précédentes réalisations. Dès le départ, Private Division était l’éditeur avec lequel nous voulions travailler. Leurs résultats dans l’industrie et leur expertise mondiale nous ont confortés dans l’idée de créer un nouveau jeu d’action-aventure de grande envergure, dont nous sommes impatients de parler davantage - Kota Furushima

Après SEGA, c'est la seconde fois que l'équipe s'associe avec une autre entité. Private Division est une filiale de Take-Two Interactive (GTA), qui a jusque-là publié des titres indépendants de petite à moyenne taille. Ils ont notamment travaillé sur Kerbal Space Program et The Outer Worlds.

Project Bloom (Game Freak / Private Division)

Une toute première tentative

Ce n'est pas la première fois que Game Freak cherche à mener sa barque et à s'éloigner de Pokémon, série que le studio développe depuis 1989 (une trentaine d'entrées au total). Le premier coup d’essai fut en 2005 avec Drill Dozer, sur Game Boy Advance. Un jeu de plateforme assez unique puisqu’il misait sur un système de vibration au sein de sa cartouche. Malheureusement, avec seulement une sortie au Japon et en Amérique du Nord, sans passer par l'Europe ou l'Australie, le succès n’est pas au rendez-vous (500.000 ventes selon VGChartz). À l'époque, la Nintendo DS était déjà sortie depuis 2 ans et l’équipe n'était pas en mesure de réaliser un portage sur la nouvelle console portable.

Une première tentative qui intervient après la sortie de Pokémon Rubis et Saphir, la troisième génération des monstres de poche. Le timing est intéressant : à l’origine, la licence n’avait pas été pensée comme une série mais simplement comme un premier épisode et une suite (Or et Argent devant apporter un point final). Ken Sugimori, l'un des fondateurs de Game Freak, accusait à l'époque un manque d’inspiration quant aux designs des célèbres créatures. L'univers de Pokémon comptait 251 espèces, contre plus de 1000 aujourd'hui.

Pokémon Rubis et Saphir (Game Freak / Nintendo)

La naissance du Gear Project

Après la réception parfois compliquée de Pokémon Noir et Blanc en 2010 - Game Freak avait tout tenté pour changer la formule -, Junichi Masuda, l'un des fondateurs du studio et compositeur de la série, lancera l’idée folle du Gear Project. Un projet visant à créer une licence encore plus forte que Pokémon et qui appartiendrait uniquement à l'équipe japonaise. Chaque employé avait le droit de proposer des idées et d'élaborer des prototypes.

C’est en 2012 sur 3DS que le premier né du Gear Project verra le jour : HarmoKnight. Un titre oscillant entre le platormer et le jeu de rythme, qui ne rencontrera pas le succès escompté. Après cette tentative ratée, Game Freak mettra les bouchées doubles, au détriment même de Pokémon (en 2015, la célèbre série n'aura pas le droit à son épisode annuel, l'équipe préférant travailler sur le Gear Project). En interne, il y a deux équipes : une sur Pokémon, et une autre bien plus conséquente sur les projets maison. Les monstres de poche ne sont alors plus une priorité pour Game Freak.

Après ça, la société va enchaîner les échecs : Pocket Card Jockey en 2013, un jeu de course à cheval couplé au solitaire ; Tembo The Badass Elephant deux ans plus tard, platformer développé aux côtés de SEGA. C’est seulement en 2017 avec Giga Wrecker que Game Freak atteindra un certain succès : une suite spirituelle à Drill Dozer avec une direction artistique très différente de d'habitude.

Pieds et poings liés à Pokémon

Malgré tout, les résultats du titre sont à des années-lumières de ceux de Pokémon, et en aucun cas une alternative viable. Little Town Hero, arrivé en 2019, n'y changera rien. Suite à l'échec de ce dernier projet, Junichi Masuda va prendre la décision de quitter Game Freak pour devenir "chef créatif" chez The Pokemon Company (société qui gère la marque, la production, l'édition et le marketing de la franchise). L'homme aura l'occasion de s'exprimer quant à ces déboires passés. Il expliquera que Game Freak sait faire des jeux vidéo, mais qu'ils ne savent pas communiquer : Nintendo s'est toujours occupé de cet aspect pour Pokémon. Lors de son départ, il déclarera :

À l’avenir, j’espère transcender les frontières des jeux vidéo en essayant d’offrir plus de surprises, de plaisir et d’excitation aux gens du monde entier, tout en faisant tout mon possible pour connecter les gens, élargir le cercle du "jeu" et contribuer à l’avènement d’un monde plus riche à partager - Junichi Masuda

Après plus de 30 ans, Game Freak souhaite s'éloigner de Nintendo et de The Pokemon Company. Project Bloom démontre que l'équipe n'a ni enterré le Gear Project, ni perdu l'envie de créer des choses différentes - ce qui compréhensible au vu l'état des derniers jeux Pokemon. Des titres souvent créés à la hâte, en un an, avec plus de 1000 créatures 3D désormais au sein d'un monde ouvert. Avec ce nouveau soft d'action-aventure, censé sortir dans trois ans, Game Freak espère sans doute un développement beaucoup plus serein.