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Sujet : [Fantasy] L'assemblée extraordinaire

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LePerenolonch LePerenolonch
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Niveau 10
09 octobre 2016 à 23:31:03

Chapitre 4 : Messire Blaireau

CHIMÈNE

« Dans la cour grand arbre, frémit ta frondaison
Sous ton ombre ancestrale nous nous y recueillons
Cenelle grand Cenellier tu en es le seigneur
Déploie tes branches et protège-nous du malheur
»

Une ribambelle de notes accompagnait la voix cristalline de Jeanne Aubépine. Léonie, la sœur cadette de la chanteuse mit fin à la chanson avec un ultime pincement de corde et posa sa cithare sur ses genoux. Les deux jouvencelles sourirent à Chimène qui applaudit.

« À ton tour de chanter, maintenant ! s’esbaudit Jeanne.
— Je n’y arriverai pas, refusa-t-elle.
— Tu interprètes plutôt bien Douce Cécile et les quatre preux. » l’encouragea Léonie.

Elle avait beau être vêtue d’une belle robe vert sombre, cela ne faisait pas d’elle une dame, et seule une dame pouvait se targuer de posséder une telle voix. Dame Cécile et les quatre preux ne demandait pas de telles échappées lyriques.

« Préfères-tu que je te montre comment jouer de la harpe ? » proposa Léonie en faisant courir ses doigts le long des cordes de son instrument.
« Oh oui ! s’exclama Jeanne, comme ça nous pourrons même en jouer toutes trois au festin ! »

L’idée de se produire sur l’estrade devant Edmond Aubépine et Alexander Wiern la terrifia. Avant qu’elle ne puisse détourner poliment l’invitation, la porte s’ouvrit. Karl Wiern pénétra la pièce. De grande taille, ses boucles brunes encadraient son visage fin. Toujours bien vêtu, sa tunique d’un sinople clair s’accordait à ses yeux. Chimène se sentit stupide à son arrivée, sans même savoir pourquoi.

« Bonjour mesdemoiselles, les salua-t-il. Je suis venu chercher Damoiselle Azalée, pour sa leçon du jour. »

Comme à chaque fois qu’il lui adressait la parole, Chimène prenait une teinte cramoisie.

« Oh Karl, tu arrives quand il faut ! Chimène a appris Douce Cécile et les quatre preux, voudrais tu l’entendre ?
— Avec plaisir. » sourit-il poliment.

Chimène souhaita que Karl soit pris d’un élan de goujaterie, allant sans ambages, repliant toute courtoisie et clamant que sa voix ne pouvait qu’être laide.

« Allons Chimène, je t’aiderai ! » promit Jeanne.

La mélodie entrainante de la chanson retentit et Chimène attaqua le premier couplet d’une voix faiblarde.

« À Cenelle il y avait un seigneur
Dont la douce fille s’enorgueillissait
D’une carnation blême et de grand’ candeur
De mollets galbés et cheveux dorés »

Chimène tremblait, la boule au ventre. Chaque son devenait de plus en plus étouffé. Au refrain, Jeanne et Léonie l’accompagnèrent et elle se fondit dans leur chant.

« Quatre gens répondirent à l’appel
Edmond le gros possédait moult terres
Thomas le fourbe avait grand’ cautèle
Simon le perfide, une âme solitaire
Alban le preux ne manquait pas de zèle

Ils conquirent les faveurs de leur dame
Cécile Aubépine au minois joli
Sur la lice s’élancèrent au clair leur lame
De grand tournois pareil nul ne revit

Quatre gens répondirent à l’appel
Edmond le gros possédait moult terres
Thomas le fourbe avait grand’ cautèle
Simon le perfide, une âme solitaire
Alban le preux ne manquait pas de zèle
»

Elle s’arrêta de chanter.

« Allons ! la rabroua Jeanne. Quand la lance désarçonna le Thomas … »

La mine désappointée de la jeune fille n’émut pas Chimène, qui se contenta de regarder le sol.

« Damoiselle Azalée doit aller à sa leçon. » rappela Karl.

La courtoisie aurait voulu que ce dernier fasse un compliment sur le chant de Chimène, mais visiblement le courage lui manqua. Il se contenta d’ouvrir la porte et de l’inviter à passer.

Comme ils descendaient en silence l’escalier menant à la salle d’étude, Chimène essaya de dédramatiser la situation.

« C’était vraiment atroce, n’est-ce pas ? »
Elle tenta une risette, comme pour montrer qu’elle n’en voulait pas au jeune sire de Felseweise.
« J’imagine que vous n’avez pas le timbre pour la musique. » la consola Karl.
Il s’agissait là d’un doux euphémisme, mais Chimène rougit encore une fois. Karl eut le tact de l’ignorer.

« Qu’étudiez-vous avec Simon ?
— Le calcul, mais je ne suis pas plus douée….
— Quand j’étais enfant, je comptais sur mes doigts pour les retenues, c’est bien plus facile.
— Simon refuse que je fasse autrement que de tête, se dépita-t-elle.
— Faites-le en dessous de la table, quand il tourne le dos. » proposa Karl d’un œil complice.

Chimène sourit et déjà se retrouva en compagnie de son instructeur. Le mitharo l’accueillit froidement. Comme à son habitude, il portait sa bure grise, et son crâne chauve et tavelé servait de support à un petit bonnet noir. Quelques chandelles brûlaient, compensant la lueur tamisée du soleil.

« Vous êtes en retard, lui fit-il remarquer.
— Veuillez m’excuser, monsire, le pria Chimène.
— Quel est le motif ? s’informa son instituteur d’un ton neutre.
— Je… je chantais, répondit-elle d’une voix blanche.
— Vous chantiez… »

Simon haussa un sourcil, circonspect. Le regard de Chimène se voulut fuyant.

« Eh bien, pour une baladine vous ne débectez point mot, mademoiselle. Quelle était l’œuvre ?
— Dame Cécile et les quatre preux, murmura-t-elle.
— Quels enseignements tirez-vous de cette histoire ? »

La question la laissa de marbre.

« Vous avez le regard d’un bovin, essayez au moins de paraitre intelligente, maugréa Simon.
— Je ne sais pas, avoua-t-elle.
— Que l’assassinat est l’apanage des fourbes et qu’il est très sévèrement puni par Mithar.
— Comment Mithar punit-il ceux qui font du mal ? demanda Chimène.

Elle repensa à Kelvin, le malotru qui l’avait menacé à la bataille de Cenelle. A Yannick qui lui avait planté son carreau dans l’œil. Mithar avait il puni William ? Simon paraissait profondément choqué par la question.

« La dernière fois que quelqu’un m’a demandé cela, c’était un enfant de cinq ans. N’avez-vous donc reçu aucune éducation religieuse ? »

Se faire humilier de la sorte n’arrangea pas son humeur et des larmes lui vinrent aux yeux. D’une voix chevrotante, elle bredouilla :

« Je croyais aux esprits de la forêt… »

La face austère de Simon s’adoucit quand il s’aperçut de son état.

« On raconte qu’il est fréquent que Mithar vienne à Ilfingard sous forme humaine.
— À quoi ressemble-t-il ? demanda-t-elle en se torchant l’œil de sa manche.
— Il n’y a pas de source sûre, mais nul doute que s’il se présente à quelqu’un, le quidam se retrouvera face à un homme fort, sans aucune souillure, libre de tout stupre, limpide comme l’eau de roche. »

Chimène acquiesça et renifla. D’un ample mouvement de bras, Simon l’invita à s’assoir. Sur la table, une carte d’un autre âge et quelques plumes d’oie étaient à sa disposition.

« Je pense que vous ne vous fâcherez pas si l’on omet l’arithmétique aujourd’hui »

Elle le regarda d’un air interrogateur.

« Votre départ pour Edelsteen est imminent. J’ai jugé bon de vous inculquer quelques notions sur le sujet. Premièrement, où se situe la région de Groléjac ? »

Elle regarda la garde mais la dure vérité revint faire surface. Les écritures lui étaient tout aussi étrangères que les groléjois.
« Je ne sais pas. »

Simon garda par devers lui son exaspération, soucieux de ne pas trop l’ébranler.

« La région de Groléjac se trouve à l’ouest, par-delà la vallée de Croix-Mont et de celle des Craffeux. Le nom de leur seigneur ? »

Depuis son arrivée à Cenelle, elle ne passait pas un couloir sans entendre jurer « Maudits Vangeld ! ». Presque sans hésiter, elle répondit :

« Le seigneur Joris Vangeld.
— Finalement, nous allons aboutir à quelque chose, sourit le mitharo. Leur emblème, pie de sable sur champ d’or les enorgueillit. Mais ce qui les rends plus fier encore est leur cité, Edelsteen. On raconte qu’elle est la plus grande ville jamais construite par les hommes.
— J’ai récemment rêvé de pies, monsire. Des pies mortes par centaines, et un grand ours qui broyait leurs cadavres sous ses griffes. »

Elle se demande si sire Evrard Athis avait suivi son conseil ou s’il avait fini comme tous les autres dans le charnier. Le mitharo la regarda d’un mauvais œil.

« Les rêves ne doivent pas vous préoccuper lorsque vous êtes éveillée. Ils ne sont que vos pensées perverses qui ressortent lors de votre sommeil. Des mensonges que Mithar vous ôte de votre esprit afin que vous soyez pur comme au matin de votre naissance. »

Simon passa l’heure suivante à lui parler de telle ou telle famille de Groléjac, puis des participants à l’assemblée extraordinaire. La multitude de noms et de blasons se mélangeait et elle n’arrivait plus à se dépêtrer de ce lacis d’informations. Une sérieuse migraine l’assaillait quand elle quitta le mitharo.

Au dehors, le soleil se taillait une brèche parmi la masse nuageuse et teintait d’or le ciel morne. Les pierres du château suintaient après la bruine matinale et tout paraissait briller. De concert avec le clocher de l’horlogerie, l’estomac de Chimène sonna midi. Une brise automnale lécha ses bras et ses poils se hérissèrent. Elle pressa l’allure, cherchant la chaleur de la grande salle et de ses grandes cheminées. Au détour d’un couloir, elle croisa Domitille Aubépine. La Dame de Cenelle dégageait une odeur de cheval, mais sa beauté n’en était pas moins estompée. Sa pelisse d’hermine lui engonçait parfaitement ses formes galbées, et sa carnation semblait être fait de l’albâtre le plus pur. Ses joues délicatement mouchetées de son rabaissaient les taches de rousseur de Chimène au rang de pustule orangeâtres. Elle se sentit fort laide à ses côtés et songea qu’il devait y avoir une part de vérité quand Jacques l’appelait « le canard ». La demoiselle Azalée effectua une courbette maladroite, et Domitille l’invita à lui prendre le bras, le temps de faire le chemin jusqu’à la salle à manger.

« Comment se passe votre séjour ici, mon amie ? demanda la Dame d’un air affable.
— Je remercie le seigneur votre père pour son hospitalité.
— J’ai appris que vous chantiez ? »

Domitille avait beau se perdre en sourire, Chimène constata quelque chose de faux derrière ses risettes bienveillantes.

« J’essaie, tout du moins, répondit-elle.
— Est-ce réellement important ? Je veux dire, à Edelsteen, vous ne serez pas une dame de compagnie, mais en quelque sorte l’invitée d’honneur ! J’aurais aimé vous accompagner, si d’aventure le destin me l’eut permis.
— Non, je ne pense pas.
— Êtes-vous avare de paroles ? reprocha Domitille. J’aurai tellement aimé voir le soleil se coucher sur le lac Astrid, pas vous ?
— J’aurai préféré rentrer chez moi, répliqua Chimène.
— Après cette guerre, je ne souhaite que fuir cet endroit de malheur. J’ai perdu mes deux cousins, mon frère et ma mère. Pleurez-vous quelqu’un ? »

Elle pleurait chaque jour son foyer perdu. Jacob avait disparu depuis presque une saison. Les derniers instants de William la hantaient. Elle sentait toujours le sang du jeune homme lui dégouliner sur le visage, le long des bras… Puis les jumeaux Merrick et Eloïck Croûtepain pendus, Déotéria décapitée devant ses yeux. Yannick, Valère, Jacques, Éric, probablement massacrés par les chevaliers mortefangiens.

« Un cousin… et des amis, se déroba-t-elle le plus succinctement possible.
— Au moins leurs vies auront sauvé les nôtres et Mortefange. Les pleurer ne les ramènera pas à la vie, et ne nous emmènera pas de l’avant. »

Chimène éprouvait de plus en plus d’antipathie envers la Dame de Cenelle. Par chance, déjà la musique de la grande salle faisait écho et les fumets des victuailles emplissaient leurs narines.

Elles se séparèrent une fois la table en U en vue. Domitille alla s’asseoir au centre, aux côtés de Karl et de son père, là où lui échoyait sa place de grande Dame. Chimène, quant à elle termina la traversée des lieux à l’une des extrémités, entre un vieil homme sourd comme un pot et un chevalier qui sentait la vinasse. Par chance, Cassandre Sandre, la camériste de Domitille n’était qu’à quelques couverts de là, et cela contribua grandement à l’amélioration du repas.

LePerenolonch LePerenolonch
MP
Niveau 10
09 octobre 2016 à 23:31:50

D’ordinaire, Simon procédait à l’inspection de la marque chaque après-midi. Il mesurait les arabesques, calculait l’angle des spirales et traçait des croquis des changements qu’il observait. Survenait ensuite la ribambelle sempiternelle de questions : « Souffrez-vous ? Cela vous irrite-t-il ? Avez-vous remarqué quelque chose de nouveau ? » ; et leurs réponses, qui sans relâche s’opiniâtraient à demeurer les mêmes : « non, non, non. »

Au grand soulagement de Chimène, on lui octroya un après-midi libre afin qu’elle empaquète ses affaires. La tâche ne lui prit pas longtemps tant ses possessions étaient maigres. Deux robes que Domitille ne mettait plus, trop amples pour Louise et trop étroites pour Sarah, les deux sœurs cadettes de cette dernière. Par-delà la fenêtre de sa chambre qui donnait sur la basse-cour, on apercevait les valets qui chargeaient malles et coffrets sur des charriots. Chimène ne prendrait qu’une toute petite place, et encore la caisse qu’elle emportait n’était même pas remplie entièrement.

Elle termina la journée en compagnie de Jeanne et de Léonie. Les deux fillettes semblaient tristes qu’elle parte. Elles lui apprirent la suite de Cenelle grand Cenellier et le début de Mon amour ma mie. Le crâne résonnant encore des chants de la journée, elle regagna sa couche, dans sa petite chambre, au deuxième étage d’une échauguette perchée sur la face sud du donjon.
Du haut d’un palefroi d’un blanc immaculé, Karl pinçait les cordes d’une lyre, et son père le suivait d’un air béat en chantant une ballade contant les exploits du grand Cenellier lors d’un tournois. Cassandre Sandre, Hyacinthe de la maison Hyacinthe, dame Domitille et ses sœurs puînées, le seigneur de Cenelle, Simon le mitharo, Tobias Blomst, Edmund Pergament, tous étaient là, s’extasiant dans la cour, s’esbaudissant à la moindre occasion. L’atmosphère semblait de miel, douce, poisseuse de félicité. Chimène ne put retenir un sourire qui s’étendit d’une oreille à une autre. Ils jouaient à la balle et la vessie de porc volait de main en main. Edmond, dans sa balourdise l’envoya dinguer si loin qu’elle sortit de leur ligne de mire. Chimène partit la chercher, une sensation de légèreté au cœur. Elle sortit de Cenelle. À chacun de ses pas, elle se sentait plus lourde et elle se retrouva seule face à une porte close. Son précédent état d’euphorie appartenait déjà au monde des lointains souvenirs et un immense vide la combla. Jamais un tel retour à la réalité ne lui avait été aussi difficile.

Face à elle, inexpugnable et impersonnel, le lourd vantail de chêne semblait la seule issue possible. Elle poussa sur la poterne, qui s’ouvrit avec difficulté : l’humidité avait fait gonfler le bois. Aussitôt un courant d’air fit voler ses cheveux détachés. Le soleil lui balaya la face et elle dut se protéger les yeux de sa main. L’air se saturait d’iode et le fracas des vagues ébranlait chaque planche du navire. Soudain, le bateau tangua et elle perdit l’équilibre, dévalant des escaliers de bois. Elle avait les fesses dans l’eau. Pas une eau profonde, juste une petite flaque, qui parcourait le long couloir, éclairé par des torches. Les murs ruisselaient d’humidité et une mousse verte s’était attaquée à leurs parois de pierre grise. Chimène traversa l’endroit, remontant les pans de sa robe jusqu’aux genoux pour ne pas la salir. Dans l’obscurité, une forme tremblait et gémissait. Une créature au pelage gris tâché de blanc et à l’épais pelage gisait là. Deux grandes bandes noires parcouraient la tête de la bête des yeux au museau. Chimène posa une main sur le blaireau. C’était chaud et poisseux. Elle la retira, et du sang coula le long de ses doigts. L’animal blessé porta son regard humide sur Chimène et lui lécha la main. Elle sourit. Le vent commença à souffler, et un tourbillon de poussière se forma, tournant autour d’elle. Puis la saleté se stabilisa et chuta, prenant la forme d’un gros loup. Le canidé grogna. Ses grands yeux brillaient dans la pénombre et il retroussa ses babines en grognant, dévoila des crocs jaunâtres. Chimène le regardait, totalement paralysée. Soudain, il porta un coup de griffe au blaireau qui s’enfonça contre le mur en couinant.

Chimène se réveilla en sursaut. Plus de porte ni de couloir lugubre. Au travers de sa fenêtre, une lumière céruléenne baignait doucement la chambre, dévoilant les reliefs du mobilier. Les cendres dans l’âtre demeuraient encore chaudes, et quelques braises achevaient de mourir, contrairement à son cœur qui battait la chamade dans sa poitrine. Ce nonobstant, les palpitations de son plexus lui chaulaient peu. Sa marque la démangeait, comme si elle la pressait de sortir de la tour. Obéissant à des ordres informulés, elle s’empara d’une chandelle. A l’aide des vestiges du foyer, elle obtint une petite flammèche qui inonda les lieux d’une lueur tremblotante. Les ténèbres engloutissaient tout dans le couloir. Comme un fantôme, Chimène traversa le château désert. Seul le son feutré de ses pas troublait le silence. Deux forces luttaient en elle : l’une lui criait avec véhémence que ce n’était qu’un rêve, et qu’aucun blaireau ne recourrait son aide. Cependant l’autre, irrationnelle, éprouvait le besoin inexorable d’agir… et la marque qui la démangeait …

Des bruits de pas la mirent en émoi quand elle passa au niveau des cuisines. Chimène souffla sa petite flamme et aussitôt l’obscurité la happa. Seul un mince filet de fumée répandait une odeur de cire fondue. Au fond du couloir, une étincelle tremblotante se rapprochait. Chimène se tapit dans l’ombre et se replia vers l’escalier en colimaçon. Inexorablement, l’intrus traversait le couloir, droit sur elle. Il aurait relevé du miracle qu’il ne l’aperçût pas. Quand l’importun quidam se dévoila à la lueur de sa propre chandelle, Chimène reconnut immédiatement la camériste de Domitille à sa mâchoire saillante.

« Cassandre ? » s’exclama-t-elle.

La jeune femme tressaillit et s’empourpra, portant la main à son cœur.

« Chimène, tu m’as fait peur ! lui reprocha-t-elle en reprenant son souffle. Qu’est-ce que tu fais debout ?
— Je ... Je me ... je me balade, mentit-elle du mieux qu’elle put.
— Mais, tantôt nous avons visité pendant près de deux heures les jardins, dit Cassandre, prise de cour. Cela ne t’a pas suffi ?
— Je n’arrivais pas à dormir, besoin de prendre l’air. Bon pour les méninges, baragouina la rousse. Et toi, pourquoi tu n’es pas couchée ?
— Saurais-tu garder un secret ? » chuchota Cassandre, s’assurant que personne ne puisse l’entendre. Précaution inutile, du fait qu’elles étaient seules.

« Est-ce grave ? s’enquit Chimène.
— Non, non, j’étais avec Hyacinthe ! » confia la domestique.

Elle paraissait vraiment heureuse. Chimène décrispa ses lèvres.
« Mais c’est très bien tout ça ! » dit-elle, essayant d’écourter leur entretien. Cassandre ne sembla pas remarquer l’empressement de la jeune femme et s’assit sur les marches de pierre, posant sa chandelle. Elle remit deux mèches de cheveux noirs qui dépassaient dans sa guimpe.

« Assieds-toi, je t’en prie ! » l’invita Cassandre, tout sourire. Chimène s’exécuta de mauvaise grâce. Avait-elle cependant le choix ? La bâtarde lui prit les mains et lui confia, tout sourire : « Il veut demander ma main à mon père !
— Oh ! » fit Chimène, plus intéressée par ses histoires de blaireaux. Elle se frotta les flancs, sa chemise de lin ne la protégeant pas des courants d’air glacés de la nuit.
« Tu as froid ? » s’inquiéta Cassandre au moment où les dents de Chimène claquèrent. La jeune femme acquiesça et la camériste retira sa pelisse et lui couvrit les épaules avec.

« Merci, la gratifia-t-elle, reconnaissante.
— Quelque chose ne va pas ? se soucia son amie.
—Tout va bien, ne t’inquiète pas, mentit-elle.
— Mais tu ne cesses de regarder partout autour de toi ! »

Chimène détourna les yeux, mais Cassandre n’abandonna pas. Elle lui prit le visage entre ses deux mains et la força à lui faire face.

« Dis-moi, je ne te trahirai pas, je peux peut-être t’aider ! » assura-t-elle d’un ton conciliant.

Chimène la toisa un moment, l’œil paniqué. Elle ne pouvait plus vraiment reculer.

« Écoute, je dois faire quelque chose. Mais il ne faut pas que quelqu’un me voit ! »

Cassandre la toisa avec suspicion.

« Qu’est-ce que tu vas faire ?
— Il faut que j’aille dans les cachots.
— Comment ? s’écria la jeune femme.
— S’il te plait, ne me pose pas de question, je dois le faire ! supplia Chimène.
— C’est Hyacinthe qui est de garde cette nuit, annonça Cassandre.
— Je t’en prie, fait le sortir rien qu’un instant !
— Mais que vas-tu faire là-bas ?
— J’en sais rien, il faut juste que j’y aille ! »

Cassandre la regarda comme si elle avait affaire à une folle. Chimène ne put lui en vouloir. Ne devenait-elle pas maboule ? La marque en devenait presque douloureuse.

« Le seul prisonnier… réalisa Cassandre… Il va être jugé demain… Que cherches tu à faire ?
— Cassandre ! » la pressa Chimène, les larmes aux yeux.

La camériste lui posa sa main sur son front.

« Tu es toute fiévreuse !
— Cassandre, je t’en prie !
— D’accord sortons ! capitula la jeune servante. Il est clair que tu as trop de sang, c’est étrange pour cette époque. L’air frais te feras du bien, mais tu auras besoin d’une saignée ! Nous nous y emploierons dès demain. »

La domestique lui empoigna la main et l’entraina à l’extérieur du donjon par la porte de l’arrière cuisine.

LePerenolonch LePerenolonch
MP
Niveau 10
09 octobre 2016 à 23:32:02

Pas un nuage ne tachait le ciel constellé d’étoiles, annonçant un lendemain d’un froid polaire. Une chouette hulula tandis que l’ombre d’une sentinelle se distinguait sur le chemin de ronde.

« La prison est par là. » chuchota Cassandre en désignant une lourde porte encastrée dans la muraille à l’autre bout de la place. De la condensation s’échappait de sa bouche.

« Gare aux chenils, ne réveille pas les chiens. » prévint-elle.

Chimène pinça les lèvres et acquiesça.

« Tu es vraiment sûre que tu ne veux pas rentrer ? tenta de la dissuader Cassandre. Peut-être que si tu me dis exactement ce que tu veux faire, sans ambages, nous pourrions trouver une alternative ?
— Je dois sauver le blaireau. »

C’était tellement stupide qu’elle s’en détesta.

« Le ... blaireau ? »
L’incrédulité déforma le visage de Cassandre.
« Oui, je ne sais pas encore qui, mais il est lié à un blaireau, et le loup lui veut du mal, et il est dans ces cachots, j’en suis certaine.
« Tu n’as pas tout simplement rêvé ? soupira la camériste.
— Justement, ce n’est pas la première fois que ça m’arrive, ce ne sont pas vraiment des rêves. » répliqua Chimène.

Elle remonta le haut de sa chemise et lui montra la spirale bleue qui tachait son dos. Cassandre acquiesça. Lorsque Chimène se trouvait en compagnie des sbires d’Ildibad, sa marque était un secret bien gardé. Ici, à Cenelle, elle jouissait d’une petite célébrité.

« J’espère que toi aussi tu sais garder un secret, dit Chimène en rabaissant sa chemise. Je ne l’ai jamais dit à Simon. »

« Ne t’inquiète pas, il sera bien gardé.
— Tu me prends pour une folle... se lamenta-t-elle.
— Euh non, je t’assure. » répondit Cassandre, gênée.

Comme des ombres, elles traversèrent la cour. Chimène s’accroupit derrière une futaille tandis que Cassandre toquait à la porte. Une rai de lumière balaya le sol quand Hyacinthe répondit. Chimène les observa parler quelques instants, puis les deux amants s’éloignèrent. Quand elle fut assurée qu’ils ne reviendraient pas de sitôt, elle bondit hors de sa cache et s’infiltra dans les cachots. A côté de l’entrée, une table sur laquelle refroidissait du gruau faisait le coin. À sa grande surprise, elle trouva le trousseau de clef posé à côté de la gamelle. Cet étourdi de Hyacinthe demeurait fidèle à lui-même. Elle s’en empara et lorgna les cachots. Taillé à même la roche, un long couloir se tapissait de mousse et des remugles d’humidité s’en exhalaient. Elle saisit une oupille fixée au mur et emprunta le tunnel. Sur les deux collatéraux les cellules s’alignaient, condamnées par des moellons vieillots. Seule une imposante grille permettait de gogner à l’intérieur.

Toutes étaient vides sauf une. Sur une paillasse gâtée, un homme d’une extrême maigreur dormait d’un sommeil agité. En dépit de sa maigreur et d’une barbe qui lui dévorait la moitié du visage, l’homme paraissait extrêmement familier à Chimène. Alaric, bien évidemment. Elle se souvint alors que Cassandre avait parlé d’un procès le lendemain, et se sentit stupide de ne pas avoir pensé à l’acariâtre homme.

Chimène hésita. Devait-elle vraiment le libérer ? Méritait-il de mourir dans cette prison ? Sûrement. Mais elle ne pouvait se résoudre à l’abandonner ici. Aussi mesquines qu’étaient ses motivations, il lui avait sauvé la vie. Plusieurs fois. Résolue, la jeune femme inséra une clef dans la serrure et la fit tourner. La serrure se coinça, indiquant qu’il ne s’agissait pas de la bonne. Elle recommença avec une autre. À chaque changement de clef, le trousseau cliquetait. Alaric commença à remuer sur sa paillasse humide. Enfin la serrure céda, et la lourde grille de fer s’ouvrit. Le prisonnier se réveilla, et regarda Chimène d’un air surpris.

« J’ignorai que ce seigneur Wiern possédait un quelconque sens de l’humour, soupira Alaric en retombant sur sa couche.
— On n’a pas beaucoup de temps. » le réprimanda Chimène.

L’homme se redressa et regarda par la porte de sa cellule. Comme le couloir paraissait désert, il sembla comprendre qu’on venait le délivrer.

« Tu aurais pu ne pas me rater avec ce couteau, ça m’aurait évité pas mal de désagréments. Vraiment minable, geignit-il.

Elle le gifla.

« Ferme-la !
— Ouh, tu as bien changé ! » constata-t-il en se frottant la joue.

Elle le gifla.

« Je t’ai dit de la fermer, répliqua-t-elle sèchement.

Alaric haussa les sourcils. Il empestait la vieille pisse et sa tunique puait la mort, souillée de sang séché.

« Tu t’es enfin rendu compte que ce vieux loup de Wiern n’était pas si sympathique que ça ? »

Elle le fusilla du regard et il leva les mains en signe de paix.

« Je te fais sortir. Mais tu dois me promettre plusieurs choses. » annonça Chimène.
Il leva les yeux au ciel.
« Premièrement, tu renonceras à faire du mal à quiconque.
— D’acc.
— Ensuite, tu partiras loin de chez moi, dans le sud, que je ne te revoie plus jamais.
— Fait froid là-bas, commenta-t-il d’un air désinvolte. D’acc ! » répondit-il alors que Chimène levait sa main pour le frapper à nouveau.
— Plus jamais tu ne reprendras les armes, sauf pour te défendre.
— D’acc.
— Tu te fiches de moi ? s’énerva la jeune fille.
— De toute façon, qu’est-ce qui va te permettre de vérifier que je respecte mes engagements ?
— Quelque chose, ou quelqu’un voulait que je te libère.
— Pff, de quoi tu parles ? questionna-t-il d’un air blasé.
— Tu te rappelles quand tu disais que j’étais quelqu’un d’extraordinaire ? Tu n’avais pas tort. Je pourrai te voir. Je pourrai dire aux autres où tu es. Pourquoi tu crois qu’Evrard a disparu juste avant la bataille ? J’avais vu sa mort, je lui ai dit. »

Elle bluffait, mais elle espérait qu’Alaric la croit. Plus le temps passait, plus elle regrettait ce qu’elle était en train de faire. Alaric se contenta de répondre :

« C’est quoi le plan ?
— Tu descends la muraille avec une corde. J’en ai vu près du chenil. Mais le problème c’est la sentinelle.
— Donne-moi une arme, et la sentinelle ne sera plus un problème.
— Et ta promesse ? s’enquit Chimène.
— Tu fais chier. »

Alaric mit un certain temps pour retrouver ses appuis et boquillonna lors de la traversée des oubliettes. Ce nonobstant, une fois l’air frais en contact, il se sentit revigoré et s’étira longuement. Prendre la corde fut chose aisée. Alaric savait se mouvoir à pas de loup, et Chimène se sentait bien pataude comparé à lui. Ils traversèrent la cour, faisant une pause lors de la relève de la garde, plaqués contre le mur dans la pénombre. Alaric ramassa une grosse pierre, et la soupesant de sa main, la regarda d’un air satisfait.

« Tu me laisses faire, puis tu montes avec la corde, pigé ?
— Inverse pas les rôles, c’est moi qui donne les ordres. » protesta Chimène.

Alaric ricana avant de la quitter. Il se mit à grimper l’escalier, progressant à pas feutrés jusqu’à la sentinelle qui scrutait l’horizon d’un regard aveugle. Il lui abattit la pierre sur la tempe, produisant un petit bruit métallique. L’évadé accompagna le corps au sol, et lui remit un coup, pour faire bonne mesure. Chimène le rejoignit.

« J’espère que tu l’as pas tué.
— T’inquiète pas pour lui, il se réveillera juste avec un très vilain mal de crâne. »

Elle acquiesça et noua la corde autour d’un merlon.

« Elle est pas assez longue, mais de quelques coudées seulement je pense.
— Eh bien, Chimène... je ne sais pas comment te remercier.
— Tiens tes promesses.
— Ah oui. » lâcha-t-il.

Ils se regardèrent un moment, ne sachant que dire. Puis Alaric la serra dans ses bras. Elle eut à peine le temps d’accepter l’embrassade qu’il la plaqua contre le mur, lui couvrant la bouche.

« Tu vois, t’es trop naïve. C’n’est pas parce que tu seras gentille avec les autres qu’ils le seront avec toi en retour. »

Elle lui donna des coups de pieds dans les jambes, mais Alaric tint bon sa prise. Il commença à la pousser dans le vide. Les yeux de Chimène s’agrandirent de terreur. Puis, il la tira vers le chemin de ronde et la laissa reprendre son souffle.

« Dernière leçon : ne fais jamais confiance en quiconque. »

Chimène se releva, complétement ébranlée. Soudain elle se retrouva au sol, la tête prise en étau par le sol de pierre et la roche d’Alaric.

« Encore une leçon : il n’y a jamais de dernière leçon. »

Il lui tendit son bras pour l’aider à la relever, mais elle recula en rampant, fuyant cette main qui ne faisait que la blesser. Alaric eut un sourire satisfait.

« Bien, tu apprends vite on dirait. Qui sait ce que j’aurai pu te faire cette fois ? Te balancer par-dessus la muraille ? »

Il enjamba les créneaux, fermement accroché à la corde.
« Ciao, Chimène. »

Il disparut. Chimène resta un moment assise, regardant là où se tenait Alaric juste avant de partir. Les démangeaisons avaient cessé. Comme le garde risquait de revenir à lui d’un moment à l’autre, elle se dépêcha de décrocher la corde, avant de courir vers le donjon. Au loin, un coq chanta l’aube.

LePerenolonch LePerenolonch
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Niveau 10
11 octobre 2016 à 16:13:54

Le 10 octobre 2016 à 22:01:23 BradPriwin a écrit :

Ses joues délicatement mouchetées de son rabaissaient les taches de rousseur de Chimène au rang de pustule orangeâtres.

Il manque un mot, non ? :hap:

Non, tâche de son, moucheté de son, etc... :hap:

Elles se séparèrent une fois la table en U en vue.

Ah, tiens, c'est bien que cette expression soit là car je me posais une question. Est-ce pertinent d'utiliser les expressions du type "droit comme un I" par exemple ? N'y a-t-il pas d'autre manière de décrire ?

Bah justement je me pose aussi la question, mais je voyais pas du tout comment faire autrement, hors de question de décrire ainsi : Deux parties latérales de la table parallèles et perpendiculaires à la partie principale blabla ou alors juste dire que c'est une table et espérer que la culture du lecteur sur le moyen age soit assez grande pour connaitre la disposition classique d'une salle de festin.

lors d’un tournois.

Pourquoi tu le mets tout le temps au pluriel lorsque c'est au singulier ? [[sticker:p/1jnh]]

Parce que je sais pas écrire :hap:

À chacun de ses pas, elle se sentait plus lourde et elle se retrouva seule face à une porte close.

Je pense que tu aurais du couper la phrase, car décrire une sensation et un aboutissement au sein de la même ne me paraît pas opportun.

Ouais

— Je t’en prie, fait le sortir rien qu’un instant !

fais*

L’air frais te feras du bien

fera*

« Ne t’inquiète pas, il sera bien gardé.

— Tu me prends pour une folle... se lamenta-t-elle.
— Euh non, je t’assure. » répondit Cassandre, gênée.

Petite question et après je te laisse tranquille : tu es sûr que tu n'as pas respecté le test de Bechdel dans le tome 1 ? Parce que là y'a plusieurs dialogues qui le vérifient naturellement :hap:

Euh bah ouais, y a vraiment pas beaucoup de personnages féminins dans la marque :hap:

Alaric mit un certain temps pour retrouver ses appuis et boquillonna lors de la traversée des oubliettes. Ce nonobstant,

Merci pour le nouveau verbe + Tu n'avais pas d'autres expressions que "Ce nonobstant", tu l'as déjà utilisé plus tôt dans le chapitre. Bon je critique mais ça m'arrive aussi de répéter une expression :rire:

Hormis ces remarques inutiles, je n'ai pas grand-chose à dire. C'est un chapitre plutôt calme, malgré la fin où le vocabulaire d'Alaric m'a un peu surpris. Il se laisse lire tranquillement et étoffe le background bien distillé ! :oui:

Ah, et les chansons sont vraiment bien écrites, sur ce point-là c'est irréprochable ! :oui:

MErci :coeur: Ca me rassure, j'avais vraiment l'impression d'écrire de la merde :hap:

Arduilanar Arduilanar
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Niveau 10
11 octobre 2016 à 19:01:16

En U = en fer à cheval. C'est assez médiéval, non ? :hap:
+ Droit comme un I = droit comme un piquet. :oui:

LePerenolonch LePerenolonch
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Niveau 10
17 octobre 2016 à 21:59:50

Le 11 octobre 2016 à 19:01:16 Arduilanar a écrit :
En U = en fer à cheval. C'est assez médiéval, non ? :hap:
+ Droit comme un I = droit comme un piquet. :oui:

Oui c'est bien aussi :hap:

Message édité le 17 octobre 2016 à 22:00:08 par LePerenolonch
HelpingFR HelpingFR
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Niveau 32
17 octobre 2016 à 22:17:44

Bon, je vais bouger le cul et demain, je vais lire le chapitre 2 :hap:

HelpingFR HelpingFR
MP
Niveau 32
18 octobre 2016 à 09:27:40

Bon, j'ai lu le chapitre 2 (ou 3 :hap: ) et j'ai vraiment bien aimé comme d'habitude, même si on reste dans le repositionnement de l'univers et des familles, etc.
Pour le coup, c'est assez marrant, le point de vue extérieur. Et les Ebroïns semblent prendre assez cher dans ce chapitre, entre le chant du Cygne idiot et le cygne qui se fait bouffer :rire:

Par contre, un peu dommage que tu ai expédié le dégoût d'Adrian après la découverte dans les cuisines, je pense que ça aurait gagné à être approfondi sur le coup :oui:
Et un peu d'acc avec Brad, peut-être étoffer un peu plus le tournois :oui:

LePerenolonch LePerenolonch
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Niveau 10
18 octobre 2016 à 12:45:34

Merci pour ta lecture Help !

Si je rallonge la scène du tournoi, je rajouterai juste des scènes de joutes ou alors un tournoi de béhourd, mais la confrontation Lucian/Adrian restera la même (au niveau longueur) parce que bon, c'est assez rapide

HelpingFR HelpingFR
MP
Niveau 32
19 octobre 2016 à 10:23:27

Lu le chapitre 2 (ou 3) :hap:

Bon, là, on revient directement sur le terrain du premier tome. J'adore Domitille qui veut faire la grève du sexe en voulant castrer son mari si jamais il comblait pas tous ses caprices :rire:
J'ai beaucoup aimé la deuxième partie aussi :oui: Même si j'aurais bien aimé quelques lignes mystérieuses afin de nous allécher concernant la Marque, qui après tout, est la raison de la mort d'Iseut.

C'est tout :oui:

LePerenolonch LePerenolonch
MP
Niveau 10
19 octobre 2016 à 10:42:34

Le 19 octobre 2016 à 10:23:27 HelpingFR a écrit :
Lu le chapitre 2 (ou 3) :hap:

Bon, là, on revient directement sur le terrain du premier tome. J'adore Domitille qui veut faire la grève du sexe en voulant castrer son mari si jamais il comblait pas tous ses caprices :rire:
J'ai beaucoup aimé la deuxième partie aussi :oui: Même si j'aurais bien aimé quelques lignes mystérieuses afin de nous allécher concernant la Marque, qui après tout, est la raison de la mort d'Iseut.

C'est tout :oui:

Comment ça la marque c'est la raison de la mort d'Iseut ? :hap: Merci pour ta lecture ! :coeur:

HelpingFR HelpingFR
MP
Niveau 32
19 octobre 2016 à 10:44:54

Le 19 octobre 2016 à 10:42:34 LePerenolonch a écrit :

Le 19 octobre 2016 à 10:23:27 HelpingFR a écrit :
Lu le chapitre 2 (ou 3) :hap:

Bon, là, on revient directement sur le terrain du premier tome. J'adore Domitille qui veut faire la grève du sexe en voulant castrer son mari si jamais il comblait pas tous ses caprices :rire:
J'ai beaucoup aimé la deuxième partie aussi :oui: Même si j'aurais bien aimé quelques lignes mystérieuses afin de nous allécher concernant la Marque, qui après tout, est la raison de la mort d'Iseut.

C'est tout :oui:

Comment ça la marque c'est la raison de la mort d'Iseut ? :hap: Merci pour ta lecture ! :coeur:

Ben, c'est ce que j'avais compris au début, Iseut se suicidait car elle croyait que le Marque de Chimène était une abomination, un truc du genre... Et en plus, il me semble que le mitharo avait bien explicité à Edmond et Alexander qu'ils avaient laissé entrer quelque chose de terrifiant :hap:

Message édité le 19 octobre 2016 à 10:45:53 par HelpingFR
LePerenolonch LePerenolonch
MP
Niveau 10
19 octobre 2016 à 11:05:07

Ah non :hap:

Iseut se suicide car sa vie craint, son fils est mort, elle supporte pas les conséquences de la guerre, elle a envoyé ses neveux au casse pipe, elle déprime :hap:

D'ailleurs c'est pas le mitharo qui parle "du truc terrifiant" à Alexander (et Edmond) c'est Hippolyte :hap:

HelpingFR HelpingFR
MP
Niveau 32
19 octobre 2016 à 11:11:46

Le 19 octobre 2016 à 11:05:07 LePerenolonch a écrit :
Ah non :hap:

Iseut se suicide car sa vie craint, son fils est mort, elle supporte pas les conséquences de la guerre, elle a envoyé ses neveux au casse pipe, elle déprime :hap:

D'ailleurs c'est pas le mitharo qui parle "du truc terrifiant" à Alexander (et Edmond) c'est Hippolyte :hap:

Ok d'accord :hap:
Donc en fait, elle sert vraiment pas à grand chose cette marque pour l'instant :hap:

LePerenolonch LePerenolonch
MP
Niveau 10
19 octobre 2016 à 11:18:43

Normalement tu sais pas mal de trucs la dessus si t'as lu le dernier chapitre de la marque :hap:

HelpingFR HelpingFR
MP
Niveau 32
25 octobre 2016 à 17:18:15

Chapitre 4 Lu :

Dis donc, c'est qu'elle se mouille et qu'elle s'affirme la Chimène [[sticker:p/1jnf]]
Au début, je me disais qu'il y avait pas eu beaucoup d'évolution vu qu'elle continuait à manquer de pleurer pour des choses futiles :oui:
Quelque chose me dit que Chimène va regretter ce choix :(

LePerenolonch LePerenolonch
MP
Niveau 10
25 octobre 2016 à 21:52:25

CHAPITRE 5 : UN PREMIER BATTEMENT D'AILE VERS LES MONTAGNES

EVRARD

Comme une veine de cristal, la Bourbière creusait son lit dans la vallée et miroitait au soleil. La rivière marquait les confins de Mortefange ; par-delà, le ciel d’un bleu limpide dévoilait le haut des montagnes de Terrefugace. Tout autour, le givre piquetait l’herbe de blanc à la manière d’un peintre sur sa toile. L’air frais s’insinuait dans les narines d’Evrard, gelant sa morve. Les terres du sud démontraient moins de clémence que celles au nord. Il s’emmitoufla dans sa cape. Regan Merrick, transit de froid, faisait profil bas, les bras noués autour des cotes pour se protéger du mistral. Sire Merrick reflétait ce qu’Evrard était lui-même devenu : amaigri, les traits creusés par la fatigue et la faim, les atours en loques.

Une fois la rive atteinte, il s’avéra que la traversée serait difficile. L’eau clapotait sur les galets, et quelques petites flaques sur la grève s’étaient cristallisées.

« Trouvons un passage à gué, souffla Regan.
— Il n’y a pas de haut-fond avant les Londes de Mortefleur, répliqua Evrard.
— La moitié d’entre nous périra si nous traversons la rivière, objecta le sire de Neufcâstel.
— Le courant est faible.
— Mais l’eau est gelée, nous mourrons de la fièvre !
— Regan ! je ne suis pas le dernier des idiots ! Mais si d’aventure tu connais un moyen de voler, ne le garde pas par devers toi ! » fulmina le vieil Ours.

A leur suite, près d’un demi-millier d’hommes, de femmes et d’enfants se trainaient, aussi épuisés que frigorifiés. La plupart louvoyait, errant comme de pauvres hères, charriant leurs coquilles vides de corps. Beaucoup mourraient avant d’atteindre un refuge, et Evrard ne doutait pas qu’il s’en fallait de peu pour que les charognards se mettent à leur tourner autour.

« L’hiver tombe si rapidement dans ces contrés. » gémit Regan. Les yeux mi-clos, il luttait pour tenir debout. Du givre s’installait sur sa barbe auburn, le vieillissant de dix ans.

« Comment fais-tu pour tenir, Evrard ? murmura-t-il.
— Grâce à ça. » déclara sire Arthis en désignant les longues colonnes de leur cortège. Les habitants du Groin du Porc qui avaient accepté de les suivre devaient amèrement s’en mordre les doigts. Les avait-il condamnés à une mort plus atroce encore ? Au moins vivaient-ils, nul doute que les troupes d’Edmond Aubépine et d’Alexander Wiern avaient rasés le Groin pour la traitrise de Jules Hellébore. Voyant que Regan menaçait de s’effondrer, Evrard ordonna une pause. Il lui offrit son outre, qui contenait les dernières gouttes de vin qu’il possédait. Regan les avala goulument, et la boisson sembla lui redonner du baume au cœur.

Comme Sire Merrick s’était assoupi, Evrard longea la grève, observant les groupes de fuyards qui se collaient les uns aux autres, emmitouflés dans des toiles de laine. Un groupe armé stationnait à quelques mètres de la rive. La licorne sinople de la maison Hellébore se cabrait sur leurs boucliers écrus, tandis que leur maille mouchetée de rouille cliquetait au gré de leur mouvement. Du blond pisseux des Hellébore, Sire Louis passait en revue le bataillon d’une cinquantaine d’hommes.

Evrard se contenta d’un sourire crispé, puis se dirigea vers un ensemble de blason plus hétéroclite : plumes Ebroïn et gerbes de blé Croûtepain. Manquait le rouge Merrick, l’or Melian et son sinople Arthis. Les survivants de l’armée d’Ildibad - une douzaine tout au plus - se voyaient remettre l’ultime honneur de veiller sur la dernière des Ebroïn, Aliénor, la nièce de Bérenger et la femme de son fils Ildibad.

La jeune femme grelottait, éloignée de ses gardes.

« Moussieu Arthis, la v’la toute agrouoli ! » l’apostropha Jacques.

Le grossier reître haussa les épaules, comme pour s’excuser de l’état de sa protégée. Evrard passa outre. Germain Croûtepain, le colosse l’aborda et lui fit part de ses inquiétudes.

« Elle ne mange presque plus.
— Depuis longtemps ? si ça date d’aujourd’hui, vous vous morfondez trop.
— Que nenni, et sauf votre respect, vous ne nous avez pas visité depuis des jours.
— Il y a beaucoup à faire pour guider tant de gens en terres inconnues, se bisqua Evrard.
— Elle ne se plaint pas, mais je jurai l’avoir vu se tenir le bas-ventre, comme si elle souffrait, confessa Germain.
— Une colique ? hasarda Evrard.
— Un enfant, je pense. » devina l’infirmier.

La nouvelle surprit tellement le vieil Ours qu’il en sursauta. Il se rapprocha de l’oreille de l’homme.

« Si tel est le cas, nous devons recourir à l’hospitalité des Vaharem au plus vite, murmura-t-il.
— Des Vaharem ? bafouilla Germain, d’aucuns ignorent qu’ils n’ouvrent jamais leurs portes.
— Dans ce cas, retournons vers le nord ? persifla Evrard.
— J’imagine que vous savez ce que vous faites. »

Sire Arthis branla du chef.

« Comment va le moral ici ? s’enquit-il.
— Bas, très bas, sire. »

A quelques pas, Yannick lançait un couteau pour qu’il se plante entre ses deux jambes écartées, et recommençait encore et encore, la même lassitude dans chacun de ses mouvements.

« Cela ne me surprend pas, regretta-t-il.
— Yannick vous reproche la mort de ses amis, notamment de Chimène et de Valère.
— L’on ne peut me blâmer de tous les maux. »

Evrard se figura qu’à chaque fois que le couteau pénétrait la terre, Yannick s’imaginait que c’était son visage qui se fendait en deux. Certes, la culpabilité de tant de morts lui pesait. S’il avait su gérer ce chien fou d’Ildibad, alors peut-être vivraient-ils tous encore.

« Nul n’a les épaules pour assumer tous les fardeaux du monde, reprit le vieil Ours. D’ailleurs, la gamine n’est pas morte. »

Une lueur s’alluma dans les prunelles de Germain.

« Est-ce bien vrai ?
— Je l’ai aperçue à Cenelle. Elle assistait à l’exécution de notre Seigneur depuis la loggia des nobles.
— Que faisait-elle là ? s’étonna Germain.
— Elle a un don pour s’attirer les ennuis. »

Germain esquissa un sourire. L’expression de son visage démontrait l’affection qu’il portait pour la demoiselle Azalée. Les ennuis attiraient également ses protecteurs.

« Devrais-je parler à Aliénor ? s’avisa sire Arthis. Je suis son plus proche parent.
— Elle reste très taciturne, sire. » prévint le garde-malade.

Evrard se contenta d’un grognement comme réponse. Le soleil atteignait lentement son zénith.

« Nous partirons dans deux heures. Le chemin est encore long jusqu’aux Londes de Mortefleur.
— Bien messire. »

Evrard s’en alla rejoindre Regan pour piquer un somme. Malheureusement, Sire Louis Hellébore lui coupa la route, ahanant. Le chevalier s’était immédiatement rallié à sa cause après que le Groin fut tombé. Si la vision de ce genre de tourne-casaque hérissait les poils de sa nuque, le vieil Ours ne pouvait pas y faire grand-chose. Chaque allié potentiel se révélait être un luxe de plus en plus rare.

« Sire Arthis, deux hommes que j’avais placé en sentinelle ont aperçu des cavaliers !
— Des cavaliers, eh bien oui ! Quel genre de cavaliers ?
— Nous pensons qu’il s’agit d’éclaireurs appartenant à sire Camomille.
— Sire Camomille ? De Futaille-Futée ?
— Indubitablement ! Champ en parti de sinople et d’orangé. »

Alexander Wiern n’avait même pas pris la peine d’en finir lui-même.

« Il y a un massif rocheux à une demi-lieue de là, se souvint Evrard. Postons-nous là, il leur sera impossible de charger avec une cavalerie.
— Que faire de ceux qui sont inaptes au combat ?
— Faite les traverser la rivière, c’est leur seule chance. Préparez vos hommes, Hellébore. C’est l’occasion de prouver dans quel camp vous êtes. »

Sire Louis le regarda d’un mauvais œil, mais garda par-devers lui une réplique acerbe.

« Certes, nous ne vous décevrons pas. »

D’un pas preste, Evrard rebroussa chemin. Il dégaina son épée et hurla :

« Aux armes Neufcâstel ! Aux armes ! »

Yannick sursauta, tandis que Jacques levait la tête d’un air interrogateur. Les autres spadassins se relevèrent péniblement.

« Soldats, je vais encore avoir besoin de votre vaillance ! Les dieux nous mettent une fois de plus à l’épreuve ! Là-bas, l’ost de sire Camomille s’apprête à nous rattraper pour anéantir tout ce qui se dressera à eux ! Vous êtes des guerriers de la fière famille Ebroïn, défenseurs de la justice ! Notre devoir est de les en empêcher, la vie de femmes et d’enfants est entre nos mains ! A moi, sus, sus ! »

La poignée de soldats resta de marbre. L’un d’eux s’avança doucement, un pas après l’autre, d’une lenteur angoissante. Un épais glaviot atterrit aux pieds d’Evrard.

« On veut plus se battre, vieillard. On en a par-dessus la tête.
— Je t’ordonne de baisser cette arme. » intima le vieil Ours comme l’homme brandissait son épée. La brigandine de l’insurgé couina quand il se mit en garde.
« Je refuse d’obéir au moindre de tes ordres. Ton temps est révolu.
— Je t’aurai fait pendre si … »

Ses mots se perdirent dans le cri que poussa l’homme en se ruant sur lui. L’épée de son adversaire s’abattit de haut en bas et ripa sur sa propre lame dans une pluie d’étincelles. Evrard plaça un bon coup de cubitière dans le visage du spadassin et acheva la course de son arme dans la gorge tendre de l’insurgé.

L’action fut si rapide que peu d’entre eux eurent le temps de commencer à s’interposer. Le goujat gisait dans son sang qui pulsa hors de sa trachée quelques temps encore.

« Je ne passerai pas par quatre chemins, menaça sire Arthis, la lame dégoulinante de vermeille. Mourrez ici, ou là-bas.
— Je vous suivrai, mon seigneur ! » assura Germain.

Evrard lança un regard approbateur à son feudataire. Que celui-ci l’appelle seigneur et non sire n’avait rien d’anodin.

« Non, mon féal serviteur. Tu resteras avec Aliénor, assure-toi de la faire traverser.
— Ce sera fait, s’inclina le colosse.
— Vous autres, suivez-moi ! » aboya Evrard.

D’un pas rageur, le sire aux Ours entama la marche qui cèlerait le destin de Neufcâstel.

« Sire, nous ne pouvons-nous battre ici, nous serons acculés à la rivière !
— Oui, Yannick. C’est pour cela que nous allons faire route face à l’ennemi, mais avant, chaque homme capable de se battre nous accompagnera.
— Qu’appelez-vous un homme ? » se refrogna-t-il.

Evrard l’ignora.

« Diable ! avec quelles armes combattront-ils ?
— Des bâtons, des pierres, ce qui leur passera par la tête !
— Ildibad a commis la même erreur, et tous se sont fait massacrer ! renchérit Yannick.
— La même action ! Dans notre cas, il ne s’agit pas d’une erreur, mais d’une nécessité absolue. » trancha le vieil Ours.

L’on dépêcha chaque jouvenceau, béjaune et morveux. Des mères eurent beau s’évertuer à retenir leurs rejetons, les armes prédominaient sur leurs avis. Quand l’ost de fortune fut levé, Evrard les pressa au massif de rocs où la rencontre des deux armées devait avoir lieux. Des larmes creusaient la crasse des joues des plus couards, tandis que d’autres sentaient leurs tripes faire la bringue et menaçaient de se conchier. Quelques téméraires couraient aux côtés de la soldatesque Hellébore, soit par manque de lucidité sur les batailles, soit pour cacher leur propre faiblesse. La vallée de blancs-pleurs, nommée ainsi à cause des pierres d’un blanc d’albâtre qui affleuraient du sol pentu se dévoila à eux. Les paysans racontaient souvent que dans les temps anciens, un géant de roche avait pleuré des larmes de pierre blanche à la mort de sa compagne. Evrard y voyait des perles échouées dans un océan de jade.

« Cachez-vous dans les roches ! »

Pris d’hardiesse, un des gamins sauta sur un bloc de grès et dérapa avant de disparaitre, comme avalé par quelque monstre. Ils se précipitèrent vers le garçon et constatèrent que la surface glissait extrêmement à cause du gel. Dans une niche, le coquebert demeurait immobile. Yannick examina le corps et lâcha son verdict :

« Il s’est rompu le cou. »

Evrard grommela.

« Déployez-vous avec attention. »

LePerenolonch LePerenolonch
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25 octobre 2016 à 21:52:41

Le soleil déclinait quand les premiers hommes de sire Camomille apparurent dans leur ligne de mire. Les rayons de l’astre du jour se réfléchissaient sur la glace recouvrant les larmes du géant, étincelante comme du diamant. Yannick se tenait plaqué un peu devant Evrard, arbalète rivée vers ses cibles.

« Nous devons les attirer dans les roches, chuchota Evrard. Tire. »

Yannick acquiesça et se mit à viser. Après quelques ajustements, il pressa la gâchette et le carreau alla se planter dans le camail de sa cible, qui poussa un cri de douleur. Evrard dégaina son épée. Face à eux, la bannière bicolore de sire Camomille vrillait au vent, sinople et orangée. La charge des cavaliers vers le massif rocheux avorta lorsque les chevaux refusèrent d’aller plus en avant, rétifs à s’engager parmi le dédale de roches. Yannick tendit la corde de son arme à l’aide de son pied de biche. Dans une venelle parcourant les larmes calcaires, un fantassin fit irruption. Aussitôt, Evrard l’envoya dinguer d’un coup de pied, le cueillant au tournant. Le malheureux tenta de se raccrocher aux parois, les bras en croix, mais l’acier du sire aux Ours pénétra son torse. Un autre carreau fusa par-dessus l’épaule de sire Arthis et termina sa course dans le front d’un spadassin qui se ruait dans l’étroit couloir.

« Mortefange ! hurlaient les hommes de Camomille.
— Mortefange ! » leur répondait ceux de Sire Louis Hellébore.
La bataille tournait au chaos, mortefangiens contre mortefangiens, jouvenceaux qui se battaient bec et ongles, n’ayant que pour seule protection une défroque de lin. Evrard et Yannick déboulèrent au cœur des combats. Trois adolescents caillassaient de loin, touchant alliés comme ennemis. Jacques balança sa francisque qui alla s’échouer dans le crâne d’un soudard qui chargeait, tandis que Sire Hellébore raccourcissait d’un bras un gus en broigne. La bataille tournait en leur faveur. Tout à coup, une douleur vive alla cueillir Evrard dans le bas du dos et il mordit la poussière. Le sire aux Ours leva son épée d’instinct pour se protéger le visage. Bien que le soleil lui cacha les traits de son agresseur, le métal de son casque irradiait de lueurs irisés. Armé d’un bâton faîté d’une tête d’acier, le spadassin darda derechef. Evrard lui faucha les jambes mais le fol ne fut pas jeté à terre.

« Neufcâstel ! »

Un éclair rouge zébra sa vue quelques infimes instants, suivit d’un bruit de choc. Sans lambiner, Evrard se remit tant bien que mal sur pied. Son ennemi gisait dos à la roche, une grosse entaille rubis au niveau du torse. Ahanant, Regan l’acheva en lui plantant la pointe de son épée dans la gorge. D’un simple regard, Evrard démontra sa gratitude et engagea le combat contre un chevalier qui venait de se débarrasser de deux fantassins portant la livrée Hellébore. Evrard se fendit, l’acier couina, chuinta et chanta. Languide, le chevalier contrait avec lourdeur ses attaques, s’affaiblissant à chaque coup. Nonobstant le martèlement que subissait son bouclier, le sire Camomille reculait peu à peu, tentant quelques frappes. Soudain, il alla se fracasser contre les roches dans un tintamarre métallique. Un carreau s’était figé dans son heaume. Evrard abattit le tranchant de son épée sur l’épaule du chevalier déchu et sectionna une artère, propulsant une fleur de sang.

« Ebroïn ! Ebroïn ! hurla-t-il pour couvrir le fracas le bataille. Refoulez les dans les couloirs ! »

Les fantassins d’Hellébore reformèrent un bloc de leurs targes meublées de la licorne sinople. Quelques javelots allèrent à l’encontre du mur de boucliers, qui, inexpugnable, contraignit les assaillant à la retraite.

« Devons-nous les poursuivre ? s’enquit Regan, maculé de sang.
— Non, nous devons traverser au plus vite la rivière, nous serons hors d’atteinte.
— Ou à la merci des Vaharem… » grommela sire Merrick.

Ils ramassèrent tout l’acier possible, ne négligeant aucune arme. Bien que les gamins aient troqués leurs roches contre du bon acier, ils demeuraient des gamins. Aucune perte ne serait jamais compensée, alors que les ressources de leurs ennemis semblaient illimitées.

« Que fait-on des corps ? demanda Yannick.
— Biâofaire, ç’va chenti si on nivalote, cru bon d’ajouter Jacques.
— Nous laisserons les corbeaux à leurs agapes, décida Evrard. Le temps presse. »

HelpingFR HelpingFR
MP
Niveau 32
26 octobre 2016 à 13:41:11

Lu, bon chapitre, qui met de nouveau en avant Evrard qui me plaît de plus en plus et qui est quand même promis à un avenir assez morbide d'après le précédent chapitre :hap:
Et j'avais oublié qu'Idilbad avait un gamin en chemin :noel:

LePerenolonch LePerenolonch
MP
Niveau 10
28 octobre 2016 à 12:05:24

Merci tous les deux pour votre lecture ! :-)

Le 26 octobre 2016 à 13:41:11 HelpingFR a écrit :
Lu, bon chapitre, qui met de nouveau en avant Evrard qui me plaît de plus en plus et qui est quand même promis à un avenir assez morbide d'après le précédent chapitre :hap:
Et j'avais oublié qu'Idilbad avait un gamin en chemin :noel:

Précédent chapitre ? :hap: Tu parles du chapitre ou Chimène parle du chapitre 15 de la Marque ? :hap: D'ailleurs il a jamais été dit avant qu'Ildibad avait un gamin, mais je crois que ça avait été deviné par quelqu"un ici :hap:

Le 27 octobre 2016 à 22:27:59 BradPriwin a écrit :
Terrefugace :rire: (Quoique je ne suis pas mieux avec mon Morneval :siffle: )

Cette traversée d'un lieu froid est plutôt bienvenue et assez bien menée, même si je pense que tu aurais plus insister encore sur l'aspect âpre de ces terres glaciales. On voit quand même bien les difficultés que traversent les personnages, notamment avec les dialogues.

Par contre, le discours de milieu de chapitre m'a paru très cliché. Je suppose que c'était le but recherché, pour mettre en contraste avec les événements subséquents ?

Tiens, la scène de combat justement. Elle se voulait courte et brutale, et en ce sens, ça marche bien. J'ai préféré les batailles de la fin du tome 1 ceci dit, plus intense encore, mais on n'est qu'au chapitre 5, donc je comprends parfaitement cet aspect "calme" des choses.

Boh c'est très bien Terrefugace :-( :hap:
J'pense ouais que je rajouterai des descriptions du froid comme tu dis. Pour le discours très cliché, bah je sais pas :hap: En fait je vois pas trop quoi lui faire dire d'autre, je voulais montrer que lui même n'y croyais pas trop, ce qui fait que les mecs ne veulent plus le suivre. Finalement, ils le suivront après sa petite démonstration de force. Pour la bataille, j'imagine que c'est moins intense que les précédentes dans le sens où ça parait évident que la clique d'Evrard va la remporter (Sire Camomille, c'est un peu un random). D'autant plus qu'aucun personnage nommé ne meure. J'assume complétement que ce chapitre est là pour ajouter un peu d'action.

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