Cette nécromancie de post
ça me va perso, je peux finir le mien avant que tu ne commences le tien.
Le 13 juin 2019 à 21:25:17 ThelVadam a écrit :
Cette nécromancie de post
Dois-je te rappeler que la création de notre très cher blabla millénaire est dû à une série de nécromancie de sujets similaires de ma part ?
ça me va perso, je peux finir le mien avant que tu ne commences le tien.
Probablement. Cependant, je n'ai encore jamais fait le mod (alors que je le souhaite depuis 2014, mais faut bien se pousser à faire le LP d'une façon ou d'une autre) et mon Skyrim a mal supporté la réinstallation suivie d'une sauvegarde de 1200h avec 180 mods à faire fonctionner. Je crains que suite à l'accession de Krengaard au trône, mon jeu ne puisse supporter autre chose que sa douce vie de Jarl dans les limites de sa châtellerie. Moi qui espérait me faire BS Morrowind sur cette même sauvegarde, je vais devoir d'une manière ou d'une autre recréer mon personnage et scinder son aventure en deux sauvegardes (probablement une première dans l'histoire des RP ). En fait, en compagnie de nos amis que sont Cathay-Raht et JackOfBlood, je prépare lentement mais sûrement une fiction qui se déroule en Morrowind de 4E212 à 4E220.
D'ailleurs si tu veux des informations à son sujet et l'acceptation de répondre à quelques questions venant de moi, ce serait avec plaisir pour cette première option et avec gratitude pour la seconde. Cela vaut également pour toi Ebony-Dono.
Tu peux toujours me poser tes questions même si tu sais que je ne suis pas très bon pour donner des conseils.
Pour l'histoire, je ne me souviens plus de tout mais j'imagine que ça tournera autour de Krengaard qui devient membre de la maison Telvanni ?
Le 13 juin 2019 à 22:49:53 ThelVadam a écrit :
Tu peux toujours me poser tes questions même si tu sais que je ne suis pas très bon pour donner des conseils.Pour l'histoire, je ne me souviens plus de tout mais j'imagine que ça tournera autour de Krengaard qui devient membre de la maison Telvanni ?
Oulah, si seulement...
Je te fais le synopsis
Krengaard est Jarl de Fort-Ivar depuis quelques années seulement, et officiellement il part en Morrowind pour régler des affaires avec les Rédoran et Telvanni (dont il est déjà membre, cf Dragonborn) et nouer des relations.
Mais comme tu le sais probablement, suite à l'invasion d'Uriel V, les Akavirois ont promis 3 invasions en représailles, et il n'y en a eu que deux... donc voilà, sans plus de suspens, il y a la Troisième Invasion Akaviroise, une alliance entre tous les peuples d'Akavir qui sont menés par le Nérévarine et Tosh-Raka en personnes. Le Nérévarine (dans mon headcanon fils de Tiber Septim et Barenziah) veut prendre la place de l'Enfant de Dragon et régner sur ces derniers, et ici Tosh-Raka est l'équivalent d'Alduin dans Skyrim, et ils tentent de faire ce qu'une alliance entre ce dernier et le Dragonborn aurait donné.
Excentrique je sais mais j'aime beaucoup le scénario. Et on a vu récemment que celui de Skyrim devait être peu ou prou similaire.
Le Nérévarine (dans mon headcanon fils de Tiber Septim et Barenziah)
+ C'est possible de "prendre la place" d'un enfant de dragon ?
Je t'aiderai avec plaisir EsZ
Chapitre en approche, je bascule sur des chapitres plus courts pour l'arc à suivre
Le 14 juin 2019 à 04:30:19 JALLET_ledire6 a écrit :
Le Nérévarine (dans mon headcanon fils de Tiber Septim et Barenziah)
+ C'est possible de "prendre la place" d'un enfant de dragon ?
Techniquement, non, mais en gros il veut régner sur les Dragons comme le fait Krengaard et même s'il a la Voix, il n'a pas d'âme de Dragon et ne peux pas aspirer celle de ces derniers, raison pour laquelle il entend se servir de Tosh-Raka pour légitimer sa position.
Le 14 juin 2019 à 12:50:14 TheEbonyWarrior a écrit :
Je t'aiderai avec plaisir EsZ
Chapitre en approche, je bascule sur des chapitres plus courts pour l'arc à suivre
Merci bien, ça fait plaisir.
Et nice pour le chapitre, moi je vais lire ton chapitre 20 (entamé une relecture depuis hier, ces pavés m'avaient manqués mais je sens plusieurs différences contrairement à l'ancienne fic, je me demande si tu n'as pas sauté quelques événements, ou bien ma mémoire me fait cruellement défaut.
Je me souviens par exemple d'une scène entre Renji, Rurick et Nemira dans une sorte de... bibliothèque, me semble, avec des livres poussiéreux partout, et des tas de monstres qu'ils tuèrent grâce à un piège du donjon. Je sais pas si tu vois de quoi je parle. Et également, pourquoi Rutick met autant de temps à dévoiler ce qu'il y a sous la housse ? De base ce n'était "que" une arme en écorce de Hist et j'ai l'impression que tu tease un maximum (cf le passage avec Nemira qui attaque seule pendant que ses comparses dorment) pour au finale... pas grand chose, sans vouloir paraître offensant.
Le 14 juin 2019 à 14:19:32 EsZanN a écrit :
Le 14 juin 2019 à 12:50:14 TheEbonyWarrior a écrit :
Je t'aiderai avec plaisir EsZ
Chapitre en approche, je bascule sur des chapitres plus courts pour l'arc à suivreMerci bien, ça fait plaisir.
Et nice pour le chapitre, moi je vais lire ton chapitre 20 (entamé une relecture depuis hier, ces pavés m'avaient manqués mais je sens plusieurs différences contrairement à l'ancienne fic, je me demande si tu n'as pas sauté quelques événements, ou bien ma mémoire me fait cruellement défaut.
Je me souviens par exemple d'une scène entre Renji, Rurick et Nemira dans une sorte de... bibliothèque, me semble, avec des livres poussiéreux partout, et des tas de monstres qu'ils tuèrent grâce à un piège du donjon. Je sais pas si tu vois de quoi je parle. Et également, pourquoi Rutick met autant de temps à dévoiler ce qu'il y a sous la housse ? De base ce n'était "que" une arme en écorce de Hist et j'ai l'impression que tu tease un maximum (cf le passage avec Nemira qui attaque seule pendant que ses comparses dorment) pour au finale... pas grand chose, sans vouloir paraître offensant.
Ce passage n'est pas encore arrivé, j'hésite à le remettre pour être honnête. Pour ce qui est de la housse, en revanche...
Le 15 juin 2019 à 14:15:29 TheEbonyWarrior a écrit :
Le 14 juin 2019 à 14:19:32 EsZanN a écrit :
Le 14 juin 2019 à 12:50:14 TheEbonyWarrior a écrit :
Je t'aiderai avec plaisir EsZ
Chapitre en approche, je bascule sur des chapitres plus courts pour l'arc à suivreMerci bien, ça fait plaisir.
Et nice pour le chapitre, moi je vais lire ton chapitre 20 (entamé une relecture depuis hier, ces pavés m'avaient manqués mais je sens plusieurs différences contrairement à l'ancienne fic, je me demande si tu n'as pas sauté quelques événements, ou bien ma mémoire me fait cruellement défaut.
Je me souviens par exemple d'une scène entre Renji, Rurick et Nemira dans une sorte de... bibliothèque, me semble, avec des livres poussiéreux partout, et des tas de monstres qu'ils tuèrent grâce à un piège du donjon. Je sais pas si tu vois de quoi je parle. Et également, pourquoi Rutick met autant de temps à dévoiler ce qu'il y a sous la housse ? De base ce n'était "que" une arme en écorce de Hist et j'ai l'impression que tu tease un maximum (cf le passage avec Nemira qui attaque seule pendant que ses comparses dorment) pour au finale... pas grand chose, sans vouloir paraître offensant.Ce passage n'est pas encore arrivé, j'hésite à le remettre pour être honnête. Pour ce qui est de la housse, en revanche...
Tu devrais, je l'avais grandement apprécié.
Au fait, énorme spoil incoming, mais il manque combien de chapitre avant la mort hyper émouvante de Rurick qui m'avait réellement fait lâcher une larme ?
Le 15 juin 2019 à 14:45:30 EsZanN a écrit :
Le 15 juin 2019 à 14:15:29 TheEbonyWarrior a écrit :
Le 14 juin 2019 à 14:19:32 EsZanN a écrit :
Le 14 juin 2019 à 12:50:14 TheEbonyWarrior a écrit :
Je t'aiderai avec plaisir EsZ
Chapitre en approche, je bascule sur des chapitres plus courts pour l'arc à suivreMerci bien, ça fait plaisir.
Et nice pour le chapitre, moi je vais lire ton chapitre 20 (entamé une relecture depuis hier, ces pavés m'avaient manqués mais je sens plusieurs différences contrairement à l'ancienne fic, je me demande si tu n'as pas sauté quelques événements, ou bien ma mémoire me fait cruellement défaut.
Je me souviens par exemple d'une scène entre Renji, Rurick et Nemira dans une sorte de... bibliothèque, me semble, avec des livres poussiéreux partout, et des tas de monstres qu'ils tuèrent grâce à un piège du donjon. Je sais pas si tu vois de quoi je parle. Et également, pourquoi Rutick met autant de temps à dévoiler ce qu'il y a sous la housse ? De base ce n'était "que" une arme en écorce de Hist et j'ai l'impression que tu tease un maximum (cf le passage avec Nemira qui attaque seule pendant que ses comparses dorment) pour au finale... pas grand chose, sans vouloir paraître offensant.Ce passage n'est pas encore arrivé, j'hésite à le remettre pour être honnête. Pour ce qui est de la housse, en revanche...
Tu devrais, je l'avais grandement apprécié.
Au fait, énorme spoil incoming, mais il manque combien de chapitre avant la mort hyper émouvante de Rurick qui m'avait réellement fait lâcher une larme ?
T'as encore la première partie de l'arc daguefilante + l'opération des Compagnons, ça arrive t'en fais pas
Chapitre 23
Aux alentours de dix heures, au détour d'un chemin à flanc de colline, le petit groupe aperçu une ombre monumentale se dessiner au loin.
Galvanisé par la vue de la capitale brétonne, Ernard pressa le pas, devançant ses deux compagnons de route de quelques mètres.
- C'est ici ! Daguefilante est en vue !
Dakin et Aris rattrapèrent le vieillard.
Au loin, la forme semblait en effet se préciser. Il s'agissait bien de celle de la ville, à peine visible au travers du brouillard matinal. Même d'ici, les proportions gargantuesques de la cité avaient de quoi susciter l'admiration : les reliefs les attendant en contrebas semblaient à peine visibles, comme écrasés par la masse informe se dessinant peu à peu.
- Plus que quelques kilomètres, dit le vieux bréton sans reprendre son souffle. Hâtons-nous, la porte ouest va se retrouver encombrée par les caravanes si nous tardons trop.
Dakin tiqua.
- Du calme, vieil homme. Votre trésor ne va pas s'envoler en votre absence. La crique où nous avons lâché l'ancre est perdue au milieu de nulle part. Et vos hommes sont là pour défendre le navire, n'est-ce pas ?
- Et s'il se volatilise, renchérit Aris, vous aurez au moins de quoi rebâtir l'Esturgeon avec ceci.
Le rougegarde désigna le sac de gemmes pendant au ceinturon du conseiller. Ce dernier baissa les yeux, puis secoua la tête.
- Je pourrais louer les services d'une petite flotte avec autant d'argent. Mais rien ne remplace le navire disparu d'un marin, tout comme aucune femme ne pourrait combler le vide causé par le départ d'une autre dans le cœur d'un homme.
- Eh bien, pressés ou pas, j'ai besoin d'une pause, conclut le Dunmer en s'asseyant.
Le Ernard dont ils avaient fait la rencontre à Sentinelle se serait offusqué d'un tel comportement. Mais celui qu'ils côtoyaient depuis son étrange transfiguration à bord du navire pirate était d'une toute autre veine. Comme si son brusque vieillissement physique s'était traduit par une métamorphose psychologique, il se trouvait être d'un tempérament plus sage et bien plus posé, et savait se montrer raisonnable lorsque la situation le demandait. Rien d'étonnant venant du contrebandier secret du Roi Daric.
Aris ne s'expliquait pas comment le vieillard avait pu les berner tout du long, mais il devait bien reconnaître que sa couverture était parfaite. S'il n'avait pu la percer à jour, seul un sortilège de divination en était capable. À n'en pas douter, il menait ce double jeu depuis des années, des décennies peut-être. Malgré tout, il s'était montré assez peu loquace quant à la nature de ses activités, et les deux Marcheurs n'espéraient pas vraiment en apprendre plus venant de lui. À vrai dire, ils n'étaient guère intéressés. Une seule chose comptait pour l'heure : mettre la main sur Nash gro-Shagol.
Tandis que le mercenaire le dévisageait perdu dans ses pensées, le bréton hocha finalement la tête :
- Bien, arrêtons nous un moment. Votre ami a assez donné pour l'instant, et je comprends que vous ayez besoin de repos.
Il n'avait pas tort. Depuis leur confrontation avec l'équipage de Zefir trois jours plus tôt, l'elfe noir avait à peine repris du poil de la bête. L'incantation qui leur avait permi de s'en tirer avait profondément puisé dans ses réserves, et il devait régulièrement s'arrêter pour souffler. Malgré tout, son état était rassurant : il avait cessé de boitiller le matin précédent, et soutenait désormais à peu près le rythme de marche du vieux bréton, étonnamment vif pour son âge. Il lui faudrait probablement une semaine ou deux pour s'en remettre complètement, mais ses jours n'étaient pas en danger.
- Alors, c'est la première fois que vous mettez les pieds à la capitale ? fit Afranius d'un ton distrait.
Le rougegarde hocha du chef.
- Pour tout vous dire, c'est même la première fois que je foule le sol d'Hauteroche.
Le Dunmer le fixa d'un regard entendu. Ils s'étaient mis d'accord sur cette version des événements. Aux yeux de tous, Aris et Dakin étaient deux ivrognes embarqués clandestinement sur la baie afin d'échapper à des dettes écrasantes amassées dans tout Martelfell. Et, bien que le conseiller soit informé de leur identité véritable, leur passé demeurait une chose qu'il leur était exclu de partager, surtout à un homme aussi influent.
Afranius se tourna vers son camarade.
- Et vous, Dolovas ?
- J'ai... J'ai passé quelques années dans cette province. Lorsque j'étais jeune.
Aris retint un sourire devant l'expression de gêne feinte par son ami. Comme il en avait souvenir, les affabulations de Dakin paraissaient presque indiscernables de la vérité. Du point de vue d'un relatif inconnu comme le bréton, il était tout bonnement impossible de flairer le mensonge.
- Je vois. Et où avez-vous grandi ?
- Dans les campagnes de Refuge. Je ne veux pas en parler.
Le vieillard se tu et hocha silencieusement la tête, mû par un respect discret.
Les campagnes brétonnes étaient pauvres, et feindre la sensibilité du sujet était une bonne façon d'éviter tout questionnement supplémentaire.
Les trois voyageurs achevèrent les quelques provisions qu'il leur restait. Aris partagea le reste de sa ration avec Dakin, affamé par la route, et profita de son temps libre pour jeter un oeil à sa carte.
Afin de dissimuler le navire débordant de richesses de Zefir, il leur avait fallu s'éloigner considérablement de la baie portuaire de la ville. Ils avaient donc passé passé la dernière journée à marcher vers l'Est, longeant les sentiers côtiers et les forêts afin d'éviter toute mauvaise rencontre. Rien de particulier n'avait frappé leur attention, si ce n'était l'étrange sensation d'être de retour sur une terre qui n'était pas prête à les accueillir.
Juchés sur une petite colline surplombant les bois de chênes et d'érables les séparant la ville, ils disposaient d'une vue panoramique plus qu'agréable. Devant le rougegarde, l'immense étendue des feuillages bruissait lentement, comme une gigantesque créature se mouvant au rythme de la sève palpitant dans les innombrables troncs qui la composaient. Partout autour d'eux, le chant des oiseaux et le crissement des insectes les assourdissait de leur timbre mélodique. Cette terre regorgeait de vie. Après toutes ces années passées à vagabonder, bercé par la mélodie des vents solitaires, Aris l'avait presque oublié.
Malgré tout, cette vie lui paraissait tout aussi hostile que ne l'étaient les prédateurs les plus féroces de Martelfell. Ils n'étaient pas les bienvenus ici, car ils se retrouvaient porteurs d'une vérité que même la terre avait oublié. C'en était presque à se demander si les Marcheurs n'étaient pas fous. Le monde tout entier ignorait la vérité sur les horreurs qui s'étaient déroulées ici, dans ces plaines et ces châteaux. Les souverains s'étaient entretués pour le pouvoir en envoyant leurs armées raser les bourgs et assaillir les villes, les paysans avaient péri par dizaines de milliers sous les coups de la famine, la guerre et la maladie... Mais cette écœurante illusion de paix instaurée par le Thalmor avait perduré envers et contre tout, incontestée pendant près de deux décennies.
Il avait beau être de retour chez lui, la sensation d'inconfort qui l'habitait n'avait cessé de croître à mesure qu'ils s'étaient enfoncés à l'intérieur de la région, comme s'il était venu regagner sa demeure pour la trouver occupée par de parfaits inconnus.
« Nous ne sommes que de passage, songea Aris. Plus vite nous aurons rejoint Nash, plus vite nous pourrons repartir. Ce sera mieux pour tout le monde. »
Une main rassurante se posa sur son épaule. Dakin se tenait derrière lui, le regard habité d'une tristesse qu'il devina en accord à la sienne.
- Viens, lâcha-t-il simplement. Daguefilante n'est plus très loin.
Ils se remirent en route.
Conformément à leurs souvenirs, la forêt était luxuriante, et la faune sauvage n'avait en rien varié de celle qu'ils avaient connu dans leur enfance. Les pies, les perdrix et les moineaux peuplaient les branchages de quelques arbres, les cerfs passaient de temps à autre devant eux, les observant curieusement en maintenant une distance respectable, et les troncs se retrouvaient parfois marqués des griffures que les lynxs sauvages laissaient pour délimiter leur aire de chasse.
Ils furent bientôt confrontés au problème qu'Ernard leur avait exposé : au détour d'un sentier, le groupe fit la rencontre des premiers voyageurs et marchands rejoignant la ville à l'ouverture des portes.
Il s'agissait des premiers hommes qu'ils rencontraient depuis qu'ils avaient mit pied à terre.
- Faites profil bas, leur intima Afranius. Je ne souhaite pas être reconnu en ces lieux.
Dakin s'étonna :
- Pourquoi donc ? Vous n'avez qu'à reprendre l'apparence que vous arboriez à notre rencontre...
- Ce n'est pas aussi simple. Cette couverture était permanente, et je suis incapable de la retrouver sans l'aide des mages de la cour royale. Ce sont eux qui se chargent de... transformer les conseillers, lorsque les circonstances le requièrent.
L'elfe noir ricana.
- Le talent politique ou celui des arcanes, je vois... Je suppose qu'on ne peut pas tout avoir.
Passant bien outre la légère pique du Dunmer, le conseiller s'approcha furtivement d'un groupe de voyageurs encadrant une charrette de minerais.
- Passons avec eux, dit-il. Cette couverture sera plus que suffisante le temps d'arriver en ville.
Les deux amis s'exécutèrent sans broncher, et rejoignirent la file. Les regards des caravaniers glissèrent sur eux sans s'attarder, et ils poursuivirent leur route sans échanger un mot de plus. Rapidement, le convoi croisa la route d'un, puis de deux autres groupes qui vinrent gonfler les rangs du petit cortège. Celui-ci se changea bien vite en flot, puis en cohorte.
Avant qu'ils ne le réalisent Aris, Dakin et le bréton évoluaient au sein d'une petite centaine de paysans, de mercenaires et d'aventuriers venus rallier l'une des plus grandes cités jamais construites.
Après une petite heure, la ligne d'horizon se couvrit de gris. Les amis mirent un peu de temps à réaliser qu'il s'agissait des remparts, plus hauts que n'importe quel arbre qu'ils avaient pu croiser en chemin.
Bien entendu, la ville était gigantesque, et portait bien son titre officieux de seconde capitale des royaumes humains. À chaque pas, la muraille s'élevait un peu plus, si bien que lorsqu'ils s'immobilisèrent à l'entrée, les trente mètres de pierre taillée les séparant de l'intérieur les frappèrent d'une stupeur contemplative.
Devant eux, les portes se tenaient entrouvertes, mais l'agitation probablement démentielle agitant le cœur de la cité en ce début de journée demeurait invisible, obstrué par la bonne centaine de marchands et d'habitants se pressant à l'entrée. Même à quinze mètres de distance, les cris et le tumulte étaient clairement audibles, couvrant presque les conversations des voyageurs autour d'eux.
Les discussions allaient bon train. Sur leur gauche, deux adolescents Dunmer pariaient sur celui qui ferait fortune le plus vite, sous le regard précautionneux de leur père, un géant à la chevelure abondante. De l'autre côté, une troupe de ménestrels laissaient libre cours à leur créativité, et amusaient les environs de quelques pirouettes sous un morceau de lute traditionnel.
Juste sous leurs yeux, les deux gardes du convoi de minerais discutaient à voix basse. Aris capta sans mal la teneur de leur intervention :
- Tu as entendu ? lâcha le premier. D'après mon frère, la révolte gronde de nouveau en ville.
- Je commençais à me demander si nous vivions bien en Hauteroche, plaisanta le second avant de regagner son sérieux. Mais je m'inquiète autant que toi. Si tu veux mon avis, nous aurions mieux fait de plier bagage dans la semaine avant d'être réquisitionnés par la garde du lion lorsque les premiers soulèvements surviendront.
Ernard tira le rougegarde de son observation.
- Par ici, af-Ozalan. La file avance.
Un petit passage venait en effet de se dégager sur leur droite, déjà couvert par les quelques envieux bondissant sur une opportunité de dépasser leur voisin de queue.
Deux ou trois fois, le rougegarde du grogner ou porter une main à la garde de son glaive pour dissuader les doigts baladeurs passant un peu trop près de sa bourse. Après maintes bousculades et faufilements, les trois compagnons de route s'arrêtent finalement devant les soldats postés à l'entrée. Ernard s'avança d'un air assuré vers l'un d'eux, avant de sortir un sceau de sa veste. Le vigile souleva la visière de son casque, blêmit brièvement, puis hocha la tête en adressant un signe à ses compères.
Curieux, Dakin en profita pour examiner le battant de la porte. Haute de huit mètres, celle-ci avait visiblement été retaillée plusieurs fois à en juger par les traces d'usure au niveau de son sommet, et arborait actuellement le blason de la famille royale, dirigée par le roi Daric.
Dans la force de la trentaine, il s'agissait d'un souverain réputé juste et sage jusque sur les côtes rougegardes. S'il ne détenait aucun exploit militaire à son actif, il avait au moins le mérite d'avoir prévenu tout conflit ou rébellion sur ses terres depuis son couronnement dix ans auparavant.
Alors qu'il observait encore les gravures finement ciselées couvrant la pierre, les gardes lui demandèrent d'entrer. L'elfe se joignit au rougegarde et au noble, qui s'immobilisèrent de nouveau devant une petite table quelques mètres plus loin.
Un impérial à la mine patibulaire s'y tenait accoudé, le visage figé en une expression d'ennui désabusé.
- Motif de visite ?
Ernard prit rapidement les devants :
- Moi et mes amis sommes venu faire affaire en ville. Je crains ne pas être en mesure de vous en dire plus.
L'homme haussa un sourcil indifférent, avant d'étouffer un bref baillement.
- Comme vous voudrez. Veuillez déposer vos armes et objets de valeur ici pour vérification. N'oubliez rien si vous voulez éviter les problèmes avec mes gars.
Effectivement, une petite troupe de soldats en armure patientait non loin, dénudant du regard chaque personne passant les portes à la recherche du faciès familier d'éventuels criminels ou voleurs recherchés.
Leur équipement était de bonne qualité. Les haumes d'acier couvrant l'intégralité leur crâne étaient munis d'une fente en T libérant yeux et bouche, et le reste de leur attirail paraissait de même adapté au combat, sans pour aurant rendre pénible un port quotidien. Maille légère, plastron de plaques, gantelets de cuir renforcé et bottes d'acier... Le parfait équipement de tout soldat préparé au pire même en temps de paix.
La longueur et le tranchant de leurs épées, cela dit, ne laissait aucun doute sur leur capacité à pénétrer les équipements bon marché en vente un peu partout en ville, et suffisaient probablement à dissuader n'importe quel pillard ou bandit de grand chemin de tenter sa chance à proximité d'une patrouille.
Sans s'alarmer du regard suspicieux qu'un ou deux des hommes lui lancèrent en s'apercevant qu'il les fixait, Aris déposa son glaive et sa boussole à cadran doré sur la table d'inspection, rapidement imité par Dakin. Le Dunmer tira une petite poignée de gemmes de sa poche, et fit religieusement glisser son sabre hors de son fourreau pour le tendre à l'impérial.
L'inspecteur les dévisagea à tour de rôle :
- Sacrés lames, ma parole ! J'ai vu un paquet de gars passer par cette porte, et je peux vous dire que je pose rarement les yeux sur pareils ouvrages ! Êtes-vous au service d'une riche famille de la cour ?
- En quelque sorte, laissa échapper Aris à mi-voix. Affaires importantes.
- Ma foi, je ne voudrais pas interrompre des agents en service, dit l'impérial en levant les mains. Vous pouvez passer. Les salutations du portier à... à quiconque vous œuvrez pour, je suppose... Gloire au Roi !
Les trois hommes s'écartèrent du vacarme ambiant, et empruntèrent quelques ruelles pour profiter d'un peu de calme en contrepartie.
- Vous avez le mensonge dans le sang, af-Ozalan ! s'exclama Ernard. À votre ton mystérieux, je n'aurais que pu croire vos affirmations si je ne les avait su fausses. Ce pauvre homme doit probablement jubiler en attendant de raconter à sa famille qu'il a discuté avec les forces secrètes du royaume !
Bien entendu, le bréton mentait délibérément. Le subterfuge du rougegarde était grossier, et ne prétendait qu'au peu de crédibilité nécessaire pour ne pas éveiller les soupçons du portier. Cependant, ceci les assuraient d'une chose : le conseiller était persuadé de pouvoir les percer à jour s'ils tentaient de le tromper. Désormais porteurs de cette information importante, ils se relâchèrent quelque peu.
- Bon, dit Dakin. Et maintenant ?
- Le temps que nos chemins se séparent n'est pas encore venu, dit le bréton. Il y quelque chose que je dois vous montrer. Suivez-moi.
Sur ces mots, les deux compagnons suivirent leur guide. Ils s'enfoncèrent davantage dans la ville, s'éloignant de l'artère principale, et eurent ainsi tout le loisir d'observer le décor dans ses moindres détails.
Les rues pavées étaient plutôt propres pour une cité aussi large. De couleur claire, la pierre du sol contrastait avec les bâtiments, d'un granit légèrement plus sombre laissant deviner l'ancienneté des constructions. Ces dernières s'élevaient fréquemment au-delà des dix mètres, et mariaient à la perfection les tons divers et variés des matériaux utilisés. Les toitures de tuiles ocres étaient reliées entre elles par de nombreuses cordes torsadées usées par les premières neiges, auxquelles pendait parfois le linge trempé oublié par les plus têtes-en-l'air avant la nuit. Il y retrouvèrent parfois pendues quelques étoffes colorées et autres fanions, vestiges de la dernière fête qui avait dû animer la ville pendant des jours entiers.
Aris se pencha à l'oreille de l'elfe :
- Je n'avais pas souvenir d'une ville si bien entretenue, souffla-t-il.
- Moi non plus. La dernière fois que j'ai mis les pieds ici, les ruelles croulaient sous les ordures et la mendicité.
Le rougegarde se tu. Tout ceci ressemblait à un magnifique tableau, monté de toute pièce pour maintenir l'illusion d'une joie de vivre commune. Assurément, une ville d'un million d'habitants ne pouvait correspondre à ce qu'il voyait. S'ajoutait à cela la discussion des deux hommes du convoi. Pas de doute, ils avaient parlé de révolte. Une simple rumeur ? Leur inquiétude paraissait pourtant bien réelle...
Plissant les yeux, le Marcheur redoubla de vigilance, soucieux de trouver autour de lui la faille qui trahirait ce décor enchanteur.
Ils marchèrent durant un quart d'heure, et contre toute attente, ses tentatives s'avérèrent bien vaines. Partout ou Ernard les menait, les visages souriants et les coups d'œil chaleureux berçaient leur progression. Il fallait dire que sa tenue de cuir et de tissu vert et la robe rouge de l'elfe noir détonnaient fortement avec l'habit ample et sombre du conseiller, une pèlerine noire des plus sobres. Leur petit groupe attirait les regards, mais aucun d'eux n'était méfiant.
Devant l'étrangeté de la situation, le mercenaire commença rapidement à s'interroger.
« Se pourrait-il que les choses aient tant changé en l'espace d'une décennie ? pensa-t-il. Le roi Daric a bonne reputation, mais tout ceci ressemble à un conte de fées... Nous avons beau être loin des bas-quartiers, nous aurions forcément du croiser quelques malheureux... Tous ces visages béats nous fixent comme s'ils n'avaient jamais vu de voyageurs de leur vie... Que se passe-t-il ici ? »
Se tournant vers son camarade, il comprit que ce dernier partageait son hésitation. Déboussolé, le Dunmer jetait régulièrement de brefs regards derrière lui, comme apeuré par la prospérité des lieux.
- Je vous l'avais dit ! fanfaronna Afranius. Daguefilante est un spectacle à ne pas manquer ! Et tenez-vous bien, le plus incroyable est juste devant vous !
Alors que le conseiller prononçait ces mots, la rue s'ouvrit brusquement, révélant un promontoire surplombant toute la ville.
Lorsqu'ils se penchèrent vers l'incroyable scène, le soleil surgit à l'est, les aveuglant de sa grandeur royale. Le spectacle en valait la peine.
Comparé à l'interminable alignement de bâtiments qui s'étendait sous leurs yeux, Refuge paraissait bien petite. Même avec la hauteur raisonnable qu'ils avaient prise, la cité était si grande qu'il était impossible de l'englober d'un seul regard. Jusqu'à l'horizon, la plus grande des deux murailles intérieures se poursuivait inlassablement, entourant le palais de son étreinte protectrice. Le château était simplement énorme, et couvrait intégralement ce qui avait autrefois dû être une colline surplombant la plaine sur laquelle le reste de la cité s'était bâtie au fil des millénaires.
Devant eux, les rayons solaires frappaient de plein fouet les douves et les tours du bâtiment, imprimant par intermittence la formes de ses flèches et de ses parois sculptées dans ce ciel nuageux d'hiver.
La vision était à couper le souffle. Comme les résidents d'une fourmilière, les habitations en contrebas semblaient minuscules en comparaison, et s'organisaient en une suite de formes insignifiantes autour des rues fourmillant d'activité. Sans même pouvoir apercevoir précisément ce qui s'y déroulait, Aris et Dakin devinèrent que les allées étaient déjà noires de monde à en juger par le grondement diffus s'élevant de cette cité aux allures titanesques.
Et malgré cela, malgré la taille vertigineuse des édifices et l'agitation infernale qui régnait dans chaque recoin de ce tableau grandeur nature, une harmonie déconcertante semblait s'échapper de ces milions de tonnes de tuiles et de pierres.
Sans rien ajouter, ils continuèrent leur chemin.
Quelques minutes de marche plus tard, ils firent expérience de l'activité presagée plus tôt. Un flot ininterrompu de marchands en tout genres vint rapidement envahir les rues qu'ils empruntaient à mesure qu'ils se rapprochait du centre de Daguefilante, les replongeant dans un vacarme que les deux amis auraient sitôt fait de quitter s'ils en avaient eut la possibilité.
Lassé du bruit, Aris saisit Afranius par la manche.
- Où nous emmenez-vous, vieil homme ? J'aimerais me reposer après ce voyage, si votre gracieuseté n'y voit pas là de contrevenance à ses nobles projets.
- Un peu de patience, mercenaire ! Nous touchons au but.
La fin de sa phrase se perdit dans la cacophonie tandis que les passants s'aglutinaient devant eux en une herse impénétrable. Une file de chariots remplis de marchandises et de miliciens bloquaient la rue, arrêtés par un barrage de contrôle de la garde royale. De l'autre côté du convoi, sous les étendards pourpres, les hommes de Daric inspectaient minutieusement chaque cargaison, mais semblaient peiner à filtrer les habitants cherchant à forcer le passage au travers de leurs rangs. La foule était dense mais grouillante, si bien qu'Aris manqua à plusieurs reprises de perdre de vue ses camarades lorsqu'ils entreprirent de contourner la masse.
Ils finirent malgré tout par dépasser la plupart des badauds sans trop d'encombres, pressés par un groupe de riches négociants jouant des coudes avec une efficacité aussi impressionnante que celle dont ils devaient faire preuve en affaires. Bien vite, les soldats cédèrent avec une exaspération calculée, et laissèrent passer le gros des saltimbanques et des passants amassés.
Ernard Afranius leur fit signe de le suivre, et se dirigea d'un pas décidé vers une rue longeant les remparts intérieurs. Ils marchèrent pendant quelques minutes, puis s'arrêtèrent lorsque la foule fut plus éparpillée.
- Bon, fit le bréton d'une voix joyeuse. Je me serais bien porté volontaire pour vous faire visiter la seconde plus grande ville de l'Empire, mais vous êtes pressés, aussi vais-je me contenter de vous présenter un vieil ami. Il se trouve dans la taverne.
Les deux amis suivirent du regard le doigt du conseiller, pointé en direction d'un petit panneau suspendu. Sur le bois de la pancarte, on pouvait lire "La tanière du lycanthrope" en grosses lettres rouges à moitié effacées par le temps. Devant l'entrée se trouvaient une dizaine de gaillards tatoués aux mains calleuses, braillant à l'attention de ce qui se trouvait dans l'échoppe. Aux insultes aussi bégayantes que fleuries qu'ils enchaînaient collectivement, tous trois comprirent rapidement qu'ils s'adressaient probablement au patron, décidé à les expulser avant que la clientèle plus fraîche de cette nouvelle journée n'investisse les lieux.
Aris sourit. Cela faisait une éternité qu'il n'avait pas festoyé de la sorte. Ces derniers mois avaient été pour lui source de suspicion constante : entre les commanditaires véreux et les affrontements de groupes mercenaires rivaux, Sentinelle n'était pas sûre pour un loup solitaire comme lui. S'il pouvait se vanter de bien tenir la boisson, il savait également qu'étancher sa soif trop abondamment pouvait vite lui valoir de se réveiller une dague entre les côtes ou un sac de toile sur la tête.
Malgré leur état d'ébriété indiscutable, les gueulards attroupés devant l'auberge s'éparpillèrent comme une nuée d'insectes lorsqu'une langue de flammes surgit de l'intérieur du bâtiment. Quelques instants plus tard, une masse de muscles émergea des portillons, scrutant la débandade des vauriens d'un air impassible en essuyantbses paumes couvertes de suie contre son tablier.
L'homme, un bréton au crâne dépeuplé et à la barbe brune hirsute, se tourna vers eux, révélant sa tenue de tavernier à carreaux et son air bougon. Voyant les trois voyageurs le dévisager sans bouger, il fit mine de retrousser les manches couvrant ses bras épais comme des troncs, avant de s'immobiliser. Sa mine s'illumina brusquement.
- Ernard, vieux vautour ! s'exclama-t-il en se jetant littéralement sur le vieillard. Viens dans mes bras, vile canaille !
Aris et Dakin observèrent avec circonspection le colosse enserrer le noble entre ses bras massifs, le soulevant de terre comme une brindille tout en l'étouffant littéralement. Reposé au sol avec une douceur discutable, Afranius tituba brièvement, le teint blême.
- Combien d'années cela fait-il !? reprit le géant.
- Deux semaines, Grégoire, bredouilla le vieillard. Seulement deux semaines.
Le propriétaire haussa les épaules avec l'air d'un enfant prit sur le fait.
- Oh... Eh bien ! Il faut dire que les jours se succèdent vite dans un métier comme le mien. Mais je vois que tu m'as amené des amis !
- Voici Dakin et Aris. Je leur offre juste un verre pour fêter leur arrivée en ville.
- Eh bien, qu'attendez-vous donc ? Installez-vous ! Je vous sers quelque chose de particulier ? La spécialité de la maison...
- Une bière argonienne, lâcha Aris. Vous avez ça ?
- Un thé à la menthe me suffira amplement, ajouta le Dunmer.
Interloqué, le patron les regarda comme s'il venait de tomber sur deux lutins au détour d'un chemin. Après les avoir fixé comme des aliénés pendant une seconde, il haussa les épaules avec une déception forcée.
- Eh bien, je suppose que vous êtes assez grands pour choisir... Mais vous ne savez pas ce que vous manquez !
Ils entrèrent. La taverne était à peu près vide, et une ambiance calme régnait. L'éclairage timide de quelques lanternes laissaient visible la poussière en suspension flottant calmement, bercée par un léger courant d'air. Les murs n'étaient décorés que de quelques torches en fer éteintes, et une odeur d'encens embaumait les lieux. Sous le plafond de parquet s'étendaient une quinzaine de tables, dont seules quatre étaient occupées. Sur les tabourets de la première, deux femmes elfes discutaient à voix basse en sirotant leurs boissons, sous les invectives d'un argonien éméché ayant miraculeusement échappé à la vigilance du gérant. Juste à côté, un groupe d'hommes vêtus de vêtements colorés se disputaient une partie de cartes, dans un silence mortel ponctué de regards assassins. Sur la dernière, tout au fond de la pièce, une silhouette encapuchonnée se tenait prostrée mains jointes.
C'est vers celle-ci que le bréton les guida. À leur approche, l'inconnu n'esquissa pas un geste, comme indifférent à leur arrivée.
Cependant, la voix accueillante d'un homme d'âge moyen s'éleva de sous le capuchon lorsqu'ils furent à l'arrêt, faisant remuer la barbe claire dépassant de son col :
- Asseyez-vous donc. Je ne vais pas vous manger, vous savez.
- Une minute, vous... fit Grégoire en se dirigeant vers l'individu d'un pas lourd. Depuis quand êtes-vous...
- Laissez.
La paume tendue d'Afranius buta contre le torse massif du grand bréton, mais suffit à immobiliser ce dernier.
- C'est un ami, expliqua le conseiller. Un invité, je dirais même.
Le tavernier ne releva pas, et se contenta de lorgner avec défiance en direction de l'étrange client.
- Bien, bien... Je vais vous apporter à boire, alors ! lança-t-il finalement, avant de s'éloigner d'un pas goguenard vers le bar encombré de choppes à moitié finies.
- Asseyez-vous, leur demanda Ernard.
Les deux Marcheurs prirent place autour de la table, encore humide des boissons renversées au cours de la nuit précédente.
Quelques minutes passèrent dans un silence tendu. La taverne se remplit peu à peu, et quelques conversations légères rompirent bientôt le mutisme ambiant. D'un regard amusé bien que tendu, les amis observèrent le tenancier faire main basse sur la dernière boisson de l'argonien ivre, avant de le flanquer dehors. Malgré sa réticence, farouche au premier abord, le lézard débarrassa prestement le plancher lorsque les premières volutes de fumée s'élevèrent des doigts du patron.
- Grégoire, surnommé le brûlant, fit Afranius avec enthousiasme. Un vieil ami. Il pourrait probablement dévisser le crâne d'un ours à mains nues, mais de mémoire, il ne s'est pas battu depuis des années. En revanche, ceux qui sèment la pagaille dans son échoppe ne font pas long feu, si vous voyez où je veux en venir.
De son côté, la silhouette ne pipait mot. Aussi méfiants qu'intrigués, les deux compagnons se regardèrent pour la énième fois.
«Sans doute un trafiquant d'armes ou quelque mercenaire à l' éthique douteuse, songea Aris avec amertume. Il nous met en contact avec la racaille sans principes à laquelle il nous pense appartenir. Rien d'étonnant à cela.»
Tandis que les deux amis se préparaient déjà à envoyer balader le reître lorsque ce dernier prendrait la parole, l'échoppier revint, les bras chargés de sa nouvelle tournée. Il servit les boissons demandées, puis s'en retourna au rangement et à l'astiquage méticuleux de ses choppes. En plus de la bière et du thé commandés par les Marcheurs, il avait laissé sur la table une bouteille de vin ainsi que deux verres, destinés à Ernard et son étrange compagnon.
- Le meilleur crû que l'on puisse espérer trouver hors d'un établissement de luxe, nota l'inconnu en scrutant la bouteille avec un regard que l'on devinait d'une douceur comparable à celui porté sur le corps d'une femme.
Sur ces mots, il se servit un verre, laissant brièvement apparaître ses mains.
L'anneau d'or et de grenat passé à son idex gauche attisa immédiatement l'intérêt de Dakin. Si Aris l'ignorait, lui savait que ce genre d'apparat était communément réservé à la haute noblesse. Assurément, cet homme n'avait aucun remord à arborer une telle parure, ni aucune peur d'être attrapé. Éviter les soupçons et fuir les forces de l'ordre ne devait donc être qu'une formalité pour lui. Le vieil homme les avait-il emmené ici dans l'espoir que cet inconnu puisse les aider à remonter la piste de Nash ? Après tout, le bréton était au courant qu'ils étaient venus ici pour trouver quelqu'un.
Le rougegarde, positionné de l'autre côté de la table, n'avait quant à lui pas vraiment prêté attention à la bague de l'homme. En revanche, la finesse de ses mains exemptes de cicatrices ne laissaient planer aucun doute sur son adresse à la tâche sans doute peu reluisante à laquelle il s'adonnait. L'énergumène était la cible de poursuites, cela était avéré. Nul ne dissimulait son visage sans raison, à moins de vouloir volontairement attirer les regards. Il ne s'était exprimé que brièvement et avec un vocabulaire rendant indéterminable son élévation sociale, mais sa voix trahissait trente bonnes années d'existence. Et dans une grande ville comme celle-ci, le mercenaire savait d'expérience que les mains se couvraient de coupures et de bleus avant toute autre partie du corps. L'absence de blessure pouvait signifier trois choses : il s'agissait soit de quelqu'un venu de l'extérieur, soit d'un individu particulièrement habile à la tâche. À moins qu'il ne s'agisse là aussi d'une illusion. Si Afranius avait pu dissimuler sa véritable apparence sans que son camarade Dunmer ne le remarque, ce nouvel intervenant en était peut-être également capable. Mais alors, pourquoi prendre la peine de cacher son visage ? Quelque chose ne tournait pas rond, mais son instinct lui criait que cet homme n'était pas n'importe qui.
Tout du long, il n'avait cessé de lorgner sur l'attirail de l'individu. En guise d'unique surface métallique sur laquelle il pu poser les yeux, un plastron usé couvrait son torse. Le reste de son corps était couvert d'un espèce de tissu de lin épais, dont les jambes, les bras et la capuche de son funeste costume étaient composés. Les vestiges d'une cape du même matériau pendaient dans son dos comme autant de lambeaux de peau décharnés, lui conférant l'allure singulière d'un chevalier errant au gré des routes depuis d'interminables années. L'arme demeurait invisible.
D'un seul geste, l'inconnu venait malgré lui de faire étalage de ses compétences. Aris tenta tant bien que mal de regarder discrètement son visage, mais son capuchon était trop large, et il n'aperçu que la paire de lèvres fines surplombant sa barbe.
- Si mon cher ami Ernard vous a fait venir à ma rencontre, c'est pour une raison bien précise, lâcha l'étranger. La connaissez-vous ?
Dakin répondit du même ton brumeux, presque autant par moquerie que par souci d'uniformité :
- Non, mais je gage que cela ne saurait se faire attendre...
L'esquisse d'un sourire se dessinant sous la pénombre du capuchon de l'homme ne leur échappa pas.
- En effet. Je suis ici pour vous proposer un échange de bons procédés.
«À la bonne heure, pensa Aris. Et que va-t-il nous demander qu'il ne saurait accomplir en personne ? Secourir une demoiselle en détresse ? Assassiner un marchand d'esclaves ? Non, c'est un échange déséquilibré. Et je refuse de m'y laisser prendre.»
L'elfe noir reprit avec une impatience feinte :
- Eh bien ? Nous vous écoutons.
Nouveau sourire.
- J'aimerais vous en parler immédiatement, mais je crains que notre petite discussion ne soit interrompue prématurément...
À peine ces mots avaient-ils franchi le seuil de ses lèvres que la porte de la taverne s'ouvrit violemment, faisant sursauter la plupart des clients attablés. Trois hommes en armes entrèrent, affichant fièrement le lion doré du blason royal sur leurs capes pourpres.
- Nous savons de source sûre que deux rebelles se terrent ici ! entonna le premier en avançant au centre de la pièce, une main sur la garde et l'autre serrée sur la poignée de son bouclier. Nous allons procéder à une fouille collective, alors veuillez ne pas faire de gestes brusques. La traitrise envers sa Majesté Daric est un crime passible de mort, et toute résistance sera considérée comme tel !
Immédiatement, un jeune homme et un bosmer en armure de cuir assis au fond de la salle se levèrent et dégaînèrent, la mine sévère.
- Allez pourrir en Oblivion ! fulmina l'elfe. Pas d'inquiétude, votre faux roi vous y rejoindra bientôt... lorsque nous hisserons sa tête sur une pique !
- Vous serez sévèrement punis pour ces mots, hérétique ! scanda l'un des chevaliers en s'avançant d'un pas menaçant.
Le bosmer se jeta sur lui en hurlant et lui asséna un puissant coup de la pointe de son épée, visant l'interstice entre son torse et son cou. Mais le soldat se décala, et la lame rebondit mollement sur la plate. Ponctuant l'action d'un regard amusé, le garde lâcha sa lame. D'un mouvement fluide qui traduisait son habitude pour ce genre de tâches, il agrippa l'arme ennemie de son poing ganté, et abattit la pointe de son écu sur le crâne du malheureux, qui s'écroula par terre avec un spasme de douleur.
Comprenant que tout combat frontal était voué à un échec cuisant, le second révolutionnaire cracha au sol, avant de se ruer vers une fenêtre, renversant chaises et boissons sur son passage. Le chevalier en tête se précipita pour l'intercepter, mais le poids de son armure et l'adrénaline galvanisant sa cible ne lui permirent jamais de lui mettre la main dessus. Le fuyard traversa la vitre et s'écrasa au-dehors sous les exclamations des passants, avant d'entamer une course précipitée.
Ni une ni deux, le garde le plus proche s'élança à sa poursuite, tandis que les deux autres se saisissaient de son complice gémissant pour le trainer avec eux. Ils franchirent le pas de la porte sans un mot supplémentaire, laissant Grégoire s'avancer vers sa fenêtre brisée avec un air outré.
Dans la taverne, le temps semblait figé. Personne n'avait esquissé le moindre mouvement du début à la fin de la scène, qui n'avait duré qu'une poignée de secondes.
Pourtant, quelques chuchotements reprirent bientôt, et une ambiance joyeuse et animée remplaça cette atmosphère froide en bien peu de temps.
Gêné, Ernard dévisagea son mystérieux invité.
- Mes excuses. Cet endroit n'est pas...
- Tout va bien, Afranius. Au contraire, ce qui vient de se produire constitue une excellente introduction à ma requête.
Sans plus de formalités, l'homme souleva sa capuche.
Comme prévu, il devait friser la quarantaine. Ses cheveux ondulés étaient d'un blond sauvage, et couraient de part et d'autre de ses joues déjà masquées par une barbe fournie mais soigneusement taillée. D'un regard, il posa deux yeux d'un bleu profond sur Aris, et ses pommettes larges se hissèrent au niveau de ses paupières effacées, réhaussées par un sourire calme. Ses lèvres et son nez étaient fins, sans imperfection, mais une fine cicatrice venait les réunir, effleurant sa narine et le haut de sa lèvre en traçant un chemin parfaitement vertical sur sa peau claire. D'après ses oreilles, il s'agissait d'un bréton.
Étonnamment, le rougegarde eut l'impression de connaître cet homme. Un sentiment troublant renforcé par l'éclat chaleureux de ses pupilles, qui semblaient le scruter sans méfiance ni arrière-pensée.
Se raclant la gorge, Dakin interrompit la communion silencieuse des deux hommes.
- Et vous êtes ?
L'inconnu se tourna presque complètement pour faire face à l'elfe noir. Ce dernier eut un mouvement de recul.
- Hé, Aris. Qu'est-ce que c'est que ce...
L'homme ne lui laissa pas le loisir de poursuivre.
- Je m'appelle Daric. Et, pour la durée de votre séjour en ville, je serai votre souverain.
Ouiii le nouveau chapitre ! Je lis ça dans la nuit.
Et bien, ce cliffhanger.
C'est la seule méthode que j'ai trouvé pour pouvoir me dire "bon, j'en ai finit avec ce chapitre, le prochain paragraphe sera pour le suivant"
Le 18 juin 2019 à 22:01:38 TheEbonyWarrior a écrit :
C'est la seule méthode que j'ai trouvé pour pouvoir me dire "bon, j'en ai finit avec ce chapitre, le prochain paragraphe sera pour le suivant"
Qui arrive... ?
Ce mois ci ?
Le 19 juin 2019 à 22:21:33 TheEbonyWarrior a écrit :
Ce mois ci ?
Donc les 10 prochains jours ?
Parfait !