Le départ d'Hideo Kojima aurait pu/dû sonner la fin de Metal Gear Solid, mais Konami en a décidé autrement. Désireux de revenir sur le devant de la scène vidéoludique, l'éditeur japonais dépoussière l'une de ses plus grandes gloires passées. 20 ans après sa sortie, le troisième épisode de la saga revient d'entre les morts sous la forme d'un remake. Metal Gear Solid Delta : Snake Eater sous Unreal Engine 5 peut-il surclasser son illustre aîné ? Et plus important encore, cette version modernisée en conserve-t-elle l'essence ? Voici mes impressions après 1h30 de jeu sur PlayStation 5.
Lors d'un événement estival organisé à Londres par Konami en amont de la gamescom 2024, la rédaction de JV a pu explorer Metal Gear Solid Delta : Snake Eater au cours d'une session de jeu d'une durée de 1 heure et 30 minutes.
Un remake (trop) timide
Konami ne cherche en rien à réinventer Metal Gear Solid 3 : Snake Eater avec son remake. 'Le projet a pour principale (et seule) ambition d'exposer des graphismes avant-gardistes et photo-réalistes. Et c’est une réussite. L’Unreal Engine 5 fait des merveilles et offre à Naked Snake des environnements criants de vérité au sein desquels se mouvoir. La végétation ainsi que la faune gagnent en crédibilité, ce qui participe grandement à l’immersion. Mais… car il y a un mais !
Les animations ne sont pas encore à la hauteur de la plus-value graphique. Tout est encore trop rigide, trop engoncé dans un gameplay daté avec pour résultat de rappeler l’expérience d'autrefois - aussi bien ses qualités que ses défauts - avec insistance. Certains en seront ravis, mais ce n’est pas mon cas. Metal Gear Solid 3 mérite le meilleur et cela passe par une refonte totale, aussi bien visuelle que ludique. L’éditeur japonais s’avère frileux sur ce point, mais a tout de même fait plusieurs concessions afin de garantir de bonnes conditions de jeu.
Metal Gear Solid Delta : Snake Eater rafraîchit le gameplay de Metal Gear Solid 3 : Subsistence en permettant principalement de viser sans passer à la première personne ainsi que de marcher accroupi. Cela facilite grandement les phases d’infiltration et de combat tout en préservant autant que possible la jouabilité d'origine. Il est même possible pour les puristes de revenir à un style classique plus proche de celui sur PlayStation 2. De plus, alterner entre les différents camouflages est bien plus facile qu’auparavant. Pour le reste, c’est stricto sensu la même chose. Et c'est là que le bât blesse.
La principale force de ce remake, celle mise en avant depuis son officialisation, réside dans ses visuels léchés, que ce soit en jeu ou durant les cinématiques, et son sound design immersif. Konami n’a pas fait les choses à moitié sur ces points avec en ligne de mire les personnages qui gagnent encore en charisme. C’est tout bonnement incroyable de (re)découvrir des scènes passées à la postérité avec des graphismes et des voix dignes des standards actuels. Snake Eater devient ainsi plus cinématographique que jamais, malgré une mise en scène pouvant paraître « old school » en 2024. Hideo Kojima n’avait pas son pareil pour concevoir des instants « over the top » et MGS3 en était et en est toujours la quintessence.
Une œuvre « intouchable »
Je suis un fan de Metal Gear Solid 3 : Snake Eater, mais je ne peux me voiler la face plus longtemps. Aussi légendaire soit ce jeu vidéo né de l’imagination d’Hideo Kojima, il accuse deux décennies après sa sortie initiale le poids des années. Même ses idées les plus en avance sur leur temps ne peuvent rivaliser avec les productions contemporaines. Et il en va de même pour les zones semi-ouvertes bien trop petites qui limitent le potentiel des mécaniques de survie et d’infiltration. Le créateur japonais rêvait d’un open world pour MGS 3… il faudra attendre Metal Gear Solid V : Phantom Pain pour assister à la concrétisation de ce rêve.
Même l’infiltration, qui est pourtant la clé de voûte de l’expérience, peine à faire bonne impression aujourd’hui. L’intelligence artificielle qui donne vie aux antagonistes ne représente aucun danger pour Snake, même dans les niveaux de difficulté les plus élevés, et va (parfois) à l’encontre de toute logique. Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres des problèmes rencontrés sur ce remake qui souffre de la comparaison avec MGS 4 : Guns of the Patriots (2008) et surtout Metal Gear Solid V : The Panthom Pain (2015). Konami aurait pu reprendre l’ossature et le gameplay du cinquième épisode et y intégrer l’histoire et la mise en scène de MGS 3. Il en va autrement. Les conséquences d’un tel conservatisme né d’un profond respect pour Hideo Kojima sautent d'autant plus aux yeux en 2024.
Konami cherche à réaliser l’impossible avec ce remake de Metal Gear Solid 3 : moderniser une œuvre culte du 10e Art en l'altérant le moins possible. Il en résulte une version Delta qui peine à exister en 2024. Au-delà de ses prouesses visuelles, ce remake ne propose rien (ou presque) de neuf et ne brusque jamais la création d’Hideo Kojima par peur de s’attirer les foudres des fans. La frustration est à son paroxysme pour tous ceux ayant espéré un remake total et non une « simple » refonte graphique.