Les stars du cinéma ne sont plus assez mises en avant d'après certains acteurs de l'industrie.
Les "monstres sacrés" de Hollywood sont-ils morts ? C'est ce que semblent penser certaines personnes du milieu, comme le rapporte un article de Variety.
Les "monstres sacrés" ... bientôt les "monstres canonisés" ?
Le Festival de Cannes a été l'occasion de s'en rendre compte : les acteurs les plus "bankables" sont de plus en plus âgés ... La tête qu'on voit le plus en ce moment est celle de Harrison Ford, pour le cinquième opus d'une saga lancée dans les années 1980, Indiana Jones et le Cadran de la destinée. Ces derniers jours, le Festival a mis en avant des films mettant à l'honneur des acteurs bien connus : Breakout, avec Arnold Schwarzenegger, 75 ans ; Lords of War avec Nicolas Cage, 59 ans ; That's Amore, avec John Travolta, 69 ans ; The Rivals of Amziah King, avec Matthew McConaughey, 53 ans ... Cette année, on retrouvera aussi Expendables 4 au cinéma, avec pour tête d'affiche ... Sylvester Stallone, 76 ans ! On reproche souvent au cinéma (comme aux jeux vidéo) de constamment faire durer des sagas, produire des remakes, etc ... Mais on ne peut pas dire que les castings se renouvellent plus que les scénarios et les franchises !
La fin du format physique a-t-il signé la fin des idoles ?
Variety interroge George Hamilton, Chief Commercial Officer de Protagonist Pictures, pour savoir ce qui a créé cette situation où les acteurs starifiés récemment semblent être moins populaires, ou en tout cas moins "bankables" pour les sociétés de production. D'après lui, tout a basculé lorsque le format physique est mort. En effet, les VHS et les DVD étaient des objets distribués à très grande échelle, qui permettaient non-seulement à une très large partie du public de partager les mêmes références, mais aussi de mettre un visage sur les films. Cela a changé avec l'arrivée du streaming ...
Presque tous les acteurs et actrices qui sont bankables aujourd'hui, étaient à l'affiche de films à grand succès alors que le DVD et la vidéo étaient encore une force énorme. Vous pourriez voir cela comme la ligne de démarcation du changement entre la génération plus ancienne et la plus récente. Avec la nouvelle génération, il y a plus de divisions entre les succès car vous pourriez être à l'affiche de la série ou le film le plus regardé sur une plateforme de streaming, mais il peut y avoir toute une partie de la société qui n'y est pas abonnée, et ils ne prennent pas part à ce succès.
Le changement à Hollywood, c'est qu'au lieu de miser sur des acteurs et des actrices, on a commencé à miser avant tout sur la franchise. C'est le cas par exemple pour Twilight, une propriété intellectuelle qui est arrivée au cinéma en 2008, à l'époque où le format physique commençait à s'effondrer. Certes, Kristen Stewart et Robert Pattinson ont énormément été mis en avant à l'époque, mais ils n'ont jamais acquis le statut que Harrison Ford a pu avoir après Star Wars, par exemple. Aaron Kaufman, réalisateur et producteur qui a travaillé avec des membres du casting et de la production de Twilight, explique :
De toute évidence, la star c'était l'IP Twilight. Le passage à la promotion de la propriété intellectuelle plutôt que la promotion des stars peut avoir semblé être une bonne idée car la propriété intellectuelle ne fait pas d'overdose ou ne tweete pas sur les Nazis. Cependant, ce changement a laissé un grand vide en ce qui concerne les stars de la prochaine génération. C'est un problème maintenant que les IP en stock ont toutes été raflées, et que tout ce qui reste est Tube-Sock Man ou quoi que ce soit que Marvel n'a pas encore produit.
Marvel, Twilight, Harry Potter ... Les contrats sur plusieurs films ont tué les stars ?
Un agent de l'industrie interrogé par Variety semble aussi penser que les contrats à long-terme de certaines franchises ont amplifié ce phénomène. Tom Holland, Chris Hemsworth et leurs compères des films Marvel Studios ont souvent signé des contrats sur plusieurs films, qui les "enferment" un peu dans des rôles. Ils ont évidemment joué dans d'autres films pendant et depuis, mais jamais avec un tel impact sur le public. Après Hunger Games, Jennifer Lawrence avait eu du mal à être constante au box-office, notamment parce que les investisseurs avaient toujours des doutes sur son aspect "bankable". On pourrait dire la même chose du fameux trio de Harry Potter déjà à l'époque, Daniel Radcliffe, Emma Watson, Rupert Grint.
D'après cet agent, les plateformes de streaming n'arriveront jamais à starifier un acteur ou une actrice comme le faisait Hollywood auparavant. Leur impact est trop "limité", par rapport aux sorties cinéma.
Nous avions l'habitude de traiter nos stars de cinéma comme des dieux. Mais la promotion de ces films en streaming est tellement limitée qu'elle ne crée pas vraiment de stars. Les acteurs ne sont plus gravés dans l'esprit du public comme ils l'étaient autrefois, et ils n'ont plus cette image presque intouchable.
Ce dernier point est vrai dans quasi tous les domaines du divertissement. Les "stars" sont de plus en plus banalisées avec les réseaux sociaux, et il y a beaucoup moins de distance avec le public. On se rend bien plus compte qu'ils ne sont "qu'humains" comme monsieur et madame Tout-Le-Monde. Des scandales comme l'affaire Weinstein et les dénonciations d'acteurs qui ont suivi lors du mouvement #MeToo l'ont bien rappelé au public : cette industrie est faite d'êtres humains qui ont des défauts, et on ne peut plus les voir comme des "monstres sacrés". Cela signifie-t-il que c'est la fin des stars de cinéma telles qu'on les a connues ? Harrison Ford et sa génération seront-ils les derniers d'un genre ?
Indiana Jones 5 sort dans les salles le 28 juin.