J'l'adore c't'orc, j'sais pas pourquoi.. l'Altmer aussi tiens. XD je pense relire la fic depuis le début
Soit indulgent alors, en me relisant sur certains chapitres du début je remarque des maladresses par milliers
Et c'est pas comme si c'était bientôt fini non plus, j'ai même pas encore révélé les antagonistes
Mais ca vient. Très, très prochainement
Plus ca dure, mieux c'est ! ^^
Je viens de tout lire, excellente fic, le dernier chapitre est juste épique
Hâte de voir la rencontre entre Renji surcheaté et le bandit transformé en goule
Sinon ça fait longtemps qu'on a plus de nouvelle de autres personnages
Merci pour le compliment, comme d'habitude
Bon, je vous cache pas que niveau combat ca va être assez limité pour le prochain chapitre
Je vais pas griller toutes mes cartes au chapitre 50 quand même
Oh t'sais y en a qui s'arrêtent au châpitre 5 alors
Chapitre plus long que prévu, la taille sera proportionnelle au temps que je met pour l'écrire rassurez vous
Alors esperons que tu écrive jusqi'a lundi prochain *prie*
Nan j'dec, J'VEUX LA SWEET !!!
Chapitre en cours de finalisation, ce soir ou demain.
Yipiiiii
sweet?
Chapitre bien long en approche, j'aurais peut-être pas le temps de le finaliser ce soir mais il sera fin prêt mardi dans le pire des cas (pour de vrai cette fois).
Yupiiiii (bis)
up
T'avais pas dit fin mardi ?
On est encore mardi hein
Sauf que demain j'me lève a 6h donc j'veux pas m'endormir a 00h
Bah tant pis, tu liras après les cours
On ne rigole pas avec les cours
EDIT : Sauf si tu attends encore 10 minutes
Chapitre 50
Rigel fut tiré de l'inconscience par la désagréable sensation d'être observé. Immédiatement, il sentit la terre enneigée sous son corps, ainsi que le souffle glacial du vent lui fouettant le visage. Alors même qu'il ouvrait les yeux, découvrant un ciel d'après-midi couvert et ombragé, il se souvint d'où il se trouvait. Le bréton releva la tête, sonné, tout en contemplant les piles de cadavres qui l'entouraient. Ce devait être la troisième fois qu'il se réveillait, pour s'évanouir presque aussitôt, terrassé par une fatigue innommable.
Mais cette fois-ci, il sentait avoir la force de se lever, ce qu'il parvint à faire au prix de quelques secondes d'efforts douloureux. Des dizaines, non, des centaines de corps jonchaient la neige rougie, à perte de vue. Où que le Héraut pose son regard, il ne trouvait que la mort. La mort, et cette étrange sensation d'impuissance.
Il fit quelques pas, hagard, titubant, le souffle court. Son corps était froid comme un bloc de pierre. Depuis combien de temps était-il allongé ici ? Sans doute plusieurs heures. Il se retourna, alerté par un raclement de gorge. Derrière lui, assit sur un rocher miraculeusement épargné par les cadavres, Farengar le contemplait avec intérêt, comme on observe un animal en cage.
- Bon retour parmi nous, fit-il avec un vague hochement de tête à son égard.
Rigel voulut répondre, mais sa gorge se serra violemment, étouffant ses paroles. Il avait soif.
Le mage haussa les épaules et lui tendit sa sacoche. Le bréton la saisit, les mains tremblantes, et y plongea son avant-bras, pour en ressortir une outre en peau. Il la vida d'un trait, et s'essuyait maladroitement la bouche, tout en sentant un liquide épais diffuser une douce chaleur dans son corps.
- Ca vous rendra quelques forces, au moins, reprit l'érudit. Nos reserves d'eau sont contaminées par les corps, alors c'est tout ce que j'ai pu trouver. Qui l'eût crû ? Un élixir inestimable, dispensé aux survivants comme s'il ne valait rien... Nous vivons des temps bien étranges, décidément.
Le nordique observa un instant une tâche de sang ayant imbibée la manche de sa toge, et l'essuya du bout des doigts. Voyant le Héraut jeter des regard inquiets aux alentours, il reprit :
- Inutile de chercher. Vous êtes le dernier.
- Pardon ? fit le bréton d'une voix éraillée.
- Les survivants sont en ville, en sécurité. Enfin, si l'on excepte le fait que la moitié d'entre eux risquent de succomber faute de guérisseurs compétents. Il n'y a plus que des cadavres ici, mais je me suis dit qu'il valait mieux que vous vous en assuriez par vous-même. Après tout, vous êtes le meneur des troupes, alors il n'y a rien de surprenant à ce que vous cherchiez tel ou tel soldat pendant des heures, j'imagine. Vous allez le faire, n'est-ce pas ?
Le guerrier secoua hâtivement la tête en signe de négation. Il ne voulait pas passer un seul instant de plus dans cet endroit répugnant.
- Surprenant, ma foi. Sur ce, je vous laisse rentrer, vous connaissez le chemin. Je m'occupe du reste.
- Que... Que voulez-vous dire ?
- Brûler les corps, disperser les cendres, ce genre de choses. Je suis capable de résister à presque n'importe quelle maladie, mais je préfèrerais éviter que les habitants ne périssent par centaines à cause de je-ne-sais-quelle épidémie.
Sans un mot de plus, Rigel s'éloigna, le regard vide. Les morts demeuraient immobiles sur son passage, mais il avait presque l'impression de pouvoir sentir leur regards le suivre en silence. Il avait le sentiment que chaque instant, les défunts se rapprochaient un peu plus autour de lui, comme pour arracher la vie, cette vie qu'il avait conservé, et que tant d'autres avaient perdu en le protégeant.
Au bout d'une centaine de mètres, il s'arrêta, en se rendant compte qu'il était en train de s'éloigner de Blancherive. Il observa hébété les environs, sans comprendre, et fit demi-tour. Il revint rapidement à l'endroit où il s'était réveillé, là ou l'érudit, accroupi, entamait sa tâche macabre. Le bréton poursuivit sa route. Il ne pensait plus à rien. Ou du moins, il avait trop de choses en tête pour pouvoir se concentrer plus de quelques secondes. Son esprit divaguait lentement, inlassablement entraîné vers les visions d'horreur encores fraîches dans sa mémoire. Sans même y prêter attention, il entra en ville, et passa les portes, fiévreux.
Les premiers cadavres ne le surprirent pas. S'il avait été membre de la Main d'Argent, lui aussi aurait sans doute ravagé la ville afin d'occuper les défenseurs, quitte à massacrer quelques innocents par pur amusement. La folie humaine ne l'étonnait même plus. Plus maintenant qu'il avait entrevu cette chose.
Renji. Comment était-ce arrivé ? Peu importait, tout compte fait. Il aurait dû le tuer lorsqu'il en avait eu l'occasion. Oui, au lieu de faire de stupides paris avec Titus, il aurait dû ôter la vie de la recrue, avant que tout ceci ne se produise. Du moins essayait-il de s'en persuader, tout en avançant à travers la cité ravagée.
Il était doucement en train de reprendre des forces, lorsqu'il déboucha sur la place du marché. Dans de grands chariots, plusieurs piles de défunts étaient entassées à la va-vite. Sans seulement réfléchir à ce qu'il faisait, le guerrier s'approcha des corps, et les fit chuter méticuleusement, les uns après les autres. Ceux qui les avaient empilé ainsi ne savait pas s'y prendre. Lui, il savait. On lui avait appris, chez les Sombrages, à positionner les corps de manière à en faire rentrer un maximum dans chaque charette. Mais cette fois, ils s'y étaient mal prit. Ce n'était pas difficile, pourtant. Un dessus, un dessous, un dessus, un dessous, un dessus... L'un après l'autre, il les remettait en ordre, l'un avec les pieds en avant, l'autre avec la tête coincée entre les jambes du précédent. Il devait faire vite. Son père serait furieux s'il apprenait que les corps de ses hommes tombaient au milieu de la route, tout ca parce que ces abrutis ne savaient pas comment les faire tenir droit.
Non. Son père était mort. Qui donc l'avait tué, déjà ? Renji, probablement. Oui, cela expliquait pourquoi il lui vouait une telle haine. À moins que... Titus ? Non, Titus était l'Empereur. L'Empereur était mort assassiné, lui aussi. Était-il donc le fils de l'Empereur ? Non, non. Son nom de famille à lui commençait par un S. Cela commençait par une lettre simple. S, comme Septim, mais en plus long. Plus long que Shazam, aussi.
Cela n'avait plus d'importance. Il devait empiler les cadavres avant d'écoper d'un tour de garde supplémentaire. Seulement...
Shazam...? Qui était-il, celui-là ? Son père, peut-être. Ou peut-être pas. Il ne savait plus. Pourtant, il voyait bien à quoi ressemblait son visage. Un vampire, avec de grands yeux oranges. Un vampire, comme ceux que la Main de l'Aube poursuivait. La Main de l'Aube ? Ou bien la Main de Stendarr ? Peu importait, il avait oublié aussi. Mais si son père était un rougegarde, qui était sa mère ? Aela. Il se souvenait d'elle. Une grande nordique, avec de la peinture sur le visage. Comment était-elle morte, celle-là ? Une flèche dans le genoux. Comme Renji ? Oui, comme Renji.
Renji... Ce nom lui disait quelque chose... Oui, il se souvenait, maintenant. Il se souvenait...
Rigel hurla. Un long hurlement, chaotique, douloureux et plein de rage, qui déchira le silence de longues secondes durant. Tout lui était revenu, avec une violence sans pareille. Son père. Sa mère. Son frère. La Main d'Argent. Les Compagnons. L'opération. La contre-attaque. Titus, Oka, Zede-Tei, Vilkas, Njada, Sheik, Neverar, Athis, Torvar, Rurick, Zede-Tei, Ja'Hiza, Fjoll, Nemira... Renji.
Le Héraut s'effondra, le front couvert de sueur et le cœur bondissant avec furie dans sa poitrine, tel un oiseau tentant de briser les barreaux de sa cage. Tout se mit à tourner avec véhémence autour de lui, le forçant à se recroqueviller sur le côté pour ne pas défaillir. La ville avait été attaquée pendant son absence. Il ne l'avait même pas remarqué, trop occuper à sauver sa misérable vie d'un combat perdu d'avance. Il avait tout perdu. Honneur, bataille et camarades. Disparus. À jamais.
Le Héraut s'évanouit soudain. Son corps froid et tremblant s'écrasa contre les pavés avec un bruit sourd. Puis ce fut le néant.
Cette fois-ci, il dormit plusieurs heures d'affilée. Lorsqu'il reprit connaissance, une douce chaleur baignait les contours de son visage. La sensation du sol froid et inhospitalier fut remplacée par celle d'un confortable matelas, sur lequel il se retrouvait allongé. Il cligna des yeux trois fois, aveuglé par la lumière d'une lanterne, puis les ouvrit complètement. Les contours flous de sa vision révélèrent bientôt les allers-retours d'un jeune paysan transportant quelque chose à bout de bras. Le bréton gémit. En portant la main à sa tête, il y sentit un linge mouillé, qu'il retira d'un geste épuisé. Quelqu'un sembla remarquer son réveil, puisqu'une main se posa presque immédiatement sur son épaule.
Le jeune fermier réapparu, une bassine d'eau dans les bras, et lui jeta un regard inquiet avant de se tourner tout à fait vers lui. Rigel n'entendait pas grand-chose, les tympans bourdonnants, mais il devina aux mouvements de ses lèvres la présence d'un autre individu, dans son dos. La sensation de la main posée sur son épaule disparut, et quelqu'un s'assit au bord de la couchette. Le Héraut observa pendant près d'une minute cette tenue grise, ce visage pâle et cette chevelure brun foncé, qui se précisèrent peu à peu, laissant apparaître les traits familiers de Vilkas.
À la vue du nordique, le Héraut laissa échapper un soupir de gratitude. Il avait les traits tirés et le visage soucieux, mais ne semblait pas blessé.
- Vous pouvez marcher ? fit ce dernier en articulant chaque syllabe pour que le bréton puisse le comprendre.
Il hocha la tête, et se redressa péniblement sur sa couche. Il reconnut le mobilier de sa propre chambre. Il se trouvait visiblement dans ses quartiers, au sous-sol de Jorrvaskr. Aidé par son camarade, il se leva, et fit quelques pas hésitants en direction de la porte. Lorsqu'il la dépassa, il découvrit une dizaine d'habitants disséminés le long du dortoir, visiblement tous occupés. Certains marchaient précipitamment, les bras chargés de compresses sanglantes, tandis que d'autres restaient assis par terre à reserrer leurs bandages, le visage figé en une mine inexpressive.
- Les soldats blessés ont été placés dans les quartiers de nos hommes, l'informa Vilkas. Les autres sont au temple, en attente de soins plus importants.
La voix du nordique lui parvint finalement, étouffée, comme venant de très loin. Brusquement, ses oreilles cessèrent de siffler, et il recouvra l'ouïe. Tout de suite, divers gémissements lui parvinrent depuis des chambres, à moitié couverts par les ordres fusant ici et là. Quelques prêtres en toge jaune orangée se tenaient dans les dortoirs, donnant diverses indications à leurs assistants de fortune.
Les deux hommes atteignirent les escaliers. Une marche après l'autre, ils montèrent jusqu'au hall, et s'arrêtèrent devant la table de banquet.
Rigel se retrouva nez-à-nez avec ses troupes. Ou plutôt ce qu'il en restait. Une quinzaine d'hommes au visages sombres, aux corps couverts de bandages et de bleus. Et aucun bruit. Le bréton crû tout d'abord être devenu sourd de nouveau. Mais le bruit de sa propre respiration le fixa : c'était bien le silence de ses soldats qui accueillait son retour à la vie.
D'un regard sur sa droite, il aperçu avec stupeur le ciel nocturne, ainsi que la silhouette torsadée du Vermidor, sur la place. Une brèche, un trou immense se trouvait là ou les portes de Jorrvaskr auraient dû se situer. Le bois de l'édifice semblait avoir explosé, faisant pencher l'ensemble de la structure. Les piliers semblaient maintenant ployer sous la masse du toit, comme écrasés par le poids de la défaite des Compagnons.
S'avançant, cette fois sans l'aide de Vilkas, Rigel sortit du bâtiment, et contempla la ville en ruines. Les maisons aux murs effondrés et aux carreaux brisés semblaient s'étendre à l'infini, mais ce fut autre chose qui retint son attention. La statue de Talos, effondrée, avait été remplacée par un immense bûcher funéraire.
Et, brusquement, il eût honte. Terriblement honte. Devant cette immense étendue de mort et de dévastation, devant ces centaines de corps brûlant, entassés, dévorés par les flammes, le poids des remords le frappa, avec la puissance d'un ouragan. Il se plia en deux, incapable de respirer, terrassé par la portée de ses propres décisions. Tout ceci était son oeuvre. Non pas l'oeuvre d'un chef. Non pas l'oeuvre d'un Compagnon exemplaire. Mais l'oeuvre d'un meneur indigne, jouant avec la vie de ses hommes tel un enfant avec celle des fourmis. Il portait la responsabilité de chacune de ces victimes, il portait le deuil impossible de chacune de ces familles effondrées. Car tout était de sa faute.
- Quelqu'un au temple a besoin de te parler de toute urgence, dit Vilkas à ses côtés.
Le Héraut, tiré de sa torpeur, se tourna vers son acolyte, le visage déformé par une profonde tristesse. Il inspira longuement pour récupérer ses moyens, hocha brièvement la tete, et se dirigea d'un pas lent vers son objectif. Sans un coup d'oeil aux femmes et aux enfants pleurant leurs disparus au combat, il dépassa le brasier, dont les langues enflammées s'élevaient en même temps que leurs plaintes déchirantes. Il n'avait pas la force de soutenir ces regards désespérés. Il n'avait rien à leur offrir. Bien vite, la lueur du feu se perdit entre les bâtiments, plongeant le bréton dans un noir presque total.
La ville était devenue plus que sinistre. Aucune lumière, aucun bruit, nulle part. Les torches disposées contre les murs s'étaient éteintes depuis longtemps, et personne n'avait prit la peine de les rallumer. Ainsi, sous l'éclat violacé de Masser, sous un ciel sans étoiles, Blancherive ressemblait plus que jamais à une ville fantôme. Une ville morte... Rigel frissona. Peut-être n'était-ce pas si loin de la réalité, après tout.
Il pénétra dans le temple de Kynareth, bien décidé à en finir. L'intérieur d'ordinaire lumineux était plongé dans la pénombre, d'autant plus que le bâtiment était d'habitude fermé la nuit. De l'unique vitrail au plafond filtrait une faible lumière rouge se répercutant avec une intensité macabre sur chacune des couchettes de pierre. Quelques bougies avaient été placées aux angles de la pièce, éclairant très faiblement les corps engourdis des blessés les plus graves.
Jusque-là adossé à côté de la porte, Vignar sortit de l'ombre et s'approcha du combattant, qui sursauta en se retournant. Les visages graves de chacun des deux hommes restèrent un long moment face-à-face, exprimant par leur immobilité plus qu'un long discours n'aurait sû le faire. Le Grisetoison prit finalement la parole, de la voix éteinte d'un homme n'ayant pas dormi depuis plusieurs jours.
- Heureux de te voir sain et sauf, Rigel.
- Moi de même, mon ami. Je suppose que c'est vous qui avez demandé à me voir ?
- Oui. Je dois vous prévenir. Ceux qui nous ont attaqué... Je crains qu'ils ne reviennent, tôt ou tard. Quelque chose ne va pas. Un simple groupe de bandits n'aurait jamais agi de la sorte. Cette chose... lorsqu'elle est entrée dans Jorrvaskr, elle a...
Le Héraut remarqua alors les bandages couvrant le torse du vieil homme.
- Vous... Vous avez été blessé ?
- Rien de grave, heureusement. J'ai juste été projeté contre un mur lorsque cela s'est produit. Vous... Vous n'avez pas idée de l'horreur que nous avons combattu. Affronter des hommes avec courage ne demande qu'un peu de volonté, mais cette abomination... C'est au-delà de nos compétences, simplement. Même les Compagnons ont des limites.
- Dites m'en plus, fit le bréton, intrigué malgré un sentiment croissant de malaise.
- Je préfère faire une croix sur cet événement, si vous le voulez bien. Les années qu'il me reste sont comptées, et j'espère pouvoir les passer en paix, loin des combats. Je pense qu'il est temps pour moi de rendre mon tablier.
- Naturellement, s'excusa le bréton. Pardonnez-moi de vous embêter avec cela, Farengar pourra sûrement m'en dire plus. Et... Je suis désolé que vous quittiez les Compagnons en de telles circonstances. J'aurai aimé que les choses ne se passent différemment.
- Suivez-moi, demanda alors le vieux nordique en se retournant.
Rigel obtempéra. Ils firent quelques mètres en longeant le mur de gauche, et s'arrêtèrent devant un drap blanc, soulevé à intervalles réguliers par la respiration du blessé se trouvant en dessous. Vignar retira le linge, révélant le visage de Zede-Tei. La peau de l'argonien était pâle, exangues, vidée de sa substance. Son torse était couvert de marques rouges, et certaines écailles manquaient. Le combattant était dans un sale état. Mais il était en vie.
Vignar reprit, une fois le Héraut soulagé de ses craintes :
- Il s'en sortira, nul besoin de s'inquiéter. Je voulais juste que tu le saches hors de danger. Vu que seul les soigneurs et les assistants sont normalement autorisés à venir ici, Oka n'a pas pu venir prendre de ses nouvelles. Il sera sûrement heureux d'apprendre que son frère est tiré d'affaire.
- Je le pense aussi. Autre chose ?
Le vieillard secoua la tête et avança lentement jusqu'à une couchette, sur laquelle il s'étendit.
- Je vais passer la nuit ici, et essayer de trouver un peu de sommeil. Bonne chance pour la suite, mon ami. Et... Toutes mes condoléances.
Rigel se figea sur place, et resta immobile pendant plusieurs secondes. Que signifiaient ces paroles ? Ils avaient tous perdu des proches durant cette bataille, alors pourquoi cette phrase, pourquoi maintenant ? Soudain, un visage lui apparut en tête. Non. Ce n'était pas possible. Le Héraut se tourna vers la porte, et s'y précipita, avant de l'ouvrir d'un violent coup d'épaule.
- Où est-il ? fit le bréton d'une voix impérieuse.
- Que...? bégaya le nordique, prit au dépourvu.
- Où est le corps de Titus, Vignar ? OÙ EST-IL !!?
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m.youtube.com/watch?v=FiH06V4dMSk
Rigel arriva sur la place, le souffle court. Devant lui, le brasier s'élevait, innondant les alentours d'une chaleur insoutenable. Mais il poursuivit, l'image de son mentor en tête. En s'approchant, il écarta avec empressement les habitants sur son chemin, et s'arrêta à environ cinq mètres de la fournaise. Il inspira longuement en tentant de garder son calme, comme il l'avait fait quelques minutes plus tôt, puis il s'y engouffra. Tout d'abord, il ne sentit pas grand-chose. Dressant une barrière magique pour se protéger, il grimaça néanmoins lorsque les poils de ses bras s'embrasèrent sous l'effet du souffle incandescent.
Le centre de la plateforme commençait tout juste à prendre feu. Il s'y précipita, et observa les cadavres lacérés se mettre à fumer. La dépouille de Titus était là, parmi les défunts condamnés à une disparition sans cérémonie. Il saisit quelques corps sans vie hors des flammes pour observer leurs visages carbonisés, mais toujours aucune trace du vieillard. Transi par la chaleur et la tournure dramatique que prenaient les événements, il avança parmi les flammes, jetant des regards frénétiques autour de lui. Rien, rien du tout. Il devait être par ici, il n'y avait pas d'autre option. Soudain, une douleur insoutenable remonta de sa main droite. Il observa les flammes gagner son avant-bras, et fut alors saisit par un désespoir sans bornes. Il ne retrouverait jamais Titus au milieu de ces centaines de cadavres. À moins de rester ici et de mourir avec lui. Sentant les flammes se repandre sur son corps tout entier, le bréton déglutit, serra les dents, mais fit finalement demi-tour. Il plongea hors du brasier, les vêtements et les cheveux en feu, la peau des bras déjà calcinée par la chaleur.
Vilkas, resté assis sur les marches en attendant son retour, réagit au quart de tour lorsqu'il vit le Héraut s'extirper de la fournaise. Saisissant un sceau de bandages trempés, il se précipita en direction d'un canal, et le remplit, avant de rejoindre le blessé. Au moment où il s'apprêtait à lui jeter le contenu de la bassine, le nordique s'arrêta avec stupeur. Les flammes s'étaient éteintes aussi vite qu'elles étaient apparues, soufflées par une force invisible. Rigel, s'avança, une expression glaciale sur le visage, et dépassa son subordonné, avant de disparaître à l'angle d'un bâtiment. Sur la place, tous les regards s'étaient tournés vers les deux hommes.
- Il n'y a rien à voir ici, annonça Vilkas suffisamment fort pour être entendu de tous. Circulez !
Sur ces paroles, le nordique jeta un coup d'oeil circulaire à la place. Rigel avait disparu. Vilkas secoua négligemment la tête, et emprunta le même chemin.
Il mit près de deux heures à retrouver sa trace. Dans l'obscurité, tous les bâtiments se ressemblaient, et se repérer devenait un véritable calvaire. Finalement, alors qu'il s'attendait à voir l'aube arriver d'un moment à l'autre, il trouva Rigel, à un endroit où il n'aurait jamais crû le voir un jour. Le bréton, qui n'avait jamais bu de toute sa vie, était à la Jument Pavoisée.
Lorsque Vilkas entra, il l'aperçut immédiatement, assit sur un tabouret et accoudé au comptoir, une choppe à la main. Ses cheveux chatains clairs étaient emmêlés, mal coiffés, et son armure de cuir avait fondu par endroits. La tunique qu'il portait en dessous semblait avoir brûlé, répandant de la cendre jusque sur ses mains à la peau noircie.
Vilkas s'approcha du bréton, intrigué.
- Rigel ?
L'intéressé ne répondit pas, absorbé par le mur situé en face de lui. Sur les planches, à côté d'une armoire défoncée, il y avait une petite tâche de sang. Ténue, sans doute à moitié effacée par un rapide coup de serviette, mais néanmoins visible. Quelqu'un avait sans doute perdu la vie, à cet endroit exact.
Le nordique vint bientôt s'asseoir à côté du Héraut.
- Je pensais que tu détestait les tavernes.
- La bière argonienne, répondit Rigel. Je n'avais jamais goûté. Ce n'est pas si mauvais, finalement.
L'homme se tut un instant, et reprit :
- Titus détestait la bière. Il ne buvait presque que du vin.
- Je sais bien. Il était terriblement difficile en matière de boisson. Avoir de l'ascendance impériale n'aide pas à apprécier l'hydromel, je suppose.
- Un jour, alors que je n'était qu'une recrue, il est venu me voir en plein entraînement. Aela et Farkas étaient encore en vie, à ce moment-là. Vous étiez partis tous les trois à cause d'une histoire de vampire près de Rivebois, je m'en rappelle encore. C'était il y a environ deux ans, je crois.
Le bréton remua sans conviction sa choppe, et en vida le contenu. Puis il se baissa, attrapa une bouteille au sol, et la remplit de nouveau.
- Je m'entraînait avec Athis, ce jour-là. Il faisait beau. Froid aussi, il me semble. Il était sortit de Jorrvaskr, et il nous avait regardé nous battre pendant quinze minutes. À l'époque, je ne faisait pas le poids contre le Dunmer, bien entendu. Quand j'ai déclaré forfait, le vieux est venu prendre ma place. Je me souviendrai de cela pour toujours.
- Rigel, il est trop tard pour avoir des regrets, dit Vilkas en posant la main sur son épaule.
- Il l'a écrasé. En deux coups, il l'a couché au sol. À peine cinq secondes, je n'avais jamais vu cela de toute ma vie. Puis il s'est tourné vers moi en souriant, et m'a dit : «Un jour, tu pourras faire cela, toi aussi».
Vilkas fronça les sourcils. Il croyait savoir où le bréton voulait en venir.
- Finalement, je n'y arrive toujours pas, fit Rigel avec un sourire peiné. Quoi que je fasse, aussi dur que je m'entraîne, je ne parvient pas à gagner aussi rapidement. Mais à l'époque... chaque matin, je me levait, dans l'espoir de battre ce record. Puis j'ai compris. J'ai saisit que je n'y parviendrait jamais. Mais j'ai continué à essayer, de toutes mes forces. Un jour, je lui ai dit que j'abandonnais.
Une larme coula silencieusement sur le visage du Héraut. Il repoussa maladroitement sa choppe, qui vint s'écraser contre le sol, répandant son contenu sur le plancher. Il se tourna vers Vilkas, qui eût un mouvement de recul devant son visage. Sa légère barbe avait brûlé, calcinant le bas de son menton et de ses joues.
- Quand je lui ai dit, il a juste souri. Il m'a dit que j'était prêt, et le soir même, nous nous retrouvions à la basse forge pour mon entrée au sein du Cercle.
Le nordique hocha la tête. Bien que ces pratiques aient cessé peu après, il ne pouvait s'empêcher de se sentir nostalgique, en souvenir des moments passés avec son frère aujourd'hui disparu.
- Je me demande... fit Rigel. Si je n'avait pas réalisé qu'Athis était trop fort pour moi, à ce moment-là... Si je m'étais obstiné, et que j'étais resté une simple recrue... Est-ce que nous serions là, aujourd'hui, assis à côté de leurs cadavres ?
- Rigel... Le temps des regrets est passé. Nous devons avancer, ou bien c'en sera finit de nous.
- Il ne le méritait pas, sanglota Rigel en serrant les poings. Il était le meilleur d'entre nous, et de loin. Et maintenant, il brûle avec les autres, loin de Jorrvaskr, loin des siens. Loin des honneurs qu'il aurait mérité. Et tout cela pour quoi ? Pour me protéger !? Comment suis-je censé supporter leur sacrifice, Vilkas !? Comment suis-je censé me persuader que cela en valait la peine !? RÉPONDS-MOI !!!
- Je...
- Non, tu ne sais pas ! hurla le Héraut, le visage baigné de larmes. Bien sûr que tu ne sais pas ! Tu n'as jamais porté la responsabilité de centaines de vies sur tes épaules ! Tu n'as jamais su ce que cela faisait, de se sentir responsable de l'avenir de ces enfants, qui grandiront sans leur père ! Tu ne sais pas ce que c'est, que de te dire que si tu était mort bien plus tôt, toutes ces vies n'auraient pas été gâchées par les actions irraisonnées que tu as commises en croyant faire le bien !
Rigel tomba à genoux, prit de convulsions. Vilkas se pencha, et posa la main sur son dos.
- Non, je ne sais pas. Tu as parfaitement raison. Je ne connais rien de tes souffrances. Mais moi aussi, je suis en colère ! Moi aussi, je veux pouvoir me venger, et trouver l'enfoiré qui est à l'origine de tout cela ! Seulement, si tu échoues, si ces gens au dehors voient que tu as abandonné, alors nous tomberons tous. Et tu n'auras plus rien pour te relever.
- C'est injuste... murmura le bréton d'une voix serrée. Pourquoi les dirigeants doivent-ils toujours se dissimuler aux yeux du monde ? Pourquoi devons-nous nous efforcer de sourire, pourquoi devons-nous persuader ces gens que nous allons pouvoir arranger les choses ? C'est injuste, Vilkas, tellement injuste...
Les deux camarades restèrent assis en silence jusqu'à l'aube, pleurant leurs disparus.