J'aimais bien le talon. Ça sonnait bien.
Le Rushrul n'est pas une mauvaise idée, mais il sonne moins bien.
Usul, tu aurais carrément dû définir la monnaie dans ton chapitre sans demander quoi que ce soit. C'est même plus dans le principe du topic.
Usul, tu aurais carrément dû définir la monnaie dans ton chapitre sans demander quoi que ce soit. C'est même plus dans le principe du topic.
J'ai d'abord voulu vérifier que je n'allais pas à l'encontre de la vision des deux principaux créateurs de la ville. Je suis d'accord, ma méthode semble avoir ses inconvénients.
Cela dit, débattre avant un chapitre d'un élément de l'histoire est tout autant dans l'esprit du topic, voire même plus que de le définir seul dans son coin. C'est ce que tu dis toujours.
En toute mauvaise foi.
« Bonjour bonjour, bienvenue au marché d'Osorineth !
— Bonjour ! Je vous prendrai une pomme !
— Bien Monain ! Ça vous fera trois globiboulgas de cuivre.
– Les voilà, bonne journée. »
C'est évidemment canon, comme d'habitude.
Bravo, j'hésite maintenant entre osefs et globiboulgas.
On ne s'en sortira pas, c'est une question trop compliquée.
Plus sérieusement, après avoir longuement médité, la monnaie d'Obseroche s'appellera le rush. (Prononcer "rouch")
Avec 200 rush d'or = 1000 rush d'argent = 10 000 rush de cuivre = un lingot d'obsichalque = 40 poules = 27,34 dindes bien dodues.
(Je suis pas trop sûr de la cohérence de ça, quelqu'un a le numéro d'un économiste qu'il nous aide ?)
Le talon c'est joli mais pas dans le thème. Voilà.
Usul a écrit :
Cela dit, débattre avant un chapitre d'un élément de l'histoire est tout autant dans l'esprit du topic, voire même plus que de le définir seul dans son coin. C'est ce que tu dis toujours.
C'est le principe : le tout est basé sur la bonne volonté des participants, aussi bien dans le cas où l'on décide d'apporter un nouvel élément que dans celui où l'on voit un élément tiers apporté à une entité apparue dans nos écrits.
Kait a écrit :
(Je suis pas trop sûr de la cohérence de ça, quelqu'un a le numéro d'un économiste qu'il nous aide ?)
Je suis 40% économiste.
Osrast fit machinalement tourner le Nabila d'or qu'il tenait entre ses doigts. La monnaie officielle d'Obseroche et de Lamarcande comprenait deux sous-divisions : le Nabila de billon et le Nabila de bronze. L'économie de la ville fluctuant légèrement, la valeur des pièces était fixée à chaque début de journée en fonction de la valeur que l'Obsichalque avait atteint par rapport à l'or à l'issue de la journée précédente.
"Cela n'a absolument rien à voir avec quoi que ce soit, mais je suis diabolique. " se satisfit le maître vampire.
Trop tard, tout ceci est 100% canonique. <spoil> </spoil>
Avec 200 rush d'or = 1000 rush d'argent = 10 000 rush de cuivre = un lingot d'obsichalque = 40 poules = 27,34 dindes bien dodues.
Donc en gros ce qu'a dit Cody?
Pourquoi pas le talent ? Imaginez les scènes qu'on ferait.
- Osrast est une véritable hyène. Vous savez ce que c'est une hyène ? Osrast est pareil, et en plus il est bourré de talent.
- Ah c'est sûr qu'il est doué.
- Non, le talent c'est la monnaie d'Obseroche, et il est riche.
- A Cornedebouc ce ne sont pas forcément les plus talentueux qui sont les plus riches.
Donc en gros ce qu'a dit Cody?
Je ne crois pas l'avoir contredit sur la deuxième échelle proposée.
Talon pas dans le thème
C'est dans le thème si on décide que ça l'est, remarque.
Je suis 40% économiste.
Maintenant j'ai la rèf !
Donc en gros ce qu'a dit Cody?
Oui, mais en reformulé pour que ça donne l'impression que c'est Kait qui a eu l'idée.
Tu remarqueras qu'en partant du bas de l'échelle, ma formulation est plus facilement compréhensible. C'est plus simple de faire logiquement des multiplications que des divisions quand c'est pas des multiples de dix.
- Osrast est une véritable hyène. Vous savez ce que c'est une hyène ? Osrast est pareil, et en plus il est bourré de talent.
- Ah c'est sûr qu'il est doué.
- Non, le talent c'est la monnaie d'Obseroche, et il est riche.
- A Cornedebouc ce ne sont pas forcément les plus talentueux qui sont les plus riches.
Mais suicide-toi en fait.
- Osrast est une véritable hyène. Vous savez ce que c'est une hyène ? Osrast est pareil, et en plus il est bourré de talent.
- Ah c'est sûr qu'il est doué.
- Non, le talent c'est la monnaie d'Obseroche, et il est riche.
- A Cornedebouc ce ne sont pas forcément les plus talentueux qui sont les plus riches.
Encore une occasion de manquée. C'est bien mieux que le rush.
Sinon, pour Kait qui jugeait que les débats s'étendant sur plusieurs pages étaient uniquement ceux où il se faisait insulter : voici trois pages de discussion sur cette monnaie.
Mais... Je reprends et confirme l'échelle de Cody pour être sympa et je me fais quand même engueuler.
Gnagnengnana rush nul gnagagna
Oh pis je vous emmerde tous, hein.
... Usul, qu'elle est la monnaie de la Roue d'Argent ? Oh, vu qu'un autre forumeur (lolmax je crois) y a aussi un perso tu vois avec lui hein.
Mais... Je reprends et confirme l'échelle de Cody pour être sympa et je me fais quand même engueuler.
Gentiment et sans grand sérieux pour ma part (et uniquement parce que tu disais clairement ne pas vouloir en trouver ni laisser Cody le faire alors que c'était à peu près le seul élément qui me manquait pour terminer mon chapitre).
Oh, vu qu'un autre forumeur (lolmax je crois) y a aussi un perso tu vois avec lui hein.
Assassincreeps et Durhin avaient annoncé leur volonté d'en faire un, mais aucun des deux n'ayant fait un chapitre introduisant leurs persos, je ne suis pas sûr qu'on puisse les considérer comme intégrés à l'histoire.
Si c'est le cas je me servirais avec plaisir de Wanienn, c'était un personnage prometteur.
Hé, sachant que j'ai plus de personnages à Obseroche que Kait.
Mais c'est bon, c'est le rush et n'en parlons plus. C'est pas comme si c'était le plus important sur la ville, tant qu'on peut s'entendre sur le reste ça va.
Tant qu'on rajoute pas plus de bœuf à couille...
C'est trop tard pour ça je crois. D'ailleurs, le prochain personnage que je vais introduire est un homme-bœuf dont les parents sont morts pendant les guerres de religions d'Obseroches.
Hé, mine de rien ça pourrait être intéressant.
La respiration de Ker était le seul bruit perturbant la clarté impassible de la nuit. Accroupi à la lisière d'une forêt que la faible lueur de la lune ne suffisait à révéler, il observait une série d'empreintes laissées dans le sol meuble par une dizaines de bêtes. Dans ces conditions d'éclairage et son état de fatigue, il hésitait à se prononcer sur leur origine. Des loups, peut-être, se dit-il. Ou des chiens. Un sourire las étira le visage du nain : il ne craignait rien des loups, ils n'étaient que les moindres prédateurs d'une région qui en comptait de bien plus terribles. Comme rendant écho à ses pensées, un hurlement lointain se fit entendre. Ils chassent, les prédateurs de la nuit. Moi aussi.
Assuré de l'absence de danger immédiat, il se releva et observa les alentours. Il se trouvait tout proche de la première forêt qu'il traversait depuis qu'il avait quitté les montagnes de Lamegdoth. Son chemin l'avait mené à travers des collines interminables où éviter les patrouilles gobelines avaient été un jeu mortel qu'il avait tant bien que mal maîtrisé, et il avait continué vers le nord jusqu'à atteindre les terres elfes et leurs forêts immenses. A présent, il était sur le point de franchir ce qui constituait autrefois la frontière entre la Roue d'Argent et son voisin du nord. Bien qu'il ne partage pas l'affinité étrange que la race immortelle avait avec les arbres, il ne pouvait s'empêcher de ressentir une certaine tristesse devant les traces évidentes de l'avancée ennemie. La horde monstrueuse avait traversé la forêt millénaire comme une bête immonde avide de détruire. Ne pouvant trouver de route vers le sud, elle avait taillé la sienne dans des arbres que les ancêtres de Ker n'avaient jamais connus jeunes. Il l'avait vu depuis les montagnes : une large balafre défigurait les bois qui avaient vu naître Nefòla, plaie de cendres recouvrant le sol sylvain. Ker n'était pas un elfe, mais même lui comprenait que les marques de la guerre perdureraient des générations. Si longtemps pour nous, s'attrista-t-il. Et si peu pour eux. Je ne sais pas comment ils supportent.
Un faible bruit provenant d'au-dessus de lui le tira de ses pensées. D'un mouvement perfectionné par l'habitude, il se jeta au sol tout en balayant du regard le ciel étoilé. Sa main droite sortait déjà une courte épée d'un fourreau à sa ceinture lorsqu'il perçut un déplacement. Un léger sourire lui échappa quand il reconnut la créature : loin dans le ciel nocturne, les ailes blanches d'une effraie en chasse lui avaient fait craindre le pire. Quelque peu rassuré, le nain observa son vol jusqu'à ce que la chouette disparaisse de son champ de vision. Après avoir attendu quelques minutes afin de s'assurer qu'il était bien seul, il rangea son arme et se releva. Machinalement, il sortit une graine brune d'une de ses besaces et l'avala.
D'un mouvement à demi conscient, il leva son visage vers le ciel pour observer la lune. Quasiment plein, l'astre baignait la région d'une lueur pâle parant les collines d'atours menaçants. La forêt dans laquelle Ker s'apprêtait à entrer était cependant aussi sombre que les abysses les plus profonds ; pensif, il se dit qu'une torche serait probablement nécessaire, bien que l'idée de se rendre visible à ce point lui déplaisait. Enfin, au moins j'ai passé le gros de leur armée. A cette pensée, il s'arrêta un instant pour contempler la longue cicatrice qui courait sur toute la longueur de son avant-bras ; cette bataille sur le mont Feb lui avait laissé un souvenir dont il se serait volontiers passé.
Involontairement, il se reprit à observer l'astre. Il était comme captivé par l'objet céleste. Déesse du monde obscur impossible à enchaîner et adoptant sans cesse une forme toujours imparfaite, il voyait dans sa présence infaillible à la fois un jugement et une offre de réconfort. Témoin silencieux de l'existence de monstres à la laideur sans nom, elle était aussi le phare et unique espoir des voyageurs égarés dont il avait très souvent fait partie. Cruelle sorcière, mère dans les ténèbres. Putain qui nous accueille en son sein.
Un vif accès de colère permit à Ker de reprendre ses esprits. Il se fustigea intérieurement tandis qu'il s'enfonçait sous le couvert des arbres ; il n'était pas du genre à se complaire dans un destin imposé par des dieux rieurs. Le maître-espion était un nain de procédés. La vie était une succession de circonstances et il appartenait à tous d'en faire ce qu'ils pouvaient. L'issue d'une action n'était dirigée que par l'opposition des compétences et des agissements des différents acteurs. Le concept de destin et d'intervention divine lui était étranger. Oui, tout était circonstances, et rediriger la table de jeu vers une issue favorable n'était qu'une question de réactions appropriées. Et que la circonstance actuelle soit la marche inexorable d'une armée menée par un démon qui avait déjà tué deux Nikuznil n'était que le coup de maître d'un joueur d'une habileté terrifiante.
La lune était presque pleine, presque bienveillante dans son mensonge nocturne. L'étudiant un instant à travers le couvert des arbres, Ker estima qu'il marchait depuis un peu moins d'un mois. Il soupira indistinctement. Un mois, et il avait accomplit si peu! Il n'était même pas arrivé en territoire elfe. Traverser les montagnes occupées s'était avéré un défi à la hauteur de la confiance que le roi avait en lui, et il s'était réjoui d'avoir refusé de prendre Becaro avec lui. Le fier Capitaine était certes un des guerriers les plus redoutables qu'il avait eu l'occasion de rencontrer, mais il manquait des compétences et de l'esprit nécessaire à une mission aussi cruciale. C'était pour le nain le seul défaut de cet elfe admirable ; la noblesse entêtante dont il pouvait faire preuve les auraient réduits à supplier les gobelins de leur livrer des informations. Le maître-espion lui-même n'ayant rien de noble, il avait pu obtenir des renseignements édifiants sur toutes sortes de sujets allant de la stratégie militaire à la géographie du pays d'origine de la horde. Il n'avait cependant que des fragments décousus qui manquaient de la moindre cohérence qui aurait permis de les lier entre eux, et il lui faudrait certainement interroger de nombreux autres gobelins avant d'obtenir un tableau complet.
Cette quête d'informations avait progressé à un rythme satisfaisant avant de ralentir quand il avait laissé les montagnes derrière lui. Il avait alors continué vers le nord, en direction du royaume vaincu de Nefòla. A partir de ce moment, les seuls groupes de gobelins qu'il avait croisé avait été des patrouilles ou des renforts venus alimenter le nombre inconcevable de leurs armées, qui se heurtaient à une résistance intense de la part des forteresses naines. Malgré l’héroïsme de soldats n'ayant pas oublié Mezilush et l'exemple de Tekkud, la violence des combats pesaient lourdement sur le peuple des montagnes, dont les espoirs n'étaient maintenant qu'une hypothétique charge de la Garde d'Argent, qui protégeait toujours le Palais de Granite, ou l'arrivée des armées cérodiennes, l'allié dont l'éloignement ne lui avait pas permis d'engloutir ses forces entières dans l'attaque initiale. Néanmoins, l'espoir était une chose difficile pour le maître-espion. Il avait vu l'étendue des armées gobelines et le général les menant. Il avait entendu certains des plans qui se décidaient dans leurs tentes obscures. Il avait senti la folie et la puissance de leurs bêtes de guerre, animaux primitifs émergés des galeries du monde souterrain pour détruire celui en surface. Aussi loin qu'il regarde, aussi longtemps qu'il cherche un futur alternatif, il ne voyait que la fin pour le peuple mortel qui devait affronter des démons. La fin. Comme Usad-Thunen et sa Reine au corps brisé...
Repenser à la Ville-Multiple était une épreuve presque physique pour le nain. Une citée aussi belle, rasée en quelques heures par une entité primitive qui se disait antérieure aux dieux. Un symbole de l'espoir de trois nations, brûlé et réduit en cendres lors d'un acte de violence dirigé par une main invisible. Nefòla, morte avec la ville pour laquelle elle avait tant sacrifiée. Et avec elle la dernière des Sages. Ah, si vous pouviez être là et tout régler comme vous l'avez fait il y a des siècles!
Et enfin, il y avait lui, Ker "Oeil-de-Nuit", le Maître-Espion. Il se tenait dans l'ombre de la famille royale depuis si longtemps qu'il en connaissait tous les secrets. Il avait beau balayer les inquiétudes de Dakon dès qu'il les formulaient, il était pleinement conscient qu'il n'aurait jamais dû se lancer seul dans une entreprise pareille. Mais avait-il eu le choix, lui qui avait toujours refusé de former un quelconque successeur? Il était maintenant vieux, mais par-dessus tout il était las. Et il se trouvait à nier les limites de son corps défaillant par l'usage de simples que le plus novice des herboristes recommanderait de fuir. Parfois, quand il levait les yeux sur la lune et l'ironie cruelle du monde, il se disait qu'il accueillerait la mort avec joie. Oui. Maintenant.
Un instant, se dit le nain, ce n'est pas moi.
Encore sous le choc du cours inattendu qu'avaient pris ses pensées errantes, il porta la main droite à sa ceinture. Le contact froid d'une dague brisa quelque peu sa torpeur, renforçant son impression d'avoir été l'acteur inconscient d'une scène sordide. Il en était certain, des pensées aussi pathétiquement gémissantes n'étaient pas - ne pouvaient pas être les siennes. Il tourna la tête pour observer ses environs : il se trouvait dans une petite clairière dont les bords étaient éclairés par la douce lueur émanant de sa torche crépitante. L'obscurité était tenace par-delà le couvert des arbres, et ni la lumière des flammes ni celle de la lune semblaient pouvoir la déchirer. Retenant son souffle, Ker tendit l'oreille ; un épais silence enveloppait la forêt toute entière, si pesant qu'il se prit à marcher en évitant les branches au sol afin de ne pas le briser. Il n'y avait plus de signes de la meute de loups de tout à l'heure, et maintenant qu'il prêtait une attention à ces détails, aucune trace du passage récent de quelque animal que ce soit. Les empreintes visibles sur le sol dataient toutes de quelques jours au moins, et le caractère absolu du silence régnant dans la forêt faisait douter au nain qu'un animal y évolue en ce moment. Tous les sens en éveil, il tentait en vain de percevoir le moindre indice de la présence d'une créature pour se heurter à la conclusion qu'il n'y avait rien dans sa proximité immédiate. C'était pourtant impossible, il en avait la certitude. Tout dans l'atmosphère de cette forêt lui disait que quelque chose y avait établi son repaire.
Il chercha durant ce qui lui parut une éternité. L'absence complète de son exacerbait ses sens au point qu'il était douloureusement conscient de chaque bruit infime que ses mouvements provoquaient. A l’affût, il scrutait les ténèbres enveloppant les arbres avec une rigueur méticuleuse, passant sur chaque ombre de feuille, chaque creux dans l'écorce dans l'espoir de déceler une forme sortant de l'ordinaire. Tout fut en vain, chacun de ses sens lui assurait qu'il n'y avait rien au-delà des arbres. Ils lui assuraient cela, et pourtant un instinct primitif lui hurlait que faire un pas de plus serait la dernière erreur de sa vie. Fermement décidé à suivre ce sentiment, il se tenait immobile au centre de la clairière lorsqu'il crut apercevoir un mouvement dans les limites de son champ de vision. Le sang battant à ses tempes, il se retourna d'un bond et tira une dague dans sa main droite. Il agita la torche qu'il tenait de l'autre main dans la direction du mouvement, espérant éclairer quelque chose. La encore, il n'obtint aucun résultat ; les ténèbres semblaient trop épaisses pour la flamme pourtant vive de sa torche. Perplexe, il continua de fixer la même direction. Après quelques secondes interminables, il dut se rendre à l'évidence : il percevait encore le même mouvement, mais plutôt que d'être celui d'une créature ou de branches, il semblait provenir des ombres elles-mêmes, qui étaient comme animées d'une pulsation malsaine.
Oh.
Enfin, la révélation emplit son esprit, et avec elle toute l'horreur de sa situation. L'évidence de la chose ajoutait à la cruelle farce dont il était victime. Car l'explication était bien évidente sinon réjouissante à entendre ; il cheminait seul sous la lune dans un lieu déserté et ressassait des pensées amères nées de ses doutes. Voilà qui satisfait la Nuit, n'est-ce pas? Catin affamée, je n'ai peur de rien!
Il avait terminé cette pensée à voix haute, son cri hésitant déchirant le silence établi. Brandissant sa torche, le regard chargé d'une colère sourde, il fit un pas en direction des ténèbres.
La scène est d'une blancheur immaculée. Où qu'il pose son regard, un blanc aveuglant de pureté recouvre les environs, voilant le paysage et ce qu'il peut s'y dérouler. Il ne comprend pas vraiment pourquoi, mais il est en paix. Il ressent comme un sentiment d'accomplissement, de fierté immense devant quelque chose qu'il n'aurait jamais cru possible mais dont il ne parvient pas à se souvenir. Il se sait aussi heureux qu'il a pu l'être, dans cet écrin d'une douceur paisible qu'il ne reverra peut-être jamais. Il sait que l'heure est grande et le restera longtemps. Heureux, il dérive au sein de cette étendue aux senteurs de sapins.
Une voix se fait entendre, douce et aimante. Une autre lui répond, grave et possédant l'assurance d'une montagne. Une troisième, noble et fière, se joint à l'ensemble. Les mots prononcés résonnent en lui sans qu'il comprenne vraiment pourquoi. Rauque et usée, une quatrième retrouve les autres.
Au loin dans cette mer comateuse, il peut voir d'infimes silhouettes. Elles sont quatre, se toisant avec gêne. L'une grande et belle se tient près d'une autre à la posture royale et reste à distance des deux autres, ramassées comme des bêtes redoutant une attaque. Pourtant, c'est d'une voix charismatique que l'une d'elles s'avance et commence à parler, brisant l'épais silence qui pèse sur toutes les épaules. Main dans la main, les deux autres l'écoutent, captivés, puis répondent d'un ton chaleureux. Le quatrième observe d'un air méfiant.
Les silhouettes continuent de débattre durant ce qui lui paraît une éternité. Il est heureux, bien qu'il ne se rappelle toujours pas pourquoi, et il voudrait bien que cela dure encore longtemps.
Les voix s'éteignent tandis que les formes s'estompent. Une tâche obscure perturbe la perfection de l'écrin. Soudainement, il comprend.
Il était heureux.
Il ne le sera plus jamais.
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Seul au centre des ténèbres, Ker gisait recroquevillé à même le sol. Des larmes salées coulaient le long de ses joues, leur fraîcheur lui apportant un faible réconfort dans l'épreuve qu'il subissait. L'intensité des visions successives l'avait laissé tremblant et sans force pour lutter contre l'attaque cruelle de l'entité. L'obscurité toujours absolue ainsi que les rires légers étaient tous deux quasiment oubliés devant la violence des émotions qu'elle faisait naître en lui. Sans la moindre notion de pitié et semblant plutôt se révéler dans le désespoir qu'elle infligeait, l'entité démontait ses joies et ses espoirs pour mieux nourrir ses peurs, qui s'ajoutaient les unes aux autres jusqu'à former un tout si immense, si inconcevable dans ce à quoi il l'obligeait à faire face, qu'il se sentait vaincu à la seule idée d'essayer. Râlant à la recherche non pas d'air mais d'un instant d'accalmie, il griffa le sol de ses mains. Une vive douleur envahit sa paume alors qu'il touchait sa torche abandonnée au sol. Il n'y prêta cependant guère d'attention, car sa main droite toucha une surface lisse et froide qu'il reconnu immédiatement. Oubliant la torche et sa main blessé, il porta l'anneau à son visage. Il ne pouvait le voir à travers l'obscurité, mais il devinait sa forme aussi sûrement que s'il avait été sous le soleil le plus brillant. La voix emplit à nouveau son esprit alors que la fouille se faisait moins violente, et les rires reprirent de leur force. Entouré par les ténèbres mouvantes, Ker concentrait tout son être sur cet objet et ce qui le liait aux visions infligées par l'entité.
Les rires devenaient grondement tandis qu'il parvenait à une conclusion. La créature lui avait montré chacun de ses doutes et l'avait maintenu dans une position où il devait leur faire face. Soulignant la futilité de la lutte, elle lui avait montré une autre vision insistant sur son impuissance et sur la fatalité de son malheur. Si être noyé sous tant à la fois avait manqué de le terrasser, il savait tirer un autre enseignement de cette vision particulière. Puisant une nouvelle résolution dans la présence presque douloureuse de l'anneau dans sa main droite, il s'assit et chercha sa torche de sa main libre. Il la trouva enfin, et lorsqu'il la saisit il vit ce qu'il n'aurait jamais espéré revoir : tremblotante mais magnifique dans sa beauté orangée, une flamme dansait au cœur des ombres.
Il avait été heureux. Et il avait une mission.
Les rires grandirent encore en puissance, bientôt accompagnés par un bruissement tel qu'on aurait cru que les arbres eux-mêmes se levaient pour marcher dans la nuit. Retentissante telle le tonnerre, la voix résonna dans ses oreilles tandis qu'il se levait. Fixant les ténèbres d'un regard où brillait une détermination nouvelle, il fit un pas en avant.
Le bruissement devint tempête et les hurlements bestiaux. Des scènes de destruction naquirent dans l'esprit du nain. Mort et ténèbres marchaient sur le monde, le recouvrant d'un morne linceul apportant à ses habitants la seule paix qu'il pouvaient espérer. Serrant l'anneau de ses doigts blancs mais vivants, il continua à avancer.
La lueur de la torche grandit soudainement, déchirant l'obscurité et éclairant finalement ses mains. Un sourire émerveillé aux lèvres, il contempla ses deux membres comme s'il les voyait pour la première fois. Les rires et la voix rugissaient autour de lui, mais il possédait désormais la sagesse et la force de ne pas les écouter. D'un air de défi, il agita la torche en direction des ténèbres qui reculèrent sous son assaut. Aussi soudainement qu'ils étaient apparu, les rires cessèrent.
Devant l'insensibilité apparente du nain, l'obscurité reflua soudainement pour se condenser au centre de la clairière. Là, devant son regard décidé, les ombres se rassemblèrent pour donner naissance à une créature informe née des cauchemars des mortels. Sa partie inférieure semblait surgir des ombres au sol et il possédait deux longs bras s'enroulant autour de son corps mal défini et s'étendant dans tout l'espace que n'éclairait pas la lueur des flammes. Un semblant de visage se devinait quelque part sur ce qui pouvait passer pour une tête. La vision donna au nain l'impression de contempler une sculpture gravée à même les ténèbres. Alors qu'elle semblait se tourner vers lui, la créature émit un puissant sifflement de rage. Tendu mais prêt, Ker avança vers elle.
Le sifflement haineux repris, accompagné de la même voix primitive qu'il avait déjà entendue. Rauque et plus ancienne que tout ce que le nain pouvait imaginer, elle parlait de mort et de haine, de peur et de désespoir. Dans le discours de la créature, Ker voyait la fin écrite des civilisations, le retour à un temps oublié où les mortels vivaient dans la terreur de la nuit et de ses enfants. Raffermissant sa prise sur sa torche, le nain continua d'avancer.
Pas après pas, la voix gagnait en violence, promettant à Ker sa fin et celle de ce qu'il tenait pour cher. Pas après pas, le sifflement montait dans les aigus, menaçant en vain le nain sur lequel il n'avait plus d'emprise. Pas après pas, les ténèbres refluaient.
Enfin, il fut devant la créature, dont les hurlements s'étaient mués en plaintes faiblissantes. Le regard sombre, il tendit le bras et plongea sa torche dans l'obscurité composant l'entité.
Un hurlement aigu retentit dans la clairière alors que les ténèbres se dissipaient. Sonné et le souffle court, le nain observa ses environs. Les ombres qui lui avaient semblé suspectes avait laissé place à l’œuvre naturelle de la nuit, et il pouvait maintenant voir au-delà des arbres. La clairière qui lui avait paru si menaçante était si paisible qu'il fut pris d'un doute quant à l'expérience qu'il venait de vivre. Vidé de toute énergie, il allait se laisser tomber au sol lorsqu'il entendit un discret bruit de pas.