Chapitre 31 :
-Ma dague, répéta le marchand. Ma dague… Ma pauvre dague… Volée…
-Pas la peine d’en faire tout un plat, fit le participant à ses côtés, toujours en train d’examiner sa hache. ‘Cherches pas, tu la récupèreras pas. Ce ne sont pas des amateurs. Ça se sent tout de suite.
-Quoi ?
Le marchand leva les yeux sur son interlocuteur. Il fallait dire qu’il ne faisait pas vraiment attention à qui il vendait ses marchandises. Cela faisait neuf ans qu’il officiait en tant que marchand officiel de la Grande Marche, et pour lui, tous les participants étaient les mêmes. Il ne retenait que rarement leurs visages.
Mais celui qui lui faisait face était plutôt atypique. C’était un Rougegarde d’une quarantaine d’année, aux cheveux bruns, en bataille, et à la peau plus claire que la plupart de ses semblables, typique des habitants du Nord de Lenclume. Il avait une barbe mal-rasée et grisonnante.
Il portait une armure de cuir, une côte de maille au niveau des bras, et des épaulières en métal souple. Son épée ébréchée pendait à sa ceinture. Elle était couverte de rouille, et on pouvait se demander comment il faisait pour se battre avec une telle chose. Pas étonnant qu’il veuille acheter une autre arme. Et, tandis qu’il examinait la hache, d’une main, il tenait une outre de vin, dans l’autre.
Il la porta à ses lèvres et en but une gorgée d’un air viril.
-Ces ordures, grogna le marchand, ils m’ont volés une de mes pièces les plus précieuses…
-Tu t’en remettras.
-Dites, vous êtes un participant, vous-aussi, non ?
-Non, je suis le roi d’Akavir. Bien sûr que je suis un participant.
-Vous… Vous êtes fort ?
-J’en ai l’air ?
Le marchand le détailla. Il était plutôt vieux. Certes, à quarante ans, on était encore dans la force de l’âge, mais pour un guerrier, c’était un vieillard. Et il puait l’alcool. Depuis qu’il était à l’étal, il avait bu au moins dix rasades de son vin.
Quant à son équipement, il semblait d’un autre âge. Même son armure était déchirée et rapiécée par endroit, et sa côte de maille aurait eu bien besoin d’être réparée et lavée. Pas vraiment le genre de preux chevalier. Plutôt un mercenaire. Un reître. Cette catégorie d’hommes capables de tuer sans le moindre scrupule pour quelques piécettes.
Le marchand se frotta le menton.
-Plutôt, oui.
-Alors accouche. Qu’est-ce que tu veux ?
-J’aimerais… Que vous alliez récupérer cette dague. Vengez-moi !
Le Rougegarde resta un instant silencieux avant d’éclater de rire.
-Te… Venger ? Sérieusement, c’était juste un couteau.
-Non, c’était une pièce de collection. Une dague d’Abinucci !
-Juste une contrefaçon.
-Qu… Vous aussi, vous êtes un expert ?
-Non, mais le vieillard de tout à l’heure a dit que c’était une fausse. Et vu la façon avec laquelle il t’as volé, j’aurais tendance à le croire.
-Ecoutez, si vous allez chercher cette dague pour moi, et que vous flanquez une raclée à ces salauds, je… je…
-Tu ?
-Je vous paye cinq cent septims !
Le Rougegarde but une gorgée de vin avant de se pencher en avant et de sourire.
-Cinq cent mille.
Le marchand faillit s’étrangler.
-Pardon ?!
-Toi tu ne l’as peut-être pas vu, mais moi je les ai remarqués quand ils sont arrivés, ces trois types. Le Bréton, le Khajiit et le vieux. Et il y avait Edwin Kingsming avec eux. Je peux foutre une raclée à qui tu veux dans cette course, mais pour Edwin Kingsming, il va me falloir un peu plus de cinq cent septims. Mille fois plus, par exemple. Ca me parait raisonnable.
-Mais… Je n’ai pas une telle somme !
-Alors oublie la dague d’Abi-truc.
-Abinucci.
-Ouais, mer… Hein ?
Le Rougegarde tourna la tête vers celui qui avait parlé, et qui se tenait juste à côté de lui. Le marchand, s’il avait faillis s’étrangler quelques instants plus tôt, face au prix proposé par le mercenaire, manqua de s’évanouir face à l’homme qui était apparu à son étal.
Raedyn Levenni.
Quelques mètres derrière, ses trois équipiers formaient un arc de cercle et montaient la garde. Plus aucun participant n’osait s’approcher de l’étal. Sauf, bien sûr, le Rougegarde qui y était déjà.
Celui-ci dévisagea Raedyn et émit un long sifflement, impressionné.
-V’là du beau monde, murmura-t-il avant de s’enfiler une énième rasade de vin.
Le Dunmer posa une main sur l’étal. Le marchand avait déjà vu les mains de toutes sortes de guerriers et de combattants, mais des comme ça… Jamais. Il y avait plus d’expérience de la guerre dans chacun des doigts de Raedyn que dans le corps tout entier de n’importe quel participant de la Grande Marche.
Tous réunis.
Le marchand déglutit.
-Que… Que puis-je pour vous ?
-Je recherche un homme.
-Je peux… p… peut-être vous renseigner ?
-Oui. Il ne devrait pas être très loin devant mes hommes et moi. Un vieillard. Avec de longs cheveux blancs et un collier de barbe. C’est un Bréton. Il a… un arc dans le dos. Et il voyage avec trois autres individus. Edwin Kingsming, un autre Bréton, et un Khajiit. Vous ne les auriez pas aperçus, par hasard ?
Il y eut un long silence. Les yeux du marchand s’illuminèrent.
-Oui ! Oui, je les ai vus ! Ils étaient à mon étal il n’y a même pas cinq minutes ! Ils viennent de partir pour le marais brumeux ! Et… Et… Ils m’ont volés ma dague !
-Ils viennent de partir ? répéta Raedyn, sans visiblement se soucier plus que cela de la fameuse dague.
-Oui ! Vous pouvez encore les rattraper !
-Bien. Merci.
Raedyn fouilla dans sa poche et jeta une bourse sur l’étal, pleine à craquer d’or. Cela fait, il se détourna et fit un signe à ses hommes. Ceux-ci l’entourèrent et ils se remirent tous en route. Le marchand avait les mains tremblantes d’excitation.
Les chiens qui avaient osés le voler allaient le regretter ! Il ignorait pourquoi quelqu’un comme Raedyn Levenni était à leurs trousses, mais avec une telle légende derrière eux, ils n’allaient pas tarder à comprendre leur douleur.
Il remarqua que le Rougegarde était toujours là. Il regardait l’équipe de Raedyn s’éloigner. Un sourire se dessina sur son visage.
-Mazette, ça promet du beau spectacle, ça.
-Hein ?
-Je ne raterais ça pour rien au monde. Allez, j’y vais.
-C’est ça, grogna le marchand entre ses dents lorsqu’il fut sûr que le mercenaire était assez loin. Casses-toi, pauvre ivrogne… Et fait toi donc tuer.
Alors, il remarqua que la hache qu’examinait le Rougegarde n’était plus sur son étal. Ce dernier était parti avec. Sans payer.
Le marchand soupira.
Sale journée…
Zimo écarta une énorme fougère de son chemin. Puis, il la trancha d’un coup de dague. Il fallait dire qu’elle coupait vraiment bien. Sa lame était incroyablement effilée. C’était un vrai plaisir de manier une telle arme. Même si ce n’était qu’une imitation. Ça laissait présager de l’efficacité de l’originale.
Sandre, lui, avançait en gardant la main à proximité de sa chaîne. Ce marais n’était vraiment pas rassurant.
Un silence pesant régnait sur les lieux, seulement interrompu par les croassements déchirants de corbeaux, au loin, à intervalles réguliers.
Comme son nom l’indiquait, le marais était envahi par la brume. Une nappe de brouillard flottait dans l’air, si épais qu’il était difficile de distinguer quoique ce soit à plus de dix mètres. On aurait dit de la fumée blanche.
Et l’humidité… C’était bien simple, aux endroits les moins profonds, les quatre hommes marchaient avec de l’eau jusqu’aux chevilles. Le reste du temps, elle leur arrivait aux genoux. Ce qui n’était pas vraiment pratique pour avancer.
Le fond était vaseux et glacé. Et la végétation dense n’aidait pas.
Des arbres tordus et grisâtres se tordaient dans tous les sens et étiraient leurs branches lugubres autour d’eux, comme des centaines de bras décharnés, essayant tant bien que mal d’attraper les voyageurs imprudents qui s’approcheraient trop près d’eux.
Sandre enjamba une énorme racine qui dépassait de l’eau.
A l’avant du groupe, comme à son habitude, Edwin ouvrait la marche. Il lançait des regards furtifs aux alentours, aux abois. Il avait beau se vanter de traverser les épreuves sans la moindre difficulté, ce marais n’était pas rassurant. Une embuscade était si vite arrivée…
Il ne faisait aucun doute que dans un tel environnement, les Chasseurs de Coureurs s’en donneraient à cœur joie.
Le seul à être parfaitement détendu était Roderick.
De toutes manières, la Flèche Blanche était détendue en toutes circonstances. Sandre se demandait ce qui pouvait encore faire peur à un tel homme.
-Ouvrez l’œil, lança Edwin. Si vous apercevez une balise, dites-le.
-Il y en a quinze dans tout le périmètre, dit Zimo. Et nous n’avons besoin que d’en trouver trois. Ça devrait être simple, non ?
-Je n’imagine même pas dans quels endroits saugrenus les organisateurs les ont cachées, répondit le mage.
-J’espère juste qu’on ne va pas tomber sur le Chevaucheur Sombre, lâcha Sandre sur le ton de la plaisanterie.
-J’espère aussi.
C’était Roderick qui avait parlé. D’une voix plutôt sinistre, d’ailleurs. La Flèche Blanche croyait-elle vraiment à ce genre d’histoires ? Au Chevaucheur Sombre, au Chuchoteur… ? Ce n’était pas pour rassurer Sandre.
Soudain, Edwin s’arrêta. Il leva la main et fit signe à tous de se stopper aussi.
Devant eux, une trentaine de mètres plus loin, se trouvait une sorte de gigantesque menhir. C’était un énorme rocher, taillé en forme de losange, qui s’élevait au-dessus de la cime des arbres. Il devait bien faire cinq à six mètres de haut.
La brume était si épaisse qu’elle masquait le ciel et le soleil, mais sans cela, son ombre aurait pu recouvrir tout le groupe sans problème.
Le rocher était couvert de mousses et de lierre, comme s’il se dressait là depuis des siècles.
Juste devant se trouvait une statue. Elle représentait une femme, agenouillée dans l’eau, faisant face à la pierre. La tête baissée et recouvert d’un voile, elle avait les mains jointes, comme si elle priait. Fait étrange, une épée, fichée dans le sol –ou plutôt dans l’eau- avait été sculptée juste à côté d’elle.
La petite troupe s’en approcha prudemment. Visiblement, il n’y avait pas de dangers.
Autour du rocher, les arbres semblaient s’écarter, comme s’ils craignaient d’entrer en contact avec. Des papillons gris voletaient un peu partout. Et il semblait à Sandre que la brume était moins épaisse, et que quelques rayons de soleil parvenaient à percer.
Il se dégageait de l’endroit une aura étrange, très singulière, qui tranchait avec l’atmosphère lugubre et étouffante du marais. Quelque chose… d’apaisant. De sécurisant. On aurait dit que celui qui avait taillé cette pierre y avait mis tout son amour, et avait fait en sorte que quiconque se trouvant à proximité s’y sente bien.
Même l’air dur d’Edwin s’était envolé.
Sandre s’approcha du rocher. Des mots étaient sculptés en relief dessus, à hauteur humaine.
« A Darius, toi dont les combats ne seront jamais chantés par aucun barde, mais dont la bravoure restera dans la légende. »
C’était donc… une tombe ? Une titanesque pierre tombale ? Mais pour qui ? Qui était donc ce Darius ?
Roderick s’approcha à son tour et effleura la tête de la statue du doigt. Il avait un air triste.
-Je ressens… beaucoup de peine, ici. Beaucoup de regrets.
-Ah bon ? s’étonna Sandre. Moi je me sens bien. J’ai l’impression d’être… revigoré.
-Bizarre, remarqua Zimo. Pour moi, cet endroit est chargé de ressentiment et de haine.
Apparemment, chacun était touché par des sentiments différents à proximité de la pierre. Edwin fronça les sourcils. Sandre comprit qu’il y avait de la magie là-dessous, et que ça n’avait pas échappé au flaire du mage.
Roderick s’éloigna de la statue.
-Remettons-nous en marche. J’ai l’impression que ce lieu a quelque chose de sacré, et que nous ne devrions pas être là.
-Si vous le dites, répondit Zimo.
Ils s’enfoncèrent de nouveau dans les marais. Il leur sembla marcher des heures, sans faire le moindres progrès. Sandre était épuisé. Ses jambes lui tiraient, à force de marcher dans de l’eau et de la boue.
Zimo aussi avait l’air d’être à bout de souffle. Il haletait en agitant parfois sa dague devant lui pour trancher la végétation.
Au bout d’une éternité, Edwin s’arrêta de nouveau. Sandre marchait les yeux baissés, pour ne pas se prendre le pied dans une racine ou un rocher, alors même s’il ne vit pas ce qui le provoqua, il entendit le juron d’Edwin, dans le silence du marais.
-Merde.
Le jeune homme releva la tête et… cligna des yeux, éberlué.
Ils étaient de retour à la pierre tombale. Le rocher se dressait là, devant eux, avec la statue agenouillé.
-Qu’est-ce que… fit Zimo. Comment est-ce possible ?
-Nous aurions tournés en rond ? lança Edwin.
-Impossible, répliqua Sandre en essuyant une goutte de sueur sur son front. Nous avons marchés en ligne droite durant des heures.
-Peut-être qu’il y a plusieurs rochers identiques ? proposa Zimo, peu convaincu lui-même.
-Cesse-donc de dire des âneries pareilles, le coupa sèchement Edwin.
Tous se tournèrent vers Roderick, comme s’ils s’attendaient à ce que la Flèche Blanche leur donne la réponse au problème.
Le vieillard fixait la pierre tombale d’un air méfiant, l’air grave. Sans un mot, il s’en approcha. Il s’arrêta juste devant et saisit son arc. D’un geste fluide, il décocha une flèche. Le trait alla se ficher dans la mousse qui recouvrait le rocher.
Roderick remit son arc en bandoulière.
-Remettons-nous en route, intima-t-il. Et éloignons-nous de cet endroit.
Ils suivirent la Flèche Blanche.
Cette fois, ils s’arrêtèrent non pas au bout de plusieurs heures, mais au bout d’une dizaine de minutes.
La pierre tombale se dressait de nouveau devant eux. Et cette fois, ils en étaient sûrs, il n’y en avait pas plusieurs répliques. Car la flèche qu’avait tirée Roderick était toujours plantée dans la pierre.
Sandre regarda autour de lui. L’endroit qui lui avait auparavant semblé si apaisant et si rassurant lui donnait maintenant des frissons. Il y avait quelque chose de… malsain dans l’air. De plus en plus intense.
Le jeune homme sentit son cœur battre dans sa poitrine. Ce n’était pas normal. Il avait le pressentiment que quelque chose allait bientôt se produire. Quelque chose qui n’allait pas du tout lui plaire.
Comme si tous en étaient arrivés à la même conclusion, à l’exact même moment, ils dégainèrent tous leurs armes.
Zimo sa dague, Sandre sa chaîne, et Roderick son arc. Quant à Edwin, il écarta les doigts, et de la glace se forma dans ses paumes et sur ses ongles. Ils se placèrent dos-à-dos, afin de se protéger d’un éventuel assaut.
-On s’est fait piéger, cracha Edwin.
-Une attaque ennemie ? lança Zimo.
-Sans doute, répondit le mage. Une illusion, visiblement. On s’est fait avoir comme des bleus.
-Mais qui est le participant qui a fait ça ? s’enquit Sandre. Et où est-il ? Pourquoi ne l’avons-nous pas repéré ?
La réponse vint de Roderick. Si simple que personne n’y avait pensé.
-Parce que ce n’est pas un participant.
Lentement, tous les regards se tournèrent vers la pierre tombale. Non, pas la pierre tombale. La statue.
D’abord, rien ne se passa. Puis, dans un craquement sonore, une fissure apparut sur son crâne. Une longue fissure qui descendait jusqu’en bas de son dos. Alors, elle commença à trembler, et tout son corps se craquela.
Brusquement, ses mains s’écartèrent, et des morceaux de roche volèrent dans tous les sens, projetés violemment par une force invisible. Les deux bords de la fissure s’écartèrent et une fine couche de pierre tomba en miette, dans l’eau, comme un cocon.
La statue, sous la première couche de pierre grise, était en fait constituée de marbre blanc, immaculé.
Avec des mouvements étranges, presque mécaniques, ses bras se déplièrent et retombèrent le long de ses hanches. Elle se redressa avec une lenteur abominable, dans une série de craquement, comme quelqu’un n’ayant pas bougé depuis des heures et dont les os émettraient des bruits en s’activant.
Elle se releva. Alors, sa tête pivota vers le petit groupe, tel celle d’une chouette. Un humain aurait eu la nuque brisé, avec une telle rotation. Mais ce n’était pas un humain. C’était une statue. Ses yeux blancs et lisses fixaient les quatre hommes.
Sandre déglutit quand les lèvres de pierre de la statue s’ouvrirent, et qu’une voix gutturale, effrayante, bien loin de celle d’une femme, en sortit.
-Monstres, dit la statue d’un ton accusateur.
Les quatre hommes se regardèrent. Monstres ?
-Monstres, répéta la statue. Hérétiques. Pêcheurs. Vous osez profaner la tombe du saint Darius.
Son bras droit se tendit et ses doigts se refermèrent sur la poignée de l’épée de pierre, plantée à côté d’elle. Toujours aussi lentement, la statue ôta l’arme du sol, puis de l’eau, et la leva au-dessus de sa tête.
C’était un monstrueux espadon qui devait peser des tonnes, mais elle la soulevait avec la facilité qu’on porterait une plume.
-Vous allez périr, lança la statue. Périr, et brûler dans l’Oblivion !
-Ca a le mérite d’être clair, ricana Edwin.
Ooh, intéressant. Je sens que les choses vont se mettre à bouger
Dat suspens je n'ai pu résisté de pensé a " La Vénus d'Ille " de Prosper Mérimée lorsque la statue c'est animée
Le combat se prépare..
"" La Vénus d'Ille " de Prosper Mérimée "
Ca me dit vaguement quelque chose. Un truc que j'ai du lire en troisième, sûrement
Très bon chapitre, comme d'habitude. Je me demande bien qui est ce Darius...
Chapitre 32 :
La statue fit un pas en avant, en provoquant des remous dans l’eau stagnante. Sandre se mit en garde, imité par Zimo. Etonnamment, Roderick n’entra pas en action et resta en retrait, son arc dans les mains, sans y encocher de flèches.
Ce fut Edwin qui s’élança le premier.
De la vapeur gelée s’élevait au-dessus de ses mains. Au moment où il arriva à son niveau, la statue se mit en mouvement.
Son monstrueux espadon vrombit et fendit l’air à une vitesse dépassant tout entendement.
Edwin écarquilla les yeux et s’arc-bouta. L’épaisse lame de pierre passa à quelques centimètres de son visage, et lui emporta une mèche de cheveux. Il recula précipitamment, alors que la statue frappait de nouveau.
La lame se leva et s’abattit en avant. Elle manqua Edwin mais elle alla s’enfoncer dans l’eau. Une explosion liquide projeta de l’eau dans tous les sens, à l’impact. Le mage se protégea le visage avec son bras, pour ne pas être éclaboussé.
Peu gêné par ce genre de contrainte humaine, la statue bondit.
Un bond tout aussi monstrueux que ses attaques. Elle s’éleva de dix bons mètres dans les airs, dépassant largement les plus hauts arbres du marais, avant de retomber lourdement, pieds joints. Edwin plongea sur le côté juste avant qu’elle ne l’écrase de tout son poids.
Là encore, la statue souleva des gerbes d’eau en retombant au sol. Tous durent reculer, y compris Sandre, Zimo et Roderick.
Edwin roula dans l’eau avant de se redresser, trempé de la tête aux pieds. Une expression de colère sur le visage, il frappa l’eau du plat de la main, tout en prononçant une incantation. Alors, tout autour de lui, le liquide se figea et sa couleur passa du vert au bleu, puis au blanc.
Quelques secondes plus tard, toute la surface de l’eau, dans un cercle d’une dizaine de mètres, se retrouva entièrement gelée. La statue, les pieds pris dans la glace, ne pouvait plus bouger. Edwin se releva et claqua des doigts.
-Crève, lança-t-il d’une voix impitoyable.
Un craquement retentit. Puis, un énorme pieu de glace creva la surface de l’eau, juste devant la statue, et fusa vers la tête de celle-ci.
Sandre s’était attendu à tout, sauf à ce qu’elle se prenne l’attaque de plein fouet. Mais le pieu la heurta violemment et… se brisa. Le visage de la statue n’avait pas une seule fêlure. Edwin en resta choqué.
-Mais… Que…
-Pauvres fous, gronda la statue. Vous allez périr !
Elle leva son épée et l’abattit de nouveau violemment, pulvérisant la couche de glace qui la maintenait immobile. Alors, elle s’élança. Sa lame remonta brutalement. Edwin croisa les mains devant lui et il sembla à Sandre qu’il prononça une formule, juste avant que l’épée ne le frappe.
L’impact fut tellement violent que le corps d’Edwin fut projeté dans les airs, à plusieurs mètres de hauteur, avant d’aller s’écraser au milieu des arbres, quelques mètres plus loin.
-Bouge ! cria Zimo.
Sandre se rendit compte que la statue avait changé de cible et… qu’elle venait de fondre sur lui.
Sa vitesse dépassait tout ce que pouvait imaginer le jeune homme. Il eut à peine le temps de voir une forme bouger à côté de lui que la lame de pierre le faucha au niveau des hanches.
Un mammouth aurait pu le charger et le heurter de plein fouet qu’il ne lui aurait pas fait aussi mal.
Sandre traversa une trentaine de mètres à la vitesse d’un boulet de canon avant d’aller rebondir brutalement contre un arbre et de s’écrouler dans l’eau, les côtes explosées. Un flot de sang jaillit de sa bouche et il sombra dans le liquide froid et obscur.
Zimo, tétanisé, brandissait sa dague dérisoire dans la direction de la statue.
Sandre et Edwin. Tous les deux mis hors d’état de nuire. En quelques fractions de seconde. C’était impensable.
Il chercha vainement la Flèche Blanche des yeux. Il repéra Roderick. Celui-ci, une vingtaine de mètres plus loin, semblait s’être vivement éloigné des lieux du combat lorsque la statue s’en était prise à Sandre. Il observait maintenant la scène, sans faire mine d’intervenir.
-Eh ! lança Zimo. Venez m’…
Il n’eut pas le temps de terminer sa phrase. La statue était sur lui.
Elle détendit sa jambe et son pied de roche percuta le ventre de Zimo avec une puissance phénoménale. Le Khajiit se plia en deux, la bouche grande ouverte. Un immonde craquement avait résonné à l’intérieur de son corps au moment de l’impact.
Il ignorait ce qu’il avait eu de cassé, mais c’était douloureux.
La statue leva sa lame, comme elle l’avait fait auparavant.
-Pêcheurs, dit-elle de sa voix d’outre-tombe. Votre insolence ne restera pas impunie, profanateurs !
L’épée retomba.
Dans un dernier sursaut de lucidité, Zimo s’était jeté en arrière. La pointe de la lame frôla son entrejambe et s’enfonça dans l’eau, dans une explosion d’écume. Le Khajiit tituba et se rattrapa à une racine.
La statue releva la tête vers lui et ses traits se tordirent en une grimace de colère.
Alors deux bras jaillirent de derrière la statue et enserrèrent son cou. Edwin venait d’apparaître, le menton dégoulinant de sang et la tunique déchirée. Un bras entourant la gorge de pierre, il apposa sa main libre sur le visage de la statue.
Aussitôt, une couche de glace, semblant provenir de sa paume, se matérialisa et s’élargit autour de sa main, en une fraction de seconde, avant de recouvrir tout le visage de la statue. Celle-ci émit une sorte de râle d’agonie avant de se figer, la tête emprisonnée dans un carcan de givre.
De la vapeur blanche s’élevait au-dessus d’elle.
Alors le combat était terminé ?
Zimo soupira, plié en deux, peinant à reprendre son souffle.
-Quel ennemi monstrueux, fit-il. J’ai vraiment cru qu’on allait y passer.
-Ce n’est pas un vulgaire pantin de pierre qui viendra à bout de moi, grogna Edwin en descendant de la statue.
Mais il avait beau dire cela, il avait l’air épuisé, lui-aussi.
-Je t’ai vu te faire frapper, dit le Khajiit. En pleine mâchoire. Comment as-tu pu survivre ?
-J’ai dressé un champ de force juste devant moi, au moment où elle m’a attaquée, répondit le mage. Sans cela, elle m’aurait arrachée la tête. Mais je crois que je me suis évanouit pendant quelques secondes.
-Heureux que tu t’en sois sorti, en tout cas.
Au loin, la Flèche Blanche n’avait pas bougé.
Sandre, lui, sortit lentement de l’eau. Il s’appuya contre le tronc d’un arbre et tenta de reprendre ses esprits. Du sang coulait encore de sa bouche et maculait sa tunique, imbibée d’eau. Il était totalement trempé.
Il voulut faire un pas en avant mais une fulgurante douleur aux côtes le fit gémir.
« J’espère que je n’ai pas eu un organe transpercé par un os… »
Soudain, dans le silence des marais, un nouveau craquement retentit. Tous se tournèrent vers la statue. Autour de sa tête, la glace s’était fissurée.
-A terre ! hurla Edwin.
La couche de givre explosa littéralement. Des dizaines de morceaux de glace pointus et effilés comme des rasoirs fusèrent dans toutes les directions en sifflant. Ils se plantèrent dans les arbres et dans l’eau, telle une nuée de flèches.
Zimo avait entendu le cri d’Edwin et réagit in-extremis. Sandre, lui, avait eu le temps de voir l’attaque venir. Il avait saisis sa chaîne et l’avait fait tourbillonner devant lui à toute vitesse, formant une sorte de rempart circulaire.
Les piques de glaces s’étaient tous écrasés dessus.
La statue, dans un mouvement meurtrier, balança son espadon vers Edwin, le seul qui n’avait pas bougé et qui avait dévié les projectiles de glace par la force de sa pensée. Le mage vit la lame fuser vers sa gorge.
Il attendit le dernier moment pour ouvrir la bouche et prononcer un unique mot, le bras tendu et la main grande ouverte.
Une onde de choc jaillit de ses doigts et fit onduler l’air. La statue sentit ses pieds quitter le sol avant de s’élever au-dessus de l’eau et d’être repoussée en arrière par une force surnaturelle. Cette fois, quelques fissures minuscules apparurent ici et là sur son corps.
Elle tomba dans l’eau pour se relever, sans montrer la moindre trace de fatigue.
Edwin haletait. Il enchaînait les sorts offensifs et défensifs les plus puissants à un rythme frénétique, et son énergie devait être au plus bas. Psychiquement, il devait avoir presque atteint ses limites. Un magicien ordinaire se serait effondré. Edwin, lui, essuya rapidement la sueur sur son front et exécuta un geste du doigt.
Aussitôt, un trait électrique jaillit du néant et frappa la statue à l’épaule dans un crépitement terrifiant, évoquant la foudre. La statue recula et de la fumée noire s’éleva au-dessus de l’endroit où elle avait été touchée.
Zimo avait vu des morceaux de pierre voler dans tous les sens. La fumée se dissipa rapidement, dévoilant un trou calciné dans l’épaule de la statue.
-Ouais ! lança le Khajiit. Bien joué ! T’as réussi à la blesser !
-Non, répondit Edwin d’une voix sombre. Loin de là. Tout ce que j’ai touché, c’est de la pierre. Elle ne ressent ni douleur, ni fatigue.
-Mais alors comment la vaincre ?
-Elle doit avoir un point faible, certainement… Mais le temps que je le trouve, vous…
Le coupant net dans sa phrase, la statue bondit, comme elle l’avait fait au début du combat. Zimo leva la tête. Dix mètres au-dessus de lui, la statue fit tournoyer son épée avant de l’abattre, tout en chutant.
Edwin poussa le Khajiit hors de sa route et joignit les mains au-dessus de sa tête. De l’énergie les enveloppa. Il les écarta brusquement et une sorte de barrière magique se forma, éblouissant Zimo. La statue retomba lourdement dessus.
Elle vola en éclat sous la pression, mais elle absorba quasiment tous les dégâts, et la ralentit considérablement.
Edwin eut à peine le temps d’esquiver la statue. Celle-ci retomba pieds joints à l’endroit où il se trouvait une fraction de seconde auparavant.
Sans pouvoir même reprendre son souffle ou réfléchir à une stratégie, Edwin vit la statue disparaître. Non. Le contourner à une vitesse surhumaine. Dans son dos, elle frappa violemment de tailles, et la lame de son espadon percuta Edwin entre les omoplates, le projetant entre les arbres, tel un météore.
Zimo secoua la tête.
-Non… Non…
La statue pivota vers lui. Elle avait une allure effrayante.
-A ton tour, murmura-t-elle.
Le Khajiit pointa sa dague vers elle. Il n’y avait donc aucun moyen d’en venir à bout ?
Elle allait s’élancer vers Zimo lorsqu’une chaîne s’enroula autour de sa cheville avec un crissement métallique. A son extrémité, Sandre tira violemment dessus. La statue perdit l’équilibre et bascula dans l’eau, la tête la première.
Sandre fit se rétracter la chaîne rapidement et saisit la faucille.
Il bondit et monta sur le dos de la statue, qui n’avait pas eu le temps de se redresser. Là, il lui entoura le bassin de ses jambes et lui coinça la lame recourbée de sa faux sous la gorge. Cela avait beau être de la pierre, peut-être qu’en la tailladant…
La statue se remit sur ses pieds à toute vitesse et balança sa tête en arrière. Son crâne heurta le visage de Sandre de plein fouet, et lui éclata le nez et les lèvres. Le jeune homme tomba en arrière, la face maculée de sang.
Zimo le vit disparaître dans l’eau.
Il lança un cri de guerre et s’élança. Il frappa. Mais son attaque était ridicule. La statue n’essaya même pas de l’éviter. La lame de sa dague rebondit vainement contre la carapace de roche. Alors elle balança son espadon vers lui.
Avec agilité, il sauta par-dessus, et la lame frôla ses pieds et lui emporta même une chaussure.
Il roula souplement dans l’eau et se redressa.
La Flèche Blanche n’était pas intervenue du combat. Elle se contentait de… tourner autour de la statue, en maintenant de la distance entre elle et lui. Comme si elle observait l’affrontement et tâchait de rester toujours dans son dos pour ne pas qu’elle le remarque.
Mais Roderick ne restait pourtant pas les bras croisés.
Laissant ses trois compagnons occuper la créature, quitte à prendre des coups, il n’avait pas lâché la statue des yeux depuis le début. Il la fixait, analysant chacun de ses gestes, mémorisant ses déplacements, essayant de comprendre son fonctionnement… Puis, son regard s’illumina.
-Elle répète les mêmes mouvements ! cria-t-il. Depuis le départ, elle ne cesse d’enchaîner des coups identiques, de façon aléatoire, mais bel et bien identiques !
-Quoi ? fit Zimo.
-C’est comme un automate, insista Roderick. Ce n’est pas vivant ! Ce n’est pas la statue, qui parle, mais l’être qui la contrôle ! Ou, tout du moins, qui a enregistré ses techniques ! Une fois qu’on a compris l’éventail de ses attaques, elle n’est plus dangereuse ! En revanche, ce n’est pas elle qu’il faut viser pour la neutraliser, mais son maître !
Roderick ne chercha pas à savoir si Zimo avait compris ou non. Il lança des regards à droite et à gauche. Ça ne devait pas être difficile… Il y avait forcément quelqu’un qui commandait ses actions… Non, si elle était directement manipulée, telle une marionnette, ses actions ne seraient pas aussi mécaniques, aussi cadencées, comme une chorégraphie.
C’était des attaques qu’on lui avait magiquement apprises, et qu’elle reproduisait dans l’ordre qui lui paraissait le plus adapté selon la situation.
Enfin, il n’avait pas beaucoup de temps. Zimo n’occuperait pas la statue une éternité.
Le Khajiit, justement, vit Roderick s’élancer dans la forêt et disparaître dans la brume.
« Il nous abandonnes ?! pensa Zimo. »
Mais il repensa à ses paroles. Des coups identiques ? Aléatoires ?
Le vrombissement de la lame le tira de ses pensées, et il se baissa juste à temps. Elle effleura son crâne, sans le toucher. Effectivement, il lui semblait qu’il commençait à s’habituer. Il esquivait ses attaques plus facilement qu’auparavant.
Certes, sa rapidité était prodigieuse, et sa force dépassait toute mesure, mais une fois qu’on avait compris son mode de déplacement et sa façon de combattre…
A bien l’observer, effectivement, les coups qu’elle donnait n’étaient pas très variés.
Elle frappa. Zimo bondit en arrière pour esquiver. La lame le rata de trente centimètres.
« Un coup de tailles, de gauche à droite, se dit Zimo. Comme celui-ci. Un coup vertical de bas en haut, aussi. Et puis, son coup de pied… »
Au moment où il pensait à cela, la statue replia sa jambe avant de la détendre violemment. Le Khajiit exécuta une pirouette et le pied de pierre passa à côté de lui et pulvérisa un tronc d’arbre, juste derrière.
Alors, elle bondit en l’air.
« Ce saut également est très répétitif, pensa Zimo. Je sais exactement où elle va retomber. »
Il l’esquiva sans trop de problème, bien qu’il dû ensuite courir pour s’en éloigner, car elle balança son espadon de gauche à droite, comme il l’avait prévu. Il se remit en garde, un sourire sur le visage. Enfin, la chance commençait à tourner.
Il rangea sa dague à sa ceinture. Il n’en avait pas besoin.
-Amène-toi, lança-t-il à son adversaire. Maintenant que j’ai compris comment tu fonctionnes, tu n’as plus aucune chance !
-Imbécile, gronda la statue. Je vais expédier ton âme corrompue de pêcheur au plus profond des enfers !
-Cause toujours !
Elle fondit sur lui, la lame en avant, à une vitesse extraordinaire, à tel point qu’elle en devint floue.
« Tiens, je n’ai encore jamais vu ce mouvement, pensa Zimo une seconde avant qu’elle ne le heurte. »
L’extrémité de la lame le cueillit à l’estomac. Il fut soulevé de terre dans une explosion d’eau, et projeté dix mètres plus loin, après un vol plané magistral. Son corps désarticulé percuta un arbre, chuta dans l’eau, flotta à sa surface et ne bougea plus.
Le silence revint, dans le marais.
Mais il en restait encore un.
La statue essuya le sang sur le bout de sa lame et se remit en marche, à la poursuite du vieillard.
Roderick regarda à droite à gauche. Il ferma les yeux et tenta de repérer sa cible par les autres sens dont il disposait que la vue. Il savait pertinemment que le maître de la statue n’était pas loin. Animer un avatar était une chose épuisante, et moins la distance était grande entre le manipulateur et sa marionnette, plus l’enchantement était puissant.
Soudain, il entendit une branche craquer.
Avec une vélocité exceptionnelle, il s’élança dans la direction du bruit. Il écarta deux lianes sur son passage et tomba nez-à-nez avec celui qu’il cherchait, caché entre deux arbres.
C’était un être décharné qui avait dû avoir une allure humaine, jadis, mais qui ne ressemblait plus aujourd’hui qu’à un cadavre maintenu en vie par une magie ancienne. Les cheveux longs, blancs, et ébouriffés, et une impressionnante barbe lui descendant jusqu’au bas du ventre, le vieillard squelettique qui se tenait devant Roderick ouvrit la bouche et tendit un doigt accusateur en avant.
-Toi, grogna-t-il d’une voix plus bestiale qu’humaine, tu vas mourir !
-C’est vous qui avez donnés vie à cette statue ?
-Je suis le gardien du sanctuaire ! Le défenseur de la tombe du grand Darius ! Misérables profanateurs, fous que vous êtes ! Vous périrez jusqu’aux derniers !
Roderick perçut des bruits de pas, lourds et imposants, au loin. Et ils se rapprochaient.
Il n’avait pas besoin de se retourner pour savoir que la statue était là, et qu’elle arrivait. Le vieillard afficha un large sourire cruel.
-Prie les dieux, pêcheur !
-Arrêtez votre statue.
-Meurs !
-Arrêtez-la !
-Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha… !
Le pied de Roderick se détendit à une vitesse surhumaine et claqua en percutant la tempe du vieillard. Le rire de ce dernier se stoppa immédiatement, et il s’écroula, la nuque tordue dans un angle improbable.
Une goutte de sueur coula le long de la joue de Roderick lorsqu’il jeta un œil sur sa droite.
L’immense lame de l’espadon de pierre était figée à quelques centimètres de sa tête. S’il avait agis une fraction de seconde plus tard, il serait mort.
Il se retourna. La statue, redevenue une simple roche à forme humaine, était immobile, en position de combat. Roderick soupira. Des papillons se mirent à voleter autour d’elle, et la brume s’écarta. Une fissure apparut sur la lame de l’épée.
Puis, une deuxième se forma sur le bras de la statue et remonta jusqu’à son épaule, avant de traverser son cou et son visage. Une troisième barra sa poitrine avec un craquement sonore.
Alors, petit à petit, la statue se mit à tomber en morceau. Son espadon, d’abord, se réduisit en miette. Les débris disparaissaient dans l’eau dans une série de clapotis. Ce fut ensuite son corps qui se désagrégea et s’évapora.
Il y avait quelque chose d’irréel dans la scène qui se déroulait sous les yeux de Roderick.
En quelques instants, la statue avait intégralement disparue. Il ne restait plus que des morceaux de marbres, au fond de l’eau.
Comme s’ils avaient attendus ce signal, les papillons s’envolèrent de nouveau. Et la brume se remit à flotter dans l’air.
Roderick passa sa main dans les cheveux.
-Eh ben, soupira-t-il. On peut dire qu’on a eu chaud.
That was epic
Bon chapitre !
Zimo va pas survivre pas avec toi Peil ou alors t'as changé
Si zimo meurs, on pissera sur toi Peil
Sincerement, Zimo m'intéresse pas trop Il est "ordinaire" comparer aux autres..
Je ne pourrait pas être aussi "rage" que quand Peil a fait crever Fenrir, heureusement il l'a ramené après
Si Roderick meurt par contre ...
Chapitre 33 :
Roderick revint lentement à l’endroit où se trouvait la pierre tombale. Le sort d’illusion s’était évaporé, il le sentait. Quant à l’aura qui imprégnait les lieux, elle avait disparue.
Il vit le corps de Zimo flotter dans l’eau boueuse, silencieusement. Le Khajiit était évanouit. Un peu plus loin, Edwin semblait avoir subis le même sort. La Flèche Blanche se dirigea vers lui et se pencha en avant.
Il secoua sa manche et une petite fiole en sortit. Roderick saisit la tête du mage, la releva, et lui versa l’intégralité de la potion dans la bouche.
-Bois ça, dit-il. Une potion de guérison. Ça m’a coûté cher mais…
Une fois qu’Edwin eut entièrement ingurgité le liquide, il se mit à tousser. Ses blessures semblèrent se refermer en accéléré, et bientôt, il ne resta plus sur lui que de légères cicatrices, souvenirs de son combat contre la statue.
Il ouvrit péniblement les yeux, les cligna une dizaine de fois, comme s’il était éblouit, puis se redressa. Instantanément, il écarta les doigts et matérialisa deux globes d’énergie dans ses mains. Roderick s’écarta vivement.
-C’est moi ! C’est moi !
-Hein ? Mais qu… Ne restez-pas à découvert ! La statue est là ! Elle…
Il tourna la tête à droite et à gauche pour se rendre compte qu’il n’y avait plus le moindre ennemi aux alentours. Alors, il fronça les sourcils. Il devait maintenant se demander pourquoi il ne ressentait aucune douleur ni aucune fatigue.
Puis, il comprit.
-Vous m’avez soigné ? lança-t-il au vieillard.
-Oui, répondit Roderick.
-Et vous avez… vaincu la statue ?
-On peut dire ça.
Si Roderick pensait que le mage allait lui être reconnaissant, il se trompait. Edwin fit une grimace de colère et frappa son poing droit contre sa paume gauche avec hargne. Il baissa les yeux et étouffa un juron.
-Merde, murmura-t-il. Je me suis fait battre comme un bleu… J’ai même frôlé la mort. Je suis encore loin de votre niveau. Et du « siens ».
-Tu sais, mon garçon, la vie n’est pas une compétition. Il me semble que j’ai un peu plus d’expérience du combat que toi. Tu n’as pas à t’en vouloir d’avoir perdu.
-Anor l’aurait vaincu.
-Pas à ton âge. Maintenant, cesse de te morfondre et va soigner les autres. Ils sont encore vivants.
Edwin sembla se souvenir qu’il avait des compagnons. Il se releva en prenant une expression agacée, jeta un regard dépité à ses vêtements complètement trempés, puis s’approcha de Zimo. Il se pencha au-dessus du Khajiit et fit passer sa main sur son épiderme.
Une douce lumière jaillit de ses doigts et Roderick vit les plaies de Zimo se refermer les unes après les autres. Le sang qui maculait ses lèvres rentra même dans sa bouche, comme aspiré. Cela fait, la lumière s’éteignit, et Zimo ouvrit les yeux.
-Oh, merde, dit-il. Elle va me tuer !
Il se rendit compte à son tour que tout était finit. Il se gratta la tête bêtement.
-J’ai… J’ai vu ma vie défiler devant mes yeux. Sérieux.
Soudain, un homme sortit brusquement de l’eau, à leurs côtés. Tous tressaillirent. Il avait le visage couvert de sang, le nez éclaté, et sûrement la mâchoire brisée. Mais une lueur de lucidité brillait encore dans ses yeux.
C’était Sandre.
Edwin écarquilla les yeux.
-Bordel de… Par Azura, ce type est encore conscient ? Il est fait d’acier ou quoi ? Il a dû prendre encore plus de dégâts que moi.
-Sandre, ça va ? fit prudemment Zimo.
Sandre cligna trois fois des yeux avant de basculer en arrière. Roderick le rattrapa in-extremis.
-Occupe-toi de lui, ordonna-t-il à Edwin.
Le mage s’exécuta. Lorsque le Bréton fut guérit, il passa sa main dans ses cheveux, doutant de ce qui lui était arrivé.
-Alors cette statue est vraiment hors d’état de nuire ?
-Définitivement, fit la Flèche Blanche. Je m’en suis personnellement chargé.
-J’espère qu’on ne tombera pas sur un autre adversaire de cette carrure.
-J’espère au contraire que si, dit Edwin. Que je puisse prendre une revanche.
-Il ne pense qu’à se battre, celui-là, lâcha Zimo en secouant la tête. On vient de réchapper à une mort plutôt atroce, ça ne te suffit pas ?
-Le combat est le seul moyen de dépasser ses limites. Particulièrement lorsque c’est un duel à mort.
-Quelle philosophie…
Soudain, Sandre s’exclama :
-Eh ! Regardez là-haut !
Tous tournèrent la tête vers l’endroit qu’il désignait. Le sommet de la pierre tombale.
Une sorte de bâtonnet noir, fixé sur la roche par des petits crochets, terminé par un joyau luisant. Une balise ! Comment avaient-ils fait pour ne pas la repérer avant ?
-Je suis le seul à me demander comment les organisateurs de la Grande Marche sont parvenus à percher leur balise là-haut sans réveiller la statue où se faire piéger par le sortilège d’illusion ? s’enquit Zimo.
-Non, répondit Roderick, mais une chose est sûre : Cette balise n’est pas une illusion.
Ils s’élancèrent tous vers le rocher et l’escaladèrent rapidement. Lorsque Sandre approcha son bracelet de la balise, le joyau clignota d’une manière étrange, comme si une flamme vacillante se trouvait à l’intérieur et s’allumait, puis s’éteignait, à intervalles rapides et réguliers.
Lorsque les clignotements cessèrent, unes des perles sur le bracelet s’illumina légèrement. Sandre la porta à hauteur de ses yeux et sourit.
-Et d’une !
Tous l’imitèrent et bientôt, chacun eut une perle luisante à son bracelet.
Après ces mésaventures, ils se remirent en route.
La nuit n’allait pas tarder à tomber, aussi décidèrent-ils de s’arrêter dans un endroit qu’ils considérèrent comme à peu près sûr. Ils ne purent pas allumer de feu, le marais étant un endroit beaucoup trop humide. Ce fut dans le noir total qu’ils dînèrent, puis s’endormirent.
Le lendemain, ils repartirent aux aurores.
Sandre ne cessait de bâiller en marchant.
Le marais brumeux portait bien son nom. Plus ils s’y enfonçaient, plus le brouillard devenait épais. Et le silence qui régnait sur les lieux était plutôt gênant. On n’entendait que le clapotis de l’eau, autour de soi, et parfois le croassement d’un corbeau, au loin.
Quant aux arbres, dans la brume, ils donnaient l’impression d’être les gardiens tortueux d’un endroit froid et silencieux, immobiles mais prêts à se mettre en mouvement sitôt qu’on leur tournerait le dos.
Sandre n’aimait pas ça, cette sensation d’être entouré… d’être cerné. Et plus il avançait, plus les arbres se rapprochaient, et devenaient de plus en plus serrés. La végétation aussi devenait plus dense, et l’eau plus profonde.
A côté de lui, Zimo chasse un insecte qui lui tournait autour, d’un air agacé.
Soudain, Sandre frémit. Là, dans la brume, pendant une fraction de seconde, il avait cru voir une silhouette passer vivement derrière son compagnon. Sans faire le moindre bruit, malgré l’eau au sol et les fougères qui bruissaient dès qu’on les frôlait.
Zimo remarqua l’expression du jeune homme.
-Eh, ça va ?
-Euh… Ouais. Ouais.
Sandre se frotta les yeux et fixa l’endroit où il lui avait semblé apercevoir la silhouette. Rien. Il se remit en marche, perplexe. Alors une autre vision s’offrit à lui, un peu plus loin, entre les arbres.
Au milieu de la brume, un individu se dressait là et fixait la petite troupe. Sandre écarquilla les yeux. C’était un Khajiit à la fourrure d’un blanc immaculé. Seul son visage était clairement discernable, le reste de son corps étant perdu dans le brouillard.
Le jeune homme resta bouche-bée. Le Khajiit le remarqua et lui fit un clin d’œil avant de porter son index devant ses lèvres, et de murmurer un « chut ». Puis, il disparut dans la brume, comme s’il n’avait été qu’un mirage.
Zimo posa sa main sur l’épaule de Sandre, ce qui fit sursauter ce dernier.
-Tu es sûr que tu vas bien ? T’as l’air bizarre depuis tout à l’heure.
Intriguant ce Khajit
Bonne suite!
T'as pas honte de t'arrêter à un moment pareil?
le kahjiit blanc ne serais pas le kahjiit voleur qu'on voit au début de la course?
Surement car on a souvent entendu parler d'un khajit a la fourrure blanche.Il ressemble beaucoup a Fenrir niveaux caractère(espiègle...)
Fenrir 2.0
OH OUI!!!!! Un nouveau Fenrir Levenni j'ai deja entendu ce nom dans La Fleche Blanche mais la flemme de chercher