Attendu de pied ferme par toute une communauté d'amateurs éclairés, la suite de Danganronpa déboule sur Vita quelques mois seulement après la sortie du premier volet. Si vous n'avez encore jamais entendu parler de ce titre, imaginez un cocktail détonant entre un Virtue's Last Reward et un Ace Attorney, et vous aurez déjà une petite idée de ce qui vous attend dans Danganronpa 2.
Danganropa est de ces petites merveilles méconnues du grand public qui ne peuvent compter que sur le bouche-à-oreille pour toucher les joueurs les plus curieux. Car le concept de ce titre est déjà assez particulier en soi, mixant sans complexe des notions de « visual novel » à des procès de type Phoenix Wright, le tout sur fond d'enquête à la Détective Conan. Pour l'atmosphère, Danganronpa 2 : Goodbye Despair flirte davantage avec un Battle Royale, voire un Assassination Classroom, avec une touche de Doubt/Judge en bonus. Des influences qui parleront donc surtout aux amateurs de mangas qui n'auront d'ailleurs sans doute pas manqué de noter que le premier Danganronpa a déjà eu droit à sa propre adaptation animée au Japon.
Du voyage scolaire au huis clos sanglant
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Avant de se lancer dans Danganronpa 2, il est préférable d'avoir terminé le premier volet, ne serait-ce que pour être en mesure d'apprécier les multiples rebondissements du scénario, d'autant que les liens qui unissent les deux histoires se font de plus en plus étroits à mesure qu'on approche du final riche en révélations. Le canevas de cette suite est d'ailleurs très proche de celui du volet précédent, si ce n'est que l'aventure ne prend plus pour cadre la Hope's Peak Academy mais une île paradisiaque sur laquelle se déroule une sortie scolaire apparemment tranquille. Celle-ci fait office de prologue à ce deuxième épisode qui démarre en douceur pour nous permettre de faire connaissance avec nos nouveaux compagnons d'infortune prisonniers de Jabberwock Island.
Car les événements tournent vite au drame, dès lors que l'ours en peluche psychopathe Monokuma fait son entrée en scène, faisant au passage d'Usami (le lapin rose qui vous sert de prof) son souffre-douleur. En quelques minutes, tout bascule. En tant que proviseur de l'académie, Monokuma énonce les règles implacables qui vont transformer le voyage scolaire paradisiaque en un huis clos terrifiant où le doute et la suspicion seront au coeur du jeu. Se délectant par avance des drames qui vont se jouer sur Jabberwock Island, Monokuma explique à Hajime Hinata, le garçon que vous incarnez, et aux 15 autres élèves concernés que, pour quitter les lieux, ils seront contraints de s'entre-tuer !
Plus précisément, pour gagner le droit de quitter l'île, un étudiant doit réussir à perpétrer un meurtre sans que personne ne parvienne à deviner son identité. S'il est désigné coupable à l'unanimité lors du procès, il est condamné à mort et immédiatement exécuté par Monokuma qui trouve toujours un supplice bien sadique à infliger à ses victimes. Si les étudiants se trompent lors du procès, ce sont eux qui sont exécutés et le vrai coupable est libéré. Dans la pratique, l'échec conduit à une situation où les autres élèves perdent confiance en vous et vous désignent comme auteur du meurtre, ce qui vous oblige simplement à recommencer depuis la dernière étape du procès en cours. Contrairement à ses camarades, qui ont tous été choisis parce qu'ils font partie de l'élite de l'humanité (on y trouve la gymnaste ultime, le cuisinier ultime, la gameuse ultime, etc.), Hajime ignore quel mystérieux talent lui a valu d'être sélectionné. Ce dont il est certain, en revanche, c'est qu'il ne peut réellement faire confiance à personne, même si les journées passées en compagnie de ses camarades le pousseront fatalement à s'attacher à certains d'entre eux.
« Free Time »
On retrouve ainsi des phases d'aventure assez libres durant lesquelles on peut se balader où on le souhaite dans les environnements du jeu, sachant qu'à chaque nouveau chapitre un portail s'ouvre vers une autre portion de l'île. Le style graphique très particulier du premier volet a été repris dans Danganronpa 2 où la réalisation en 2.5D donne aux protagonistes des airs de PLV plantées dans des décors en carton qui se déplient sous nos yeux façon Paper Mario. On peut faire pivoter légèrement la caméra pour déceler des personnages ou des éléments cachés dans le décor, ou bien recourir à une option qui permet d'afficher directement tous les éléments avec lesquels il est possible d'interagir. Lorsqu'on entame une discussion, le profil des interlocuteurs apparaît en gros plan, la grande majorité des dialogues étant doublée en anglais et en japonais (au choix).
L'exploration des bâtiments s'effectue en vue subjective, alors que les déplacements en extérieur sont à la troisième personne, ce qui apporte un soupçon de variété aux phases de type exploration. Plus important, les allers-retours étant nombreux, la map permet de se téléporter directement à certains points de l'académie et indique l'endroit où se trouve chaque étudiant à n'importe quel moment de la journée. Chaque jour, on sait qu'un meurtre va être commis mais la mise en place de celui-ci implique un développement de l'intrigue assez poussé qui passe par de très nombreuses discussions avec les autres élèves, ce qui pourra rebuter les joueurs les moins patients. Libre à vous, en tout cas, de choisir les personnes avec lesquelles vont déciderez de passer un peu de temps avant qu'un nouveau cadavre ne soit découvert. Partager un peu de complicité avec eux sera de toute façon l'occasion de récupérer des "hope fragments" à échanger ensuite contre des skills utilisables lors des procès.
Des procès où chacun risque sa peau
Une fois un corps découvert, il convient d'examiner minutieusement les lieux pour récupérer les pièces à conviction qui prennent dans le jeu la forme de « truth bullets », des munitions qui vous serviront à contredire les témoignages de vos camarades ou au contraire à appuyer leurs théories. Si les procès rappellent évidemment le principe de la série Ace Attorney, l'ambiance en est diamétralement opposée. Ici, tout se fait dans la frénésie et la panique la plus totale, chacun essayant de démêler le vrai du faux pour tenter de sauver sa peau. L'autre intérêt des procès de Danganronpa 2 réside dans leur grande variété puisqu'ils font intervenir des phases de jeu allant du simple contre-témoignage à des épreuves de rythme ou de skateboard. Du grand n'importe quoi qui se révèle étonnamment efficace, d'autant que de nouvelles règles s'ajoutent au fil des chapitres pour venir complexifier le tout.
Par exemple, lors des contre-témoignages, des phrases parasites défilent à l'écran pour vous empêcher de vous concentrer sur les répliques défaillantes, et surtout pour vous empêcher de viser correctement celles-ci afin d'émettre une objection. La souplesse de l'interface offre toujours une alternative efficace au gameplay tactile, et le fait de pouvoir accélérer ou ralentir à loisir la vitesse des échanges verbaux permet de s'en sortir même lorsque tout le monde braille en même temps. Un désaccord brutal avec quelqu'un peut engendrer une sorte de duel où il faut « trancher » les répliques de son adversaire pour réussir à en placer une avant d'envoyer la « truth bullet » dénonçant la faille dans sa théorie. Le fait que les répliques s'affichent dans tous les sens et défilent dans toutes les directions ne rend jamais la tâche aisée, mais c'est également ce qui fait tout le sel de ces tribunaux.
Certes, le jeu est en anglais, mais on peut prendre le temps de consulter la description des preuves à tout moment et l'échec n'est jamais trop contraignant puisqu'on reprend toujours à la dernière phase du procès ou au début du dernier mini-jeu entamé. Parmi ces épreuves inattendues, Danganronpa 2 nous sert vraiment de tout : un jeu du pendu où il faut reconstituer un mot avec des lettres explosives, un QCM qui se déroule sur des parcours de skate de plus en plus ardu, ou encore des phases de rythme complètement frénétiques qui constituent généralement l'avant-dernière étape des procès. Le point culminant est atteint avec la reconstitution du crime façon planche de B.D. où l'on doit placer les événements clefs dans les bonnes cases pour démontrer la culpabilité du meurtrier. Vient alors l'inévitable sanction durant laquelle Monokuma inflige au coupable le supplice qui lui sied le mieux.
Toujours plus de contenu
Avec ses six chapitres, Danganronpa 2 bénéficie d'une très bonne durée de vie qui dépasse facilement la vingtaine d'heures de jeu, rien que pour le mode principal. S'ajoutent à cela des modes de jeu annexes et des extras que les fans se feront un devoir de débloquer. Le mode Magical Miracle Girl Monomi est un petit jeu d'action dans lequel le petit lapin rose doit enfermer ses adversaires dans des cercles magiques, un peu à la manière d'un Qix. Le Island Mode est davantage orienté aventure / gestion et prend comme point de départ l'hypothèse selon laquelle Monokuma aurait perdu contre Usami au tout début du jeu. Les élèves ont alors 50 jours pour mieux connaître leurs camarades afin de réunir tous les « hope fragments » requis pour quitter l'île. Un mode sans meurtre donc, où il faut assigner des tâches à chacun pour tenter de récupérer les matériaux requis pour fabriquer les objets demandés par Usami. Quant au mode Novel, il s'agit d'un pur visual novel dévoilant des éléments supplémentaires sur l'intrigue de Danganronpa et sa suite. Enfin, on trouve quantité de bonus (vidéos, artworks...) à débloquer en dépensant les pièces obtenues durant la partie. Du contenu bonus sympathique donc, mais qui reste assez marginal en comparaison de l'efficacité de l'aventure principale.
Points forts
- Scénario imprévisible et ambiance torturée à souhait
- Une nouvelle galerie de persos très travaillés
- La bande-son bien dans l'esprit du jeu
- Choix entre les voix anglaises ou japonaises
- Possibilité d'ajuster la complexité des procès
- La souplesse de l'interface (tactile jamais imposé, vitesse ajustable)
- Durée de vie solide (20-25 heures) et modes de jeu annexes
Points faibles
- Le prologue et les phases d'aventure un peu longuettes
- Toujours pas de traduction française
- Pas grand-chose de neuf par rapport au premier volet
Mission accomplie pour la suite de l'une des meilleures surprises de la Vita puisque, même s'il ne s'éloigne que très peu de son prédécesseur, Danganronpa 2 réussit à nous scotcher de bout en bout. La frénésie des procès compense la relative lourdeur des phases d'aventure, et le scénario va bien au-delà de la simple formule d'un Battle Royale. Un titre à découvrir d'urgence donc !