Resident Evil est une série comprenant beaucoup d'épisodes, beaucoup beaucoup d'épisodes. Il est donc logique qu'on y trouve quantité de scènes cultes, marquantes ou effrayantes. On se rappelle encore aujourd'hui de l'apparition du tout premier zombie, de Wesker se prenant pour Neo dans Code Veronica ou bien encore que ce cross over entre la série et Le Seigneur des Anneaux. Mais il y a pour moi une scène en particulier qui surpasse toutes les autres tant elle arrive au bon moment, tant elle est méticuleusement pensée... Et vous l'avez sûrement compris, c'est de ce passage dont nous allons ici parler.
Cette séquence, c'est tout simplement l'introduction du Hunter, qu'on croise dans le premier épisode de la saga. Pourquoi est-ce que cette scène fonctionne aussi bien ? Tout d'abord, il faut la contextualiser. En effet, elle arrive à un moment où on a déjà pris nos marques. On a visité une bonne partie du manoir qu'on commence donc à connaître, on a déjà affronté des chiens, des zombies et même récupéré des armes plus puissantes comme le fusil à pompe notamment. Qui plus est, la séquence arrive quelques minutes après l’affrontement d'un premier boss autrement dit la plante géante. Ceci n'est à mon sens pas anodin puisqu'en règle générale, dans la plupart des jeux vidéo, lorsque vous sortez d'un combat de boss, vous avez toujours droit à un répit, un moment pour souffler.
Ici, c'est tout le contraire puisqu'une fois ce combat terminé, qui vient de se dérouler à l'extérieur du manoir, on nous demande d'y retourner. C'est donc au moment où on revient dans le manoir Spencer que Shinji Mikami décide de faire apparaître le Hunter. Ici aussi, la façon de faire est millimétrée puisque l'instant où se déclenche la cinématique n'est pas lié à une action spécifique de notre part comme celle d'actionner un levier ou même d'ouvrir une porte. Le moment choisi est plus subtile puisqu'il intervient justement quelques secondes après avoir ouvert une porte, lorsqu'on déambule dans un couloir qu'on a par ailleurs déjà emprunté plusieurs fois et où il n'y a normalement aucun ennemi. L’effet est d'autant plus saisissant puisque rien ne nous a préparé à cette séquence qui arrive sans prévenir.
Cette dernière est effrayante pour trois raisons principales selon moi :
- Premièrement, elle se déroule en vue subjective. Elle nous met donc dans la position du prédateur, nous force à suivre son point de vue, ceci véhiculant un sentiment de stress encore plus fort chez le joueur d'autant qu'il se trouve être la proie. L'effet est particulièrement saisissant puisque le chemin parcouru par le monstre est celui que nous venons justement de prendre pour revenir dans le manoir.
- Ensuite, c'est la rapidité de la séquence qui amène également le malaise en nous faisant comprendre l'importance de la menace à venir. Le monstre se déplace très vite, ceci voulant dire que nous allons nous retrouver face à une créature inconnue et véloce dans les secondes qui vont arriver.
- Enfin, et cela peut paraître plus anodin, mais nous entrapercevons la main griffue de la créature qui ouvre par deux fois une porte. Bien que ceci ne débouche pas sur une mécanique de jeu (voulant par exemple qu'un Hunter puisse nous suivre d'une pièce à l'autre), en l'état, cela crée une vraie différence entre le zombie de base, qui ne fait rien d'autre que d'avancer et d'essayer de nous mordre, et le Hunter qui est présenté dès son introduction comme un chasseur (d'où le nom), une créature qui pense et qui n'a qu'une idée en tête : nous tuer.
D'ailleurs, cette cinématique est intimement liée aux secondes qui la suivent puisque si le joueur ne réagit pas suffisamment vite, il peut se faire décapiter par le Hunter, ceci lui faisant alors comprendre quelle menace le monstre représente.
Ainsi, en une cinématique et un court passage de jeu, renforcé par un excellent sound design (synonyme du cri strident de la créature et du bruit caractéristique de ses pattes griffues sur le sol), Shinji Mikami crée l'effroi chez le joueur qui redoublera alors d'attention à partir de ce moment là et sera à n'en pas douter bien plus réceptif aux sons environnants.
La séquence remplit donc parfaitement son office aussi bien d'un point de vue du spectateur que du joueur. Elle effraie, elle surprend et elle nous renseigne en même temps sur le fait qu'à partir de cet instant précis, l'aventure bascule vers une plus grande difficulté en nous réclamant bien plus de prudence et de réflexes.
Notons que la mise en scène est tellement forte et réussie qu'elle sera réutilisée à l’identique dans le remake du premier épisode mais aussi dans celui du récent Resident Evil 3 pour introduire le Hunter Beta.