Valve met les deux pieds dans le monde du TCG online avec Artifact, leur jeu de cartes inspiré de l’univers DOTA. Et s’il y a bien une chose de sûre, c’est que le géant américain ne fait rien comme les autres.
Vidéo-Test d'Artifact
Avec Artifact, Valve rentre dans un domaine qui semble à la fois lucratif et saturé, celui du jeu de cartes en ligne. Pour réussir dans ce milieu aux multiples prétendants, il faut savoir se faire remarquer en proposant quelque chose d’unique. En cela, Artifact réussit sur plusieurs points.
Un concept novateur
Le premier, c’est son gameplay, qui n’hésite pas à adopter quelques codes du MOBA, à commencer par le système de tours et de « lanes », ces dernières étant représentées par des plateaux. Ce sont donc sur trois boards en même temps que les joueurs vont devoir s’affronter, ce qui densifie déjà l’expérience d’un cran ! L’idée est de poser ses cartes, si possible sans vis à vis afin de pouvoir attaquer directement la tour adverse et lui infliger des dégâts. Si vous renversez deux tours adverses, vous avez gagné la partie. Une condition de victoire alternative consiste à détruire une tour, puis à détruire l’Ancien qui apparaît à sa place, celle-ci disposant de bien plus de points de vie. Une sorte de « tout pour le tout », en somme.
Pour arriver à vos fins, vous disposez de plusieurs types de cartes, dont les héros, bien évidemment indispensables à la victoire. Il s’agit de cartes puissantes avec des capacités actives ou passives dont la couleur détermine les cartes que vous pouvez sur le board qu’elles occupent. En clair, vous ne pouvez jouer des cartes rouges sur un plateau que si vous y contrôlez un héros rouge. Cette division des forces nécessite une importante gymnastique du cerveau puisqu’il faudra prévoir vos coups à l’avance. Où dois-je mettre mon héros ? Sur un plateau où je suis en sous-nombre pour protéger ma tour ? Ou sur celui où je domine déjà afin de détruire celle de l’adversaire plus rapidement ? Avec cinq héros pour trois boards, vous vous poserez souvent ces questions, d’autant que vous pouvez rejouer vos héros un tour après leur mort.
Tout cet aspect stratégique est ce qui fait la force d’Artifact. Il faut prévoir à l’avance nos futurs mouvements, mais aussi se donner assez de souplesse pour s’adapter à l’imprévu. En effet, chaque tour, des cryptides de base (les cryptides sont l’équivalent des créatures de Magic) et des flèches de direction d’attaque sont distribuées aléatoirement sur chaque plateau. Cela veut donc dire qu’un de vos héros peut soudainement se retrouver face à deux attaquants, à cause de ce simple tirage au sort. Heureusement, entre chaque tour, vous pouvez aussi acheter des objets à la boutique, via l’or glané en tuant les cryptides et héros adverses. L’avantage des objets, c’est qu’ils peuvent s’utiliser sans dépenser de mana et ne nécessitent pas la présence d’un héros d’une couleur particulière. Il est même possible de construire son deck avec l’optique de gagner un maximum d’argent rapidement, Artifact étant plutôt ouvert sur les différentes tactiques à employer pour gagner.
Artifact, trop cher ?
Il est fort possible que vous ayez déjà entendu parler du modèle économique d’Artifact si vous vous intéressez un peu au sujet. Non seulement il est payant à l’acquisition, mais en tant que vrai TCG, il vous incite fortement à passer à la caisse si vous voulez construire un deck potable, et pire encore si vous en voulez plusieurs. Le bon point, c’est qu’il est tout à fait possible d’acheter des cartes à l’unité, ce qui permet de trouver ce qu’il vous faut sans tenter aveuglément votre chance avec des boosters. Dans le cas où vous aviez de toute façon l’intention de mettre la main à la poche, Artifact vous permet donc de vous faire un deck précis et meta pour des frais moindres que dans la plupart des free-to-play. Toutefois, le système d’Artifact est bien moins intéressant pour quiconque aime butiner. En effet, il est impossible de gagner des cartes, ou une quelconque monnaie de jeu, dans les modes « free » d’Artifact. Vous pouvez participer à des drafts, des gantelets, jouer contre des amis ou l’IA, mais tout cela se fera seulement pour le fun, sans aucune impression d’avancer. Pour espérer gagner quelque chose, vous devez non seulement payer un droit d’entrée pour les formats prévus à cet effet, mais même avec un ratio de trois victoires pour deux défaites, c’est à dire meilleur que la moyenne des joueurs, vous ne faites que rembourser votre ticket. Il vous faudra quatre victoires pour deux défaites max pour gagner quelque chose (en l’occurrence, juste un booster, en plus du remboursement du ticket) et le "kill streak" ne peut pas dépasser cinq victoires (pour deux boosters). Ainsi, pour participer aux formats un tant soit peu compétitifs, plus de 60 % des joueurs seront obligés de passer à la caisse. Vous avez dit élitiste ?
En conclusion, deux visions s’opposent face à ce modèle économique. Certains y voient un système proche des jeux de cartes physiques et apprécient une construction de deck qui fait moins souvent appel à la RNG. Les autres s’inquiètent de l’argent qu'il faut mettre pour jouer, surtout quand on n’est pas encore sûr de son niveau. En d’autres termes, Artifact n’est clairement pas destiné à ceux qui ne veulent pas s’y investir à fond, ainsi qu’à ceux qui aiment changer régulièrement de deck pour varier leur expérience. Il s’adresse exclusivement à des joueurs passionnés qui ne jouent que pour le compétitif, n’offrant que peu de moyens de se développer aux autres joueurs. C’est à vous de voir dans quelle catégorie vous vous situez.
Points forts
- Le jeu sur trois plateaux inspiré du MOBA, ingénieux
- L’aspect stratégique omniprésent
- De vraies thématiques de decks
- Idéal pour les joueurs compétitifs
- Pouvoir acheter ses cartes à l’unité
Points faibles
- Aucun sentiment d’évolution pour 60 % des joueurs
- Coûte cher si on veut jouer plusieurs decks
- Animations de qualité discutable
- Manque de visibilité et de quelques fonctions lors de la construction de deck
S’il ne fallait juger que ses règles et son gameplay, Artifact est un excellent jeu de cartes qui impose une vision stratégique du placement. Il faut prévoir ses coups à l’avance et il est possible de renverser des situations compliquées sur de simples prises de décision. Le système d’achat objet offre plus de souplesse et les decks s’avèrent variés. Toutefois, son modèle économique, qui prend une part importante de l’expérience, le réserve aux joueurs qui n’ont pas peur de mettre des sous supplémentaires, ou qui comptent s’assurer d’avoir un niveau largement au-dessus de la moyenne des joueurs dans un jeu qui se veut d’office élitiste. Si vous voulez juste vous amuser, jouer de temps à autre ou si vous aimez avoir plusieurs decks compétitifs à votre disposition, nous vous déconseillons l’achat. Vous êtes prévenu.