Avec The Council, les français du studio Big Bad Wolf tentent une approche différente du jeu d’aventure narratif. L’intrigue est ici découpée en cinq actes épisodiques que le joueur découvrira au fil des prochains mois. Entre complots, manipulations, ésotérisme et rencontres avec différentes personnalités majeures de la fin du XVIII ème siècle, préparez-vous à affronter les conséquences de vos actes dans ce huit-clos politique et historique qui ne manque ni de charme, ni de bonnes idées.
Ce test concerne l'épisode 1 de The Council, The Mad Ones, dans sa version PC, PS4 et Xbox One.
Belle île en (Morti)mer
Dans ce premier épisode, le joueur fait la connaissance de son personnage, Louis de Richet, fils de Sarah de Richet, tous deux membres de la société secrète de l’Ordre Doré. Et des secrets, il y en aura à la pelle dans la suite des événements où se tisse un large voile de non-dits et de mensonges que l’on tentera de percer à la lumière de nos différentes rencontres. Après une courte, mais efficace séquence introductive chargée de nous inculquer sans tarder que tout choix entraîne des conséquences irréversibles, nous retrouvons Louis au pied de l’imposant manoir de l’énigmatique Lord Mortimer, sur une petite île perdue au large des côtes anglaises.
Derrière les apparences d’une réception mondaine où certains des plus grands noms de l’époque sont conviés, Louis sait que plane un important mystère lié à la récente disparition de sa mère sur l’île. Notre objectif principal sera donc de tout faire pour la retrouver en actionnant différents leviers narratifs aux effets plus ou moins directs sur le court, le moyen et le long terme de l’aventure.
La liste des invités participe à la réussite narrative de The Council puisque le titre utilise un contexte et des figures historiques pour la plupart réelles dans le but de mettre en place une intrigue héritière des grands classiques du roman d’enquête criminelle. Ne vous étonnez donc pas de croiser un tout jeune Napoléon Bonaparte au détour d’un couloir ou de tailler le bout de gras avec George Washington himself au coin du feu. Si chacun des onze invités représente l’opportunité de faire progresser l’enquête, il faudra aussi jouer de finesse et de compétences sociales afin de découvrir leur lourd secret.
Un RPG narratif
Car contrairement à une aventure narrative à la Telltale où les décisions se prennent le plus souvent en fonction de votre ressenti sur la situation, The Council aborde les interactions avec une approche assez unique en son genre, héritière de la patte RPG du studio français. Le joueur décide en effet de l’orientation narrative de son personnage grâce à un choix de classes initiales combinées à un arbre de compétences sociales à débloquer au fil des événements. Ces aptitudes vont lui permettre de gérer les événements avec plus ou moins de réussite, de faire basculer certaines situations, mais aussi de manœuvrer le savoureux casting d'interlocuteurs en jouant sur leurs forces et leurs vulnérabilités.
Les compétences de Louis peuvent être développées grâce à un système classique de points à attribuer dans différentes branches. Que vous choisissiez la voie de la diplomatie, celle de l’occultisme ou du détective, le choix vous appartient de rendre le personnage plus doué dans certaines actions plutôt que d’autres. Des compétences telles que la manipulation ou l’art de la psychologie ont un impact assez significatif sur les dialogues tandis que d’autres comme la connaissance historique ou la perception des détails ouvriront d’autres opportunités d’interactions avec les invités et l'environnement.
Il n’y a pas de bonnes ou de mauvaise façon d’aborder l’enquête de The Council, il n’y a que vos actes, vos choix et les conséquences de ces derniers. La plupart des décisions auront des répercussions sur la suite de l’aventure, au sein même de l’épisode en court, mais aussi sur la suite des événements dans les prochains actes. Les conséquences vont du simple fait de froisser la sensibilité d’un interlocuteur à des séquelles plus... physiques dirons-nous sans trop vous gâcher la découverte du jeu. Des décisions plus importantes que d’autres demandent de choisir entre certains embranchements massifs de l’intrigue avec pour conséquence directe la mise de côté définitive de plusieurs phases de gameplay ou rencontres avec les invités. Sans système de sauvegarde manuelle ou possibilités de réparer une bourde lors d’un dialogue, The Council nous met face aux conséquences de nos décisions. L’intelligence d’un tel système réside dans l’absence de Game Over ainsi que dans la nature définitive des actions du joueur au fil de l’enquête.
Verbal Kombat
Les combats traditionnels du RPG sont ici retranscrits par une mécanique de joutes verbales appelées les confrontations. À certains moments clés de l’aventure, Louis aura pour mission d’arriver à convaincre un personnage en plusieurs “round” durant une joute verbale que l’on pourrait rapprocher, tout du moins dans la mise en place, des batailles de jurons d’un Monkey Island. Les compétences acquises au fil du jeu, la dialectique, la compréhension du scénario et de la psychologie de son interlocuteur seront autant de facteurs avec lesquels jouer pour tenter de sortir vainqueur de ces duels verbaux. La facette RPG de The Council réside aussi dans la gestion de nos points d’actions, une ressource limitée dans laquelle Louis de Richet devra piocher pour réaliser certains choix de dialogue. Par l’exploration minutieuse du manoir de Lord Mortimer, les échanges réguliers avec les invités et la lecture d’ouvrages à dénicher au sein des lieux, le jeune Louis augmentera petit à petit sa maîtrise des relations sociales.
Doté d’un savoureux casting d’invités venus des quatre coins du globe, ce premier épisode à parcourir en moins de trois heures annonce une suite très prometteuse. Écriture convaincante, doublages anglais de qualité où chaque personnage y va de son accent natal, direction artistique maîtrisée, moteur graphique qui, sans en faire des tonnes, parvient à dépeindre un manoir aussi exubérant que mystérieux, ce premier épisode nous a séduit. Reste quelques animations faciales parfois un peu figées et une caméra un poil trop proche du personnage lors des phases d’exploration libre pour finir de vous présenter ce premier acte d’une aventure narrative dont on a hâte de démêler l’intrigue au fil des prochains mois.
Bande-annonce de The Council
Points forts
- Nos décisions ont de réelles conséquences
- Des compétences qui influencent directement le scénario
- Le casting de personnages historiques
- La direction artistique des lieux et des personnages
- Doublages de qualité pour la plupart des personnages (en anglais sous-titrés en français)
Points faibles
- Animations faciales parfois un peu rigides
- Caméra trop proche du personnage durant les phases d'exploration
- Quelques acteurs moins au niveau côté doublage
Avec The Council, le studio Big Bad Wolf explore et interprète à sa manière le genre de l’aventure narrative dans un thriller historique de choix… et surtout de conséquences. Là où trop souvent les jeux du genre nous donnent l’illusion d’influencer en profondeur leur scénario via nos décisions, le titre des Bordelais livre une vision plus audacieuse du concept où le joueur devra vivre avec les conséquences irrévocables de ses actes au fil des épisodes. Ajoutez à cela un casting haut en couleur de figures historiques, une intrigue bien ficelée, mélangez, et laissez vous charmer par le résultat.