Après des années d’absence en Europe, les jeux Digimon font depuis 2014 leur retour sur notre vieux continent pour le plus grand plaisir des nostalgiques et des fans des franchises japonaises. Franchise Après un Digimon Story : Cyber Sleuth plutôt réussi l’an dernier, c’est cette fois-ci un épisode de Digimon World, la plus fameuse sous-série de la franchise, qui arrive sur nos PS4 en ce début d’année 2017. Malheureusement, entre appels du pied un peu forcés à la nostalgie et innovations bancales, le titre peine quelque peu à convaincre.
Bande-annonce de Digimon World : Next Order
Toujours la même histoire (virtuelle)
Le pitch de Digimon World : Next Order est simple et à peu près identique à ceux des précédents jeux Digimon World : un jour, en se connectant à son MMO favori mettant en scène les Digimon, le personnage incarné par le joueur se voit aspiré dans le monde virtuel. Sa mission : rentrer chez lui dans le monde réel. Comment ? En explorant l’open-world que constitue le Digimonde afin de rassembler tous les monstres de pixels pacifiques qui ont fui la capitale suite à l’attaque d’un Digimon ultra-puissant. Pour ce faire, il sera évidemment secondé par sa propre créature… Ou plutôt, pour la première fois, par deux créatures !
Principale innovation du titre, quoiqu’un peu gadget, le fait d’avoir deux Digimon à gérer et à faire combattre ne change fondamentalement pas la façon dont on joue à Digimon World. Le titre utilise les mêmes règles que le premier opus PS1 original, si chères au coeur des joueurs qu’elles avaient été remises en place dans l’excellent Digimon World Re:Digitize. C’est à cet épisode très réussi sorti sur PSP et 3DS en 2012 et 2013 uniquement au Japon (mais dont une fan-traduction en anglais existe) que Next Order fait suite.
Retour aux sources côté gameplay
On commence donc avec deux Digimon très faibles et au début de l’échelle d’évolution (les niveaux commencent à bébé puis entraînement, disciple, champion, ultime et méga). Avant de pouvoir partir explorer le monde, il faut donc commencer par les faire digivoluer en créatures capables d’affronter les monstres sauvages sans broncher. Pour y parvenir, il faut s’adonner à l’incontournable salle d’entraînement de la capitale qui propose des exercices permettant chacun de booster certaines statistiques de ses monstres à chaque séance. Le choix des disciplines à son importance : dans Digimon, contrairement à Pokémon, un même monstre peut évoluer en plusieurs créatures différentes, selon ses statistiques de combat propres (force, points de vie, endurance, points de magie…) mais également d’autres comme son poids, son obéissance ou… sa saleté.
Car l’autre grosse composante est un aspect simulation de vie et gestion essentiel, le véritable ADN des Digimon (qui n’étaient à l’origine que des Tamagotchi améliorés). Féliciter ou gronder ses monstres quand ils ont mal agi, leur donner à manger quand ils ont faim, les emmener au petit coin quand ils ont une envie pressante, panser leurs blessures ou les emmener chez le médecin en cas d’infection… Sans oublier de garder un oeil sur leur âge, car les Digimon meurent de vieillesse au bout d’un moment et repartent au stade d’oeuf après une dizaine de jours in-game.
Si avec un Digimon à gérer, l’aspect simulation de vie et entraînement était plutôt agréable et ludique, vous envoyant parfois dans d’épiques chasses aux toilettes aux pires moments, avec deux monstres, cela devient assez vite irritant. Les cris des Digimon en stéréo sont assez vite insupportables et l’on a le sentiment d’être deux fois plus (et deux fois trop) sollicité. Digimon World Next Order donne d’ailleurs généralement l’impression d’être entre deux eaux : les mécaniques liées à l’évolution des Digimon ou aux effets des attaques ou des objets n’ont jamais été aussi clairs, mais paradoxalement, on se retrouve constamment bombardé de statistiques en tous sens qui donnent vite mal au crâne. Les deux opus précédents dans le même style étaient un peu plus cryptiques quant aux conditions des évolutions ou aux effets des items, mais nous laissaient nous focaliser sur l’attachement à ses créatures et à l’exploration, donnant moins l’impression de passer sa vie dans des menus où il faut toujours veiller à sélectionner le bon Digimon parmi ses deux compagnons.
Des combats (encore plus) déroutants
Finissons en évoquant ce qui est évidemment le plus important élément du gameplay, les combats. Comme les précédents Digimon World, Next Order utilise un système de combat semi-passif. Lors d’une rencontre avec un ou plusieurs adversaires, la caméra prend de la hauteur et se fixe, afin de délimiter une sorte d’arène où va se disputer le combat. Vos Digimon combattent seuls et comme bon leur semble dans des batailles en temps réel. Votre rôle consiste à établir une stratégie et un rôle pour chaque monstre (combats au maximum, économise tes points de magie, soit défensif…), à encourager vos Digimon en leur donnant quelques directives qu’ils peuvent suivre ou non (attends avant d’attaquer, fonce maintenant…) et à déclencher leurs attaques spéciales ou ultimes une fois celles-ci chargées au fil du temps.
Ce système de combat atypique faisait partie une grande partie du charme de Digimon World, mais là aussi, avec deux monstres à gérer en même temps, cela devient juste irritant et impossible à suivre, d’autant plus que la difficulté du jeu est particulièrement mal dosée. Dès la sortie du tutorial dans la première zone, ce sont des monstres qui peuvent facilement terrasser des Digimon disciples qui vous attendent. Il faut donc passer un long moment à l’entraînement avant de pouvoir partir à l’aventure, on ne peut pas espérer faire progresser son Digimon juste au fil des zones. Il est également très difficile de deviner à l’avance la puissance d’un monstre hostile et l’on est souvent contraint à devoir fuir, si l’on n’est pas mort en seulement deux attaques. Les choses s’équilibrent au fil de la partie mais l’accueil reste particulièrement aride, on aurait pu imaginer plus progressif et moins démotivant, tout comme l’idée de combats online asynchrones et de bourse d’objets en ligne qui font figure d’idées sous exploitées.
Les images d'illustration sont des screenshots éditeur.
Points forts
- Les codes et le gameplay de Digimon World parfaitement respectés
- Une pléthore de monstres à entraîner et évoluer : plus de 200
- Le nouveau système de binôme de Digimon à dresser, intéressant sur le papier
Points faibles
- Des graphismes hérités de la Vita, et ça se voit
- Le scénario et l’univers simplistes et peu inspirés, génériques
- La gestion de deux Digimon est plus prise de tête que satisfaisante
- Une difficulté très mal dosée
Bien qu’il respecte les codes fondamentaux de Digimon World et propose un contenu riche, Next Order déçoit par son manque de finition et sa difficulté mal dosée. Alors que Re:Digitize était un modèle en matière de progression et d’exploration, Next Order donne tout tout de suite sans parvenir à vraiment capter l’attention. Pas éblouissant ni très inspiré côté scénario, le jeu déçoit par son système de progression, aride et peu fluide. C’est d’autant plus dommage que cette version PS4 internationale sort un an après la version Vita d’origine, ce qui laissait le temps aux développeurs du jeu de corriger l’équilibrage. Les fans européens pouvaient espérer un meilleur retour aux sources.