Experience Inc. est en passe de devenir l'un des principaux pourvoyeurs en JRPG de la Vita, console qu'on a souvent dit mort-née mais qui, comme la PSP en son temps, vivote d'expédients typiquement nippons. Les Dungeon-RPG notamment, pour confidentiels qu'ils soient, s'y sont taillés une bonne place grâce à l'apport de l'éditeur dont le genre est la marque de fabrique : en deux ans ce ne sont pas moins de quatre jeux aux concepts similaires qui y auront trouvés leur place. Parmi ceux-ci, Stranger of Sword City est le troisième à débarquer, talonné de près par Ray Gigant.
Un avion disparait quelque part dans le ciel asiatique. Ailleurs, une boule de métal en fusion déchire le ciel avant de s'écraser au sol. Dans la carcasse encore fumante de l'appareil, une seule âme brille encore. Elle se lève et contemple ce qui l'entoure, ne distinguant qu'un grand terrain vague offrant le repos à ce qui semble être des débris de métal qui s'amoncellent. A peine a-t-elle le temps de reprendre ses esprits qu'une vouivre monstrueuse, vision irréelle pour ce quidam, se jette sur elle. Son salut viendra d'une jeune femme en habits de lycéenne qui d'un coup de sabre décapite le saurien. Elle se nomme Riu et explique à notre héro-ïne que son habitat sera désormais cet autre monde teinté de désespoir, celui de nombreuses autres personnes déracinées qu'on appelle les Etrangers.
Cette contrée inhospitalière semble tout droit sortie d'un conte fantastique pour le personnage créé par le joueur. S'y côtoient différentes races toutes arrachées de la même manière à leur monde, qui doivent apprendre à vivre ensemble pour survivre face aux monstres du coin et espérer un jour pouvoir rentrer chez eux. Ils se sont ainsi organisés en clans, les uns trouvant abri dans la coque d'un paquebot échoué en plein milieu des terres, les autres dans un véritable château au bord d'un lac, les derniers dans une guilde trônant au beau milieu d’Escario, la ville des épées. C'est ici que Riu vous emmène, car votre don fait de vous un élu, celui dont l'âme ne peut pas mourir. Ce talent particulier serait donc utile à la Guilde et aux autres factions, qui tous coopèrent à la lutte contre les Lineages, créatures hors-normes - même pour des monstres - renfermant les Cristaux de Sang porteurs d'espoir.
Voilà donc ce qui servira de leitmotiv tout au long du jeu : pour arriver à leurs fins, les forces en présence ont besoin de récupérer les cristaux de sang détenus par les Lineages qui se terrent dans divers donjons, avant de les offrir à l'un des trois meneurs dont Riu fait partie. Ils obtiendront en retour de nouveaux pouvoirs divins qui les aideront dans leur quête, complétant ainsi le cycle restreint de ce qui n'est au final qu'un "simple" Dungeon Crawler. C'est en effet le principal reproche que l'on peut faire à Tsurugi no Machi no Ihoujin (de son nom original), un classicisme lié à l'Histoire du développeur.
Avant de fonder Experience Inc., Chikami Hajime et Motoya Ataka travaillaient pour l'éditeur Michaelsoft, dans une équipe nommée Team Muramasa qui se spécialisait dans les Wizardry-likes. Wizardry (Sorcellerie en bon français) est souvent considéré comme l'un des Dungeon Crawlers les plus influents, ayant inspiré de près ou de loin bon nombre de grandes séries RPG qui perdurent encore aujourd'hui (parmi lesquelles Dragon Quest, excusez du peu).
La Team Muramasa engendra par la suite Experience Inc. qui reprit le flambeau et continua à créer clones et spin-offs de ce genre immuable et déjà bien codifié. Plusieurs volets de Generation Xth, Labyrinth Cross Blood, Students of the Round et leurs rejetons Operation Abyss et Demon Gaze. Ce n'est donc pas étonnant qu'avec un tel conservatisme, et malgré des tentatives de varier le cadre de ces jeux, Stranger of Sword City (qui s’insère originellement au beau milieu de cette généalogie) puisse paraitre bien trop classique. Que l'on considère ce trait comme un défaut ou une qualité.
Les chiffres dansent, tout se mélange
C'est ainsi que l'on retrouve presque copiées-collées les caractéristiques de leurs précédentes productions. La forme que prennent les donjons où l'on se déplace case par case, guettant le chemin vers le boss des lieux et les mécanismes à déclencher. Les combats au tour par tour, les adversaires apparaissant face au groupe à la manière d'un Dragon Quest, mais sur plusieurs plans difficilement atteignables avec des armes de corps à corps. Une difficulté parfois brutale bien sûr. Mais aussi et surtout la création libre des personnages qui composeront l'équipe.
Commençons par déterminer la race de la future recrue, parmi les 5 disponibles qui influeront sur ses statistiques initiales et maximales. Certaines seront parfaites pour les mages, d'autres plus adaptées aux combattants agiles, et les Humains plus équilibrés. Vient ensuite la Classe initiale, celle liée au système d'expérience et qui apprendra diverses techniques au personnage à mesure de sa prise de niveau. Donnons-lui un nom et un visage, et terminons sur un jet de dés pour assigner un total de caractéristiques bonus au nouveau-né. Avec tout ça, c'est tout le potentiel d'évolution et la finalité du personnage qui se retrouvent fixés au bon vouloir du joueur. Il faut toutefois comprendre qu'un personnage se gère sur le long terme : si Demon Gaze permettait de transférer librement des techniques d'une classe précise à toute autre unité, offrant donc une large flexibilité des tactiques, le système choisi ici est plus rigide mais offre une plus grande responsabilisation du joueur sur ses créations. Chaque unité peut alors changer de classe jusqu'à 5 fois par partie (les NG+ augmentant ce total) pour cumuler l'apprentissage des techniques, et équiper des Skills de diverses provenances pour former des classes hybrides. Initialement, seuls deux emplacements pour ces Skills sont ouverts mais atteindre le niveau 13 dans une classe augmentera cela jusqu'à un maximum de 8. Oh, ne croyez pas pour autant que le système est outrancier ; en reclassant le personnage, son niveau se retrouve divisé par deux, et celui-ci ne gagnera pas de point de statistiques avec l’expérience avant de rejoindre son niveau d'origine, uniquement des HP supplémentaires. Vous voulez un Samurai aussi fort qu'un Soldat et aussi agile qu'un Ninja ? Investissez du temps et vous l'aurez.
La version Xbox 360 d'origine, sortie en 2014 au Japon, présentait fièrement des personnages au dessin soigné. Illustrés par Yoko Tsukamoto, les personnages comme les monstres avaient une vraie patte artistique, le genre qu'on ne voit que rarement dans la production japonaise, ni dans l'occidentale du reste. Seulement voilà, ce style réaliste aux accents pompeux détonne un peu vis à vis des autres productions du studio, et n'est peut-être pas au gout de tout le monde. C'est probablement ce qui a poussé cette édition Vita/Xbox One à proposer une refonte supplémentaire de ces illustrations dans un style plus proche du manga (lorgnant sur l'ecchi, bien que beaucoup moins qu'à l'accoutumée), par l'illustrateur Okishiji En qui avait déjà sévi avec succès sur Demon Gaze. Sont concernés un nouveau jeu de portraits pour les personnages à créer, mais également les portraits des quelques PNJ et les trop rares artworks qui agrémentent les phases narratives.
Chacun aura son opinion sur chacun des deux styles. Les uns trouveront les premiers trop peu vivants, les autres critiqueront le manque d'originalité et la paresse des nouveaux designs qui nient l'intention première des créateurs du jeu en gommant le désespoir qu'elle transmettait. Mais avant de vous battre, sachez qu'il est possible de librement passer d'un style à l'autre par un simple choix d'option, et de panacher à loisir les portraits des personnages durant la phase de création. Comme ça tout le monde est content.
La seule vraie particularité de ce titre vis-à-vis des autres réside dans une mort possiblement définitive des personnages. En effet les unités possèdent un compteur de Points de Vie qui baisse à chaque décès, et influencé par l'âge choisi à la création. Un jeunot disposera de 3 points quand un octogénaire sera d'entrée en bout de course, avec toute erreur en épée de Damoclès au-dessus de la tête. Car un personnage atteignant le terme de ce que la génétique lui octroyait de ligne de vie retourne, non pas à la poussière, mais à une forme de joli lépidoptère bleuté. Comme une tentative du jeu d'amoindrir par ces papillons colorés l'ambiance pesante qui plane sur l'aventure. En contrepartie, l'âge croissant augmente le nombre de points bonus à allouer dans les statistiques. Créer un sénior sera donc plus dangereux en un sens, mais aussi bien plus puissant à moyen terme. Surtout quand on prend en compte les spécificités des statistiques et du système de combat.
C'est en scrutant les caractéristiques portées par les héros que l'on comprend ce qu'est le concept des jeux d'Experience Inc., en ce sens que l'effet qu'elles prodiguent va parfois à rebours des conventions du genre. Les HP (points de vie, déterminés par la Vigueur) et MP (points de magie) devraient être transparents pour qui a jamais touché un RPG, tout comme la statistique de Force qui ne conditionne que la puissance d'attaque effective, en conjonction avec celle portée par les armes. Pas grand-chose à dire non plus des deux statistiques magiques, l'Intelligence et la Piété qui toutes deux augmentent les MP disponibles, et respectivement la puissance des sorts d'attaque et de soin. La Chance est peut-être un peu plus importante que dans la plupart des RPG tant les altérations d'état et coups critiques peuvent véritablement ruiner une formation ou au contraire améliorer grandement les chances de victoire lorsqu'elles sont bien utilisées. Mais ici c'est bien l'Agilité qui trône au centre de ces statistiques, car en plus d'influer sur la puissance d'attaque des armes en main gauche (portées par nombre de classes d'attaque) et l’ordre d’action, elle conditionne avant tout les chances de porter un coup et de les éviter.
Stranger of Sword City exacerbe l'importance de ces Hit et Avoid : exception faite de la classe Knight, dont le seul but est d'attirer les frappes et d'agir comme éponge à dégâts, les personnages n'ont clairement pas les moyens d'encaisser les coups. Par conséquent, pour vos unités et - dans une moindre mesure - pour les ennemis, c'est leur capacité à esquiver qui constituera le seul rempart, et leur capacité à toucher juste qui fixe leur puissance d'attaque réelle. Bien que nombre de sorts permettent de manipuler ces deux traits, il n'est pas rare qu'un combat équilibré ne déroule un tour sans qu'aucun des deux camps ne prenne un coup, et on trouve même des techniques toutes entières basées sur cette mécanique, faisant attaquer un Samurai jusqu'à ce qu'une contre-attaque ne fasse mouche ; outrancièrement létal, mais aussi très risqué. Surtout avec le spectre constant de la mort permanente.
Permadeath, j'écris ton nom
Il faut dire que Stranger of Sword City n'est pas très hospitalier pour les nouveaux désireux de s'intéresser au genre, et c'est peu de le dire. Là où la difficulté de Demon Gaze était bien calibrée, Strangers semble plus s'inspirer d'Operation Abyss en la matière tant l'aléatoire pèse sur les mauvaises rencontres que ne manquera pas de faire votre équipe dans les labyrinthes. En effet si les combats sont souvent déclenchés en ouvrant des portes ou en marchant sur des dalles bien identifiées, on ne sait pour ainsi dire jamais à quoi s'attendre avant que les monstres n'apparaissent : une même case peut en effet abriter aussi bien deux ennemis faibles qu'une dizaine de créatures monstrueuses au niveau absurdement plus élevé que le vôtre, qui balayeront vos lignes en un seul coup si vous décidez d'engager le combat. La fuite sera souvent donc le seul salut, particulièrement au début du jeu où vos unités ne disposent pas de possibilités tactiques à même de contrebalancer la différence de niveau.
Et c'est bien là le principal souci, l'incapacité du jeu à utiliser la pédagogie et l'intelligence du joueur pour capter son attention. Usons à nouveau de la comparaison : Demon Gaze obligeait le joueur à composer son équipe petit à petit, avec l'augmentation graduelle de la puissance des lignes ennemies, et si l'obligation de s'acquitter d'un loyer substantiel à chaque retour au bercail pouvait paraitre lourde, force est de reconnaitre que la sensation de progression était bien réelle. On avançait à tâtons dans les nouvelles zones, engrangeant XP et richesses, et on s'y sentait très vite comme un poisson dans l'eau. Ici l'air est continuellement irrespirable du fait de la menace du one-shot rébarbatif ; le début de jeu n'est pas des plus amicaux alors que le premier contact devrait conditionner l'instauration du rythme et du feeling, et donc l'appréciation du joueur sur une bonne partie de l'aventure. Mettons-nous à la place du profane, ça ne donne pas vraiment envie de continuer. La loi de Murphy jouant, il arrive que le passage d'un croisement dans un couloir vous oblige à fuir en boucle des combat trop ardu jusqu'à tomber sur moins fort que vous, ou du moins sur une bataille équilibrée. Certes, certains pouvoirs vous y aideront - on le verra plus tard - mais cette difficulté parait un peu trop factice pour être honnête.
C'est la mode aujourd'hui, quand un jeu résiste un peu trop fortement il est de bon ton de tenter un rapprochement profitable (d'un point de vue marketing) avec la licence Dark Souls et assimilés de FromSoftware. Si comme l'auteur de ces lignes vous enragez dès lors qu'un éditeur tente indument le coup, sachez que malgré une difficulté de façade assez élevée, Stranger of Sword City n'en partage aucun lien de filiation. Au contraire, on reste ici dans la plus pure tradition des Dungeon Crawlers japonais.
Certes les DRPG d'Experience ont tendance à faire mourir les personnages à la moindre pichenette, et celui-ci force vraiment le trait : le début du jeu en particulier est assez ardu, les ennemis les plus faibles plafonnant au triple du niveau d'expérience de l'équipe. Un coup mal placé et le personnage meurt sans crier gare, et la mort permanente peut toucher tout un chacun, excepté le protagoniste principal. Avec une telle punitivité on enrage souvent, le Reset devient monnaie courante et la frustration bout sans discontinuer. Seulement voilà, les similitudes s'arrêtent là et SoSC comme ses ancêtres n'ont pas besoin de s'inventer de tels argument marketing pour trouver une personnalité propre. Bien que la mort d'un personnage reste relativement fréquente tout au long du jeu, plusieurs mécaniques viennent la mitiger, comme la facilité de fuite immédiate de tout combat excepté les boss, ou encore l'existence d'objets rares permettant de ressusciter une unité tombé au champ d'honneur ou de régénérer ses Points de Vie.
Il faut en plus de ça composer avec diverses contraintes selon les donjons. Sols empoisonnants, privation forcée de magie, combats à l'aveugle contre des créatures inconnues, monstres immunisés à la plupart des dégâts conventionnels, attaque inopinée de Lineage, et parfois tout ça à la fois. Ajoutons ces contraintes au large éventail de puissance des ennemis, et il devient difficile de savoir quel groupe d'ennemi est prenable et lequel il vaut mieux fuir comme la peste, ou d'évaluer s'il est pertinent de poursuivre une exploration dangereuse plutôt que jouer la prudence. On progresse donc dans le jeu à pas mesurés, appréhendant toujours le coup chanceux qui ruinera potentiellement les efforts de dizaines de minutes à arpenter les couloirs. Loin d'être mal vue, la couardise est ici autant encouragée que la prise de risque, et on prend vite le pli de rentrer au bercail sauvegarder nos nouvelles possessions. Demeure la menace du one-hit kill, ce qui ne serait pas un problème si la mort n'était pas ici définitive, ou presque. Nul joueur n'a envie de perdre irrémédiablement un personnage entrainé depuis plusieurs dizaines d'heures sur un coup du sort. S'il est possible de les laisser au repos sur une longue, trop longue plage de temps pour les faire récupérer d'un KO et même guérir leurs Points de Vie perdus, cela oblige à créer des personnages de remplacement souvent moins aguerris. On finit par s'y faire et créer son petit roster à faire tourner selon les situations et les besoins des donjons, à remplacer son Sorcier par une Danseuse aux altérations d'état dévastatrice le temps d’une exploration sous-marine, ou recruter une autre Kunoichi pour garnir la première ligne le temps que la première se remette de ses émotions. Le tout à contrecœur, ne vous y trompez pas.
Fort heureusement les choses s'améliorent peu à peu. Grâce au gain de skills venant proposer autre chose que de simples attaques à l'éventail d'options qui s'offrent à vous en matière de combat, le joueur a beaucoup plus la maitrise du flow des affrontements contre les nombreux ennemis. Quand un essaim s'annonce à 20 contre 6, disposer de techniques de crowd control n'est pas du luxe. Avoir accès aux attaques à longue distance du Ranger pour toucher un boss sur les lignes du fond est bien pratique. Pouvoir empêcher les ennemis les plus faibles de toucher vos personnages par un simple sort ou par l'intervention d'un paladin enfin en état de marche est également réconfortant. On comprend surtout que ce qui va primer dans ce jeu, c'est l'utilisation massive, vivement recommandée voire parfois obligatoire pour la poursuite de l'aventure, de tactiques de trappeurs à même d'améliorer grandement l'arsenal des Etrangers.
De proie à prédateur
Et en la matière c'est bien de farming massif que l'on parle. C'est bien beau d'avoir des personnages compétents, encore faut-il leur fournir un matériel à la hauteur des embuches qu'ils rencontreront. Et là ce ne sont pas les trois armes hors de prix de la boutique du musculeux nain du coin qui feront l'affaire ; il faut donc trouver un meilleur endroit pour se fournir. Demon gaze invoquait des cercles démoniaques, ici on tend des embuscades.
Nul besoin de piège à loup ou de lasso, juste de dépenser quelques points de la jauge de Morale. Vos équipiers n'ont besoin que d'un endroit calme où se faire discret en attendant un monstre puissant porteur d'un coffre sur lequel fondre. Celui-ci, aléatoirement choisi parmi tous les types de combat assignés à une zone, sera en général bien plus robuste que les ennemis normaux et aura parfois tendance à fuir avec le butin après quelques tours, d'où le besoin de bien évaluer la stratégie à adopter pour éviter de se retrouver Grosjean comme devant ou pire, mort. Il est même possible de choisir l'adversaire dans une certaine mesure, ou de fuir sans aucune pénalité en cas de problème. Mais pour gagner, il faut savoir prendre des risques. Une fois l'adversaire occis, reste à ouvrir le coffre sans déclencher son piège, en choisissant le plus susceptible de plomber chaque type de contenant ou, à défaut, en sélectionnant le moindre mal : mieux vaut perdre quelques HP ou MP que libérer un affreux Mimic ou empoisonner toute l'équipe. Ne reste ensuite plus qu'à empocher la mise et à recommencer à loisir l'opération, en gardant à l'esprit que le cout d'une traque dans une zone donnée augmente à chaque essai, et que le prochain combat pourrait ne pas aussi bien tourner.
On peut obtenir par ce biais des objets rares, puissants, améliorés par rapport à la normale et même certains équipements uniques Tout objet obtenu sur les monstres doit en revanche être évalué avant utilisation. Les compétences d'experts des membres de l'équipe suffisent en général, mais donnent parfois des objets maudits et inutilisables ; revenir en ville évaluera de toute façon le tout manu militari. Une mécanique assez vaine, il faut bien le dire, dont le jeu aura bien du mal à convaincre de l’utilité. On note d'ailleurs nombre de choses mal expliquées, notamment du fait d'une traduction parfois branlante dans la transmission du fonctionnement des Skills. D'autant plus dommage que l'ergonomie des menus est globalement bonne, et que des facilitations existent en et hors combat pour rendre l'expérience moins laborieuse : le déplacement automatique sur la carte déjà dévoilée, et l'accélération jusqu'à l'instantanéité des tours d'action, très utile pour se débarrasser sur menu fretin sans perdre de temps ou ne pas avoir à valider en boucle la même action dans les combats accrochés.
Dernier élément de gameplay qu'il nous reste à aborder, et pas des moindres en la présence des Divinités. En fournissant les Cristaux de Sang aux trois dépositaires de l'autorité des dieux, l'élu et son équipe obtiennent des fragments de leur puissance. En piochant ensuite en début de tour dans la jauge de Morale, qui augmente au gré des attaques, ils deviennent capables d'utiliser ces forces comme autant de tactiques aux effets immédiats et dévastateurs. Régénération de vie sur la durée, augmentation de dégâts des attaques, divers types de protection, et surtout buffs ou diminutions des fameux Hit et Avoid sur l'équipe et les ennemis, respectivement. Bien jongler avec cette jauge devient primordial pour mener les combats à bien. Le hic, c'est qu'on ne peut choisir pour chaque session de révélation qu'un seul pouvoir parmi les (généralement) trois disponibles, et que le total de cristaux sacrifiés à l'ordre, à la neutralité et au chaos va en outre conditionner la fin du jeu. Ceci étant, libre à vous de privilégier l'amélioration des tactiques les plus utiles à vos idées plutôt que la diversité de leurs pouvoirs, ou la relation tissée avec l'un ou l'autre des prophètes plutôt que la fin encourue.
Voilà ce que recèle Stranger of Sword City, en ce mois de mai 2016 où l'on apprend l'arrivée prochaine au Japon d'une version "ultime" du jeu qui contiendra nombre de remaniement, et notamment de nouvelles Classes de personnages qui faisaient un peu défaut ici. Peut-être cette nouvelle version rehaussera-t-elle aussi les graphismes, les donjons faisant pâle figure devant les superbes artworks originaux. Côté musiques, même constat du "bien mais peut mieux faire". Au travers de ces compositions sans génie mais instillant un vrai caractère, on reconnait parfaitement le compositeur attitré des D-RPG d'Experience, Naoaki Jimbo. L'utilisation fréquente de chœurs haut-perchés mélancholico-mystiques porte bien les combats les plus serrés, et le doublage intégral en japonais satisfera les habitués du JRPG. Les mêmes ne s'émouvront pas non plus de l'absence de traduction française pour un jeu aussi peu diffusé. Toujours est-il que sous des dehors bourrus, cet énième Dungeon-RPG de la Team Muramasa assure le job, en attendant mieux. On croise les doigts pour Ray Gigant ?
Points forts
- Une mécanique de fond solide
- Création de personnage intéressante
- Les amateurs de farming seront aux anges
- Portraits superbes, et chacun son style
Points faibles
- Presque identique sur la forme aux précédents titres
- On aurait apprécié un peu plus de variété
- La difficulté est surtout causée par des mécaniques mal foutues
- La conception des donjons, visuelle comme réflexive, fait peine à voir
Des mécaniques efficaces, de somptueux artworks, que demander de plus ? Plein de détails en fait : si elle repose sur des mécaniques intéressantes et bien rodées, cette version internationale de Stranger of Sword City est peut-être sorti trop tard, comme Operation Abyss avant elle. En débarquant après des opus (Demon Gaze, à nouveau) qui dynamitaient joyeusement les conventions, il ressemble parfois à un brouillon, ou à une pâle copie. Pourtant riches sur le papier, les systèmes de jeu (donjons, combats) comme la plupart des actifs (races, classes et surtout Skills) s'y retrouvent majoritairement à l'identique et si le jeu reste agréable, il porte un gout persistant de déjà joué. A réserver aux fans du genre, à même de lui passer ses errements.