Sous ses airs de Simulator, Coast Guard avait de quoi susciter une certaine méfiance. Si l'on s'en tient à l'habituelle qualité de ce genre de productions, on est en effet rarement satisfait du résultat. Seulement, et pour éviter les écueils inhérents à ce type de jeu, Reality Twist abandonne la simulation (même si celle-ci laisse quelques stigmates) et préfère transformer son soft en un ersatz d'enquête policière. Pari réussi ?
Sans briser un secret de polichinelle, Coast Guard ne sera sûrement pas le jeu qui arrivera à s'extirper de sa condition de titre de niche pour rejoindre les hautes sphères vidéoludiques. Ceci principalement à cause du grand nombre de problèmes qu'il se coltine et qui entachent d'une marque sanglante son aventure. Pourtant, celle-ci n'est pas complètement mauvaise : malheureusement, le studio a sans doute vu trop massif pour rentrer dans ses frais, et cela laisse une cicatrice béante sur le produit fini.
Simulation du dimanche
Si vous rêviez de réaliser le travail d'un garde-côte dans une pure simulation, ce qui inclut des éléments de gestion et une connaissance assez fouillée du domaine, ce n'est clairement pas ici que vous trouverez votre plaisir. Ce qui est un peu stupide pour un jeu qui s'appelle littéralement "garde-côte', mais ce n'était apparement pas l'idée du studio : celui-ci préfère créer une véritable aventure autour de ce métier, sans doute bien plus épique que dans la réalité. Vous incarnez donc un jeune garde côte du nom de Finn qui va irrémédiablement se retrouver dans la panade : sa nouvelle collègue Fatima vient de se faire enlever par des pirates (modernes, bien sûr). De ceci, le jeu se fragmente en quantité de petites missions qui sont chacune censées apportés leur bout de puzzle à l'enquête.
Alors évidemment, sous cet angle le jeu a l'air tout de même bien pensé, et sa structure en forme de mini-enquêtes évolutives donne au joueur une grisante sensation de réalisme. Enfin, encore faudrait-il que l'univers soit conçu en une sorte de petit monde ouvert où le joueur irait dénicher çà et là les diverses missions : seulement, et par manque de moyens j'imagine, le jeu est d'une linéarité exacerbée. Hors de question de s'éloigner des sentiers battus, car en vérité il n'existe aucune zone autre que celle que les développeurs ont très précisément définie. Bon, ils ont tout de même décidé de conserver les phases en bateau, car il ne faut pas oublier que vous êtes garde-côte quand même (et que c'est votre principal outil de travail), mais celles-ci aussi sont vraiment perfectibles.
Un véritable naufrage
Même si vous prenez les commandes du rafiot avec simplicité (ZQSD), cela est loin d'être gage de facilité. Déjà car l'engin est très lent, mais il est également muni d'une précision toute discutable : veillez à ne pas trop vous emballer à sa commande et jouez surtout de façon méticuleuse. Cela vous évitera déjà de vous y reprendre à 40 fois avant de redresser la barcasse, ce qui extrêmement gênant, et surtout vous fera passer le plus digestement des séquences d'une lourdeur sans nom. Le problème, c'est que tout le jeu est à l'avenant. Ayant sans doute vu très grand pour leur projet, les développeurs ont clairement zappé la case finition. Le jeu est premièrement truffé d'un nombre incalculable de bugs, entre retours à Windows et autres joyeusetés... il est assez rare de mener une partie à bien, sans que celle-ci bugge, voire carrément que la sauvegarde soit corrompue. Mais bon, si certains peuvent encore passer au-dessus de ce genre de détail si l'aventure est suffisamment convaincante, là non plus, ce n'est pas terrible.
Toujours avec un budget famélique, l'équipe n'a pas suffisamment approfondi son histoire et elle fait preuve par conséquence de facilités vraiment affligeantes à notre époque, sans parler de certains dialogues qui ont clairement été bouclés à la dernière minute, à en juger par leur innommable pauvreté. Et même si cela revient à tirer sur l'ambulance alors qu'elle est déjà bien amochée, il faut également souligner le moteur technique et la modélisation en général, qui alterne entre le "pas trop mal" (notamment l'aspect de l'eau) et le franchement immonde (la trogne des personnages). Nous pourrions également vous parler de la façon factice dont le studio rallonge la durée de vie avec des aller-retours incessants et très laborieux, mais ce serait inutile. Ne reste au final qu'une ambiance maritime pas trop mal retranscrite, mais c'est malheureusement tout.
Points forts
- Une aventure novatrice sur le papier
Points faibles
- Une optimisation complètement aux fraises
- Très moyen graphiquement
- Des dialogues pauvres et une histoire remplie de facilités
- Des déplacements très, très laborieux
Malgré la volonté de s'éloigner du carcan "Simulator" pour fournir une réelle aventure au joueur, Reality Twist se plante magistralement. Accordant sans doute beaucoup trop d'ambition à leur projet, alors qu'il n'était en possession que d'un minuscule budget, l'équipe a dû faire d'immenses concessions sur toute la production : un scénario affligeant soutenu par des dialogues risibles, une réalisation mi-figue mi-raisin, un rythme en dents de scie... Il y aurait beaucoup à dire pour énoncer tous les défauts que porte en lui ce Coast Guard. Dommage, pour une fois qu'un peu d'innovation était apportée à la recette.