Un mois à peine après La Descente, BioWare nous propose son ultime DLC, en guise de conclusion à Dragon Age Inquisition. Vous aviez trouvé la fin de celui-ci un poil bâclée et frustrante sur de nombreux points ? Intrus est là pour vous apporter tout un tas de réponses. Et comme il se déroule deux ans après les évènements du jeu, autant vous avertir d’emblée : ça va spoiler. Que ceux qui n’ont pas fini l’histoire principale retournent combler cette lacune avant de lire ce test ! Vous êtes toujours là ? Vous aurez été prévenus.
Ce qui suit a été rédigé sur la base d’une partie dans laquelle Cassandra est devenue la Divine, Blackwall a été pardonné, la Charge du Taureau et Sera sont toujours là, Célène, Gaspard et Briala ont trouvé un terrain d’entente, etc. Il est donc possible que certaines remarques soient basées sur ces éléments, mais qu’elles ne s’appliquent pas forcément à toutes les parties et tous les choix faits par d’autres joueurs.
L’avenir de l’Inquisition
Deux ans après la défaite de Corypheus et la fermeture définitive de la Faille, l’Inquisition est toujours en place, plus puissante que jamais. A tel point que les gouvernements des Etats voisins s’en inquiètent de plus en plus. Sous leur pression, la Divine Victoria convoque un conseil exalté à Halamshiral, afin de déterminer s’il faut placer l’organisation sous la tutelle de la Chantrie ou la dissoudre purement et simplement. La première option est soutenue par l’empire d’Orlaïs, représenté par Cyril de Montfort, fils de feu le Duc Prosper (mais si, vous savez bien, ce noble arrogant que Tallis et Hawke ont balancé d’une falaise) et dont les flatteries ne peuvent cacher les véritables intentions. La seconde solution, radicale, est réclamée avec force par le royaume de Férelden, qui a envoyé un Teagan aussi agressif, aigri et prématurément vieilli qu’il était conciliant, sympathique et avenant dans les deux jeux précédents.
Autant dire que l’Inquisiteur ou Inquisitrice et ses trois fidèles conseillers se font recevoir assez fraîchement et que les négociations vont s’avérer d’autant plus tendues que les intrigues politiques sont reparties de plus belle. Heureusement, vous retrouverez aussi vos anciens compagnons, qui ont tous continué leurs vies, plus ou moins éloignés de vous. Tous, sauf Solas bien sûr. Et leur soutien va devenir indispensable, lorsque le cadavre d’un Qunari en armes est découvert non loin du Palais d’Hiver. Très rapidement, il apparaît qu'il se trame des choses bien plus graves que ce que l’on pouvait penser.
Fen’harel et le Qun
Contrairement aux Crocs d’Hakkon et à la Descente, Intrus propose un scénario riche en informations et révélations, en plus d’être indispensable à la bonne compréhension du jeu. D’ailleurs, si vous y accédez également via la table de commandement, ce n’est plus sous la forme d’une zone à débloquer, mais bien d’une véritable mission reliée à la trame principale. Et une fois validée, vous ne pourrez plus retourner à Fort Céleste et finir vos quêtes annexes laissées de côté. Ce qui est logique, dans la mesure où les évènements se déroulent deux années après la fin officielle de la trame principale, qu'il est nécessaire d'avoir débloquée pour accéder à sa suite directe. Pensez donc bien à finir tout ce que vous avez à faire avant de vous lancer dans cette ultime aventure.
Avouons-le, la conclusion d'Inquisition était pour le moins frustrante et expédiée, sans même parler du combat contre Corypheus, à mille lieues de l’affrontement épique qu’il proposait dans l’Héritage. Après le générique, vous vous retrouviez avec plus de questions que de réponses et peut-être aussi le sentiment d’être passé à côté du véritable antagoniste. Mais pas de panique, Intrus est là pour éclairer votre lanterne, du moins en partie. Dans un premier temps, il se présente comme une conclusion au rôle de l’Inquisition, perturbée par l’irruption des Qunaris et d’un complot de grande ampleur. A ce titre, si la Descente comblait votre manque de Nains dans le jeu principal, Intrus est là pour compenser la discrétion des congénères d’Iron Bull. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ne font pas les choses à moitié. Cependant, on se rend rapidement compte qu’il y a quelqu’un d’autre dans la partie. Et l’on devine très vite de qui il s’agit. A travers les lieux que vous visiterez via les Eluvians, ce ne sera que Fen’harel par-ci, des statues de Fen’harel par-là... Vous savez tout de suite sur qui vous allez fatalement finir par tomber. Mais, si les joueurs sont désormais au courant de qui est le Loup implacable, il n’en va pas de même pour vos personnages. Et les explications vont faire mal.
Soyons clairs : Intrus est la véritable conclusion de Dragon Age Inquisition. On y traite du devenir de l’Inquisition, de son impact sur les pays voisins, des conséquences de la guerre sur les autres états et organisations (dont le Qun, bien entendu) ou de ce qu’il adviendra de vos compagnons. Mais surtout, on comprend enfin comment Corypheus a pu causer autant de chaos et qui est réellement derrière tout ça. Bien plus, des révélations sur les Elfes et l’ordre même actuel de Thédas vous seront apportées. Enfin, on vous annonce, à grands renforts dramatiques, l’épisode suivant, à côté duquel les problèmes de la Faille risquent de passer pour une simple contrariété. Et, reconnaissons-le, BioWare sait faire monter la pression sur ce point. Indice : ça va aller en empirant. Pour ne rien gâcher, le scénario lui-même est assez rondement mené, bien rythmé, plutôt cohérent, et introduisant un personnage éphémère mais d’une classe folle, la Vidasalla. Le DLC, outre sa trame agréable à suivre, est donc la conclusion qui manquait au jeu et il est indispensable pour qui veut comprendre le fin mot de l’histoire ou ce qu’il se passera dans le prochain Dragon Age. Et c’est bien là le problème, mais nous y reviendrons un peu plus bas.
Du nouveau dans la continuité du gameplay
Tout cela est bel et bon, mais l’histoire ne fais pas tout, aussi intéressante soit-elle. Rassurez-vous, le gameplay suit. Evidemment, il n’y a pas de bouleversements majeurs, à l’exception de votre base d’opérations, provisoirement transférée au Palais d’Hiver d’Halamshiral. Celui-ci est d’ailleurs bien plus vaste que dans l’opération Yeux Sombres et Cœur Cruel. En effet, en plus du palais proprement dit, vous aurez également accès aux jardins et aux communs sur les côtés, où vous pourrez trouver boutiques, forges, tavernes, spa (si si) et vos différents compagnons, mais aussi votre coffre de réserve, votre commode pour vous changer ou de quoi fabriquer armes et armures. De ce côté-là, Fort Céleste ne vous manquera pas trop. C’est également l’occasion de remplir quelques quêtes annexes sans grand intérêt : ramasser les nonos du seul Mabari du jeu (+ 1 en constitution à chaque fois que vous lui en donnez un) ou récolter les éléments épars d’un certain costume (achievement unlocked). Rien de bien palpitant cependant.
Heureusement, il y a les quêtes principales, qui sont nettement plus intéressantes et pas seulement parce qu’elles font avancer le scénario. Pour commencer, vous y accéder en passant par des Eluvians et ça, c’est quand même la classe. D’autant plus que vous découvrez enfin la Croisée des chemins, endroit imprécis, étrange et un peu inquiétant où donnent la plupart des miroirs. De plus, ces derniers sont intégrés au gameplay, puisqu’il faudra à plusieurs reprises trouver à travers lequel passer pour accéder à la prochaine zone, ou découvrir ceux qui sont cachés dans la Croisée, pour débloquer des coffres et des démons bien costauds. Autre petite nouveauté : l’Ancre de l’immatériel se met à débloquer à pleins tubes. Au fur et à mesure que vous avancerez, cela vous donnera cependant de nouvelles capacités : éclairer des zones sombres, faire exploser des objets, des gens, voire votre équipe. Gardez bien ces facultés à l’esprit, ça pourra vous servir (et cela vous évitera également de tourner en rond pendant de longues minutes en passant entre des jets d’acide durant un affrontement, en vous demandant comment faire bouger ce fichu chariot…).
Niveau combat, vous allez affronter des Qunaris. Plein de Qunaris. Des Qunaris partout. Et ils sont costauds, les bougres. Par-dessus le marché, quelques Saarebas se trouvent parmi eux. Pour ceux qui n’auraient pas joué à Dragon Age II, il s’agit des mages qunaris… qui n’ont pas grand-chose à voir avec ceux que l’on peut trouver chez les Humains ou les Elfes. Enormes et massifs, très agiles et effroyablement puissants, ce sont les ennemis les plus difficiles du DLC et les affronter requiert un petit peu plus de technique que pour les adversaires lambdas. Quant aux boss, comme pour les Crocs d’Hakkon, vous en aurez deux pour le prix d’un. Un d’un type qui commence à être familier et un autre un poil plus enquiquinant. Rien d’aussi compliqué cependant que celui de la Descente, ce qui est un assez dommage. Mais on ne peut pas tout avoir.
Enfin, BioWare a également cru bon de doter le contenu d’un véritable New Game +, histoire de faire durer le plaisir. En effet, si Intrus se conclut en environ 7 heures, ce qui est très correct, il rajoute également de nouveaux défis à remplir en recommençant une partie, qui feront le bonheur des joueurs atteints de trophéite aiguë et débloqueront également des récompenses inédites. Ce nouveau système permet en outre de synchroniser vos différents butins et objets de collection d'une partie à l'autre via une magnifique statue de cochard dorée, du meilleur goût dans votre intérieur. De quoi occuper les fans de longues heures supplémentaires.
Exploration et fan service au menu
Concernant la réalisation, on reste au niveau du jeu principal, avec des zones de toute beauté. Le Palais d’Hiver est toujours aussi splendide et fourmillant de détails et les nouveaux lieux ne sont pas en reste. Comme indiqué plus haut, la Croisée des Chemins, où mènent tous les Eluvians, semble être située entre l’Immatériel et le monde normal, étrange et inquiétante. De même, une certaine bibliothèque, qui permet de prendre toute la mesure du choix du mot Archiviste pour désigner les mages elfes, offre un terrain de jeu grandiose, suspendue entre deux mondes. On découvre également le repère des partisans de Fen’harel, perdu au milieu de superbes montagnes, les Tréfonds à nouveau ou encore une base qunarie de nuit. Ces derniers environnements sont eux aussi très réussis, bien que moins originaux que les zones de l’entre-deux. Vous pouvez d’ailleurs y revenir après vos missions, à l’exception de la dernière zone, si vous pensez avoir oublié quelque chose (comme débloquer les objets cachés par les statues du Loup implacable). On peut regretter toutefois que la localisation de ces endroits ne soit pas précisée. Les Eluvians pouvant vous transporter n’importe où, vous pouvez aussi bien vous trouvez à 10 kilomètres d’Halamshiral comme à Antiva sans le savoir…
Votre exploration et le scénario se concluront par de nombreux dialogues, plutôt bien mis en scène et qui mettront avec brio un point final à l’histoire de votre Inquisiteur ou Inquisitrice. En outre, et comme pour la Descente, le tout bénéficie de cinq nouveaux morceaux de musique pour illustrer l’action et l’ambiance du soft. Là encore, s’ils sont plutôt réussis et collent tout à fait à ce que l’on voit à l’écran, on peut toutefois regretter un certain manque d’originalité et de prise de risque. Faisant à nouveau la part belle aux cuivres, aux percussions et à la corne zimmerienne, la plupart soulignent un peu lourdement à quel point l’instant est dramatique ou triste ou les deux, des fois que vous n’ayez pas compris. Cela peut être agaçant, mais pas non plus dérangeant. Il est à noter également que l’épilogue du DLC est plus détaillé que celui du jeu principal, illustré de manière sobre, et prend en compte aussi bien vos choix cruciaux que quelques éléments paraissant a priori anodins, comme une certaine conversation de taverne avec Sera.
Globalement, la réalisation est donc satisfaisante, mais ne devient vraiment réussie que grâce à ce que la plupart des joueurs pouvaient attendre : du fan service. Dans le bon sens du terme. Un peu à la manière du Citadelle de Mass Effect, le contenu fait la part belle aux interactions avec vos compagnons et aux situations parfois complètement surréalistes qu’ils déclenchent (la palme du genre revenant à Vivienne et à son sens des priorités assez particulier). Il est absolument indispensable de discuter avec chacun d’entre eux. Cela vous permet, tout d’abord, de savoir ce qu’ils ont fait durant ces deux dernières années, tous n’étant pas restés en contact avec l’Inquisition. Vous pourrez ainsi admirer l’ascension sociale de Varric, interrogez Léliana sur son commerce de cochards, retrouver Dorian, devenu ambassadeur de Tévinter, ou constater que Cole se mêle toujours des affaires des autres, et notamment de la vie amoureuse de la barde Maryden. Beaucoup de dialogues n’apportent pas vraiment d’informations essentielles, mais plutôt de grands sourires, comme les réflexions de Varric sur Cyril de Montfort, fan inconditionnel de ses œuvres, qui le harcèle pour obtenir des autographes.
En outre, il est également possible de conclure vos romances, certains compagnons pouvant même être épousés. Pas tous, malheureusement, mais ce n’est pas ça qui empêchera Varric de se payer la tête de Cassandra en faisant croire à votre prochain mariage. Enfin, en plus de conversations aléatoires supplémentaires entre membres de l’équipe lors de vos déplacements, des points spécifiques, dans les lieux explorés, permettent de déclencher des dialogues particuliers. A ce titre, si vous n’avez romancé ni Iron Bull ni Dorian, pensez à les prendre avec vous, leurs réflexions sur leur relation sont assez amusantes. Et vous pourrez également trouver, au cours de vos pérégrinations, quelques références à des personnages d’autres épisodes (enchantement ?). Bref, c’est du pur fan service, mais bien intégré et qui fait plaisir. Alors pourquoi s’en priver ?
S’il ne fallait en garder qu’un…
Peut-on alors en conclure qu’Intrus est un DLC réussi ? Incontestablement. C’est fun, c’est beau, il y a du challenge, de la rejouabilité accrue, une durée de vie correcte et tout un tas d’informations cruciales pour la compréhension de l’histoire. Et, comme indiqué un peu plus haut, ce dernier point est à la fois une qualité et un gros défaut, que l’on peut reprocher aux développeurs. En effet, la fin d’Inquisition n’avait rien de satisfaisante et laissait plein de questions sans réponse, qui trouvent ici en grande partie leur solution. Or, il est difficile d'accepter que la véritable fin d’un jeu doive être achetée à part, comme c'est le cas ici. Si vous ne prenez pas ce contenu, vous ratez les explications et les amorces du prochain épisode. On peut donc reprocher à BioWare de nous avoir, à nouveau, vendu en tranches du contenu qui aurait dû se trouver dans le jeu de base. Et à prix fort, par-dessus le marché, puisqu’il est proposé au même prix que les autres, certes, mais aussi d’Awakening, la seule véritable extension digne de ce nom proposée à ce jour par l’éditeur. Les joueurs n’ayant pas forcément envie de passer leur temps à ouvrir leur portefeuille, cette façon de faire peut être légitimement critiquée. Il n’empêche, Intrus reste le meilleur DLC d’Inquisition et un incontournable absolu. Cependant, si vous pouvez le prendre en soldes…
Avant d’éteindre votre console/ordinateur ou de recommencer une partie, pensez toutefois à rester confortablement installés devant les crédits de fin. Vous pourrez y écouter Cassandra vous lire des extraits du dernier livre de Varric, « Non mais c’est quoi ce bordel ? », en imitant ses petits camarades pour les répliques les concernant. Un dernier moment de rigolade avant la toute fin.
Points forts
- La vraie fin du jeu…
- De nouvelles musiques…
- L’histoire et plein de révélations
- Le fan service et des easter eggs un peu partout
- Vos personnages
- Les environnements
- Une durée de vie correcte
- Un système de New Game +
- Bientôt Dragon Age 4 ?
Points faibles
- ... qu’on aurait préféré avoir dans le jeu de base
- ... un peu convenues cela dit
- C’est, à nouveau, beaucoup trop cher
Véritable conclusion à Inquisition, Intrus est un contenu additionnel riche et fun, à la réalisation impeccable, qui apporte ce qu’il faut de challenge, de nouveautés et de révélations en tous genres. Mais surtout, il est totalement indispensable pour tout fan de la saga et passer à côté serait dommage. Si l’on peut légitimement reprocher à BioWare de faire payer fort cher ce qui pourrait ou devrait être dans le jeu de base, il faut toutefois reconnaître les qualités et l’intérêt de ce DLC, qui sont indéniables. Un must have coûteux.