Longue fut la gestation de High Strangeness puisqu'il aura fallu attendre pas moins de six ans pour voir sortir la version finale alors que le soft avait été Kickstarté en 2009. Il s'agit d'ailleurs du tout premier titre dont le projet de développement s'est vu concrétiser via la plate-forme de financement participatif Kickstarter, à l'époque où celle-ci venait d'ailleurs tout juste de voir le jour. Il est donc plus que temps de découvrir ce que nous réserve finalement cette étonnante "aventure 12-bits", comme aiment à la qualifier ses géniteurs.
Disponible pour un peu moins de dix euros sur Steam et sur l'eShop Wii U, High Strangeness s'inscrit dans la grande famille des jeux indé qui tentent, chacun à leur manière, de rendre hommage à la préhistoire du jeu vidéo. Le soft mise donc principalement sur le capital nostalgie et le charme d'une réalisation rétro auquel bon nombre d'entre nous résistent encore difficilement, mais pas seulement. Car son aspect le plus attractif réside surtout dans son parti pris d'allier des graphismes 8 et 16-bits pour donner vie à un action-RPG entre deux âges !
La dimension qui n'existait pas
Prenant soin de ne pas trop se focaliser sur le character design peu attractif de High Strangeness, le joueur endosse rapidement le rôle d'un adolescent voué malgré lui à sauver le monde, et doté surtout d'une capacité hors du commun : celle de changer de dimension. A l'aide d'un mystérieux crâne de cristal, Boyd découvre ainsi qu'il existe plusieurs mondes (sa réalité 16-bits et sa version rétro 8-bits), et qu'il est capable de passer de l'un à l'autre librement. Cette capacité sera l'un des premiers pouvoirs que lui conféreront ces crânes convoités par d'inquiétants individus encapuchonnés qui semblent bien déterminés à éliminer Boyd par tous les moyens. Durant son périple interdimensionnel, notre héros ne pourra compter que sur l'appui de rares alliés, dont celui de son chat Abydos et d'un ninja providentiel nommé Scout.
Plus concrètement, à partir du moment où le joueur dispose du crâne en question, il peut à tout moment basculer entre une réalisation 8-bits et une réalisation 16-bits. La scène reste la même, seuls changent l'apparence des personnages, des ennemis et le rendu des décors, plus ou moins pixelisés selon la dimension choisie. Si, au début, on s'amuse surtout à comparer les graphismes d'un écran à l'autre, on comprend vite que cette feature pour le moins originale va surtout servir le gameplay. Impossible en effet de progresser dans l'aventure sans switcher régulièrement entre les deux dimensions, afin de modifier ne serait-ce qu'un tout petit peu la configuration des lieux et ainsi débloquer la situation. Cela pourra, par exemple, altérer l'emplacement des précipices, la vitesse de déplacement de certaines plates-formes, matérialiser des chemins inexistants dans l'autre monde, ou encore faire apparaître des indices invisibles autrement.
« Par le pouvoir du crâne ancestral »
Le reste du temps, le joueur est libre de conserver la vue qu'il préfère, chacune ayant ses avantages et ses inconvénients. En mode 16-bits, il sera plus facile de combattre ses ennemis, le personnage étant plus rapide, doté de combos et capable de tirer en diagonale. A l'inverse, le mode 8-bits se révélera plus utile pour déceler les marques suspectes dans le décor, et il faudra de toute façon y recourir pour éliminer certains types de monstres. Dommage que la musique ne soit pas affectée par l'ajout de sonorités 8-bits lorsqu'on passe en version rétro, histoire d'aller vraiment au bout du concept. Quoi qu'il en soit, l'attirail de notre héros reste le même dans les deux mondes, sa lampe de poche lui servant de massue pour se battre au corps-à-corps tandis que divers objets insolites viendront régulièrement enrichir son éventail d'armes secondaires.
Mais l'aventure étant courte, on ne trouve guère que quelques feux d'artifice et autres CD à lancer pour s'en sortir, chacune des capacités de Boyd pouvant tout de même rapidement être upgradée. Ces améliorations ont hélas pour conséquence de rendre la progression beaucoup trop facile, dès lors qu'on a compris comment tenir nos adversaires à distance en économisant notre endurance. Les subtilités du gameplay découlent donc plutôt des pouvoirs liés aux autres crânes qui, même s'ils sont peu nombreux, nous obligent à nous creuser un minimum la cervelle pour résoudre les quelques énigmes disséminées dans les donjons. L'aventure pèche donc principalement par sa faible durée de vie et sa grande facilité, réservant High Strangeness à ceux qui jouent avant tout pour le plaisir d'être surpris.
Points forts
- Le plaisir de comparer les mêmes scènes en 8 et 16-bits
- Le bon équilibre entre l'action et les énigmes
- L'ambiance sonore à la fois rétro et onirique
- La narration bien présente, malgré un final prévisible
- Des clins d'oeil discrets qu'apprécieront les nostalgiques
Points faibles
- Le chara design peu engageant
- Les upgrades qui rendent vite surpuissant
- Les boss qui ne résistent pas plus de quelques secondes
- Des niveaux très courts et relativement classiques
- Pas de quêtes annexes ni de secrets optionnels
- Pas de bonus post-game
En dépit de son concept audacieux et de son déroulement plaisant qui font que l'on dévore le jeu d'une seule traite sans se forcer, High Strangeness manque un peu de consistance et aurait gagné à proposer des bonus de fin de partie susceptibles de booster davantage son challenge et sa durée de vie. Une curiosité à découvrir surtout si vous cherchez un jeu typé rétro qui sort un peu de l'ordinaire.