Faut-il sauver le soldat Call of Duty ? À l’heure où nous écrivons ces lignes, l’épisode 2023 du plus célèbre des jeux de tir (Modern Warfare 3) se prend balle sur balle, partout sur la toile. Une grogne justifiée ? Dans ce test, nous nous efforçons de voir toutes les qualités (et faiblesses) de cet opus.
Call of Duty Modern Warfare 3 est sorti dans un contexte particulier. Le 9 novembre, c’est-à-dire la veille du lancement du volet, Jason Schreier a publié une nouvelle enquête dans les colonnes de Bloomberg… À l’intérieur, le journaliste décrit une production “à la hâte”, où les développeurs ont dû cruncher la nuit et le week-end pour terminer le titre. Des révélations qui se sont ajoutées aux premiers avis déjà très tranchés sur la campagne de cet opus - publiés les jours précédents.
Pour la première fois de son histoire, Call of Duty dégaine la même “sous-série” deux ans de suite ! Oui, après un Modern Warfare 2 en 2022 synonyme de pas mal de nouveautés - dont un mode à la troisième personne dorénavant mis au placard -, le plus célèbre jeu de tir remet le couvert avec une troisième relecture de son univers phare… Call of Duty Modern Warfare 3 se présente ainsi à la fois comme une suite directe aux aventures de Capitaine Price et ses amis - mais également comme un package vraiment nostalgique, avec le retour de cartes, de features qui vont faire plaisir aux joueurs de longue date. On vous détaille tout ça et on vous explique si ça vaut le coup de passer à la caisse.
Une campagne qui rate sa cible
On met les pieds dans le plat avec la campagne. Comme expliqué plus haut, Modern Warfare 3 est une suite directe à l’épisode de l’année dernière… On y retrouve donc la redoutable Task Force 141 (Price, Ghost, Gaz et Soap) qui devra tout faire pour arrêter le terrible Makarov ! Un grand méchant que les fans de Modern Warfare connaissent bien et qui prévoit ici une série d’attentats pour mettre le monde à feu et à sang. Nos héros devront alors vider du chargeur partout autour du globe - dans le cadre d’une aventure composée de quinze missions (4 à 5 heures de durée de vie en ligne droite).
N’y allons pas par quatre chemins : la campagne de Call of Duty Modern Warfare 3 n’est clairement pas le point fort du jeu, et elle ne parvient pas à se hisser à la hauteur des épisodes d’origine ! Déjà parce qu’elle est vraiment courte et qu’elle prend rarement de le temps d’installer quelconque enjeu (on a juste l’impression de passer d’un coup tordu de Makarov à l’autre) - mais surtout parce qu’elle ressemble plus à une collection de petites expériences qu’à une aventure complète et haletante. Un problème notamment causé par les open combat missions, des séquences beaucoup plus ouvertes que d’habitude et qui constituent LA nouveauté du solo… Ici, vous pouvez choisir votre équipement, aborder les objectifs comme il vous plaît, même trouver des armes | killstreaks en explorant un peu. Des phases plus challengeantes que d’habitude où il faudra plusieurs tentatives avant de l’emporter. Une jolie idée sur le papier, mais qui se relève maladroitement mise en place (à une exception près).
En fait, les open combat missions sont plus frustrantes qu’autre chose. On s’y lance d’abord l’esprit ouvert, faisant de notre mieux pour ne pas se faire voir… avant de réaliser que ni le level design, ni l’IA n’est prévu à cet effet. En résulte des approches qui dérapent systématiquement, dans le cadre d’affrontements “ouverts” sans saveur comme une triste partie de Warzone. On a juste l’impression de buter sur un obstacle biscornu, on appuie sans cesse sur "reset" et le rythme du solo lui-même en souffre (sur 15 séquences principales, il y a 6 open combat missions). Il y a un goût d’inachevé assez amer, en particulier car l’une de ces phases (“Gratte-Ciel”) s’est révélée franchement réussie. D’ailleurs : tout dans la campagne n’est pas à jeter - et nous avons par exemple aussi bien apprécié le gunfight de la Toundra Enneigée, ainsi que le réalisme glaçant de la fameuse scène dans l’avion.
Multijoueur : simple mais efficace
Mais passons à quelque chose de plus réjouissant : le multijoueur. Un gros morceau de Call of Duty Modern Warfare 3 dont le maître-mot est “nostalgie” ! Dès le lancement, Sledgammer propose seize cartes issues du Modern Warfare 2 de 2009. Des maps cultes, dédiées exclusivement aux joutes en “6v6”, avec notamment les célèbres ruelles de Favela, le toit de Highrise ou bien le fameux aéroport de Terminal (liste complète est ici). Franchement, quel plaisir de retrouver ces champs de bataille, dont le level design s’avère toujours aussi efficace. Au-delà de visuels remis au goût du jour, Modern Warfare 3 ajoute des portes qui ouvrent et se ferment - ça peut avoir son importance en Domination par exemple - et quelques bassins où l’on peut nager. Surtout, le retour de ces cartes est l’occasion de profiter de modes qui n’existaient pas à l’époque, à l’image de Point Stratégique, Contrôle (issu du volet 2022) ou encore du petit nouveau “Coupe-Gorge”.
Vous l’avez compris, les seize maps nostalgiques de Modern Warfare 3 permettent de varier les plaisirs en 6v6 (Match à mort par Équipe, Mêlée Générale, Domination, Recherche / Destruction, Élimination Confirmée, Point Stratégique, Contrôle, sans compter leur version “Hardcore”). Mais, le mode Coupe-Gorge arrive à la fête. Trois équipes de trois doivent ici s’éliminer dans un temps imparti. Il n’y a pas de respawn - juste la possibilité de relever un copain tombé au sol - et quand le chrono s’arrête, celui qui capture un drapeau gagne l’une des trois manches ! Un mode assez prenant et complémentaire du reste de l’offre. Ce Call of Duty propose d’ailleurs un dernier mode 6v6 à carte unique, “Guerre”, hérité de WW2, et deux modes 32v32 : Guerre Terrestre / Invasion. Au global, nous avons remarqué quelques problèmes de spawn - ainsi qu’un SSBM très présent.
En gros, sans parler du mode Zombie (on en discutera dans un deuxième temps), Modern Warfare 3 met sur la table un multijoueur mine de rien pas mal complet, et dans l’ensemble, nous avons pris beaucoup de plaisir à enchaîner les parties, du moins en 6v6. Comme d’habitude, les combats à 64 joueurs semblent trop dispersés pour rendre honneur au gameplay de Call of Duty, et les nouvelles cartes présentes ici, Popov Power, Levin Resort, Orlov Military Base, ne donnent pas spécialement envie de s’y investir. Mais surtout, nous avons été interpellé par la banalité d’Operation Spearhead, la seule et unique map du mode Guerre au lancement, que ce soit en termes de direction artistique ou de level design. Au final, le plus gros reproche qu’on puisse faire au multi de Modern Warfare 3, c'est sa tendance à ne rien proposer de nouveau et à tout baser - ou presque - sur de la nostalgie.
Un gameplay qui fait la différence ?
Car tant qu’on parle de nostalgie, cet opus cherche à “caresser les fans dans le sens du poil” avec le retour de features très demandées par la communauté. En marge du vote pour choisir une carte lors d’une partie en ligne, on remarque le retour de deux choses importantes : la mini-map classique, où les joueurs qui tirent sans silencieux sont signalés par un point rouge, en haut à gauche de l’écran ; et le slide-cancel, qui permet d’interrompre une glissade à tout moment. Un geste certes intéressé de la part d’Activision, mais qui marche vraiment bien manette en main. Le retour du radar d’antan redonne une saveur presque asymétrique aux affrontements, où il faut constamment jongler entre le son, l’image et l’interface, alors que la nouvelle pirouette au sol nous donne encore un peu plus de contrôle sur nos déplacements (en plus de tous les ajouts de Modern Warfare 2 2022). D’ailleurs, en parlant de contrôle, le titre introduit une nouveauté super agréable. Il s’agit de la “Position Tactique”, un mode de visée inédit afin de tirer à courte et moyenne portée sans regarder à travers la lunette de son arme. Ça permet d’être polyvalent, même avec un gros zoom, et de mettre un peu plus l’accent sur l’approche offensive. Une mécanique flambant neuve qui est vraiment sympathique à maîtriser.
Dans ce Modern Warfare 3, il y a un autre ajustement par rapport aux opus précédents : la santé du joueur passe de 100 à 150, résultant en théorie à un temps de mise à mort (TTK) un peu plus long que d’habitude. Si ce changement nous avait tout à fait convaincu lors de la bêta, sur le jeu final, c’est une autre tasse de thé ! Ici, le “TTK” nous est apparu incohérent, parfois super court, d’autres fois anormalement long. Pas de quoi gâcher nos parties, mais il y a un correctif à faire.
En général, pas grand chose à signaler non plus pour le gunfeel ou la technique de ce Call of Duty Modern Warfare 3, qui se révèlent toujours aussi solides. Même chose pour les armes disponibles - celles débloquées dans l’épisode 2022 sont d’ailleurs transférées ici - et les possibilités offertes par la personnalisation de l’attirail. Sur ce point en revanche, il y a du neuf, avec un système à base de gilets pare-balles, de bottes et de gants… C’est en gros une nouvelle façon de distribuer les bonus bien connus des fans : le gilet va déterminer le nombre “d’objets” que votre personnage peut porter (outil mortel, tactique, nombre d’équipement). Un vent de fraîcheur qui est tout de même bienvenu.
Une progression en dents-de-scie
Par contre, il y a un changement qui va faire grincer des dents, et ça concerne le système qui permet de débloquer les armes | les objets du jeu. À présent, il ne faut plus seulement monter “bêtement” de niveau en niveau. À partir du level 25, toute une partie de l’équipement est bloquée derrière des défis d’arsenal. Concrètement, après avoir sélectionné l’item qui vous intéresse, il faudra ensuite terminer trois, cinq ou huit défis quotidiens, des challenges renouvelés chaque jour qui obligent par exemple à tuer tel nombre d’ennemis avec une arme précise, ou de réaliser un certain nombre de headshots. Sur le papier, pourquoi pas, ça donne une progression un peu moins linéaire ! Le problème, c’est que ce système bloque l’accès à des outils qui sont un peu la base sur Call of Duty. C’est notamment le cas des grenades flash, ou des mines de proximité (sans parler du fait que huit défis, ça fait un peu beaucoup). Cependant, on peut aussi voir le verre à moitié plein et se dire que tout ça est l’occasion de s’imposer des contraintes et de sortir de sa zone de confort. Enfin, précisons que la plupart des armes et outils verrouillés par les défis d’arsenal peuvent aussi être obtenus dans le mode Zombie, dans le cadre d’une exfiltration réussie… Et d’ailleurs, le mode Zombie, il est venu l'heure d'en parler.
Mode Zombie : mort ou bien vivant ?
On enchaîne donc avec le dernier gros morceau de Call of Duty Modern Warfare 3 : le Zombie, qui fait son grand retour. “Grand”, ce n’est pas pour rien, car pour la première fois, le mode se déroule dans un monde ouvert sur une carte modifiée de “Warzone”. Le but ici, c’est survivre 45 minutes et réussir à s’exfiltrer avec le meilleur équipement possible dans une équipe de trois. Si vous mourrez sur place, vous perdez à peu près tout - vos armes, aussi rares soient-elles, votre gilet pare-balles, vos outils tactiques et mortels et le contenu de votre sac à dos (seul l’argent amassé se transforme en points d’expérience). Un fonctionnement qui rappelle immédiatement le mode DMZ de Modern Warfare 2, mais qui trouve ici bien plus son intérêt, c’est sûr. Car entre les hordes de morts-vivants et les monstres en tout genre, un échec peut vite arriver, notamment dans la seconde | la troisième zone d’infection au centre de la carte, où la difficulté augmente drastiquement ! Bien sûr, le but est d’enchaîner les parties pour se constituer le meilleur attirail possible et aller dans l'œil du cyclone… Petit à petit, comme on ne veut pas tout perdre, on se retrouve avec une tension pas mal prenante.
Dans l’ensemble, même si le Zombie de Modern Warfare 3 s’éloigne beaucoup de ce qui a été fait par le passé (on perd entre autres cette saveur escape game), la version 2023 se présente comme une sorte de suite logique, à mi-chemin entre Warzone, DMZ et “Infecté” de Call of Duty Black Ops Cold War… D’un côté, les fans de longue date retrouveront des créatures bien connues, des boîtes mystères et autres “Sacré Punch”, alors que les habitués aux formules plus ouvertes ne seront pas dépaysés par la boucle de gameplay construite autour de contrats à réaliser (c’est d’ailleurs un peu répétitif à la longue). Bref, ne vous attendez pas au Zombie d’antan - mais ça reste une expérience plutôt agréable à découvrir entre copains. On en profite d’ailleurs pour vous dire que le mode permet de former une “super escouade”, en recrutant trois autres joueurs en pleine partie. Une bonne idée.
Conclusion
Points forts
- Des sensations toujours aussi solides
- 16 cartes de Modern Warfare 2 (2009)
- Le comeback de la mini-map classique
- Un nouveau mode de visée à maîtriser
- Un mode “Zombie” différent et prenant
Points faibles
- Une campagne courte… et dispensable
- Aucune nouvelle carte n’est mémorable
- Temps de mise à mort assez incohérent
- Les défis d’arsenal, pour tout débloquer
- Finalement, aucune nouveauté majeure
Note de la rédaction
Sur le papier, avec son solo, son multijoueur et son Zombie, Call of Duty Modern Warfare 3 se présente comme un package assez complet, et c’est quelque part ce qu’il est. En marge d’une campagne dispensable et de quelques ajustements à revoir (notamment sur le temps de mise à mort), nous avons pris du plaisir sur les deux pans en ligne de cet épisode. Bien que misant avant tout sur une formule nostalgique, avec ses cartes et ses features d’antan, difficile de ne pas tomber amoureux, une nouvelle fois, de ces sensations de shoot toujours aussi réussies. Le Zombie de son côté, bien que copier-coller sur Warzone et DMZ, s’avère agréable et plutôt prenant… Au final, dans ce titre aux airs de “grosse extension”, il y a bien quelques qualités ! Mais celles-ci apparaîtront seulement si Call of Duty n’est pas votre titre de chevet. Pour les fans en possession de Modern Warfare 2, c’est franchement discutable.