Alors que Call of Duty s'apprête à faire son retour avec Modern Warfare 3, ce sont des vétérans de la licence qui ont publié en ce mois d'août le jeu Immortals of Aveum : un titre aux allures du jeu de tir phare d'Activision avec (beaucoup) de magie en plus
"Je me rappelais travailler sur l’un de ses niveaux de Call of duty en me demandant : Et si à la place d’un hélicoptère c’était un dragon ? Et si à la place de ces explosions c’était des boules de feu ? Et à la place de ces soldats des mages de guerres ? Je veux jouer à ce jeu !"
Quelques années plus tard, Bret Robbins a exaucé son souhait. On n’est jamais mieux servi que par soi-même comme dirait le dicton. L’ancien directeur créatif sur des licences comme Call of Duty et Dead Space a fondé, en 2018, Ascendant Studios. Un studio indépendant visant à développer des AAA. Il a sorti, en partenariat avec Electronic Arts, son tout premier jeu mardi 22 août sur PC, PlayStation 5 et Xbox Series. Il s’appelle Immortals of Aveum, que l’on appellera IoA pour des raisons évidentes de lecture. Il est présenté comme un jeu de tir solo (il n'y a pas de multijoueur) narratif en vue à la première personne. Rien de bien différent si ce n’est… son univers. Adieu les guerres inspirées de conflits historiques, bonjour le folklore fantastique. Une transition brutale pour quiconque est habitué à la série des Call of Duty. L’élève est-il à la hauteur du maître ? Réponse dans ce test.
Sommaire
- Une histoire efficace et divertissante à défaut d'être magique
- Un monde semi-ouvert aux allures de metroidvania
- Un gameplay qui n'y vas pas de main morte
Le test d’Immortals of Aveum a été réalisé sur PlayStation 5. Les défauts et qualités techniques peuvent alors varier sur les autres supports, le jeu étant également sorti sur PC et Xbox Series.
Une histoire efficace et divertissante à défaut d'être magique
Au début des années 2000, certains développeurs d’Electronic Arts décident de filer. Ils créent alors leur propre studio appelé Infinity Ward. Ce dernier concurrence alors EA et Medal of Honor sur leur terrain en proposant un titre appelé Call of Duty. 20 ans plus tard, Le premier est enterré tandis que le second appartient désormais à l’une des licences de jeux vidéo les plus connues du monde. Et c’est bien connu, l’histoire adore bégayer : quelque chose qu’on voit à plusieurs titres dans Immortals of Aveum mais surtout par son scénario et sa mise en scène.
IoE prend place dans le monde d’Aveum : une terre où la magie fait partie intégrante de la vie humaine. Certains ne naissent pas tous égaux face à elle. Il y a les Sans-Éclats qui n’ont aucune affinité avec la magie ; les Instables qui se sont soudainement mis à manifester des compétences magiques ; et les biens-nés qui sont tombés dedans quand ils étaient petits. De cela va naître des inégalités sociales faisant d’Aveum un endroit assez hostile. C’est sans compter la Guerre Éternelle que se livre le royaume de Lucium et le royaume de Rasharn : le vainqueur peut s’approprier le contrôle de la magie et alors afficher une domination sans partage sur le monde.
C’est dans ce contexte pas vraiment glop que le joueur incarne Jak. C’est un habitant de Seren, un village de Lucium qui fait office de refuge à tous ceux rejetés par les Bien-Nés. Pour vivre, il effectue plusieurs larcins avec ses amis (et notamment Luna qui est sa meilleure amie). Son quotidien change alors du tout au tout quand un avion de Rasharn détruit son habitation et ses colocataires. Un tel choc émotionnel provoque en lui l’éveil de magie (c’est donc un Instable). Il décide alors de s’engager dans l’armée des Immortels (la force militaire magique de Lucium) pour poursuivre le rêve de Luna.
Un départ somme toute classique. L’histoire d’Immortals of Aveum ne brille pas par sa qualité d’écriture générale. Les rebondissements sont assez convenus (si ce n’est de la fin qui est assez chouette) et l’on se sent rarement porté dans une aventure qui nous dépasse. À ce sujet, les protagonistes impliqués ont des rôles très convenus. Jak’ est un héros au sang chaud qui agit souvent avant de réfléchir. Kirkan a tout l’impératrice intransigeante à la main de fer lorsque Devyn est le pote sympa toujours prêt à faire une blague. Ces personnalités font office de barrière que le joueur peut ne pas arriver à surmonter quand il s’agit de s’identifier aux personnages.
C’est d’autant plus dommage qu’il y a un vrai travail sur les dialogues et les animations faciales. Pour être honnête, cela faisait longtemps que je n’avais pas autant ri devant un jeu vidéo. Immortals of Aveum arrive à alterner le sérieux et le comique avec brio. Certains joueurs trouveront (probablement) certaines blagues ringardes voire lourdes quand, personnellement, elles constituent l’une des raisons qui m’ont poussé à jouer. Pour n’en citer qu’une, il y a le moment où les trois Immortels (Jak, Davyn et Sandara) décident de faire la fête avant de partir en mission. Ivre, Devyn explique qu’il serait terrifié de devoir la même tête que les oiseaux lorsqu’ils marchent. Une scène loufoque mais qui apporte une légèreté bienvenue au ton parfois trop sérieux d’IoA.
En résumé, l’histoire d’Immortals of Aveum fait son travail : elle sert de justification (parfois trop) solide au contexte de guerre sans imposer un rythme haletant au joueur. Elle parvient même à le divertir non pas par ses retournements de situations mais par son humour. Peu importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse.
Un monde semi-ouvert aux allures de metroidvania
À la différence des Call of Duty, Immortals of Aveum permet au joueur d’explorer son monde grâce à une construction semi-ouverte. Aveum, c’est cinq royaumes (quatre sont visitables) divisées en régions, elles-mêmes divisées en plusieurs zones. C’est donc par ces zones que se fait l’exploration, d’une manière assez linéaire. Une grosse arène appelle au combat avant de laisser sa place à un jeu de plateformes, qui va lui-même céder à une énigme. Et ainsi de suite. Une architecture assez répétitive qui se remarque d’autant plus que les zones sont assez vides. Cela étant dit, cette vacuité n’est pas forcément un défaut. Cela se justifie en temps de guerre. Et puis, cela force les joueurs à se concentrer sur l’histoire, à travers les biomes comme s’il était investi d’une mission de la plus haute importance… ce qui est le cas !
Néanmoins, il faut reconnaître que ce n’est pas forcément une qualité non plus. Une fois les 18 chapitres bouclés (une quinzaine d’heures pour quiconque est pressé), on vous encourage à régler les derniers problèmes qui se terrent encore à Aveum. Et par problèmes, ils entendent contenu que vous auriez volontairement ignoré ou simplement passé.
Ce contenu n’est pas colossal : il faut une dizaine d’heures pour aller au bout. Il consiste à trouver des coffres dorés, à réussir des sanctuaires (épreuves de plateforme, énigmes ou combats) et à vaincre les Six, des mages d’élites qui lâcheront un objet de qualité proportionnelle à votre maestria pour le vaincre.
Mais il est indispensable de mentionner la qualité avec laquelle Ascendant Studio rythme le périple. Pendant la quasi-totalité de l’aventure, Jak se voit remettre de nouveaux pouvoirs. Certains sont utiles à l’exploration : coup de poing briseur de barrière, grappin-lasso ou encore ralentisseur temporel… Il y en a de plusieurs sortes, ce qui fait que l’on a toujours le sentiment de progresser. Une approche tirée de la probable inspiration des metroidvania puisqu’il est possible de revenir en arrière et de découvrir des chemins qui se dérobaient alors en l’absence de ces capacités.
Un gameplay qui n'y vas pas de main morte
Mais pour survivre dans cette guerre éternelle en temps que soldat, il faut d’abord faire ses preuves. Dès de le début du jeu, le joueur traverse alors une espèce de tutoriel mis en place par Kirkan. Jack apprend alors qu’il est un triarque : un type d’Immortel très rare pouvant se servir des trois types de magies qui existent en Aveum. La rouge représente le chaos ; la verte la vie et la mort ; la bleue la manipulation physique de la matière. C’est donc grâce à celle-ci qu’il peut résoudre différentes énigmes mais aussi affronter ses ennemis. Jak peut porter trois gants, chacun représentant un type de magie. Au sein de chaque type de magie, il existe ensuite trois types différents d’attaques. Pour illustrer, le gant rouge peut envoyer des bombes à mi-distance, des ondes à courtes portée et des explosions pour des dégâts de zone. Il faut donc s’orienter vers l’archétype qui nous fait envie, d’autant que notre héros est personnalisable grâce à un arbre de talents (image ci-contre) et différents objets améliorant les statistiques.
Des spécialisations très importantes dans la mesure où les affrontements vous forceront à changer de stratégie. Certains adversaires auront un bouclier sensible à seulement un élément. Heureusement, Ascendant Studio a mis en place un système d’attaque de fureurs. rrrCes capacités dépensent de la mana mais sont optimales pour endommager la carapace ennemierrr. À tout cela s’ajoute encore les pouvoirs récupérés pendant l’aventure (perturbateur, bouclier, pesanteur…) qui multiplient les approchent. Une floraison de bouton est alors à utiliser et il n’est donc pas rare de se tromper de touche même après 20 heures de jeu. Hormis cela, la prise en main est très naturelle et progressive.
Les sensations de combats sont très présentes, rendues excellentes par le sound-design particulier de chaque sort. C’est aussi, on l’a dit, la mise en scène qui brille. De nombreux combats de la campagne rendent réellement justice à la guerre qui se trame en Aveum. Il s’avère qu’effectivement, Ascendant Studio a repris la mise en scène qui a fait le succès de la licence d’Activision ces dernières années : vaisseaux volants, explosions de magie, soulèvement de poussière… Tout est là.
Malheureusement, ce tintouin généralisé n’est pas sans conséquences : la lisibilité en prend parfois un coup, comme si Jak se retrouvait juste en dessous d'un feu d'artifce. Beaucoup de choses sont alors affichées à l'écran, ayant pour conséquences régulières des chutes de framerate. Elles ne gênent pas le gameplay mais sont quand même là. Un seul écueil se met alors en travers de notre route au moment de saluer les affrontements : nerveux, dynamiques et exigeants, ils ont néanmoins tendance à traîner en longueur dans les derniers chapitres. Il devient difficile de compter sur l’intégralité de ses pouvoirs. On se retrouve alors, souvent, à seulement appuyer sur R2 pour tirer sur notre ennemi comme on le ferait avec un AK K7.
Conclusion
Points forts
- Une vraie immersion en temps de guerre
- Le travail sur dialogues entre protagonistes, dont certains sont à mourir de rire
- L'intégralité du doublage français
- Un excellent rythme
- L'histoire qui met en valeur la mise en scène
- Des combats nerveux et sous tension
Points faibles
- Des zones qui peuvent paraître vides
- Des combats qui traînent en longueur
- Une lisibilité souvent mise à mal
- Une écriture un poil trop traditionnelle
Note de la rédaction
Pour un premier jeu à l'ambition AAA, Ascendant Studios livre une bonne surprise. On ressent sans effort le soin apporté à la mise en scène et au contexte de guerre qui fait, encore aujourd'hui, les belles heures heures de Call of Duty. L'histoire, sans être révolutionnaire, fait ce qu'on attend d'elle : proposer une justification solide au conflit qui a lieu dans Aveum. En bonus, elle peut divertir une certaine partie des joueurs sujet au sacarsmes et à l'humour potache. Enfin, Immortals of Aveum propose également des combats dynamiques et nerveux, comme sur un champ de bataille. Dommage que les zones vides, clairement épargnées par le conflit, les quelques longueurs en fin de partie et la lisibilité de certains affrontements viennent ternir le tableau. En tout état de cause, Ascendant Studio parvient à jeter des fondations solides dans le genre du FPS magique sans toutefois se hisser à la hauteur des plus grands. Tant mieux pour eux alors, puisqu'ils suivent donc le même chemin que leur maître.