Judgment fut une excellente surprise à sa sortie en 2019. Face au succès critique et commercial du spin-off de la saga Yakuza, les studios Ryu ga Gotoku et Sega ont mis en chantier une suite. Le jeu d’action-aventure Lost Judgment est-il le digne successeur des aventures de Takayuki Yagami et de Yakuza : Like a Dragon ?
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Only God Forgives
Le récit débute plusieurs mois après la fin de Yakuza : Like a Dragon. Takayuki Yagami reprend du service le temps d’une enquête en apparence simple, une affaire d'agression dans les transports publics qui s’avère bien plus complexe. Le détective privé du quartier tokyoïte de Kamurocho finit comme à son habitude par donner un coup de pied dans la fourmilière, et provoque une réaction en chaîne qui va mettre le feu aux poudres. Tel est le postulat de départ de Lost Judgment. Ce scénario aborde avec sincérité et justesse des thématiques contemporaines fortes - le harcèlement scolaire, le suicide ainsi que la vengeance - et oppose deux visions de la justice sans tomber dans le manichéisme.
L’histoire principale doublée au choix en japonais ou en anglais et sous-titrée en français (VOSTFR ou VASTFR) enchaîne les rebondissements et autres révélations dont les productions des studios Ryu ga Gotoku sont friands. Le dernier héritier en date de la saga Yakuza s’inspire ouvertement du 7e Art, et puise dans les œuvres qui ont fait la gloire des polars et des films de gangsters. Le cinéma coule dans ses veines, et cela se ressent dans sa mise en scène qui n’oublie jamais ses racines. Elle conserve ainsi cette propension à l’épique contrebalancée par une touche d’absurde décomplexée. Malheureusement, le lien avec la saga Yakuza, au-delà de quelques références et clins d'œil, s’étiole quelque peu.
La force de Lost Judgment réside dans son cadre autant que dans sa plume. Vissé le scénario à un établissement scolaire était un coup de maître inattendu, et surtout rafraîchissant, à même de dépoussiérer une saga par essence mafieuse. De plus, la qualité du jeu des acteurs et la précision des animations faciales ajoutent une dose de crédibilité supplémentaire à ce récit qui parvient à tenir les joueurs en haleine une vingtaine d’heures durant... à condition de terminer l’aventure en ligne droite. A cela vient s’ajouter les dizaines de missions annexes parmi lesquelles les affaires secondaires confiées à l'agence de détective ou encore les intrigues de lycée qui représentent autant si ce n’est le double de temps de jeu. Takayuki Yagami a du pain sur la planche.
Le cimetière de la morale
Les studios Ryu ga Gotoku se sont faits une spécialité de reconstituer à l’échelle 1:1 certains lieux iconiques de l’archipel nippon. Si Judgment se contentait de Kamurocho et uniquement de Kamurocho, sa suite directe alterne entre le quartier de Tokyo précédemment cité et celui d’Isezaki Ijincho situé dans la ville de Yokohama. Lost Judgment invite les joueurs à visiter virtuellement ces deux cités au point de les connaître comme leur poche, et à s’en imprégner. Les artistes n’ont pas fait les choses à moitié une fois encore. Il se dégage de Kamurocho et d’Isezaki Ijincho deux atmosphères distinctes qui n’appartiennent qu’à ces deux quartiers.
De jour comme de nuit, ces centres urbains prennent vie de la plus belle des manières. Les badauds vacant à leurs occupations, les nombreuses activités disponibles (salles d’arcade SEGA, shogi, mahjong, golf, courses de drône, fléchettes, etc.) histoire de passer le temps, la multitude de restaurants pour se sustenter sans oublier l’ambiance sonore… la reproduction partielle des villes de Tokyo et de Yokohama est criante de vérité, et cela n’a rien d’étonnant. Néanmoins, le Dragon Engine n’est plus tout jeune. Si le moteur maison développé par les studios s’avère solide à bien des égards, grâce notamment à plusieurs améliorations techniques notables, ce dernier affiche en 2021 certaines limites. Techniquement parlant, Lost Judgment suit les traces de Yakuza : Like a Dragon… ni plus, ni moins.
Introduction de Lost Judgment
Une histoire de détective
Takayuki Yagami, autrefois avocat de la défense, gagne aujourd'hui sa vie en tant que détective privé. Pour résoudre les affaires qui lui sont confiées, il peut compter sur ses nombreux talents d’enquêteur, mais pas seulement. Lost Judgment se dote sans surprise des mécaniques de gameplay intégrées dans le précédent opus, à savoir la filature, l’infiltration, la recherche d’indices, les courses-poursuites, etc. auxquelles se greffent désormais des phases de Parkour. Les anciens systèmes profitent d’une légère refonte, parfois même d’ajouts, afin de d’enrichir l’expérience et de la rendre moins rigide, mais cela n’empêche en rien ces séquences de conserver cette approche (trop) dirigiste.
Il en va de même pour les aptitudes en Parkour mentionnées précédemment. Notre héros peut aisément escalader certaines façades d’immeubles, mais toujours dans un contexte précis. De manière générale, Lost Judgment, à l’image de la saga Yakuza, ne laisse que peu de latitude quant à l’approche à adopter. Une situation se résout d’une certaine manière sans véritablement laisser le choix aux joueurs. Les conversations supposées gagner en profondeur via la présence de choix s’avèrent finalement “linéaire”. En vérité, ces derniers n’ont aucun impact sur le déroulé de l’histoire. Ce jeu d’action-aventure se démarque en définitive par sa générosité, parfois maladroite, mais qui parvient à nous divertir, et c’est bien là l’effet escompté.
Les poings contre les murs
Être détective dans le quartier chaud de Tokyo n’est pas de tout repos. Fort heureusement, Takayuki Yagami sait parfaitement se défendre face à la pègre locale. Il peut ainsi compter sur ses connaissances en arts martiaux pour se défaire de ses ennemis. Aux deux styles de combat éprouvés dans Judgment s’ajoute un troisième fort plaisant à prendre en main. Le style du Serpent pensé pour affronter une menace armée complète parfaitement ceux de la Grue et du Tigre, efficaces respectivement face à un groupe d’individus et en 1v1. Les qualités de combattant du héros naissent ainsi de l’alternance entre ses différentes approches martiales. Notre détective privé fait preuve d’une efficacité redoutable, et utilise comme toujours son environnement pour survivre.
Le système de combat n’a que très peu évolué depuis le précédent épisode. La jauge EX ainsi que les actions EX restent un véritable plaisir coupable. Ces instants “over the top” donnent aux affrontements une saveur toute particulière, un sens démesuré de l’épique, inhérent à la saga Yakuza et à sa série spin-off. Au fil de l’aventure, Takayuki Yagami débloque fort heureusement de nouvelles aptitudes, que ce soit des boosts de statistiques ou encore de nouvelles techniques à éprouver dans la rue. Ces compétences fraîchement acquises ne seront pas de trop pour franchir les obstacles qui se dressent entre le détective et la vérité. Enfin, ce dernier peut dépenser l’argent durement gagné pour s’équiper ce qui se traduit par divers bonus passifs, une fonctionnalité qui reste toutefois en arrière-plan.
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Conclusion
Points forts
- Le cadre lycéen et les thématiques contemporaines abordées
- La dimension enquête et les mécaniques de gameplay qui y sont liées
- La mise en scène cinématographique
- La performance des acteurs de doublage
- Les combats intenses et techniques
- La reconstitution à l’échelle 1:1 des quartiers de Kamurocho et d’Isezaki Ijincho
- La durée de vie (+50 heures)
- Les doublages en japonais/anglais et les sous-titres en français (VOSTFR)
Points faibles
- Le manque de lien avec la saga Yakuza
- L’absence d’une nouvelle ville à explorer
- L’approche ludique parfois trop dirigiste
- Les limitations techniques du Dragon Engine
Note de la rédaction
Lost Judgment est la suite légitime de Judgment, et fait aussi bien que son prédécesseur sur la majorité des points. La reconstitution fidèle de Tokyo et de Yokohama est une invitation à l’exploration tandis que les combats conservent cette intensité et cette technicité propres à la franchise. Quant au scénario, ce dernier prend littéralement aux tripes. Le cadre lycéen ainsi que les thématiques abordées compensent parfaitement le manque de lien fort avec la saga Yakuza. Seules certaines mécaniques de gameplay trop dirigistes, et l'absence remarquée d'une nouvelle zones géographique sont à déplorer sans que cela ne ruine l’expérience de jeu. Le titre des studios Ryu ga Gotoku applique ici sa sentence avec talent.