Après le merveilleux remake de The Dragon’s Trap en 2017 et un retour fracassant avec The Cursed Kingdom l’année suivante, Wonder Boy, la série de jeux de plateforme culte des années 80-90 chez Sega, est à nouveau à l’honneur cette année. Sous la baguette du studio Artdink (et non plus des français Lizardcube), c’est désormais le sixième épisode qui fait peau neuve, rebaptisé Asha in a Monster World pour l’occasion. Est-ce que la magie sera de nouveau au rendez-vous ?
Pour ce test, nous avons eu accès à la version PS4 et Switch de Wonder Boy : Asha in a Monster World. Les deux moutures ne présentent aucune différence notable, et tournent très bien. Même constat lorsqu’on joue en version portable sur l’hybride de Nintendo. Au global, il n'y a pas de ralentissement à déplorer.
Dur dur pour Asha in a Monster World de passer après The Dragon’s Trap et The Cursed Kingdom. Car au-delà de leur approche Metroidvania très efficace, les deux remakes misaient sur une somptueuse direction artistique en 2D, manière de sublimer et de réinventer les pixels de l’époque, comme l’a fait Lizardcube (derrière The Dragon’s Trap) avec Streets of Rage 4. Cette nouvelle refonte est, quant à elle, plus sage, et souffre surtout d’un game design bien plus vieillot que le précédent remake. Pour le coup, ce n’est pas dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes. Même si Asha in a Monster World à ses qualités. Votre mission : sauver le monde en libérant quatre esprits enfermés au fond de quatre donjons.
Peu pour être heureux
On commence par le visuel. Pour ce nouveau remake, le studio Artdink a opté pour un joli cel shading 3D. Le résultat a les fesses entre deux chaises, entre le très bon pour les décors ensoleillés et le passable pour ceux dans l'obscurité, comme les grottes. Toutefois, on se laisse très régulièrement porter par Asha in a Monster World, notamment grâce à sa BO joliment réorchestrée, qui participe à une sorte d’euphorie de chaque instant.
Cette euphorie, elle est aussi marquée par le gameplay, très classique de prime abord (attaque dans quatre directions avec la possibilité d’augmenter ses dégâts via de la magie) mais rendue plus excitant grâce au coup vers le bas, qui permet de rebondir sur un ennemi tout en lui infligeant des dégâts, à la manière d’un DuckTales ou d’un Shovel Knight. Un mouvement qui donne envie de détaler vers l’avant, en particulier en mode facile, où la récupération des pièces est un peu plus rapide et où les items de soin sont plus fréquents.
Wonder Boy : Asha in a Monster World - Petite balade en forêt (Gameplay)
Le gameplay s’étoffera d’ailleurs tout au long de l’aventure (entre 4h et 5h pour en voir le bout). Mais ce n’est pas Asha, votre héroïne, qui évoluera directement, même si cette dernière pourra acheter des armes plus puissantes à Rapadanga, point de rendez-vous central du titre. En fait, c’est votre animal de compagnie volant, un Pepelogoo - Pepe pour les intimes - qui va évoluer et gagner en puissance. D’abord tout léger, il vous sera dans un premier temps utile pour planer dans les airs et faire un double saut. Mais il ne résistera pas à la tentation de fruits juteux, et deviendra plus gros, se découvrant de nouvelles compétences (éteindre une lampe torche, colmater un geyser et faire office de plateforme, etc) jusqu’à devenir trop lourd à porter. Une manière originale et plutôt chouette d’amener de nouvelles situations de gameplay.
Mais ce qui aurait pu donner lieu à une structure à la Metroid - débloquer de nouvelles formes / compétences et revenir sur vos pas pour débloquer des passages et progresser - se révèle finalement très dirigiste. Au global, Asha in a Monster World est un jeu linéaire, et il ne sera pas possible de revenir dans les précédents niveaux pour exploiter les nouvelles compétences de votre Pepe (y retourner servira à rassembler tous les fragments pour augmenter sa barre de vie). Ce qui n’est pas forcément un mal en soi. Le titre met régulièrement en place de nouvelles mécaniques et façon d’aborder le level design pour faire varier les plaisirs.
À nos actes manqués
On ne peut pas vraiment reprocher à Artdink d’avoir laissé la structure de ce Wonder Boy inchangée, même si quelques passages sentent vraiment les années 90 (en particulier le quatrième donjon exagérément labyrinthique avec des mots de passe et des indices à noter). En revanche, la pilule passe moins bien pour le système de sauvegarde, totalement manuel. Concrètement, vous devrez sans cesse vous arrêter en pleine course pour enregistrer votre progression, sans aucune aide automatique. Si, sur le papier, ce détail peut apparaître comme anecdotique, il vous arrivera sans doute de sauver vos données alors que votre vie est basse et qu’un challenge vous attend, sans avoir pris la peine de mettre de côté un second fichier pour revenir avec davantage de force. Pas sûr que ce genre d’aspect valait la peine d’être conservé pour un remake.
Wonder Boy : Asha in a Monster World - Au fin fond du canyon (Gameplay)
Pour ne rien arranger, ce système de sauvegarde est pénible à utiliser, vous obligeant à mettre le jeu en pause, accéder au bon menu, et attendre que la jolie cinématique de sauvegarde se termine. Il faudra aussi faire ce genre de manip pour utiliser des objets, comme un item de soin par exemple. À force, vous passerez sans cesse par la pause pour limiter les faux pas, et ça casse le rythme. Ce genre d’éléments propres au titre d’époque alourdissent Asha in a Monster World, alors qu’ils ne sont pas constitutifs de l’expérience de jeu (en tout cas pas dans le bon sens du terme). Pas de quoi vous faire lâcher la manette, mais c’est dommage.
Ça fait toujours plaisir. Si vous craquez pour la version physique de Asha in a Monster World, vous recevrez gratuitement le titre de l’époque, Wonder Boy IV. Sur Switch, il est directement stocké dans la cartouche. Sur PS4, il est offert sous la forme d’un code qu'il faudra télécharger en passant par le PlayStation Store.
Surtout que quand Artdink cherche à moderniser Wonder Boy, le studio est un peu à côté de la plaque. Pour twister le changement de plan successif du jeu d’origine dans la ville principale (auparavant en 2D et en plan par plan), le studio a joué sur les perspectives pour faire rentrer différentes strates que le joueur peut explorer. Mais le tout fonctionne bizarrement, et il faudra souvent repasser par un point précis pour changer de plan. Les différents boss - pas des plus mémorables - pâtissent également de cette maladresse, avec des attaques en perspective compliquées à lire. En gros, retenez que le choix de la 3D n’apporte pas grand chose et crée plus de problèmes qu’il n’en résout, même si le tout permet de faire deux trois effets de mise en scène sympatoches, que ce soit en plein jeu ou lors des cinématiques.
Points forts
- Du néo-rétro qui fera plaisir aux fans
- Un platformer coloré et entraînant
- Quelques chouettes mécaniques
- Une jolie direction artistique
Points faibles
- Des séquences qui ont mal vieilli
- La sauvegarde 100% manuelle
- Une 3D parfois imprécise
Asha in a Monster World n’est malheureusement pas au niveau du précédent remake, The Dragon’s Trap, ni de The Cursed Kingdom, dernier épisode canonique en date. Mais cela tient plus du jeu d’origine que du travail de Artdink, même si quelques choix faits par le studio (imprécisions avec la 3D, garder la sauvegarde 100% manuelle, pas de raccourcis d’objet) n’ont sans doute pas aidé. Contrairement aux deux autres titres, Wonder Boy IV arbore une structure linéaire qui a parfois du bon, avec souvent de nouvelles mécaniques de jeu, tout comme du mauvais (les déambulations insensées dans le village et le donjon à base de mots de passe à retenir). Si bien qu’on pourra pester face à son écran, tout en se laissant porter par la jolie direction artistique - assez inégale -, la bande-son, et une sorte d’euphorie ambiante. Asha in a Monster World reste ainsi un chouette jeu de plateformes, qui réussira surtout à transporter les fans du titre d’origine.