Enfourchant son scooter, le citadin quitte la vie urbaine pour s’enfoncer dans la campagne. Après plusieurs longues heures de route, ce dernier arrive à destination mais l’appareil, lui, est bien mal en point. Accueilli par le Maire d’Olive Town – ou Oliville en français – il découvre un endroit paisible mais qui a besoin d’un sérieux rafraîchissement. À l’image de plusieurs épisodes de la franchise (et de celle des Harvest Moon), il va falloir poursuivre l’héritage du grand-père et devenir le bon samaritain d’une population avide de requêtes.

Un apprentissage de longue durée

L’aventure débute par la conception de son avatar et par une série de tutoriaux étalés sur plusieurs jours. Dans cet épisode exclusif à la Nintendo Switch, tous les outils sont disponibles dès le départ pour travailler la terre, semer les graines, couper le bois, déblayer le terrain ou arroser les semences. Même si le Maire distille quelques conseils, c’est avant tout au joueur de comprendre les mécaniques de gameplay et le fonctionnement du village. S’il est primordial de se focaliser sur la gestion de la ferme et ses à-côtés (construction d’une maison, réparation des installations, achats et soin des animaux, expédition de la marchandise, tenue et agrandissement du terrain…), Pioneers of Olive Town ne tarde pas à montrer sa touche « Animal Crossing ». En effet, Oliville est une charmante bourgade en bord de mer mais elle peine à attirer les touristes et le rôle du petit héros (ou de l’héroïne) est aussi de rendre attractive cette contrée qui regorge de richesses. Mélange de gestion de ferme et de simulation de vie, Pioneers of the Olive Town est un titre qui demande du temps et de la patience car il abonde d’activités et les nouveaux arrivants pourront être perdus par cette accumulation de tâches aussi diverses que variées. La présence d’un mode allégé (qui permet notamment d’accélérer la pousse des plantations et l’expérience acquise par le joueur) est une bonne chose pour les plus pressés. Car entre l’entraide aux citoyens, l’élevage des animaux, le temps passé avec son compagnon (chien ou chat), le nettoyage du terrain, la tenue des comptes et les diverses activités temporaires (comme la chasse aux œufs), il y a vraiment de quoi faire ! Les journées passent assez vite (elles débutent à 9 heures du mat’ en plus !) mais comme les magasins ont leur jour de fermeture, cela implique une grande organisation. À noter qu’il existe un mode en ligne permettant d’envoyer des cartes postales ou de rendre public ou privé son profil mais il est malheureusement assez anecdotique.

Les Lutins de la Terre

Bien que très terre à terre (en même temps, pour un jeu à tendance agricole, le contraire eut été étonnant), le titre de Marvelous instille une petite pointe de fantastique. Au bout d’un moment, le joueur aura ainsi la possibilité de se rendre dans une clairière où vit une communauté de petites créatures. Celles-ci, nommées les Lutins de la Terre, sont des entités qui épaulent le joueur dans ses tâches, en récoltant par exemple des matériaux. À mesure que le joueur effectue des activités, il aperçoit par moments de petites bestioles s’enfuir. Il s’agit de Lutins acolytes et chaque lutin acolyte découvert peut ensuite être assigné à diverses besognes. Il est aussi possible de commercer avec ce peuple des bois mais leur monnaie prend la forme de jetons qui n’a cours que dans ce monde alternatif et qui s’obtient en vaquant à ses occupations. Le concept n’est pas inintéressant mais il est malheureusement un peu superficiel et on peut très bien s’en passer, surtout quand on sait que ça implique de nouveaux chargements et que ces derniers sont un peu longuets. L’idée est bonne mais pas suffisamment exploitée. Dommage.

Les Lutins de la Terre apparaissent assez tôt dans le jeu mais leur utilisation manque de consistance. Dommage car le concept est intéressant.

Dépaysant mais poussif

Pioneers of Olive Town distille une chouette ambiance. Son graphisme en cel-shading est très coloré et s’accompagne de jolis effets (comme les feuilles de cerisiers volant au vent ou les rayons de soleil aveuglants). Le character design est lui aussi dans le ton de toute cette atmosphère portée par des musiques aussi guillerettes que réussies. Sur le plan technique, en revanche, le jeu souffre de ralentissements et les développeurs auraient pu optimiser le moteur pour qu’il soit un peu plus fluide. L’autre gros problème vient de cette sacro-sainte manie à limiter les interactions du joueur à des cases de damier. Il arrive ainsi régulièrement, par manque de souplesse dans les commandes, qu’on rate la plante à arroser ou le légume à ramasser. Comme le jeu souffre de saccades régulières, on a cette désagréable impression de ne pas tout maîtriser. C’est regrettable car le titre ne manque pas de bonnes idées, comme ces machines qui permettent de confectionner de nouveaux matériaux en transformant des aliments ou matières premières. Des œufs vont devenir de la mayonnaise, le minerais va se grimer en lingot ou l’herbe peut se métamorphoser en fils. Le problème, c’est qu’elles sont effroyablement lentes et n'acceptent qu'UN unique matériau à transformer à la fois ! On vous laisse imaginer quand il faut réunir 120 pièces de bois transformées pour retaper une grange et qu'il faut étaler des dizaines de machines pour aller plus vite. Cette complexification est incompréhensible.

Pour accélérer les choses, il est toutefois possible d’obtenir, assez rapidement, des outils très pratiques comme un arroseur, une pompe de drainage ou même différents « pouvoirs » permettant de semer plusieurs graines à la fois, d’arroser sur une plus longue distance, de couper plusieurs arbres en même temps, etc. Malheureusement, on voit rapidement les limites du système et… du sac contenant les ingrédients ! Il ne faut pas traîner pour agrandir ce dernier et passer à sa taille ultime pour avoir un minimum de confort. Par ailleurs, si les habitués de la licence ne seront pas décontenancés par le manque d’informations, certains utilisateurs risquent de ne pas comprendre comment obtenir tel ou tel matériau. Avec l'accumulation de machines pour transformer les matières premières, il arrive régulièrement qu’on tourne en rond et c’est un peu agaçant, tant bien même qu’il s’agisse d’un jeu qui demande de prendre son temps et d’être patient. Ce n’est pourtant qu’au fil de nombreuses heures de jeu que le titre se découvre enfin, avec un terrain assez vastes, de multiples structures à réparer, des mini-jeux et activités diverses mais aussi une petite histoire à base de fantôme et de jeune femme étrange. Est-ce que cela suffit à faire oublier les carences de Pioneers of Olive Town ? Malheureusement, non. En voulant densifier sa formule tout en lorgnant du côté d’Animal Crossing et Stardew Valley, cet épisode peine à maintenir son rythme et s’enfonce dans une routine sans fin, la faute à une durée énorme mais artificielle. On a beau acquérir de nouvelles compétences, matériaux, animaux et autres, le programme revient comme un boomerang dans la figure et mise, à notre sens, beaucoup trop sur le farming. Oui, pour un jeu de ferme, ça paraît logique mais un meilleur dosage aurait été le bienvenu.