Est-ce Superman ? Est-ce un avion ? Non, c’est un oiseau ! Développé par un seul et unique développeur, The Falconeer puise ses inspirations dans divers shoots aériens aussi cultes que Crimson Skies et Panzer Dragoon. Mettant le joueur aux commandes d’un rapace légendaire face à un bestiaire de créatures fantastiques, le titre édité par Wired Productions ajoute une pincée de RPG au sein d’un monde ouvert enseveli sous les eaux. Après une première rencontre qui a soulevé plus d’interrogations que d’ardeur, il est enfin temps de vérifier si ce jeu de tir à l’ambiance poétique a de quoi donner des ailes.
Bird of Thrones
Il y a deux semaines, nous vous transmettions nos premières impressions sur The Falconeer, ce jeu de tir aux couleurs chaudes disponible pour le lancement des Xbox Series X|S. À cette occasion, nous expliquions que le titre de Wired Productions n’était pas un shooter aérien comme les autres grâce à sa petite touche RPG, tout en émettant quelques doutes sur des choix de game design liés à l’exploration, à la construction du monde et aux combats. Se déroulant dans l’univers de la Grande Ursée, un lieu abritant d’anciennes reliques que se disputent diverses factions, The Falconeer tente de prendre de la hauteur en plaçant ses personnages au centre de conflits géopolitiques. De ce fait, chaque mission qui compose les quatre campagnes disponibles (hors prologue et épilogue) débute par une explication de l’objectif sur une carte du monde. Les tenants et aboutissants de la quête y sont exposés, ainsi que les alliances à nouer, donnant une dimension très “Game of Thrones” à l’épopée. Le côté épique en moins. De perchoir en perchoir, l’utilisateur déroule en fait des menus textuels pour sélectionner les mandats des campagnes, les quêtes annexes, ou dépenser les deniers acquis auprès des marchands. Ces derniers proposent diverses améliorations à destination du héros comme de son fidèle destrier à plumes, à condition bien sûr de posséder le bon permis. Intégralement doublée en français, la création de Tomas Sala peine à intégrer le joueur dans les rouages de son univers, la faute à une relation héros/oiseau inexistante, et à des missions trop génériques. Il n’y a rien d’anormal à ce que la répétitivité se fasse ressentir dans un jeu de tir à la troisième personne, mais l'impression de devoir toujours faire la même chose dans le même (grand) niveau gâche l’expérience sur la longueur. Le challenge, corsé si le pilote oublie d’acheter de meilleures armes, n’est pas très bien équilibré. Certaines quêtes basiques peuvent donner du fil à retordre alors que d’autres plus avancées s’accomplissent en deux temps trois mouvements.
The Falconeer : les 10 premières minutes du jeu.
Un shoot à l’ancienne, mais pas que
À l’instar d’un Crimson Skies : High Road to Revenge , les quêtes de The Falconeer se résument la plupart du temps à protéger des alliés ou à livrer des items spéciaux. Contrairement à l’œuvre de FASA Interactive, le pilote ne monte pas à bord d’un avion mais enfourche un faucon de guerre. Manette entre les mains, cela signifie que la bestiole doit être domptée puisqu’elle n’est pas qu’un amas de vis et d’écrous. En ligne droite par exemple, le faucon a tendance à dévier si aucune pression n’est exercée sur le joystick. Dans le même ordre d’idée, freiner provoque un changement d’orientation, et l’oiseau gagne de la vitesse en se faisant emporter par les courants d’air. Cet intéressant système très organique qui veut donner l’impression de diriger un être vivant plutôt qu’un véhicule comporte quelques défauts. Le premier vient de l’obligation de devoir plonger pour regagner de l’endurance et ainsi pouvoir accélérer et effectuer des vrilles. Même si nous comprenons l’idée, jouer aux montagnes russes pendant les affrontements n’est pas ce qu’il y a de plus amusant. Le second, c’est que les courants d'air aidant le rapace à regagner les cieux rapidement ont la fâcheuse tendance à mener le pilote en hauteur quand bien même ce dernier souhaiterait voler en rase-mottes pendant une bataille. Sur une note plus positive, la maniabilité qui utilise principalement les gâchettes est bien pensée, rendue plus agréable par un pad Xbox Series X aux boutons “LB” et “RB” mieux situés. Il est tout de même regrettable de ne pas avoir accès à une seconde arme histoire d’apporter un peu plus de profondeur aux dogfights. En combat, les sensations sont plutôt bonnes dès lors que l’on améliore son fusil de base. Bien que le joueur regagne automatiquement sa vie avec le temps, les munitions sont à récupérer en fonçant dans les orages (ou en ramassant sur les ennemis détruits). Là encore, cette idée sympathique est contrebalancée par un système de surchauffe assez frustrant. Planer près des boules de foudre quand les réservoirs de munitions sont pleins provoque une surcharge, ce qui a pour effet de détruire le catalyseur (à racheter auprès d’un marchand). Mais dans le feu de l’action, ou plutôt sous la foudre des tempêtes, il peut être délicat d’éviter une surchauffe, surtout lorsque les adversaires sont nombreux et que les courants d’air renvoient le rapace directement dans les cieux électrisés.
Libre comme l’air
Dans ce monde ouvert où la guerre entre différentes factions fait rage, le joueur a la possibilité de se balader librement. Cela permet de découvrir de nouveaux lieux comme de se rendre au Comptoir volant pour acheter un Lance-foudre, un Grocanon, un Crache-poison ou une autre arme destructrice. Si chaque mission réussie apporte des points d'expérience remplissant diverses jauges (agilité, vitesse, points de vie, régénération, etc.), la puissance de l'arme est avant tout déterminée par le modèle acheté auprès des marchands. Autant être clair, s’équiper d’un Grocanon refroidira la plupart des adversaires en quelques coups bien placés, facilitant drastiquement la progression malgré la consommation élevée des ressources. Malheureusement, la vitesse du dragon et le peu de choses à faire/découvrir dans la Grande Ursée plombent l’envie de virevolter au gré du vent. The Falconeer échoue tout simplement à rendre ses trajets passionnants, au point où le jeu propose très régulièrement de se téléporter plutôt que de voyager par ses propres moyens. Assez décousu dans sa narration à cause du système de chapitres à picorer dans le sens que l’on souhaite, le jeu de tir de Wired Productions n’arrive pas à créer du lien avec son utilisateur. Les bonnes idées, comme la possibilité de devenir un pirate en abusant du tir ami ou modifier le recul de la minimap en fonction de l’altitude, n’arrivent pas à cacher les approximations. C’est dommage, car sur sa partie strictement technique, le soft de Tomas Sala se révèle d’une belle qualité. Jouable en 4K/60fps sur Series X et en 1800p/60fps sur Series S, The Falconeer dispose d’animations soignées qui servent une direction artistique épurée agréable à l’œil. L’impression de survoler du vide se fait néanmoins vite ressentir, tandis que les différentes régions ne varient que trop peu. Heureusement, les effets climatiques réussis donnent du cachet à ce qui est affiché à l’écran. Oui, sur un téléviseur HDR, le titre de Wired Productions brille de mille feux.
The Falconeer : exemple d'une quête annexe.
Points forts
- Des dogfights loin d’être déplaisants
- Un lore particulièrement développé
- Une jolie direction artistique et de bonnes musiques
Points faibles
- Les quêtes principales comme secondaires sont peu inspirées
- Des phases d’exploration laborieuses
- Des éléments de game design frustrants
- Une difficulté mal équilibrée
Malgré sa direction artistique plaisante et son ambition de raconter une histoire complexe aux multiples ramifications, The Falconeer manque un petit peu d’âme pendant sa grosse dizaine d’heures de jeu. Le lore développé peine à inclure le joueur à cause d’un manque d’attachement aux héros tandis que les missions peu passionnantes, voire génériques, plombent l’envie de progresser. Fort heureusement, ses dogfights globalement réussis ainsi que ses quelques fulgurances font de ce shoot aérien une expérience qui mérite l’attention. Le travail effectué par son unique développeur est évidemment remarquable : son amour pour un genre en voie de disparition brille sur chaque plume du faucon fantastique.