Il existe une vérité malheureuse concernant les suites de saga à succès qui surviennent un long moment après leur arrêt : celles-ci sont très souvent de mauvaise qualité. Quand on entend parler de la suite de la trilogie Karate Kid, on est donc en droit de s'attendre à une énième suite sans interêt ni originialité. Pourtant, c'est loin d'être le cas de Cobra Kai, l'excellente surprise de ces dernières années. Alors que les fans attendent de pieds fermes une troisième saison prévue pour 2021, c'est de son adaptation vidéludique dont il est question aujourd'hui. Hélas, Il existe aussi une triste vérité concernant les adaptions d'un film en jeu vidéo (et inversement) à laquelle Cobra Kai : The Karate Kid Continues tente d'échapper.
Un scénario qui manque de punch
Sachez avant tout que ce test ne contiendra aucun spoiler scénaristique sur la série pour ceux qui découvriront son univers avec cet opus. Pour les autres, n'attendez pas d'énormes rebondissements ou de révélations liés aux intrigues ou aux personnages. En fait, il est même difficile de caser cet opus dans le canon de la série tant les situations s'avèrent totalement surréalistes et totalement inimaginables dans l'intrigue de la saga. Heureusement, ce titre ne prétend pas se placer entre la saison 2 et la 3, que vous devriez démarrer sans avoir rien raté. Cobra Kai place en effet une intrigue qui débute immédiatement après les événements de la saison 2. Toutefois, rassurez-vous, il s'agit d'une courte séquence pour replacer le contexte de la série, et surtout la rivalité entre Cobra Kai et Miyadi-Do avant de plonger dans le passé, plus précisemment à partir de la saison 2.
La narration nous est présentée sous forme de bandes dessinées légèrement animées, narrées par les protagonistes. Première bonne nouvelle, les amateurs de la version originale reconnaîtront avec un grand paisir le doublage officiel d'une grande partie du casting : Ralph Macchio (Daniel), William Zabka (Johnny), Jacob Bertrand (Eli/Hawk), Mary Mouser (Samantha) et bien d'autres encore. Une excellente nouvelle donc, sachant que chaque protagoniste est plus ou moins important dans l'intrigue, quand d'autres sont totalement oubliés. En outre, ne vous attendez pas à deux histoires bien disctintes entre les deux dojos. Si les dialogues et relations entres les personnages sont bel et bien différents, les situations et niveaux restent les mêmes. Le tout semble finalement très décousu et n'a pas d'autre but que d'étaler la relation conflicutelle entre les protagonistes, dont la source des conflits et le caractère sont toutefois bien respectés.
Frappe vite ! Frappe fort ! Aucune pitié !
Mais alors, ressent-on du plaisir lors des six heures nécessaires pour terminer le jeu une première fois ? La première impression sera, il faut l'avouer, plutôt négative. Aux commandes de Miguel ou de Samantha, vous ne disposerez pour le premier niveau que de très peu de techniques, et les premiers instants sont particulièrement ennuyeux. Pourtant, nous prenons rapidement nos marques dans ce titre fortement inspiré des bornes d'arcade ou des vieux beat'em up des années 90. Chaque ennemi vaincu vous donnera des points d'expérience à dépenser entre deux niveaux et un compteur apparait pour compter le nombre de coups que vous portez aux ennemis, ainsi qu'une note qui grimpe au fur et à mesure que vous restez indemne. Le joueur peut faire valser ses ennemis dans les airs, manger pour récupérer de la santé, faire des take-down… bref, jusqu'ici, nous sommes dans un jeu de combat pur et dur. Si vous connaissez la série, vous remarquerez alors que chaque niveau est inspiré d'un lieu connu, avec quelques clins d'œil souvent sympathiques.
Heureusement, si les premiers instants peuvent paraître ennuyeux, le gameplay se densifie au fur et à mesure que vos combattants deviennent puissants et que les défis s'accomplissent. L'arsenal de technique s'amplifie considérablement et chacun de vos personnages dispose d'une technique ultime plus ou moins en lien avec sa personnalité et son dojo (Daniel et son fameux coup du Héron). Ces techniques s'avèrent malheureusement totalement ratées d'un point de vue visuel en plus d'être totalement anednotique pour un ou deux personnages. D'ailleurs, il est évident que choisir de combattre pour Cobra kai ou Miyagi-Do n'est pas un choix anodin. Un combattant du dojo Lawrence frappera plus fort, fera plus de dégâts avec des attaques enflammées, alors qu'un élève de Daniel aura plus de résistance, de point de vie en plus d'attaques gelées. Dans l'idée, c'est très sympatique, dans les faits, c'est Cobra Kai qui l'emporte (désolé Dany).
Non seulement les combattants de feu (Miguel, Johnny, Hawk et Tori) sont plus agréables à manier mais leurs attaques ultimes sont bien plus efficaces. De plus, le jeu n'étant pas bien difficile, l'intérêt de jouer un membre de Miyagi-Do (Daniel, Samantha, Robby, Demetri) est plus contestable puisqu'il est difficile de mourir. Puisqu'on évoque la difficulté, autant parler des boss disséminés sur la trentaine de niveaux qui composent l'aventure. Autant le dire d'emblée, ils sont totalement ratés en plus d'être totalement incohérents dans l'univers de la saga. Par exemple, vous aurez à affronter Demetri, le personnage le plus faible de toute la série dont il est le comic relief, ou encore un homme d'affaires qui n'apparait que quelques secondes dans la série originale. Également, et comme tous les boss en 2D ou fausse 3D qui se respectent, ils n'offrent pour la plupart aucun challenge puisqu'il suffit de les coincer dans l'angle de la caméra et de les cogner sans pitié jusqu'a ce que fin du niveau s'en suive. À noter d'ailleurs que les Cobra Kai peuvent frapper un adversaire déjà à terre…
Daniel-San suffit pas
Enfin, évoquons la partie visuelle d'un titre qui, disons-le franchement, est plutôt laid. Si on reconnaît aisément les protagonistes incarnés, force est de constater que le reste ne tient pas la route. Les décors demeurent tristement vides malgré de gros efforts fournis sur le fan-service et manquent terriblement de vie. Les voitures sur les routes ne circulent pas, les civils en arrière-plan sont immobiles pour la plupart (seuls quelques rares PNJ sont animés, notamment sur les bornes d'arcades) et de nombreux niveaux se ressemblent tout en proposant le même schéma. Les bugs sont nombreux (il n'est pas rare de croiser un personnage sans tête...) et certaines animations sont parfois à la limite de l'insulte pour un jeu qui sort à l'aube de la sortie de la PlayStation 5 et de la Xbox Series. Même son de cloche pour les personnages qui n'ont pas tous bénéficié du même soin : si certains comme Hawk ou Johnny ont eu le droit à un meilleur traitement, d'autres comme Tori ou Sam sont à peine reconnaissables et bénéficient en plus d'attaques ultimes totalement ratées. En revanche, tout n'est pas à jeter puisqu'il est possible de jouer avec le décor pour se débarrasser des ennemis, et ce de manière souvent amusante avec des animations que l'on qualifiera de correctes. On pourrait bien sûr pardonner ces erreurs et ces soucis visuels qui ternissent l'expérience de jeu ; cependant, il est difficile de faire preuve d'indulgence face à un titre proposé au prix plûtot couteux de 40 euros, ce qui est une somme non négligeable au vu de sa qualité.
Points forts
- Un hommage aux vieux beat'em up
- Gameplay plutôt jouissif qui gagne en intensité…
- Une trentaine de niveaux
- Partie sonore efficace
- La VO des acteurs de la série
- Jouable en coop
- Une durée de vie correcte si on décide de faire les deux histoires
Points faibles
- Visuellement très daté
- … après un début franchement ennuyeux
- Prix bien trop élevé à sa sortie (40 euros)
- Scénario difficile à caser dans le canon
- Les animations parfois minimalistes
- Les boss, ratés
- Un manque d'équilibre de gameplay entre les deux dojos
Il est difficile de noter objectivement ce cobra-Kai dans une industrie où ce type de jeu à totalement disparu des rayons. L'idée d'honorer la série dans un beat'em up hommage aux années 80 était bonne ; malheureusement, les développeurs n'ont pas mis à leur profit les nombreuses générations qui ont suivi pour apporter le vent de fraîcheur et la nouveauté nécéssaires à la qualité du titre. On se retrouve finalement avec un jeu qui aurait très bien pu sortir il y a de nombreuses années malgré quelques indéniables qualités qui procurent un certain plaisir de jeu. Pour ce résultat, difficile de vouloir y dépenser quarante euros. Cobra Kai reste un défouloir loin d'être désagréable qui pourrait convenir aux fans du genre ou de la série. À vous de voir si vous voulez y mettre le prix.