Durant les années 80, avant la sortie de l'immense succès que sera la Game Boy, les Game & Watch faisaient fureur chez toutes les tranches d'âge. Les petites machines de Gunpei Yokoi se déclinèrent en dizaines de modèles différents. Manhole, jeu sur lequel nous nous attardons aujourd'hui, est l'un d'entre eux. Mais comment ce Game & Watch a-t-il traversé le temps ? Penchons-nous sur son cas…
Manhole est un Game & Watch de l'une des premières séries (le sixième commercialisé, pour être plus précis). Il fut un immense succès, de part certaines caractéristiques sur lesquelles nous reviendrons plus bas. Mais là ne s'arrête pas son histoire, car "faire du neuf avec du vieux" pourrait très bien être la devise de Nintendo. Ainsi, il fit partie de la première compilation Game & Watch Gallery sur Game Boy en 1997. Plus tard, Nintendo choisit Manhole comme ambassadeur d'une série de cartes destinée à ces petites machines sur le Nintendo e-Reader (accessoire de la Game Boy Advance permettant de lire des cartes pour jouer à des jeux). La série fut malheureusement annulée au vu de l'insuccès du support, et Manhole resta seul représentant de cet abandon. Enfin, il fit une dernière apparition sur le DSiWare, où il était disponible en téléchargement au même titre que plusieurs autres de ses congénères. Manhole eut donc une histoire très riche pour un simple petit jeu d'adresse !
Commençons sans plus tarder le test de ce Game & Watch. Le but de ces machines était d'être les plus intuitives possibles ; ainsi, en démarrant le jeu, de petits personnages marchent sur les deux promenades situées à l'écran. Malheureusement, deux bouches d'égoût ouvertes sur chacune de ces promenades les menacent d'une chute périlleuse ! À vous de diriger votre personnage pour placer une plaque d'égoût sous les pieds de chaque personnage à temps! Après trois chutes, c'est le Game Over…
Niveau jouabilité, il est presque impossible de faire plus simple et intuitif : quatre boutons vous permettent de vous diriger vers les quatre emplacements vides. Dans les portages consoles, la croix directionnelle permet de se déplacer. Les déplacements des perssonnages à sauver sont si synchronisés que Manhole tient presque par moments du jeu de rythme, genre inexistant à cette époque. Si tout ceci semble bien sommaire, il faut néanmoins se souvenir qu'il s'agit là d'un simple Game & Watch, conçu pour être peu coûteux et faire passer le temps quelques minutes de temps à autre. Rien à redire, donc, de ce côté-ci.
Passons maintenant aux graphismes. Encore une fois, il faut prendre en compte le support : qui dit Game & Watch dit graphismes fixes, très simplistes pour comprendre immédatement l'objectif du jeu, et souvent en noir et blanc. À noter que Manhole est le deuxième de ces appareils à présenter de la couleur sur son écran. Le décor est très minimaliste mais il est suffisant pour ce genre de jeux. Les personnages, quant à eux, sont assez amusants, que ce soient les marcheurs de par les postures qu'ils adoptent en se déplaçant ou même une fois tombés, ou le personnage contrôlé par le joueur notamment par les expressions plutôt comiques qu'il arbore… ainsi que les positions assez incongrues qu'il adopte pour placer le regard sous les trous. Tous ces petits détails confèrent à l'ensemble une atmosphère puérile très agréable et tout à fait adaptée à ce genre de jeu. Rien à reprocher, donc, de ce côté-ci.
Passons à la bande son : le moins qu'on puisse dire, c'est que le titre ne brille pas par cet aspect. Les Game & Watch étant dotées de processeurs sonores très peu performant sdéjà pour l'époque de leur sortie, la qualité sonore n'est pas vraiment au rendez-vous... pour le cas de Manhole, deux sons aigus différents se font entendre lors de avancée de chaque personnage, pour les deux pas effectués. Un son encore différent se fait entendre lorsqu'un personnage marche sur la bouche d'égoût bien placée. Enfin, un son est émis lorsqu'un personnage tombe (pour le "splash" dans l'eau), puis lorsqu'il revient à terre (pour l'ébrouement). C'est rès simpliste, donc, comme dans la plupart des Game&Watch. Si la bande son est dans la norme de ces petits appareils, elle n'en est tout de même pas plus convaincante. Son seul point positif est de rythmer encore un peu plus le gameplay, renforçant la sensation décrite un peu plus haut.
Enfin, évoquons la durée de vie. La difficulté augmente avec le temps au cours d'une partie. Cela se traduit principalement par un plus grand nombre de personnages en même temps à l'écran. Ainsi, les premières parties d'un débutant ne dureront que quelques secondes, ce nombre pouvant s'élever à quelques minutes pour un joueur confirmé. Néanmoins, le concept est particulièrement addictif, notamment grâce au système de score mis en place (une personne sauvée ajoute un point au compteur). Ainsi, la volonté de toujours améliorer son score permet aux parties de vite s'enchaîner, sans que le joueur s'en rende compte. Il est ainsi possible d'y passer plusieurs dizaines de minutes d'affilées. Même si on aura peut-être un peu de mal à revenir dessus, une fois la partie lancée, il devient difficile de s'arrêter. Toutefois, le concept ne se renouvellant pas, il devient assez répétitif. Le temps passé sur Manhole dépend donc en grande partie du profil du joueur et de ce qu'il attend d'un jeu.
Manhole était le tout premier Game & Watch sur lequel il était possible de programmer une alarme ! Les Game & Watch proposaient une fonction horloge depuis le tout premier numéro (Ball) mais c'est bien Manhole qui apporta ce petit plus, en tant que premier appareil de la série "Gold".
Finalement, pour donner un avis sur Manhole, tout dépend de l'époque prise en compte : sous format de Game & Watch traditionnel au début des années 1980, il était reconnu comme un excellent jeu. Certains voyaient même dans ces petites machines l'avenir du jeu vidéo ! Quelques années plus tard, dans la compilation sortie sur Game Boy, Il remplit tout à fait son rôle aux côtés de Game & Watch tout aussi classiques. Sur Nintendo e-Reader, le jeu ne nécessitait qu'une seule carte pour y jouer (contre cinq pour la plupart de autres jeux) : il était donc commercialisé comme un petit quelque chose pour passer le temps, et ne justifiait en aucun cas à lui seul l'achat du lecteur de cartes. Enfin, sur Nintendo DSi, le concept commence vraiment à souffrir du poids des années. Les courtes parties répétitives n'intéressent plus, ou presque, sur ce genre de support.
Points forts
- Le minimalisme propre à ces machines...
- Les personnages amusants
- Le côté addictif
- L'aspect presque rythmique
Points faibles
- ...parfois un peu trop simpliste
- La bande son tout juste existante
- L'intérêt très variable suivant le type de joueur
En résumé, Manhole fut un très gros succès à sa sortie en 1981, et ce n'est pas dû au hasard. Il reprend tous les codes de ses quelques prédecésseurs, s'adaptant ainsi parfaitement aux courtes parties pour lesquelles il était prévu. Ses graphismes amusants, presque cartoon, lui permirent de trouver son public chez les enfants, chose que Ball ou Flagman avait plus de mal à faire de par une certaine austérité. Mais bien du temps s'est écoulé depuis, et, bien que toujours sympathique, le modèle des Game & Watch ne trouve plus vraiment son public de nos jours, hormis chez certains nostalgiques ou passionnés, Manhole ne se subsituant pas à la règle.