Il y a-t-il une vie après la mort ? Si la question pourra largement être débattue, le studio indé Ukuza nous livre sa version avec Skelattack, platformer tout mignon qui se déroule dans l’au-delà. La boîte n’a jamais vraiment fait parler d’elle mais elle débarque avec un éditeur de taille : Konami, qui ne finance pas souvent des projets indépendants. Mais la firme japonaise a misé sur le bon cheval. Skelattack est un très bon jeu de plateforme à la fois léger et exigeant.
Skelattack - Un trailer pour fêter la sortie du jeu
Vous incarnez Skully, petit garçon tout en os qui fait ses premiers pas dans l’au-delà. Tradition oblige dans ce monde : un rituel vous attend pour retrouver les souvenirs qui précèdent votre mort. C’est d’abord pour cette raison que vous et Imber, votre copain chauve-souris, vous vous dirigez vers le donjon du coin. Mais entre-temps, l’alerte est donnée. Les Humains envahissent le village à la recherche de la Flamme Bleue, source d’énergie qui permet à vous et vos congénères d’écouler des jours heureux pour l’éternité. Ni une ni deux, vous empoignez une épée : il faut chasser ces maudits vivants hors de chez vous.
Maître du rythme
Avant de poser nos mains sur Skelattack, le titre nous a été présenté comme une tentative de renverser le “modèle du dungeon crawler” en incarnant un petit squelette plutôt qu’un humain. Si la formule est appropriée pour le scénario, le jeu d’Ukuza est à des kilomètres d’une vue à la première personne et de combats au tour par tour (caractéristiques communes au genre). Skelattack a tout de même pour lui un level design parfois labyrinthique qui pousse à l’exploration. Mais c’est surtout un jeu de plateforme pur jus. On peut ainsi décomposer le titre en six niveaux principaux qui renferment tous leur lot de dangers et secrets. Chacun amène un nouvel environnement malgré une redondance “bâtisse médiévale lugubre” côté direction artistique.
Mais surtout, chacun des levels amène de nouveaux défis : des plateformes qui commencent à s’animer, des ennemis qui peuvent dorénavant attaquer à distance ou encore des nouvelles phases de jeu, comme lorsque la chauve-souris Imber y met du sien pour porter Skully dans les airs et que le joueur doit tapoter sur un bouton pour battre des ailes. Rien de révolutionnaire sur le papier mais Ukuza sait varier les situations pour renouveler l’expérience de jeu. Il en résulte un jeu particulièrement bien rythmé qui colle aux mains. Surtout lorsque le titre à l’audace d’insérer une phase d’infiltration qui n’est pas sans rappeler l’excellent The Wind Waker. Bref, mieux que de varier ses phases de jeu, Skellatack surprend le joueur. Un argument d’autant plus solide car soutenu par un très bon gameplay.
Danse du stick
Côté prise en main, le jeu est très simple sur le papier : un bouton pour sauter et double-sauter, un autre pour attaquer, encore un autre pour faire appel à des capacités spéciales (potion, boomerang, triple-saut, sonar pour dénicher des secrets) et le stick pour se déplacer. Classique. Les premiers instants de jeu pourront ainsi sembler monotones - on avance, on saute, on agite son épée, etc - mais c’est lors des phases plus avancées que le sel de Skellatack se révèle au joueur. Cette substantifique moelle tient en deux mots : sauts muraux. Une technique à laquelle le titre fait beaucoup appel et que les développeurs ont eu la bonne idée de simplifier manette en main. Il ne faut en effet pas presser le bouton saut à chaque rebond mais seulement bouger le stick de droite à gauche pour effectuer l’action. Un choix qui demandera un peu de temps d'adaptation mais qui est largement bénéfique au confort, dynamisme, et plaisir de jeu.
Car si l’on peut déjà s’amuser à expérimenter le level design avec cette simple mécanique, Ukuza parvient à la sublimer en dissimulant des secrets par dizaines. Un chemin alternatif peut ainsi mener à une séquence de plateforme particulièrement complexe comme on peut en voir dans le fantastique Celeste. Et au bout de ce chemin de croix : un trésor. Les recoins des niveaux cachent aussi souvent beaucoup d’Âmes - monnaie du jeu qui permet d’améliorer son personnage, nous y reviendrons plus tard. Vous l’aurez compris, Skellatack sait récompenser les joueurs en quête de défis sans pour autant entraver la progression de ceux qui veulent une aventure plus paisible. A noter toutefois que le chemin principal se complexifie au fur et à mesure et qu’en ligne droite, le titre d’Ukuza n’est pas tout à fait une promenade de santé. Et que a contrario, on aurait peut-être aimé avoir plus de défis qui exploitent encore un peu plus les saut muraux. Mais en tout cas, côté courbe de progression, Skellatack est assez exemplaire. Et ses points forts ne s’arrêtent pas-là.
Skelattack - Dix minutes de gameplay dans l'au-delà
L’âme des Souls
Qui dit phases de plateforme complexes dit parfois réessayer encore et encore. Et c’est en effet quelque chose qui risque de vous arriver en jouant à Skellatack, surtout que certaines surfaces et pièges sont synonymes de mort instantanée. Mais de nouveau, le titre parvient à trouver un équilibre entre exigence et facilité d’accès, réduisant au passage pas mal de frustration. Dans les faits, les niveaux comptent des dizaines de petits checkpoints dont le fonctionnement est similaire aux feux de camp de Dark Souls. Lorsque Skully meurt, il revient automatiquement à ce petit havre de paix (sans restriction de vie ou Game Over). Seule pénalité : la perte d’une vingtaine d’Âmes, cristaux bleus que l’on trouve un peu partout dans les niveaux et qui resteront à l’emplacement de votre dernière mort. Le joueur peut les récupérer dans leur intégralité s’il retourne à l’endroit concerné (souvent devant un ennemi ou au fond d’un gouffre infesté de pics). S’il meurt en essayant, ces Âmes disparaîtront et seront remplacées par vingt nouveaux cristaux.
Il est rarement aisé de retrouver ces items, surtout lorsqu’ils se trouvent un pixel plus haut qu’une surface qui vous tue automatiquement. Mais une nouvelle fois, le joueur n’est forcé à rien. Les plus acharnés retourneront sur leur pas au risque de perdre davantage de cristaux et les autres continueront leur chemin. Chacun devra estimer le pour et le contre avant de se lancer. Au final, ceux avec le plus d’Âmes pourront améliorer leur personnage, lui offrant une barre de vie plus conséquente ou un boomerang plus puissant. Mais aucune de ces améliorations n’est obligatoire pour terminer le jeu, même si elles faciliteront la progression. Ukuza a su faire la part des choses pour bien équilibrer son bébé. Par exemple, les items vous permettant d’améliorer la puissance de votre épée se récupèrent à des étapes clés par lesquelles tout le monde doit passer.
Quelques points noirs
Pour l’heure, nous n’avons fait qu’évoquer les qualités de Skelattack. Mais le titre d’Ukuza compte quand même quelques défauts. Et si nous avons choisi de dédier une partie de ce test à ces derniers, c’est parce qu’ils n’entravent en rien le solide coeur du jeu et qu’ils relèvent davantage du goût de chacun que de véritables points noirs. La direction artistique fait ainsi parfois un peu simplette, surtout du côté des ennemis dont certains sont génériques au possible. Ce manque de polish visuel se retrouve également dans les décors du titre, où certaines plateformes semblent porter une pancarte “Bonjour, je suis un obstacle de jeu vidéo” et ne se fondent pas harmonieusement avec la DA du lieu.
Lors de très rares cas, nous avons aussi confondu des pans du niveau avec le décor, ce qui nous a valu des morts tout à fait héroïques. Et le jeu est aussi un peu trop verbeux par moments, notamment sur la fin où il enchaîne les retournements de situation qui laisseront beaucoup de joueurs de marbre. On pourra également signaler la mollesse des affrontements à l’épée même si les boss restent agréables, une BO assez répétitive et quelques autres détails. Mais rien qui ne dissimulera l’évidence : Skelattack est un très bon jeu.
Points forts
- Un jeu qui se renouvelle sans cesse
- Les sauts muraux, un plaisir à utiliser
- Un level design qui pousse à l'exploration
- Du challenge pour ceux qui veulent du défi
- Rarement frustrant
Points faibles
- Le design de certains ennemis
- La BO un peu répétitive
- La fin, inutilement verbeuse
Alors oui, l'aspect de certains ennemis est d'un autre temps. Oui le jeu aurait pu être plus abouti sur le plan visuel. Mais sinon, Skelattack est une vraie réussite. Son level design ainsi que son gameplay, basé sur les sauts muraux que l'on peut simplement déclencher à l'aide du stick, fonctionnent très bien. On se perdra ainsi volontiers dans certains niveaux tortueux pour dénicher des trésors et réussir des passages de plateforme complexes. Engageant et très rarement frustrant (grâce à sa mécanique de checkpoints qui permet de revenir rapidement en jeu après une mort), le titre d'Ukaza est un plaisir à parcourir. Un jeu qui n'a rien de révolutionnaire mais qui fonctionne diablement bien. Et que nous avons adoré parcourir.