La saga Yakuza jette son dévolu sur l’Occident depuis plusieurs années et Ryu Ga Gotoku, développeur en charge de la franchise, persiste dans cette voie. Après avoir exploré Yakuza 6 : The Song of Life ainsi que les remakes des deux premières aventures de Kazuma Kiryu, le studio japonais quitte pour un temps la mafia et s’intéresse de près au système judiciaire nippon avec le thriller Judgment. Mais ce spin-off peut-il décemment se mesurer au Dragon de Dojima ?
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Après Yakuza : Like a Dragon, c'est au tour de Judgment d'avoir droit à sa version next-gen. Malheureusement, précisons tout de suite que si Yakuza 7 a eu droit à une mise à niveau gratuite pour les possesseurs du jeu sur PS4, ce spin-off n'a pas bénéficié du même traitement de faveur. En effet, pour jouer à la version PS5, il faut forcément repasser à la caisse, peu importe si vous possédez déjà le titre sur PS4. Pour rappel, les joueurs Xbox Series ne sont pas concernés par ce problème puisque Judgment n'est pas sorti sur Xbox One. Une fois ce point éclairci, on se retrouve face à un jeu bien plus agréable que l'expérience originale. Avec un framerate à 60 i/s et une définition plus élevée, Judgment en ressort plus net et plus fluide, rendant le quartier fictif de Kamurocho plus beau et vivant que jamais. À noter qu'il n'y a pas le choix entre deux modes graphiques comme dans Yakuza : Like a Dragon et que le titre ne propose donc pas de 4K/30 i/s. Enfin, au niveau des différences, nous avons également pu remarquer que les couleurs paraissent ici plus froides par rapport à la version PS4.
Les capacités techniques des consoles next-gen permettent également au Dragon Engine, le moteur du jeu, de révéler encore plus son potentiel. Ainsi, les visages des personnages, point fort de la série Yakuza, apparaissent ici encore plus réalistes, malgré quelques animations faciales rigides en dehors des cinématiques. Cependant, on ne peut pas en dire autant en ce qui concerne l'environnement qui affiche parfois des textures peu détaillées et un très léger aliasing. Cela n'empêche en rien cette version next-gen d'être visuellement plus fine et confortable, notamment grâce à des temps de chargements qui ont drastiquement été réduits.
En plus de tous ces avantages techniques, cette édition comporte également tous les DLC du jeu de base, à savoir des tenues à offrir à de potentielles petites amies, des éléments de décors pour votre bureau ou encore des objets pour renforcer vos compétences en combat. Des bonus anecdotiques en soi mais dont on salue tout de même la présence. Finalement, ces versions PS5-Xbox Series se destinent donc aux possesseurs de consoles next-gen qui souhaitent découvrir le jeu. Ceux qui l'ont déjà parcouru ne trouveront que peu de nouveautés qui justifient un nouvel achat, même si ce dernier est à prix réduit (39,99€).
Yagami, détective privé
La vie de Takayuki Yagami, membre du barreau de Tokyo et employé du cabinet Genda, bascule en 2015 lorsque son client Shinpei Okubo… tout juste acquitté… est accusé du meurtre de sa petite ami dans la foulée. Reconnu comme l’avocat libérant les criminels, ce dernier quitte son poste et embrasse la profession de détective privé. Trois ans plus tard, notre héros arpente le quartier de Kamurocho afin de résoudre plusieurs affaires sur fond d’assassinats en série et de complot d’envergure nationale.
Judgment s’amuse avec les codes du polar et nous sert un récit conspirationniste à tiroirs multiples et rebondissements dont seuls les scénaristes de la franchise Yakuza ont le secret. L’ex-avocat déterre les sombres secrets du quartier chaud de Tokyo et met volontier les pieds dans le plat. Ce spin-off supposé s’éloigner des trames mafieuses habituelles parvient à surprendre les fans sans véritablement oser le hors-piste. La pomme ne tombe jamais loin de l’arbre et cette locution ne saurait être plus vraie dans le cas présent. Les accointances avec la série principale ne tardent pas à contaminer l’histoire tant le clan Tojo et ses querelles avec les yakuzas du Kansai pimentent les débats au point d'occulter par moment la trame principale. Judgment fait partie intégrante du “Yakuza universe”… cela ne fait aucun doute.
La structure linéaire du titre repose sur les mêmes fondamentaux avec ses cinématiques pour faire progresser le récit, ses discussions verbeuses et ses rebondissements en cascade. Judgment transpire l’ADN des yakuzas par tous les pores et c’est une excellente chose tant la formule a fait ses preuves. Celle-ci le prouve une fois encore au cours d’une aventure divisée en 13 chapitres nécessitant une vingtaine d’heures pour arriver au verdict final. Il faut compter le double pour boucler l’intégralité des affaires secondaires et des missions annexes.
Les artistes de Ryu Ga Gotoku s’inspirent du 7e Art depuis les premiers pas de Kazuma Kiryu. La saga Yakuza est intimement liée aux films de gangsters et ce nouveau polar embrasse cette vision cinématographique du jeu vidéo avec sa recherche constante de plans de caméra signifiants, ses ralentis esthétiques et son ton sérieux collant parfaitement aux thèmes couchés sur “papier” par la plume des scénaristes. Et les performances des acteurs interprétant les personnages, flattées par le Dragon Engine, participent grandement à rendre l’ensemble crédible et à donner ce souffle épique caractéristique des productions du studio. Judgment est à L.A Noire ce que Yakuza est à GTA.
Une bonne nouvelle ne venant jamais seule, Judgment est intégralement doublé en japonais/anglais et sous-titré en français une première depuis la sortie de Yakuza en 2005 (ainsi qu’en anglais, allemand, espagnol, italien). Et cet ajout attendu par les joueurs depuis plusieurs épisodes apporte un confort de jeu indéniable. Cela s’avère vraiment reposant de lire dans sa langue maternelle surtout après plusieurs heures consécutives la manette en mains.
Une cinématique d'introduction enflammée
Tokyo Confidential
Takayuki Yagami enquête à sa manière et accepte toutes sortes d’affaires pour faire vivre sa jeune agence. En tant que détective privé, ce dernier est amené à découvrir la vérité par des moyens souvent détournés et Ryu Ga Gotoku met à sa disposition tous les outils nécessaires pour mener à bien des missions variées. Récupérer des dettes, accumuler les preuves d’un adultère dans le cadre d’un divorce, aider la police à élucider un crime… notre héros sue sang et eau lors de ces enquêtes… véritable pilier de cette aventure vécue conjointement dans la rue et dans un tribunal.
De nouvelles mécaniques de gameplay font donc leur apparition dans la saga. Takayuki possède un don inné pour suivre discrètement les gens ou les poursuivre lors de séquences semi-scriptées laissant finalement que peu de liberté aux joueurs. Ce dernier crochète également des serrures et se déguise selon les circonstances afin de pénétrer dans des lieux hautement surveillés. De plus, ses talents de déduction et d'analyse seront fort utiles lors des phases de recherche que ce soit pour repérer un individu dans la foule, examiner documents et scènes de crime ou encore confronter l’accusé lors des interrogatoires. Pour finir, le drone et l’appareil photo qui complètent l’attirail du parfait détective privé s’avèrent essentiels pour faire avancer l’histoire.
Un cas après l’autre, la réputation de Takayuki Yagami et de son acolyte Masaharu Kaito (ancien Yakuza de la famille Matsugane) grandit. De nouvelles demandes viennent alors grossir les rangs des affaires annexes, des missions qui ont le mérite de détendre l’atmosphère entre deux saynètes d’une trame principale sous haute tension. Judgment était attendu sur sa capacité à bousculer les habitudes de la saga Yakuza et y parvient la majorité du temps, malgré une certaine répétitivité et plusieurs features sous-exploitées.
Le détective Takayuki Yagami file un suspect
Une justice implacable
Takayuki Yagami n’a rien à envier au Dragon de Dojima quand il s’agit d’appliquer une vision expéditive de la justice. Le détective privé se fraye un chemin dans les ruelles de Kamurocho à l’aide de ses poings et sème sur la chaussée yakuzas et loubards tokyoïtes par dizaines. Les affrontements n’ont rien perdu de leur superbe et gagnent en intensité avec l’ajout d’attaques mortelles et des blessures qui vont avec. Celles-ci entament pour de bon votre santé et exigent alors un médecin spécifique ou une trousse de secours pour être soignées.
Pour le reste, Judgment s’appuie sur le système de combat des précédents épisodes développés sous le Dragon Engine, à savoir Yakuza 6 : The Song of Life et Yakuza Kiwami 2. Les combos dévastateurs, la jauge EX, les actions contextuelles ultra badass… reprennent du service lors de joutes à la mise en scène spectaculaire. Le détective privé peut se fier à sa connaissance des arts martiaux et à sa maîtrise de deux styles distincts, Tigre et Grue, pour affronter respectivement un ou plusieurs adversaires. Et le résultat ne se fait pas attendre. Ce héros vêtu d’un jean usé et d’un manteau en cuir fait sien l’environnement et se débarrasse avec aisance de ses ennemis lors d’une danse martiale redoutable et stylisée.
Judgment intègre également les mécaniques RPG inhérentes aux jeux estampillées “Yakuza”. Néanmoins, Ryu Ga Gotoku simplifie grandement son système d’apprentissage via une ressource unique (des Points d'Aptitudes ou PA) permettant de débloquer des améliorations de statistiques, de nouvelles attaques, etc… Cela permet de gagner en clarté et en accessibilité au détriment d’une approche plus roleplay. De plus, Takayuki apprend auprès d’un ancien croisé dans Kamurocho l’art des Extraits… des potions offrant un avantage non-négligeable en combat (vitesse des combos, brise-garde…) durant un laps de temps limité.
Un ex-avocat défie les yakuzas du clan Kyorei
Kamurocho sous haute tension
Judgment troque l’ambiance colorée de la franchise Yakuza pour une atmosphère plus sombre digne des films neo-Noir occidentaux. La moiteur des nuits pèse de tout son poids sur ce polar nippon et souligne habilement l’urgence du scénario. Les fans reconnaîtront au premier coup d’oeil Kamurocho et seront ravis de reprendre leur marque. Quant aux néophytes, ils apprendront à aimer ce quartier reproduit à l’échelle 1:1. Les rues, les magasins, les bars, les lieux emblématiques… rien ne manque à l’appel. Et le Dragon Engine embellit cette reconstitution fantasmée de Tokyo avec ses effets de lumière idéalisés, ses rues débordant de vie et ses bâtiments accessibles sans temps de chargement.
Mais, car il y a un mais, tout n’est pas parfait au pays du soleil levant. Judgment présente quelques failles techniques (aliasing, freezes lors des transitions…) qui fort heureusement ne ruinent jamais l’expérience. En effet, Kamurocho demeure un lieu de tous les excès propice aux surprises et au dépaysement avec ses dizaines de restaurants à tester, ses activités en tout genre à découvrir, ses résidents à rencontrer et le gang Keihin à affronter. Certains joueurs pourraient tout de même déplorer l’absence d’une autre zone de jeu… car Judgment se concentre exclusivement sur le quartier tokyoïte… et une météo unique justifiée par la courte temporalité de l’histoire contée.
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Points forts
- Les phases d’investigation et de filature...
- Une enquête passionnante sur fond de conspiration...
- Un casting cinq étoiles parfaitement interprété par des acteurs impliqués
- Une mise en scène et une réalisation digne du 7e Art
- Une aventure intégralement sous-titrée en français (VOSTFR)
- Des combats intenses et techniques
- Une durée de vie conséquente (+40 heures)
- Un quartier de Kamurocho débordant de vie et d’activités en tout genre
Points faibles
- … au gameplay tantôt répétitif tantôt sous-exploité
- … souffrant par instant d’un manque de rythme
- L’absence remarquée d’un seconde quartier à explorer
Ryu Ga Gotoku tend la main aux joueurs du monde entier avec ce nouveau titre. Judgment les invite à (re)découvrir l’univers de la saga Yakuza de la meilleure manière qui soit et en explorer un pan méconnu. Ce spin-off déroule un scénario complexe inspiré du 7e Art et incarné par des personnages haut en couleurs. La dimension polar et les nouvelles mécaniques de gameplay soufflent un vent de renouveau sur la série. De plus, les combats demeurent intenses et épiques au coeur d’un quartier de Kamurocho plus vrai que nature. La présence de sous-titres en français joue le rôle de cerise sur un gâteau fort appétissant.