Quid de la maniabilité au pad ?

Comme l'avait fait son prédecesseur, Tropico 6, après avoir fait un bon bout de chemin sur PC, a trouvé sa route jusqu'aux versions consoles. L'occasion pour nous de nous pencher sur le portage au pad, qui est toujours un exercice délicat lorsqu'il s'agit d'un jeu de gestion.

Le contenu de Tropico 6 sur consoles est identique à la version PC. Ainsi, si vous désirez savoir comment s'articule la gestion d'une République bananière, nous vous invitons à vous référer à notre test ci-dessous. En revanche, si la perspective de vous lancer dans un jeu « à tableaux » à la manette vous effraie, soyez rassuré. Effectivement, et à nouveau, de vrais efforts ont été accordé à l'intuitivité de l'interface et des commandes. D'une simple pression de touche et par l'intermédiaire de menus radiaux concentriques plutôt clairs, nous sommes parvenus en quelques minutes à bien maîtriser la navigation dans les multiples possibilités de construction et dans les différents tableaux permettant une gestion adéquate de vos îles.

En revanche, si l'opération n'était déjà pas très intuitive à la souris, inutile de préciser que le tracé des routes laisse quant à lui nettement plus à désirer et tenter d'aposer une route courbe contournant un bâtiment peut s'avérer assez frustrant à la manette (comme à la souris, par ailleurs). Mais en règle générale, opter pour Tropico 6 sur PS4 en l'absence de PC reste un choix recommandable, autant pour l'adaptation réussie des commandes que du rendu visuel assez similaire à la version sortie en début d'année.

Bienvenue en terrain connu

Tropico 6 conserve bien évidemment les bases qui ont fait l'originalité de la franchise. Vous êtes toujours dans les chausses de El Presidente, dont vous pouvez désormais choisir le sexe et modifier l'apparence, et devrez, en actionnant divers leviers financiers et politiques, donner un fort essor économique à votre petite île, le tout avec l'humour caractéristique de la saga, toujours présent.

Il sera toujours question, en premier lieu, de veiller au bien-être de vos habitants. Pour cela, il faudra subvenir à leurs besoins, en leur offrant logement, travail, accès aux soins ou aux divertissements. Mais bien entendu, la construction d'infrastructures coûte de l'argent et pour en gagner, Tropico repose essentiellement sur son système d'export de ressources. En fonction de la richesse minérale et de la fertilité de votre terrain, vous pourrez varier les plantations et mines, pour par la suite établir des chaînes de productions et exporter des biens plus coûteux. Tout ceci sera bien conditionné par l'ère dans laquelle vous évoluez, Tropico 6 conservant ce système de progression historique pouvant vous conduire de l'époque coloniale aux temps modernes avec pour intermédiaires les Guerres mondiales et la Guerre froide. Les bâtiments, plus nombreux qu'auparavant, et les exigences de la population évolueront donc avec le temps, même si les mécaniques de gestion resteront les mêmes d'une ère sur l'autre.

De leur côté, les nombreuses factions (écologistes, capitalistes, communistes...) seront à nouveau de la partie, et il s'agira pour vous de ménager la chèvre et le chou pour satisfaire aux exigences d'une faction sans trop en pénaliser une autre, si toutefois vous le désirez. Effectivement, Tropico 6 vous permet à nouveau, si vous êtes prêt à en payer le prix, de négliger totalement les désidératas d'une faction au profit d'une autre, quitte à vous attirer les foudres de la première et vous assurer les bonnes grâces de la seconde. Il faudra donc jouer les équilibristes en répondant aux requêtes de certaines factions, vous enjoignant de bâtir certaines infrastructures en l'échange d'argent ou d'augmentation de réputation tout en tentant de promulguer des décrets ayant pour la plupart des incidences sur la perception que les divers groupes politiques auront de vous.

Nous retrouvons toujours la bibliothèque, qui permet l'obtention de points de recherches autorisant le déverrouillage de certains bâtiments, mais également de décrets ou de politiques générales, permettant à terme de modifier les aspects de la constitution de votre île, pour mieux la façonner à votre manière. La dimension politique, notamment avec les grandes puissances, les élections ou la possibilité d'influer sur les votes ou l'orientation de votre île à grands coups de discours et de loi, fonctionne à nouveau plutôt bien, et il est toujours agréable de modifier à l'envi décrets et règlements pour mieux favoriser votre essor économique et votre gloire personnelle.

Notez que le titre propose, en plus d'un mode bac à sable paramétrable à souhait, une campagne de 15 missions scénarisées, chacune d'entre elles offrant l'opportunité de découvrir ou d'appliquer une mécanique de jeu particulière. Idéal, donc, pour accompagner les nouveaux venus dans l'univers déjanté de la franchise, même si la courbe de difficulté est parfois abrupte. Cependant, les défis à relever sont intéressants : construire une puissante économie sans logements, faire de votre île un paradis à touristes... les idées de ne manquent pas et les challenges sont assez stimulants.

Des nouveautés intéressantes, mais pas bouleversantes

Vous l'aurez compris, les vétérans de la saga seront en terrain connu et pourront largement se dispenser du tutoriel, pas forcément exhaustif, à destination des nouveaux venus. Cependant, les habitués de Tropico ne manqueront pas de souligner l'arrivée de quelques nouveautés. La première d'entre elles est la présence d'archipels, qui vous contraindra à repenser votre gestion de l'urbanisme. Effectivement, les ressources seront dispersées entre différentes îles et il vous appartiendra d'acheminer toutes les ressources vers vos docks. Il sera donc désormais possible de bâtir des ponts au-dessus des bras de mer ou des tunnels pour percer les montagnes afin que le transit soit fluide que ce soit vers les zones d'exportation ou simplement d'une plantation à une industrie de transformation.

Cet aspect plus morcelé de la construction implique une gestion un rien différente de vos logements, puisque désormais, vos habitants vivent leur propre vie, fréquentent les infrastructures de loisirs et doivent en outre ne pas être trop éloignés de leur lieu de travail. Effectivement, les usines ne tourneront plus à plein régime si les ouvriers ne l'occupent plus. Ainsi, vous aurez rapidement accès à la construction de bus et, plus tard, de métro et de téléphériques pour favoriser une circulation fluide entre habitations et lieux de labeur. Cela aurait pu donner lieu à des mécaniques intéressantes, mais malheureusement, dans les faits, ce n'est pas vraiment le cas. Tout juste suffira-t-il de construire des habitations près des zones industrielles, d'y associer quelques bâtiments de loisir et de santé, et vous ne devriez pas rencontrer trop de problèmes, à plus forte raison que vous ne disposez pas d'outils précis pour surveiller la gestion du trafic. Cette absence d'outils de contrôle se ressent également sur l'approvisionnement de vos usines en matières premières. Il n'est effectivement pas rare, en dépit d'un solide réseau de routier, que certains bâtiments se trouvent provisoirement sans ressources, sans que des indicateurs clairs en donnent la raison précise.

Parmi les autres nouveautés, nous noterons l'effacement du système de dynastie au profit d'un « négociant ». D'un naturel roublard, l'homme peut vous proposer plusieurs solutions pour garnir votre compte en Suisse, mais également pour vous servir de cet argent afin de mener des actions à tendance illégales. Vous pourrez par exemple troquer 2000 $ de votre budget pour les convertir en 2500$ sur votre compte en Suisse. Le même principe s'applique à la conversion des points de recherche de la bibliothèque et celle des points de raids, sur lesquels nous reviendrons. Le compte en Suisse pourra à terme déverrouiller des actions en votre faveur. Déblocage d'un plan de construction, soudoiement d'une faction belliqueuse ou nouveau décret alléchant sont autant d'opportunités d'influer sur la gestion de votre île. Une idée plutôt simple et qui s'avère efficace, donnant un peu plus de poids à ce fameux compte que l'on avait tendance à négliger sur les précédents épisodes.

Par ailleurs, un système de raid fait son apparition. En fonction de l'époque dans laquelle vous jouez, vous pourrez bâtir une crique de pirate ou un bâtiment d'espionnage, générant, comme la bibliothèque, une certaine quantité de points pouvant être dépensés dans des expéditions. Sabotage de l'ennemi, récupération de butin, de ressources, divulgation des pensées rebelles... de nombreux leviers sont à votre disposition pour étoffer un peu l'approche de votre partie. Mieux encore, vous pourrez même directement piller certains bâtiments emblématiques des puissances concurrentes (Statue de la Liberté, Tour Eiffel, Colisée...) afin de faire rejaillir toute leur splendeur sur votre petit archipel et profiter de certains bonus. Plus anecdotique, nous noterons la possibilité de customiser votre palais ou encore l'aspect de votre personnage, afin de façonner un représentant qui vous ressemble au moins un minimum, même si l'éditeur reste assez limité.

Un manque de pronfondeur et de précision persistant

Malheureusement, ces nouveautés n'ont qu'un impact limité sur le déroulement traditionnel d'une partie de Tropico, qui présente en outre d'autres carences. L'ensemble manque cruellement d'outils de microgestion. Lorsque par exemple votre balance économique vire au rouge, il n'existe pas suffisamment d'options pour redresser la barre, exception faite d'une multiplication des exportations et d'une diminution drastique de certains budgets. Les filtres de leur côté sont parfois un rien obscurs et le contentement de la population se résume un peu trop à une multiplication excessive de certains bâtiments, indépendamment de toute notion géographique. Enfin, nous pourrons déplorer la redondance des demandes de factions, identiques d'une partie sur l'autre, au même titre que leurs interventions, qui ne changent pas d'un pouce quelle que soit la mission parcourue dans la campagne.

Et c'est en définitive dans le sentiment de stagnation que réside encore le principal défaut de Tropico 6. Les nouveautés, plutôt sympathiques, ne changent pas fondamentalement la donne et n'apportent qu'une faible profondeur à des mécaniques qui ont, certes, déjà fait leurs preuves. Le jeu est assurément agréable à jouer, les fans de Tropico apprécieront les quelques remaniements opérés ici ou là tandis que les novices y trouveront une version complète réunissant plusieurs qualités des précédents opus. Mais la recette embarque toujours certains défauts qui auraient gagné à être corrigés et Tropico 6 conserve à nouveau cette étiquette d'extension de l'épisode précédent.