Déjà dotée de plusieurs épisodes au Japon, la série des Chocobo’s Dungeon a foulé pour la première fois le sol Européen il y a plus d’une dizaine d’années, lors de l’arrivée de l’opus Final Fantasy Fables édité sur Wii. Ce titre qui a su trouver son public se voit aujourd’hui remanié et agrémenté de quelques nouveautés, mettant entre nos mains un portage dédié aux consoles de salon. Si la volonté de Square Enix d’exploiter le filon du fan service va inévitablement traverser l’esprit, qu’en est-il en réalité ? Et sous ses airs de jeu pour enfant, cet opus va t-il au delà des préjugés ?
Chocobo's Mystery Dungeon Every Buddy! a été testé principalement sur Nintendo Switch et expérimenté sur Playstation 4. Les deux versions sont identiques, seuls ceux qui ont précommandé leur exemplaire ont obtenu des bonus et contenus spécifiques à leur plateforme. En matière de graphismes et d’optimisation, il n’existe pas de différence significative, le rendu est le même sur les deux consoles et, une fois n’est pas coutume, en cas d’hésitation sur le choix de la machine, le prix proposé à la sortie du jeu n'est pas non plus un argument décisif, puisqu’il est commun à la Switch et à la PS4. Notez que le jeu est compatible avec les manettes pro.
Chocobo et Cid, un duo incontournable
Lors de sa parution sur Wii, le titre bénéficiait d’une cinématique d’introduction qui mettait en place le contexte de l’histoire qu’allaient vivre Cid et le Chocobo, personnages emblématiques de la série. Celle-ci a tout simplement disparu de cette version remaniée, impliquant pour le néophyte de découvrir ce qui se trame de manière plus progressive. Nous découvrons donc les deux protagonistes alors qu’ils entrent dans un premier donjon, à la recherche d’une pierre qui semble posséder de grands pouvoirs. Mais comme rien ne se passe jamais comme prévu, l’intervention des vilains de l’histoire met à mal les projets de Cid et Chocobo. Ils se retrouvent propulsé à travers les dimensions et atterrissent dans un village en proie à un maléfice qui prive les habitants de leurs souvenirs, à chaque fois que la cloche de l’horloge de l'église retentit. Les deux compères vont aider la population à retrouver les morceaux de leur mémoire perdue, tout en cherchant à comprendre les tenants et aboutissants de leur propre situation.
C'est mignon, oui mais...
Première leçon : ne pas se fier à la mignonnerie affichée qui pourrait laisser croire que cet opus est réservé à un public jeune, très jeune, avec l’idée d’un gameplay minimaliste, pouvant paraître creux aux yeux des autres générations. Si les premiers instants passés à côtoyer cet adorable Chocobo peuvent entraîner quelques craintes, de par le minimalisme des actions réalisées et de l’unique petit cri particulièrement kawaii de l’animal, ils ne présagent en rien du potentiel du titre qui va se dévoiler par la suite. En effet, comme dans tout Dungeon-RPG, deux phases de jeu vont se présenter alternativement et vont se révéler être plus garnies qu’il n’y paraît. Le village offre de nombreuses possibilités d’interactions avec la population par le biais d’actions et de quêtes visant à étoffer l’inventaire du Chocobo, ou même à recruter les sept personnages jouables en mode duo. Hub central du jeu, c’est dans ce lieu que les commerçants se trouvent, que le surplus de l’inventaire peut être stocké ou encore que le nombre d’objets transportables peut être augmenté. Le village va également être le lieu privilégié du déploiement de la trame scénaristique. Mais ce sont les donjons qui vont plus particulièrement surprendre par une richesse à laquelle on ne s’attend pas lorsqu’on aborde le titre.
Des commandes qui manquent de simplicité
Classiquement pour un jeu de la catégorie Dungeon-RPG, les déplacements du personnage se font case par case, que vous pouvez choisir d’afficher afin de gagner en clarté afin d’anticiper et développer une stratégie. Certaines de ces cases comportent divers pièges, qui peuvent sanctionner de quelques points de vie ou infliger des malus. Notez que ce test a été principalement réalisé avec une manette pro sur Nintendo Switch et malgré l’ergonomie de ce pad, diriger le Chocobo via le joystick s’avère peu intuitif, les bonnes vieilles flèches directionnelles retrouvent ainsi toute leur utilité. En outre, si l’interface a été visuellement retravaillée, il aurait été pertinent d'apporter également quelques modifications aux commandes : un accès direct aux fonctions les plus utilisées aurait été appréciable, plutôt que d’effectuer une multitude de manoeuvres rébarbatives via la manette. On aurait pu espérer une revisite de cette ergonomie old school pour une version plus intuitive, qui se serait démarquée de celle de ses prédécesseurs.
Une dimension tactique inattendue
Les affrontements se déroulent au tour par tour et s’enclenchent lorsque vous arrivez sur une case occupée par un ennemi. Celui-ci éliminé, vous gagnez de l’expérience et des objets. Chaque zone visitée étant générée aléatoirement, cela permet de varier les possibilités de combat et d’items à glaner lors des retours dans des lieux déjà explorés. Les possibilités d’amélioration des capacités et d’optimisation de l’équipement vont dépendre de cette phase du jeu, une fouille minutieuse des moindres recoins ne doit pas être négligée, d’autant plus si vous souhaitez éviter de vous retrouver démuni face à un challenge qui va s’amplifier drastiquement. La forge va donc être une alliée de taille, permettant d’augmenter la performance de l’équipement de Chocobo, constitué d’une selle, de serres et d’un collier, le tout se déclinant en plusieurs versions. Chaque élément peut bénéficier d’effets bonus via des sceaux, dont un principal fixe, non modifiable. Pour les autres, il est possible de vous en débarrasser s’ils ne vous conviennent pas, mais le bien nommé sceau maudit fait figure d’exception : ses malus assez pénalisants continuent à faire effet après l’avoir abandonné.
Parmi les effets négatifs des sceaux maudits se trouve l’impossibilité de gagner des points d’XP, ces derniers se cumulant en remportant des combats. Les points de job (les classes du jeu, au nombre de 14) se gagnent également lors des affrontements. Ils permettent d’obtenir des techniques spécifiques à chaque job, techniques utilisables en contrepartie d’une quantité définie de points d’une jauge d’attaque spéciale qui se remplit grâce aux déplacements ou aux coups portés. Ces classes vont de divers chevaliers au ninja, en passant par les mages, ou encore le voleur, l’érudit, le danseur… Chacune de ces catégories dispose de talents spécifiques qui influent sur la manière dont va se dérouler l’exploration. Peu importe la classe sélectionnée, Chocobo dispose de tous les moyens offerts pour progresser dans le jeu, que ce soit les grimoires magiques ou les pierres d’invocation qui permettent de faire intervenir une des chimères - des boss assez coriaces - qu’il aura précédemment vaincu.
Des nouveautés qui tiennent la route
Parmi les nouveautés de cet opus figurent des donjons supplémentaires intégrés à la trentaine déjà existants dans le jeu original. Sans révolutionner le contenu proposé, ils n’en représentent pas moins une réelle valeur ajoutée aux propositions déjà variées du prédécesseur de ce Chocobo's Mystery Dungeon, dont certains peuvent contenir plusieurs dizaines de paliers. Ces donjons en sus sont d’autant plus les bienvenus que Square Enix a fait le choix de supprimer le Pop-Up, un jeu dans le jeu basé sur un système de cartes à débloquer permettant de réaliser des duels, utiles à la progression. Notez qu’il est possible d’arpenter à nouveau chacun des niveaux précédemment explorés via le miroir dédié présent dans l’église du village.
Autre nouvelle proposition : la possibilité de recruter des créatures. Ce n’est pas sans rappeler Tales of Symphonia 2 et son système permettant d’utiliser certains monstres au combat après les avoir vaincus. Ici, ce sont les Buddy’s Points - ou BP - qui permettent de débloquer l'une des 112 créatures disponibles, lorsque vous avez cumulé le nombre de points requis. Ces BP sont collectables dans les donjons à l’issue de certains affrontements. Une fois le monstre recruté, il peut combattre au côté de Chocobo, il suffit de le sélectionner dans le menu dédié, accessible via l’autel présent au début du donjon. Cet autel permet par ailleurs de choisir la classe des personnages ou de sélectionner un partenaire humain débloqué en amont.
Mais l’ajout le plus innovant dans la série réside dans l’intégration d’un mode coopératif à deux joueurs, en local. Reprenant le principe exposé ci-dessus, l’aventure peut ainsi se vivre en duo, le second joueur ayant un rôle de soutien, laissant l’initiative du combat à Chocobo. Devant la complexité croissante et subtile de ce gameplay ayant de nombreuses similitudes avec celui de Pokémon Donjon Mystère, la coopération est un atout majeur.
Des améliorations graphiques qui manquent d'ambition
Le jeu a bénéficié d’un lifting graphique, élément incontournable parmi tous ceux qui permettent d’obtenir un portage attirant. C’est toujours aussi frais et coloré, avec une luminosité améliorée. Ce lissage contribue lui aussi à la modernisation du titre, pour une version remasterisée qui reste cependant loin d’une refonte visuelle profonde qui aurait su séduire un plus large public. Notez l’absence de localisation en français, ce qui est vraiment dommage car certaines subtilités humoristiques des dialogues vont échapper à ceux qui sont les moins à l’aise avec l’anglais, en plus de priver toute une partie des joueurs de cette expérience surprenante et addictive.
Points forts
- Un gameplay attractif et riche
- La sensation de redondance quasiment absente
- Des ajouts intéressants
- Le lifting graphique...
Points faibles
- … qu’une refonte plus poussée aurait pu agréablement remplacer
- L’ergonomie des commandes à revoir
- La localisation en français qui manque à l’appel
Contre toute attente, cet opus en a sous le pied et peut aisément se faire sa place dans la ludothèque des adeptes de la licence, mais également dans celle des amateurs de Dungeon-RPG, qu’ils apprécient ou non l’univers Final Fantasy. Chocobo’s Mystery Dungeon Every Buddy! comporte des propositions variées dont la richesse surprend celui qui aurait basé son jugement sur l’aspect enfantin du titre. Quant à ceux qui ont expérimenté les versions éditées depuis 2007 sur Wii et DS, la pertinence d’acquérir ce nouvel opus est dépendante de l’expérience toute personnelle vécue avec le titre : les uns regretteront les suppressions effectuées, les autres y verront au contraire le moyen de se replonger dans un jeu ayant conservé son ADN, tout en apportant des propositions différentes qui donnent un nouveau souffle à l’expérience. Le seul regret qu’on peut avoir réside dans le remaniement des commandes et des graphismes qui aurait mérité d’être plus approfondi.