C'est au coin d'une ruelle sombre pleine de pixels qu'un matin Diablo a percuté Dark Souls II, le choc fut si violent qu'un jeu naquit de cette funeste collision. Il porte le nom d'Eitr et nous avons pu y jouer durant cet E3 2015 tout en tapant la causette avec ses deux développeurs, l'artiste et game designer David Wright accompagné de son collègue Tobi Haper, le développeur. Si Eitr ressemble effectivement à un Dark Souls en pixel art, c'est avant tout parce que ses créateurs sont de grands fans de la série et de son gameplay. L'idée leur est donc venue un jour de développer le jeu auquel ils aimeraient eux-mêmes jouer en tant que gamer. On fait le point dans cet aperçu.
Dark Pixel Souls
Eitr propose d'incarner une guerrière, la « déesse au boulier » dotée de quelques pouvoirs liés à la foudre et maudite par Loki. Sa périlleuse tâche consiste à rétablir la lumière dans un monde enseveli sous les ombres inspiré de la mythologie nordique. La présentation ne s'est pas longtemps attardée sur l'histoire du jeu car les développeurs souhaitaient mettre l'accent sur son gameplay. Il a tout de même été question du légendaire arbre Yggdrasil corrompu par l'eitr. Le jeu revendique son gameplay action-RPG, mélange de Diablo et de Dark Souls dans sa prise en main. Le personnage évolue en effet dans de sombres et mornes environnements peuplés d'ennemis squelettiques capables de vous ôter la vie en quelques coups bien sentis. Tout dans Eitr est question de skill, de maîtrise de l'esquive et de gestion de la prise de risque. Constatez-le vous-même en visionnant le trailer en fin d'aperçu, notre guerrière n'est pas des plus rapides sur le terrain. Ses déplacements sont volontairement lents pour ajouter une dose de difficulté aux combats. Il est tout de même possible de sprinter ou d'effectuer des esquives lors des affrontements pour boire une potion de soin par exemple. Manette en mains, le feeling est très proche d'un Dark Souls en 2D car on y retrouve un système similaire de blocage, des parades timées, des coups de pied et attaques rapides ou plus lourdes à placer au bon moment.
Eitr gonna hate
Il faut ainsi profiter de la moindre ouverture pour placer quelques coups puis se mettre à l'abri derrière son bouclier afin de recharger sa barre d'endurance. Eitr nous équipe de base avec un combo épée et bouclier assez équilibré en combat. Ce dernier pourra être échangé par la suite par d'autres armes comme un duo très intéressant de hache et d'épée que l’héroïne peut buffer à la foudre afin de maximiser ses dégâts. Le gameplay devient un peu plus nerveux dans ce mode au détriment de notre propre défense. Il faut tout de même une poignée de minutes avant de commencer à se sentir à l'aise avec les contrôles du personnage, la vue isométrique et la relative lenteur de la guerrière peuvent laisser une première impression d’imprécision à l'ensemble. Le sentiment tend à disparaître avec la pratique (et quelques morts assez douloureuses !). Eitr est typiquement le genre de jeu taillé pour le superplay, le speedrun et autres démonstrations de maîtrise de ses mécaniques manette en mains.
La progression emprunte l'esprit général des Dungeon Crawler avec ses sombres caveaux à explorer, ses couloirs à nettoyer et ses boss à dézinguer (lorsque ce n'est pas le contraire). On y retrouve de nombreux éléments directement repris de la saga des Souls comme un nombre de potions de soins limité à recharger sur des feux de camps qui ici ne déclenchent pas la réapparition des ennemis. Il n'y a pas non plus de barre d'expérience au sens classique du terme puisqu'à la manière des productions de From Software, on gagne ici des points de faveur à dépenser pour augmenter un panel de statistiques classiques (force, vitesse, endurance) ou à conserver pour accroître son bonus d'expérience et de loot avec le risque de tout perdre en cas de trop grande gourmandise ! En plus de perdre tous ces points rudement acquis au combat, la mort déclenche une sorte de loterie des pertes pouvant au choix, nous faire perdre de l'expérience, des objets ou de l'or. Bref, Eitr joue dans la cour de ces jeux « hardcore » capables néanmoins de se montrer hyper gratifiants une fois le gameplay maîtrisé.
Graphiquement, l'artiste David Wright fournit un très bon travail sur le pixel art tout en noirceur du titre. Selon ses propres mots, le travail ici est colossal, « a pain in the a.. » me confie-t-il en se marrant joyeusement. Mais j'ai bien senti que le bonhomme était un passionné, motivé par le souhait de proposer aux joueurs en mal d'expériences difficiles un jeu sur lequel ils pourront s'arracher les cheveux et pourtant y revenir avec plaisir. Le petit studio travaille d'ailleurs en ce moment d'arrache-pied sur une nouvelle zone, les égouts, décrite comme vaste et impitoyable pour les aventuriers courageux que nous sommes. Ils espèrent sortir le jeu en début d'année 2016, et on l'attend de notre côté avec intérêt.
Mélange entre deux philosophies de gameplay, Eitr pioche ici et là ses inspirations dans le gameplay hardcore et gratifiant des Dark Souls tout en proposant une ambiance sinistre à la Diablo. Le titre prend le parti pris d'un pixel art très à la mode dans le milieu indé, mais dont le rendu ici nous laisse une première très bonne impression. Son gameplay assez lent pourra en décourager plus d'un, mais force est de constater que le plaisir est bel et bien là une fois la manette en mains et les contrôles de la guerrière maîtrisés. On attend d'en découvrir plus sur sa durée de vie et sa capacité à proposer des rencontres épiques à souhait tout en gardant un œil attentif sur la suite de son développement. Un projet prometteur !