Alors qu’on pensait que tout allait bien dans le meilleur des mondes sur PlayStation, la division jeu vidéo de Sony a finalement annoncé - la semaine dernière - des ventes en deçà des objectifs fixés. Il est également question d’aucun titre first-party avant avril 2025, d’une chute en bourse estimée à 10 milliards, d’une PS5 qui serait déjà à la fin de son cycle de vie... Il est temps de faire un point.
Si la mi-février a été marquée par les nouveaux choix stratégiques de Xbox, du côté de PlayStation, ça remue aussi - et pas forcément dans le bon sens ! Comme on peut l’apprendre dans les résultats du 3ème trimestre de l’année fiscale 2023, la PS5 n’atteindra pas l'objectif de 25 millions d’unités vendues sur l’exercice en cours (qui s'achève le mois prochain). Aux dernières nouvelles, sur cette année fiscale, Sony n’a écoulé "que" 16 millions d’exemplaires de sa console... L’ambition est donc revue à la baisse. La société japonaise prévoit désormais d’en livrer 21 millions avant mars 2024.
Une tendance que PlayStation applique aux prochains mois de la PS5… Le constructeur prévoit, en effet, une “baisse progressive des ventes” de la machine à partir du prochain exercice fiscal (de avril 2024 à mars 2025) en mettant tout de même l’accent sur “l’équilibre avec les bénéfices”. Pour cause, comme le note Sony : la console de salon entrera bientôt dans sa 5ème année de commercialisation et dans la “seconde moitié de son cycle de vie”, ce qui a aussi été décrit comme sa “dernière étape”. Qui plus est, l’entreprise ne prévoit de sortir aucun jeu majeur - de la trempe de Marvel Spider-Man 2 ou God of War Ragnarok - avant au moins avril 2025. Bref, pas de quoi rassurer les observateurs. En guise de résultat, le cours de la bourse de Sony a chuté de 10 milliards de dollars (calculs de CNBC).
Alerte rouge chez Sony ?
Alors, est-ce que c’est la cata chez PlayStation ? Eh bien, pas vraiment. Déjà, il faut savoir que 2023 a été la plus grosse année de la PS5. De janvier à décembre dernier, la machine s’est écoulée à 22,7 millions d’exemplaires dans le monde… Une hausse de 53% par rapport à la même periode en 2022. “C’est la meilleure année de l’histoire de PlayStation depuis les 24,2 millions de PS2 en 2002”, note sur X Oscar Lemaire - analyste bien connu des acteurs de l’industrie. “La PS5 est aidée par un effet de rattrapage après deux ans de pénurie”. Du côté de la vente de jeux ? C’est du “très haut niveau”.
Là où le bât blesse, c’est que la performance n’est pas au rendez-vous au dernier trimestre de 2023 (celui de Noël, toujours super important). “Seulement” 8,2 millions de PS5 y ont trouvé preneur alors qu’au même stade, la PS4 faisait 9,7 millions - rapporte Oscar Lemaire… Dans l’ensemble d’ailleurs, bien que la nouvelle PlayStation ait réalisé le plus gros lancement de console ever (toutefois entravé par la pénurie) et affiche encore à ce jour des ventes robustes, face à la PS4, on est un peu derrière. Si la PS5 affiche près de 55 millions d’unités écoulées fin 2023, c’est-à-dire un peu plus de trois ans après sa commercialisation, sa grande sœur dépassait de son côté 57 millions sur la même période.
Quand ça se joue à rien
Bref, il n’y a pas mort d’homme, mais loupé ainsi ses objectifs n’a jamais été accueilli à bras ouverts (d’où la chute en bourse). Dans l’ensemble, Sony semble avoir vu un peu trop large pour sa console de salon en 2023-2024, motivé par un précédent exercice (2022-2023) qui s’est achevé à 19 millions de PS5 au lieu des 18 millions prévues initialement ! Cette fois, on repassera pour les 25 millions, ce qui ne veut pas dire que les 21 millions avant le mois prochain vont tomber tout cuit. On parle quand même d’un peu moins de 5 millions d’exemplaires en trois mois… L’un dans l’autre : il y a une forme d’urgence, ce qui pousse Sony à déployer des ristournes pour rester dans les clous. En ce fin février par exemple, la PS5 Slim Édition Standard - avec lecteur de disque - est à -10% (-75€) sur Amazon.
Des ristournes qui, elles aussi, n’envoient pas forcément pas le bon message. Si PlayStation atteint 21 millions de PS5 en mars à grand renfort de réductions, à terme, les marges | les bénéfices vont forcément être moindres ! Après, l’argent récolté grâce au hardware, c’est peanuts face au véritable nerf de la guerre : la vente de services et de jeux. C’est clairement “là où est l’argent”. Et ce dernier modèle (la console comme produit d’appel pour vendre des exclusivités), il est encore super présent sur PlayStation, même si c’est amené à évoluer… Sauf que cette strétégie a, elle aussi, ses limites.
L’aboutissement d’un modèle
Parce qu’au-delà de toute cette histoire d’objectifs loupés et de PS5 en fin de vie (ce qui n’exclut pas du tout l’arrivée d’un modèle Pro d’ailleurs), les analystes interrogés par CNBC sont préoccupés par autre chose : la marge des jeux de Sony, c’est-à-dire la différence entre les coûts de production et le prix d’achat. D’après le média américain, cette marge était de 6% en décembre dernier (contre 9% en décembre 2022 et 12-13% début de la même année). Si l’on en croit les sources de CNBC, cet indice serait à son plus bas depuis “une décennie”. Vous voyez venir la cause : les coûts de production des jeux, qui ont explosé ces dernières années. Selon Kotaku, Spider-Man 2, c’est 300 millions de dollars.
Une problèmatique qu’Hiroki Totoki, directeur financier de Sony | président par intérim de PlayStation (suite au départ de Jim Ryan), a bien en tête… Dans une séance de questions-réponses tenue après l’annonce des résultats de l'entreprise, l’homme affirme qu’il aimerait être “agressif” pour améliorer les marges des jeux de la PS5. “Si vous avez un contenu first party (pas seulement sur notre console mais aussi sur d’autres supports, comme les PC) il peut être développé sur plusieurs plateformes, et cela peut aider à améliorer les bénéfices”, raconte-t-il. Une route qu’emprunte un certain Helldivers 2, nouveau jeu service édité par PlayStation et sorti simultanément sur PS5-Steam. Il a enregistré un pic à 400.000 joueurs en simultané sur la boutique de Valve, un record pour un titre de Sony sur PC.
Même si le succès d’Helldivers 2 sur le long terme n’est pas encore acquis, l’engouement du jeu sur PC va dans le bon sens pour la société japonaise ! Pour rappel, PlayStation prévoit de sortir six jeux services à l’horizon 2025-2026. Une manière de faire face aux coûts de production croissants - avec des expériences taillées pour rapporter de l’argent sur le long terme (Fortnite). On est sans doute à l’aube d’une nouvelle stratégie pour Sony, qui va devoir s’éloigner du modèle des exclus à tout prix.