Après quasiment trois années à l’attendre, Final Fantasy XVI fut enfin mien ce 22 juin 2023 sur PS5. Ni une ni deux, j’ai lancé l’aventure de Clive, curieux de découvrir ce que ce seizième opus avait à mettre en scène et à me raconter. Rapidement, même si j’adhérais à sa proposition de gameplay et à cette envie de se focaliser sur le scénario avec une aventure dirigiste dans des zones semi-ouvertes, j’ai eu une étrange sensation, celle que l’on ressent quand on est en proie à la nostalgie. Oui, j’ai adoré me balader au sein des contrées d’Eos dans Final Fantasy XV mais j’aurais aimé en faire de même dans les royaumes de Valisthéa.
Cet article est un billet d’opinion, il est par nature subjectif. L'avis de l'auteur est personnel et n'est pas représentatif de celui du reste de la rédaction de JV.
Jouer à Final Fantasy XVI m’a rendu nostalgique de FF15. Oui, c’est possible !
À n’en pas douter, la date du 22 juin 2023 était très spéciale pour une grande partie des joueurs de Final Fantasy. Pour ma part, cela faisait bien longtemps que je n’avais pas découvert un volet numéroté le jour même de sa sortie. Il faudrait, je crois, remonter au lancement de Final Fantasy XII ! À partir de là, j’ai toujours eu un train de retard de quelques mois voire même de quelques années au moment de démarrer Final Fantasy XIII et Final Fantasy XV, à l’exception du remake de Final Fantasy VII. Bref. Dès la présentation de Final Fantasy XVI, lors du PlayStation Showcase de septembre 2020, j’ai de suite compris qu’il me faudrait une PS5 avant la date butoir de sa sortie, ne serait-ce que pour avoir le privilège d’y jouer le jour même. Au final, toutes les conditions étaient bel et bien réunies mais, après plusieurs heures de jeu, quelque chose me chafouine et plus le temps passe, plus je pense avoir cerné le problème.
Alors, quel est le souci ? L’univers médiévalo-fantastique ? Non. La disparition du tour par tour, au profit d’un gameplay à la Devil May Cry ? Encore moins, notamment lorsque l’on part du principe que les différents volets de la licence ont toujours cherché à se renouveler d’une manière ou d’une autre et que l’on est en accord avec cette philosophie. Ah, donc c’est l’absence du monde ouvert qui pose problème ? Pas vraiment, mais on se rapproche d'une piste. Depuis que je m’intéresse à la licence, l’aspect très dirigiste des différentes aventures n’a jamais été un point noir. Au contraire, chaque épisode est là pour nous délivrer une histoire, une « dernière fantaisie » pour mieux nourrir notre imagination, nous faire rêver (ou pleurer). Néanmoins, la manière dont est construit le monde de Final Fantasy XVI me fait tiquer, alors que parcourir Final Fantasy XIII et Final Fantasy VII Remake, des récits couloirs ponctués de zones plus ou moins larges, ne me pose aucun souci. Qu’est-ce qui me gêne tant dans ce cas ? À y réfléchir, ce sont très certainement certains aspects de Final Fantasy XV qui me rendent nostalgique, et ça commence, étonnamment, par cette portion en monde ouvert.
Une aventure à deux facettes au sein d'un « monde ouvert »
Initialement, on ne peut pas dire que j’étais plus emballé que cela de savoir qu’une partie de Final Fantasy XV se déroulerait en monde ouvert. À l’époque, c’est un type de production auquel j’ai un peu de mal à accrocher parce que j’y éprouve davantage la sensation d’être face à un trop-plein de possibilités, de ne pas savoir par où commencer, de tourner en rond puis de me perdre et, surtout, de m’ennuyer à défaut de maîtriser et d’apprécier le terrain de jeu qui s’offre à moi. Il faut dire qu’à cette époque, nous sommes dans une période où les mondes ouverts s’appuyaient sur des formules à base de points d’intérêt omniprésents et mettaient déjà en place certains des poncifs les plus rebutants du genre. Pourtant, Final Fantasy XV et tous ses défauts m’ont, en quelque sorte, permis de dépasser cette impression, à tel point que ce quinzième volet numéroté est l’une des expérience en monde ouvert qui m’a le plus marqué. Il y a plusieurs choses qui jouent en sa faveur et qui permettent d’expliquer cela.
La première chose, c’est que j’avais enfin la possibilité — tout comme les amateurs de Final Fantasy — de parcourir librement toute une portion d’un univers inédit, sans coupures liées à des temps de chargement interminables mais avec tout de même quelques restrictions spatiales. Certes, Final Fantasy XV n’était pas révolutionnaire dans son approche du monde ouvert mais, aujourd’hui, ce n’est pas tant la forme qu’il prenait à cette époque que je regrette mais plutôt les perspectives que cela offrait et pouvait offrir à la licence. Oui, les Final Fantasy ont toujours été une invitation au voyage, à l’accomplissement d’une destinée, aussi funeste soit-elle, mais Final Fantasy XV avait, en partie, cette forme qui lui permettait de refuser cela ou, du moins, de le mettre de côté pendant quelques instants. Avec ses coins de pêche, ses chasses aux monstres, ses contrées libres d’accès, ses espaces pour faire des feux de camp, la partie « monde ouvert » de Final Fantasy XV amenait ses respirations, ses moments de liberté et d’exploration dictés par le joueur lui-même.
Ce qui, à mon sens, fait du tort à Final Fantasy XVI, c’est de proposer un univers somptueux et dépaysant, capable de plaire à un très large public, sans qu’on ait le sentiment de le parcourir et de l’explorer véritablement. Bien évidemment, il faut faire progresser l’histoire, mais avancer d’un point A à un point B en débarrassant chaque zone remplie d'ennemis (qu'on nous présente comme des « défis »), par le biais de combats qui nous noient d’effets visuels, sans prendre le temps de découvrir ce qu’elles peuvent réellement nous offrir laisse un arrière goût amer en bouche. Par conséquent, Final Fantasy XVI me fait ressentir une légère frustration parce que l’on a envie d’explorer Valisthéa dans son entièreté et d’en connaître toutes les facettes ainsi que les moindres recoins. Alors oui, il existe des zones plus larges sauf qu’elles ne récompensent quasiment pas l’exploration et sont uniquement là pour alimenter le côté « character action game » de Final Fantasy XVI et gonfler sa durée de vie en misant sur ce qui se fait de moins aguicheur en matière de quêtes annexes.
Alors, pourquoi ne pas faire ces reproches à Final Fantasy VII Remake ? La subtilité, pour moi, c’est que FF7R, avec sa relecture, apportait plus de matière à l’objet initial en développant son univers : oui, on pouvait parfois rester sur notre faim, mais on avait enfin l’opportunité de faire se confronter le fruit de notre imagination à la vision des développeurs sur ce qu’est réellement Midgar et ses environs, le tout en posant quand même un cadre qui respecte le matériel original. À ce propos, le meilleur pourrait même être à venir avec les évènements de Final Fantasy VII Rebirth ! En fin de compte, et après ce léger aparté, je réalise que si je regrette de ne pas retrouver une telle partie en monde ouvert dans Final Fantasy XVI, c’est parce que les personnages de Final Fantasy XV avaient réussi à me prendre par les sentiments et à me le faire aimer d'une manière bien spécifique.
Un « monde ouvert » qui n'aurait pas la même saveur sans Noctis et sa bande
Finalement, au-delà de défricher une portion de ce nouvel univers baptisé Eos, c’est le propos même de Final Fantasy XV qui m’a fait apprécier sa partie en monde ouvert, à savoir de se lancer dans une aventure aussi exaltante que terrifiante qui dépasse complètement son casting de personnages. Aussi bien pour Noctis que pour ses trois amis (Gladiolus, Ignis et Prompto), ce périple modifiera drastiquement leur existence. Par conséquent, et même si c’est une goutte d’eau dans l’océan du jeu, les simples trajets que l’on peut effectuer en voiture nous rappellent cette insouciance qui disparaît peu à peu. En réalité, c’est le simple fait de planifier un trajet et de lâcher prise (littéralement) qui m’a fait aimer ce segment ouvert de Final Fantasy XV. Dans ces moments là, on prend le temps de regarder autour de soi, d’être émerveillé par le paysage qui défile, d’apprécier les échanges entre les quatre membres de la bande et de s’arrêter sur le bas-côté lorsque l’on a repéré quelque chose d’intrigant en route et que l’on ne peut y accéder qu’à pied.
Après un certain nombre d'heures sur Final Fantasy XVI, c’est quelque chose qui me manque. Le nouveau titre de Square Enix aurait pu étendre ses frontières, le souci aurait toujours été là. Si ces instants dans Final Fantasy XV me rendent nostalgique, c’est parce que je réalise que Clive est plus ou mois seul dans l’épreuve qui est la sienne, et qu'il renvoit constamment ce sentiment, parfois agaçant, d'avoir tout le poids du monde sur ses épaules. Pourtant, la licence nous avait habitué à une odyssée en groupe, avec des membres dotés d'une écriture et d'une personnalité singulières : Final Fantasy VII, Final Fantasy VIII, Final Fantasy IX, Final Fantasy X, Final Fantasy XII, Final Fantasy XIII et, enfin, Final Fantasy XV. Certes, Final Fantasy XVI a dû ménager la chèvre et le chou pour, à la fois, plaire à ses admirateurs (avec une histoire soignée, un lore respecté, des instants épiques et des personnages qui ne laissent pas indifférent) et convaincre les nouveaux joueurs de ses qualités (système de combat nerveux, affrontements grandiloquents contre les boss, scénario à la Game of Thrones, …), mais il en a oublié l’importance de l’effet de groupe, quelque chose qui pouvait être viscéral dans Final Fantasy XV parce que très terre à terre.
Qui n’a jamais eu envie, en compagnie de ses ami(e)s, de prendre part à une aventure inoubliable et de tailler la route à la manière d’un road trip ? Ce n’est pas grand chose en soi, mais cette fraternité qui liait les personnages de Final Fantasy XV me donnait envie de parcourir la terre entière, ou plutôt l’univers d’Eos. Sans ça, la portion en monde ouvert n’aurait peut-être pas eu la même saveur et peut-être que je n’aurais pas autant défendu le titre de Square Enix. Mais que voulez-vous, j’ai eu un faible pour ce titre cabossé et ponctué de défauts parce qu’il laissait transparaître une certaine humanité dans ces moments de balade et d’exploration, quelque chose d’à la fois simple et sans fioritures.
En tout cas, chez Square Enix, si l’on tente des choses avec Final Fantasy, on en oublie pas que le J-RPG, c’est avant tout une aventure à nulle autre pareille, portée par une galerie de personnages qui ne se quitteront quasiment jamais, du début à la fin. Un peu à l’image d’Octopath Traveler II qui a su se tailler une place de choix dans le cœur des joueurs adeptes de cette formule. Quoi qu’il en soit, je ne jette pas la pierre à Final Fantasy XVI ! Si je n’apprécie pas l’aventure imaginée par Naoki Yoshida et ses équipes autant que je l’aurais souhaité, elle m’a permis, à l’inverse, de mieux comprendre les éléments qui m’ont fait aimer son aîné. Et rien que pour ça, je ne peux que lui en être reconnaissant !