Si Microsoft espérait peut-être une approbation rapide des instances régulatrices, l’attente sera peut-être un petit peu plus longue qu’espérée. Ces derniers jours, les autorités de la concurrence britanniques et néo-zélandaises ont exprimé leur souhait d’approfondir l’examen de cette proposition de rachat pesant 68,7 milliards de dollars. Une décision que l'Union européenne devrait suivre dans les jours qui viennent. Face aux inquiétudes des commissions aiguisées par les préoccupations de Sony, le patron de la Xbox chausse les gants et met les points sur les i.
Le combat des chefs
Au fur et à mesure que les instances régulatrices s’expriment sur la proposition de rachat d’Activision-Blizzard par Microsoft, les événements prennent la tournure d’un feuilleton de l’été qui pourrait bien durer. La firme de Redmond avait raison d’être prudente en annonçant une finalisation de l’accord pouvant arriver en juin 2023 : d’après le Financial Times qui évoque des sources proches du dossier, “c'est un gros et difficile accord qui nécessite une enquête prolongée”. Depuis que l’Autorité britannique de la concurrence et des marchés (CMA) a recommandé l'ouverture d'une enquête sur l'impact de l'opération, craignant que l'acquisition d'un des plus gros éditeurs de jeux vidéo mondiaux par une des entreprises les plus riches du monde n'entraîne "une diminution substantielle de la concurrence sur un ou plusieurs marchés", Sony se sent pousser des ailes.
Dans une déclaration accordée à Gamesindustry.biz, le groupe japonais dit apprécier “la volonté du CMA de protéger les joueurs” après avoir décrit son vœu de “garantir la meilleure expérience de jeux aux joueurs PlayStation”. Le représentant de Sony continue : “donner le contrôle à Microsoft des jeux Activision, comme Call of Duty, aurait des conséquences négatives majeures pour les joueurs et pour le futur de l'industrie”. La réponse du mastodonte américain ne s’est pas faite attendre. Toujours chez Gamesindustry.biz qui retransmet le duel avec un léger différé, un porte-parole de Xbox déclare qu’il n'y a “aucun sens commercial pour Microsoft de retirer Call of Duty de la PlayStation étant donné sa position de leader sur le marché des consoles”. Un habile message qui a pour objectif de rappeler, presque sournoisement, que l’actuel leader du marché n’est pas Microsoft mais Sony. Un "détail" qui devrait compter lors des analyses complémentaires des commissions.
Spencer veut apprendre à Ryan ce qu’est la concurrence
Actuellement au Japon à l’occasion du Tokyo Game Show 2022, le boss final de Microsoft Gaming, Phil Spencer, était interviewé chez CNBC. Le journaliste Will Koulouris a profité de cette occasion pour demander au grand patron de Xbox de s’exprimer sur le sujet chaud qu’est le rachat d’Activision-Blizzard, ainsi que les revendications de Jim Ryan (dirigeant de PlayStation). “Ne pouvez-vous pas simplement assurer que Call of Duty sera disponible perpétuellement sur PlayStation ?” demande le journaliste. “Je ne peux vous dire où nous en sommes avec les régulateurs. J’ai déjà dit publiquement à nos fans et à nos clients quel était notre engagement, que notre perspective était de continuer à livrer Call of Duty sur PlayStation (...). Nous voulons même élargir le nombre de joueurs qui peuvent jouer à nos jeux”.
Notre but, c’est de mettre le joueur au centre des technologies telles que le Cloud ou les puces graphiques du PC. Notre espoir est de rendre nos jeux jouables par plus de gens dans un avenir proche. Phil Spencer, directeur de Microsoft Gaming
Arrive ensuite la question de l’arrivée de Call of Duty dans le Game Pass, et le fait que cela pourrait rendre le service inattaquable sur le marché des abonnements pour accéder à des jeux. Un point soulevé par Sony que Spencer balaie d’un revers de main. “Ce n’est pas que lié au Game Pass, c’est à propos de la concurrence sur ce marché. En tant que Xbox et Microsoft, nous voulons innover et créer de la valeur. Comment pouvons-nous apporter de la valeur aux joueurs avec un nouveau modèle proposant une librairie de jeux que les joueurs aiment ? C’est ça, la concurrence".
La concurrence dirige les concurrents vers l’innovation, et vers de nouvelles choses à faire comme le Cloud, les abonnements (...). Tout ce que nous avons fait a été de nous concentrer sur comment rivaliser efficacement, et comment proposer plus de valeur à nos clients. Phil Spencer, directeur de Microsoft Gaming
Voilà des mots que Jim Ryan devrait apprécier, Microsoft indiquant de ce fait que Sony refuserait de se remettre en question par rapport aux évolutions du marché. À propos de concurrence, Phil Spencer a répété son envie de ne pas augmenter le prix de ses consoles “dans une époque où les joueurs doivent déjà faire beaucoup d’efforts”. Au sujet des acquisitions, le dirigeant assure qu’il continue de passer en revue les candidats potentiels “dans un marché très concurrentiel” et évoque les efforts déjà faits en Asie, territoire où le géant américain devrait multiplier les investissements.
Aujourd’hui, Tencent est la plus grosse compagnie de jeux vidéo au monde et ils continuent d’investir lourdement dans le jeu vidéo. Actuellement, Sony est plus important que nous dans le secteur du gaming et ils continuent d’investir (...). C’est un marché très compétitif, mais nous nous efforçons d’être un joueur majeur. Phil Spencer, directeur de Microsoft Gaming
Enfin, Will Koulouris interroge son interlocuteur sur les exclusivités potentielles de jeux Activision-Blizzard, des exclusivités qui “pourraient inciter les joueurs à ne plus acheter de PlayStation” selon le géant japonais. “Les exclusivités sont la colonne vertébrale de cette industrie depuis longtemps. Nous avons pris cette décision il y a quelques années de sortir nos jeux à la fois sur consoles et sur PC. Nous les avons même rendu accessibles chez quasiment tous ceux qui disposent d’un navigateur Internet s’ils se connectent sur Xbox.com/play. Rendre nos jeux accessibles au plus grand nombre est notre objectif".
Nous aurons des titres exclusifs sur Xbox, nous le faisons déjà, cela fait partie de notre plateforme pour susciter une affinité avec ce que nous faisons, mais nous voulons que ces jeux finissent par être joués par plus de joueurs qu'avant. Nous construisons notre technologie et l'innovation de notre modèle commercial pour rendre cela possible. Phil Spencer, directeur de Microsoft Gaming
