Alors que GTA Trilogy Definitive Edition débarque aujourd’hui, nos confrères de The Gamer ont pu s’entretenir avec Rich Rosado, producteur chez Rockstar. L’occasion d’évoquer les défis techniques et artistiques que les développeurs ont affrontés pour remettre au goût du jour ces trois jeux culte.
Même si les remasters sont régulièrement taxés de fainéantise, Rockstar s’est imposé comme ligne de conduite d’en faire plus que les autres, sans pour autant créer de véritables remakes. Ce fut le cas avec les moutures PC, PS4 et Xbox One de GTA V, techniquement plus avancées que celles sur PS3 et Xbox 360. Et ce sera encore le cas avec GTA Trilogy Definitive Edition, collection qui regroupe GTA III, Vice City et San Andreas dans des versions retravaillées, aussi bien pour le gameplay que des visuels. “Le défi artistique à lui seul semblait insurmontable” affirme ainsi dans les colonnes de The Gamer Rich Rosado, producteur chez Rockstar Games, studio derrière Grand Theft Auto. “C’est une tâche énorme (...) vous faites vraiment trois jeux à la fois, et ils ne sont pas devenus plus petits. San Andreas est toujours un jeu de 100 heures”.
Croisée des chemins
Mais avant de mettre les mains dans le cambouis, Rockstar devait d’abord définir un cap pour GTA Trilogy Definitive Edition, avec trois jeux qui ont presque tous fêté leur vingt ans, et qui ont laissé une trace indélébile sur l’industrie et les joueurs eux-mêmes. “Ce qui a attiré les gens vers ces titres dès le début, c'est leur ressenti très spécial. Quand il s'agit de les recréer, vous êtes à la croisée des chemins” note Rich Rosado. “Vous pouvez soit essayer de les reconstruire et de les améliorer, et ce faisant, cela signifie tout retranscrire et ajouter une nouvelle physique. Ou vous reconnaissez que ces jeux avaient un ingrédient secret auquel les gens sont tombés amoureux, et ce serait mission impossible d'essayer de reproduire chaque élément, avec les bons morceaux et des morceaux plus frustrants”. Il conclut ensuite : “l'un des premiers choix que nous avons fait pour ces remasters a été de laisser (ces morceaux, ndlr) intacts”.
C’est alors un véritable casse-tête qui démarre pour les équipes de Rockstar. Déjà technique, pour retrouver et réutiliser les modèles et fichiers du début des années 2000 (“nous n'avons jamais pensé que nous allions revisiter ces projets” explique Rosado). Les développeurs optent pour un mélange de machine learning, pour notamment améliorer “automatiquement” les textures, et de travail à la main. The Gamer cite par exemple le néon du casino Las Venturas, dans San Andreas, totalement recréé pour l’occasion. “Au tout début, nous nous sommes dit, refaisons seulement les bâtiments des héros : la maison de CJ, la cachette de Tommy, le bureau de Rosenberg, etc” affirme le producteur de Rockstar. “Mais il y aurait eu un décalage à terme. Une chose aurait été très jolie, puis deux mètres plus loin, la qualité ne correspondait plus. C’est à ce moment que nous avons décidé d’appliquer un coup de pinceau sur tout, d’une manière ou d’une autre”.
(A l’époque, ndlr), le fait de pouvoir voir jusqu'au bout d'une rue, de voir les gens se déplacer et les voitures monter et descendre, ajoutait une impression d'échelle et de majesté au monde. Pouvoir repousser cette distance d’affichage et voir encore plus la ville était une chose que nous ne pouvions pas faire sur PS2 mais que nous avons pu faire dans les remasters. Nous aurions aimé que le jeu ressemble à ça à l’origine - Rich Rosado, producteur chez Rockstar
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Un relooking délicat
Pour la géométrie des bâtiments ou encore des véhicules, à l’évidence pas de problème. “Vous pouvez rendre une voiture plus propre, ajouter plus de polygones et cela ressemblera à avant, juste plus moderne” explique Rich Rosado. “Mais lorsque vous vous attaquez à un personnage comme Claude, qui a été construit à l'ère PS2 et qui n'a pas beaucoup de détails sur le visage, c'est délicat (...) Vous vous inquiétez de ce que les gens vont penser (...) Vous devez ajouter plus de définition à ces personnages que les gens ont appris à connaître au cours des années et dont ils ont leur propre image mentale (...) Cela a impliqué beaucoup d'itérations pour nous assurer que nous (l’équipe, ndlr) étions tous à l'aise avec eux” précise le producteur.
Pour le sujet délicat du redesign des personnages, l’équipe en charge de GTA Trilogy s’est rapprochée de Rockstar North, où travaillent encore les artistes originaux des trois jeux culte. Finalement, c’est sans doute Claude, héros de GTA III, qui a fait l’objet du relooking le plus important. Et ce n’est pas par hasard. “Quand vous comparez les assets (de San Andreas, ndlr) à ceux de GTA 3, c'était la nuit et le jour” affirme Rich Rosado. “Ce sont les assiettes les plus spartiates, plus en forme de boîte. Les piétons étaient littéralement construits comme le bonhomme Michelin. Leur corps était séparé en morceaux, nous avons donc dû les relooker et les réajuster de manière à les rendre plus cohérents avec San Andreas”. Pas simple, c’est sûr.
Nous voulions aussi profiter des effets mis à notre disposition dans le nouveau moteur de rendu, qui nous a permis de faire bien plus que juste ajouter de nouveaux éclairages ici et là. Vous avez toute une boîte à outils avec laquelle jouer - Rich Rosado, producteur chez Rockstar
Au-delà de ramener à la vie les trois premiers GTA 3D, Rich Rosado et ses équipes avaient comme ambition de créer un nouveau standard nostalgique à l'avenir. “Le public aime encore ces jeux des années plus tard” assure le producteur. “Nous voulions prolonger cette feuille de route de 10 ou 15 ans supplémentaires et nous assurer qu'ils fonctionnent sur des écrans modernes de 1080p, 4K et plus”. Résultat, un rendu cartoonisé en très haute définition, avec un gameplay inspiré des récents épisodes. Une manière de mettre des images sur les souvenirs lointains début 2000, régulièrement embellis avec le temps qui s'est écoulé.