Si vous avez suivi l'actualité du jeu vidéo ces dernières semaines, vous savez que le lancement de Cyberpunk 2077 a été entaché de nombreux problèmes techniques, notamment sur PS4 et Xbox One.
Par la suite, de nombreux autres éléments sont venus s'ajouter à ce lancement plus que difficile : la possibilité de se faire rembourser, le retrait de Cyberpunk 2077 du PS Store, le dépôt d'un recours collectif, la pression mise par les autorités de protection des consommateurs et les excuses publiques de Marcin Iwinski. On se doutait que Jason Schreier de Bloomberg surveillait attentivement la situation, et a profité de ses contacts pour publier ce matin une longue enquête sur les conditions de développement de Cyberpunk 2077.
Ce dernier en propose un long résumé sur Twitter, et indique avoir pu interroger plus de 20 personnes travaillant ou ayant travaillé sur le titre, et met en avant une ambition hors de contrôle, des problèmes techniques, des délais intenables et surtout, un slogan : "Nous avons fait The Witcher 3, ça fonctionnera", que Schreier rapproche de la "Magie BioWare". Dans leurs témoignages, les développeurs indiquent que malgré les promesses autour du fait que le crunch ne serait pas obligatoire, nombre d'entre eux se sont sentis obligés de faire des heures supplémentaires pendant des années. Un ancien programmeur audio, Adrian Jakubiak, qui a quitté le studio après son mariage déclare d'ailleurs :
Il y a eu des périodes durant lesquelles je crunchais jusqu'à 13 heures par jour (...), et je le faisais cinq jours par semaine. J'ai quelques amis qui ont perdu leur famille à cause de ces manigances.
Certains vétérans extérieurs auraient été choqués d'apprendre qu'une forme de chacun pour soi était en place chez CD Projekt. En guise d'exemple, Jason Schreier explique que lorsqu'un développeur avait besoin d'un shader, il était créé sans vérifier s'il avait déjà été fait. En ce qui concerne le crunch, un développeur aurait dit à son responsable qu'il ne souhaitait pas faire d'heures supplémentaires, et que c'était OK puisque cela avait été annoncé. Ce dernier aurait accepté la décision, tout en ajoutant que, du coup, les collègues devraient travailler plus pour compenser. Du côté des développeurs étrangers, certains témoignages mettent en avant une forme de mise à l'écart. Certaines discussions se seraient déroulées devant eux en polonais, ce qui était interdit par le règlement de l'entreprise et aurait créé un malaise.
Ce sentiment, auquel on peut ajouter les bas salaires, aurait occasionné un certain nombre de départs durant le développement. A ce sujet, Adrian Jakubiak indique qu'il gagnait 400$ par mois en 2015 lorsqu'il était testeur, et que son salaire était monté à 700$ mensuels lorsqu'il est devenu programmeur junior en 2018. Cependant, CD Projekt a annoncé en 2019 que 10% des bénéfices seraient partagés avec les développeurs, mais il n'y a pour le moment aucune donnée à ce sujet. Annoncé en 2012, Cyberpunk 2077 aurait changé de forme dans un passé pas si lointain que ça. Sur Twitter, Schreier indique que, jusqu'en 2016, il s'agissait d'un jeu à la troisième personne. Egalement, le système lié aux forces de l'ordre aurait été ajouté au dernier moment, et certains développeurs n'auraient pas compris pourquoi le studio essayait de créer un RPG et un GTA en même temps en n'ayant qu'une fraction des effectifs dont dispose Rockstar.
Jason Schreier indique également que le développement n'aurait, comme on pouvait s'en douter, réellement débuté qu'en 2016, une fois que le chapitre The Witcher 3 a été refermé. La démo de 2018 aurait été majoritairement composée de faux gameplay, et que beaucoup de temps avait été perdu dans sa réalisation. Enfin, les développeurs auraient ouvertement dit qu'il serait impossible de sortir le titre en 2020.
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