Notre analyse thématique a pour but de reconstituer les éclats fulgurants d'un album à l'image de la modernité qu'il critique : tantôt fragmenté, tantôt liquide.

Le soir de son show à l'AccorHotelArena, anciennement "Bercy', Nekfeu annonce en plein milieu de son concert, lors d'une retransmission live sur les réseaux sociaux, la sortie surprise de son deuxième album : Cyborg. Aussitôt disponible sur les plateformes d'écoute en streaming, le projet se classe presque instantanément en tête des ventes et le restera pendant plusieurs semaines. À l'heure où ces quelques lignes sont écrites, le LP est triple disque de platine et ce, sans la moindre promotion. Un exploit.

Éclectique tout en restant cohésif, engageant et émouvant, parfois minimaliste ou, au contraire, baroque, l'album offre une palette musicale large et séduit un public jusqu'alors peu habitué à un album concept français qui se voudrait mainstream. Au-delà de l'esthétique calibrée du projet, une vision critique et acerbe de la société se révèle. Le premier titre, Humanoïde, est un cri cinglant, un regard à la fois introspectif et porté sur le monde extérieur, dans une dialectique rendue volontairement confuse. En scrutant le reflet de son âme, Nekfeu y voit les contours d'une civilisation malade.

https://soundcloud.com/ndmgo/nekfeu-humanoide
(0:52 pour le début réel)

Le titre est d'abord porté par les efforts conjoints des trois producteurs impliqués dans sa conception : KLM (pseudo alternatif du rappeur Népal, qu'il emploie uniquement pour le Beatmaking), Diabi et Loubensky. De sources sûres, nous pouvons d'ailleurs révéler - et c'est une information que seuls les proches de Nekfeu savent - que la piste est en réalité l'assemblage de deux instrumentales, l'une de KLM, l'autre de Népal. Loubensky s'est chargé des arrangements et c'est avec tout son talent déployé qu'il est parvenu à maintenir une harmonie et une continuité entre les deux productions.

Les quelques notes de piano qui ouvrent Humanoïde nous renvoient à une atmosphère froide, quasiment métallique, où la monotonie des accords évoque déjà un sentiment de mal-être et d'inadéquation. Avant même que les paroles ne soient prononcées, un soupir vient rompre cette boucle, une façon de nous signaler que tout ce que cette chanson va nous apprendre de l'artiste relèvera de l'aveu douloureux. Puis, les premières interrogations :

Est-ce que tu t'es d'jà fait rabaisser par celle que t'aimais secrètement ?

Gentille en privé mais, d'vant les gens, cruelle et légère

Là où Martin Eden ouvrait Feu sur un déluge embrasé d’auto-congratulations, de braggadocio assumé, d'égotrip insolent, autant d'exaltations qui permettaient au rappeur de se satisfaire de son ascension sociale (non sans quelques nuances cyniques), Humanoïde prend l'auditeur à revers en le replongeant dans le passé de Nekfeu. Un retour en arrière terne, maussade, anxiogène où les mesquineries (celles que subit le rappeur mais aussi celles dont il est coupable), la violence et la misère affective se confondent en une série d’événements mentionnés sous la forme de questions qui nous sont directement adressées : un racket devant lequel il détourne les yeux, une fille à la fois douce et méprisante, la luxure insatiable de l'adolescence freinée par le manque d'argents... Autant d'humiliations, de gênes, de malaises, de hontes qui alimentent un peu plus une impression qu'il exprimait déjà sur le dernier morceau de Feu, intitulé Être humain , où il remarquait avec justesse qu'il est "rare de voir un Être humain être humain".

À travers son propre autoportrait, Nekfeu dessine les contours de l’Humanoïde .

L’Humanoïde est la cristallisation des dernières traces subsistantes d'humanité dans un monde entravé par les conditionnements et l'ingénierie sociale. Il est le "Cyborg défectueux", celui qui n'a pas encore été formaté par l'éducation techno-libérale. Ainsi, Nekfeu affirme :

Non, j'ai pas fait l'ENA ni Sciences Po, j'ai pas fait HEC

J'ai pas b'soin d'ça pour m'exprimer quand j'vois des pauvres sur la chaussée

Aux statistiques, aux théories sociales, aux hautes études des experts, il oppose son expérience, aussi anecdotique soit-elle. Mieux encore, lui qui se sentait impuissant face aux tares de la société, sait désormais comment parvenir à un changement de conscience, aussi infime soit-il :

J'me suis longtemps d'mandé si j'pouvais faire quelque-chose mais, là, je sais

C'est par le biais de son art et, précisément, de cet album, qu'il compte apporter les jalons de conscience nécessaires à cette jeunesse déphasée qui l'écoute. Cette opposition farouche à la technocratie est également exprimée dans le second couplet où il demande, sans doute de manière purement rhétorique :

Qui a conseillé la conseillère d'orientation ?

Les experts, les économistes, les "conseillers" dirigent et suggèrent, leurs choix peuvent avoir des conséquences dramatiques mais ils ne sont en rien affectés par les mauvaises conseils qu'ils pourraient prodiguer. Cette problématique éthique a d'ailleurs été récemment soulevée avec pertinence par l'essayiste Nassim Taleb dans son livre brillant intitulé "Skin in the Game".

Cette volonté active des instituions qui consistent à vouloir encadrer, manager et limiter les groupes humains comme les individus, a déjà été critiquée avec virulence par l'artiste dans son titre Nique les Clones pt. II. Ici, elle est centrale. L’Humanoïde se définit justement par son incapacité à être formaté et, c'est en cela qu'il est "défectueux". C'est aussi là, la cause principale du rejet qu'il subit, il ne peut se conformer aux codes sociétaux : son allure est "bizarre", il peut tomber dans la délinquance, il est vertueux mais maladroit... Autant de tares qu'il accumule sous l'effet des contradictions systémiques.

A contrario, le Cyborg est l'individu parfaitement implanté dans la matrice sociale. Il est conditionné, formaté, individualiste mais parfaitement sociable ("des griffes que nous vernissons" conclut-il, sur son dernier couplet), superficiel mais dénué de sensibilité véritable ("je ne vois que des vitrines mais tout ce qui brille, nous le ternissons"). C'est l'homme de son temps, quelqu'un qui a parfaitement intégré la technique dans son existence (cf. Réalité augmentée, nous y reviendrons dans l'analyse dédiée).

L’Humanoïde est à la fois un produit de son époque et une âme hors de son ère. Se réclamant d'eux, Nekfeu, dans un cri déchirant, s'exclame :

Meurtri comme un ermite, je ne décris que l’éternité

Putride devient l'esprit que l'on a pétri de modernité

Nous pouvons déjà supposer que l'ermite mentionné peut s'agir, en réalité, de Ted Kaczynski : https://fr.wikipedia.org/wiki/Theodore_Kaczynski
Ce militant écologiste et anarcho-primitiviste s'est fait connaitre pour son action terroriste radicalement technophobe. Je vous conseille d'ailleurs de lire son brillant Manifeste, qui puise également dans les écrits de Jacques Ellul. Il est tout à fait possible d'imaginer que Nekfeu, sans être en accord sur tous ses positionnements, puisse s'identifier à sa lutte contre les effets néfastes de la technique sur l'homme et l'écosystème. Nous pouvons d'ailleurs retrouver des éléments marquants d'une critique de la science et de la technologie dans le titre Avant tu riais mais aussi de la Cybernétique et de l'Hyperréalité dans Réalité Augmentée.

Cette attaque clairement dirigée vers la technique s'accompagne d'une aversion assumée envers les esprits rendus "putrides" par la modernité. Pour Nekfeu, le scientisme et la technique n'élèvent pas, ils nous rabaissent et nous réduisent à des automates. Aussi, dans un élan que certains jugeront "naïfs", l'artiste voit en l'amour le dernier rempart face à la déshumanisation généralisée et imposée par le système. Le titre s'ouvre sur une question rhétorique et s’achève de la même manière :

Pour toi, si l'amour rend aveugle

Pourquoi l'ai-je embrassée les yeux ouverts ?

Par le biais de cette interrogation, Nekfeu nous laisse donc entendre que l'amour n'est pas illusoire... Mais révélateur.

Pour supporter l'artiste et écouter le morceau sur les plateformes de streaming :
https://nekfeu.lnk.to/Cyborg

pourquoi t'as pondu un article

C'est quoi ton son favori du coup?
Perso Humanoide, Nekketsu et...Vinyle pour la prestation d'Alpha Wann

Je te up. C'était très intéressant à lire

Le 23 mai 2018 à 02:20:10 PtitCieuxAlchi a écrit :
C'est quoi ton son favori du coup?
Perso Humanoide, Nekketsu et...Vinyle pour la prestation d'Alpha Wann

Humanoïde, Avant tu riais, Nekketsu et O.D.

Le 23 mai 2018 à 02:22:49 Silverjs-III a écrit :
Je te up. C'était très intéressant à lire

Merci. C'est surtout très intéressant une fois que tu réécoutes le morceau, tu comprends alors mieux certaines phases et le rapport de continuité que Cyborg entretient avec Feu.

Feu s'ouvre sur un égotrip et s'achève sur un titre introspectif porté par une voix féminine, Cyborg s'ouvre sur un titre introspectif (dont l'intitulé renvoie à celui du dernier morceau de l'album précédent) et se termine sur un égotrip accompagné par une voix féminine.

Y a plein de petits détails intéressants de ce genre.

Un autre exemple : dans le morceau "Nekketsu", Nekfeu affirme avoir le "cœur souffrant" et se compare à Goku. L'arc narratif où Goku développe une maladie cardiaque est celui... où il affronte des Cyborgs.

Ton analyse est plus riche que l'album

Le 23 mai 2018 à 02:28:08 CyborgDissected a écrit :

Le 23 mai 2018 à 02:20:10 PtitCieuxAlchi a écrit :
C'est quoi ton son favori du coup?
Perso Humanoide, Nekketsu et...Vinyle pour la prestation d'Alpha Wann

Humanoïde, Avant tu riais, Nekketsu et O.D.

Le 23 mai 2018 à 02:22:49 Silverjs-III a écrit :
Je te up. C'était très intéressant à lire

Merci. C'est surtout très intéressant une fois que tu réécoutes le morceau, tu comprends alors mieux certaines phases et le rapport de continuité que Cyborg entretient avec Feu.

Feu s'ouvre sur un égotrip et s'achève sur un titre introspectif porté par une voix féminine, Cyborg s'ouvre sur un titre introspectif (dont l'intitulé renvoie à celui du dernier morceau de l'album précédent) et se termine sur un égotrip accompagné par une voix féminine.

Y a plein de petits détails intéressants de ce genre.

Un autre exemple : dans le morceau "Nekketsu", Nekfeu affirme avoir le "cœur souffrant" et se compare à Goku. L'arc narratif où Goku développe une maladie cardiaque est celui... où il affronte des Cyborgs.

Ah oui quand même. C'est un reproche ment pas con

Nekfeu cette légende, en plus il a vécu une enfance plus que difficile

Quand il devait bouquiner en cachette pour ne pas qu'on se moque de lui

Les voitures qui se garaient en bas de chez lui

Nekfeu, ce lamnda qui rêve d'être rebeu

Le 23 mai 2018 à 02:28:14 Vierhundertzehn a écrit :
Ton analyse est plus riche que l'album

Au contraire, là je ne me concentre que sur quelques éléments thématiques.
Si j'avais voulu analyser la forme, ça aurait été bien plus long. Y a beaucoup de choses intéressantes à relever, notamment certaines techniques d'écritures purement modernistes qui viennent enrichir le texte, notamment la mélodie fredonné entre le second et le troisième complet qui s'avère être en réalité le refrain qui conclura le morceau.

Dans une interview accordée à Closer en Mai 2017 Nekfeu revient sur une anecdote à l´image de son passé trouble.
Voici un extrait de l’interview par Stéphane Comoli:

NEKFEU: Il y avait moi et mon frère. On était dans notre chambre à jouer sur la PS1 que notre grand-père nous a offert. Et la d’un coup on entend un bruit sourd ça faisait genre BAM d’un coup sec !
On était trop choqués ! En fait c’etait mon père qui avait claqué la porte d’entrée ! »

-Le journaliste Stéphane Comoli le regarde avec de grands yeux-

STÉPHANE: La porte a claquée ! Mais ça n’arrive pas tous les jours ca !

NEKFEU: Ouais sur le coup ça nous a trop surpris ! On peut dire que j’ai pas eu une enfance facile. Tu savais qu’a 6 ans j’ai du voir un psy ?

Fin de l’extrait.

Le 23 mai 2018 à 02:33:12 MoneyMyBro4 a écrit :
Nekfeu cette légende, en plus il a vécu une enfance plus que difficile

Quand il devait bouquiner en cachette pour ne pas qu'on se moque de lui

Les voitures qui se garaient en bas de chez lui

T'es un loser qui se moque d'un artiste accompli et déjà légendaire dans le monde de la musique francophone, t'es vraiment très mal placé pour tourner en dérision le vécu de qui que ce soit. Ta vie se résume à ce forum et aux sites pornographiques sur lesquels tu te masturbes pour échapper à la misère sexuelle.

Le 23 mai 2018 à 02:34:54 ModoSaleCuck a écrit :
Nekfeu, ce lamnda qui rêve d'être rebeu

Un "lambda" qui a à son actif plusieurs single de diamants, de platines et d'or, trois tournées des zéniths et l'appui de tout le rap game francophone (si l'on exclut Guizmo) ?

Nekfeu a de l'affection pour la communauté musulmane et maghrébine parce qu'il a grandit avec des algériens mais aussi parce qu'il a eut l'appui d'une famille musulmane quand il s'est retrouvé SDF.

Il s'est TOUJOURS revendiqué d'origine grecque dans ses morceaux.

Les bobos blancs comme le Règlement ou Kustom qui font des analyses approfondies de rap de branleurs plutôt que de vous cultiver, plutôt que d'étudier l'histoire de la France vous foutez la rage. Surtout lorsque vous lier toute cette merde à des oeuvres cinématographiques qui n'ont rien à voir, vous êtes du genre à regarder l'image et à l'intellectualiser, à boire les paroles comme si c'était de l'eau pure, ça devient très malaisant, vous resterez à jamais des faibles d'esprit passionné de branlette à mes yeux

Le 23 mai 2018 à 02:39:49 Toupize a écrit :
Dans une interview accordée à Closer en Mai 2017 Nekfeu revient sur une anecdote à l´image de son passé trouble.
Voici un extrait de l’interview par Stéphane Comoli:

NEKFEU: Il y avait moi et mon frère. On était dans notre chambre à jouer sur la PS1 que notre grand-père nous a offert. Et la d’un coup on entend un bruit sourd ça faisait genre BAM d’un coup sec !
On était trop choqués ! En fait c’etait mon père qui avait claqué la porte d’entrée ! »

-Le journaliste Stéphane Comoli le regarde avec de grands yeux-

STÉPHANE: La porte a claquée ! Mais ça n’arrive pas tous les jours ca !

NEKFEU: Ouais sur le coup ça nous a trop surpris ! On peut dire que j’ai pas eu une enfance facile. Tu savais qu’a 6 ans j’ai du voir un psy ?

Fin de l’extrait.

ptdrrrrr jpp plu issou la chankla
J'ai posté sur le 18-25 ou sur le -15 ?

Le 23 mai 2018 à 02:44:06 PeauLaiteuse a écrit :
Les bobos blancs comme le Règlement ou Kustom qui font des analyses approfondies de rap de branleurs plutôt que de vous cultiver, plutôt que d'étudier l'histoire de la France vous foutez la rage. Surtout lorsque vous lier toute cette merde à des oeuvres cinématographiques qui n'ont rien à voir, vous êtes du genre à regarder l'image et à l'intellectualiser, à boire les paroles comme si c'était de l'eau pure, ça devient très malaisant, vous resterez à jamais des faibles d'esprit passionné de branlette à mes yeux

J'ai pas parlé d'oeuvre cinématographique, le gogole. Essaye de lire avant de généraliser.

Surtout que je méprise les pseudos-analyses du Règlement et de l'autre rouquin qui ne sont que du remplissage ou des paraphrases de ce qui a déjà été dit par le rappeur en interview.

Que des "Cyborgs" parmi les haineux.

Nekfeu suce incroyablement les étrangers n’empeche

- hey, hey, y'a pas plus fidèle que mes reufs #s-crew, hey.
- j''aime les filles belles qu'ont des seufs qui ne déçoivent pas les zouaves, hey
- j'avoue j'adore trop le le-sty d'Johnny Deeeppp
- Mon amour j'aborde en de-spi ton jolie deeeerche

Le niveau du forum a dramatiquement baissé depuis que je suis parti.

A 6 ans il a du voir un psy !
Quelle mauvaise graine !