Une expérience, Rez en est catégoriquement une, et pas des moindres. Ne serait-ce que par son approche esthétique, qui se veut simplement dénuée d'une quelconque texture, pour laisser place à des graphismes en « fils de fer » très épurés, jouissant finalement d'un charme incroyable. Ce n'est pas ça qui empêche les effets visuels d'abonder au fur et à mesure que l'aventure progresse, et surtout les décors d'être variés et fouillés. On a franchement la sensation de voyager à travers des constructions romaines, chinoises, égyptiennes, indiennes ou même futuristes, en compagnie de notre avatar dont les mouvements dynamisent le tout à chaque portail. Grisant. Et n'oublions pas d'évoquer les couleurs du jeu, aussi psychédéliques et destructrices pour les yeux que celles qu'imaginera plus tard un certain Jeff Minter, créateur de Space Giraffe, c'est dire. Du côté du son, ça sent fort le synthétiseur. Les musiques résolument électro sont toutes composées par des DJ de talent : Keiichi Sugiyama, Mist, Ken Ishii, Joujouka et Adam Freeland. Saluons au passage l'intégralité de la bande-son du dernier parcours que l'on pourrait sans problème qualifier de performance musicale. Mais Rez ne serait pas signé Mizuguchi si nous n'avions pas le don d'interagir avec ces musiques. Ici, l'interaction se produit à chacun de nos tirs, en créant un son de cymbale, une voix robotique ou d'autres timbres étranges qui se mêleront à la musique.
Comme ce sera le cas pour Child of Eden, la grande force du jeu réside dans cette montée en puissance musicale et visuelle qui donne progressivement vie au monde parcouru. Le corps entier de notre avatar bat en rythme tel un cœur tout en dézinguant tout ce qu'il rencontre. La musique électro s'intensifie au même titre que la vitesse à laquelle on avance et les vibrations rythmées de la manette Dreamcast s'ajoutent au tout, pour former une pure expérience synesthétique qui sera considérée pendant longtemps comme l'une des plus intenses qui soient. Pour l'anecdote, Mizuguchi tient fermement à ce que les vibrations de la manette soient primordiales aux yeux des joueurs. Il fera donc fabriquer un « trance vibrator » compatible sur PS2 et vendu exclusivement avec le jeu Rez. Cet accessoire servait à accentuer les vibrations pour encore mieux ressentir le rythme de la musique.