La création d'un son dans BK1
Je connais mal Sakuraba. Comme beaucoup, je l'ai découvert avec son travail sur Valkyrie Profile avant de le retrouver quelques années plus tard grâce à Baten Kaitos. L'OST de ce dernier, parlons-en, ça sera très utile. Il est généralement apprécié, à juste raison. Sakuraba remplit alors le cahier des charges : ravir et définir un "son" Baten Kaitos. D'un côté l'impérial, le noble, porté par des arrangements de contrebasses et de synthés. De l'autre, l'intimiste, le plus souvent des solos de flûtes ou de violons, avec quelques rares "sorties" vers des instruments folkloriques. C'est dans le premier CD que l'on retrouve le plus souvent ce coté grâce à une collection d'hymnes et de balades formidables. Cette face, la plus douce et la plus appliquée, est l'âme musicale de la série, et plus particulièrement les quatre premières pistes, du Prologue Mine au Soul Poetry, en passant par l'immense To The End Of The Journey Of Shining Stars. Mais le disque dans son entier ne comporte que des perles (incroyable Bellflower!) et très peu de déchets.
Le second CD, parsemé d'intermèdes mineurs, est logiquement en retrait. Sakuraba revient à ses Valkyries : des pièces plus sombres, plus étouffantes, avec choeurs de femmes et grandes nappes de synthés à l'appui. Mais curieusement, pour une merveille comme Twisted Time And Distorted Sky, il faut aussi supporter des très lourdauds et indigents Disorder ou Ottom Out. Cette seconde partie est cependant admirable pour au moins deux pièces de choix : Kings Of The Nine Heaven, synthèse virevoltante de tous les instants de bravoures du jeu, et Adressing Stars, morceau lacrymal mais irrésistible malgré sa longueur (7 minutes et des poussières). Si je vous fais l'article de cet OST, c'est que la musique d'Origins se présente comme un prolongement et certainement pas une autre gestuelle musicale.
Beaucoup de reprises dans Origins
En fait, il y a pas mal de redites dans les 62 nouvelles pistes. Comment aurait-il pu en être autrement ? Le compositeur participe à l'effort d'association entre BK1 et BK0, et conserve de fait certaines couleurs musicales qu'il a précédemment imprimé sur tel endroit, tel personnage. Ainsi, l'amateur pourra s'amuser à retracer tous les morceaux ou parties "miroirs", mais arrangés différemment.
Le très pop Bellflower, nourris aux meilleurs thèmes de Chrono Cross, devient le folklo Deep Red Pastures. Sakuraba enlève l'abondance de guitares par des bâtons de pluie rigolos et un piano sautillant. Sun-Light Pierces And Flows, très porté sur le changement de volume et la déstructuration (pas un mouvement qui ne tienne plus de 10 secondes), devient le bien plus sage et impérial Rays Of The Rising Sun Flowing Through. Sakuraba ajoute des choeurs, une rythmique plus martiale, des trompettes, et le tour est joué. Tenkai Flower Temple, valse narquoise tout à fait limpide est ici transformée, avec The Hall Of All Creation, en une petite balade symphonique qui n'aurait pas dépareillé dans les Quatre Saisons de Vivaldi. Sakuraba a ralenti le rythme, placé quelques intermèdes, et apaisé le tout avec un ton plus champêtre. Quant à la très dérangée Chaotic Dance, qui revient ici sous le même nom, certains regretteront peut-être qu'elle soit devenue un pur morceau de hip-hop electronica, à mi-chemin entre les Beastie Boys et Bran Van 3000. En tout cas, elle perd en richesse ce qu'elle gagne en punch.
Bon, on ne va pas faire la liste de tous les morceaux réarrangés. Les joueurs de BK1 auront chacun leur version préférée pour chaque reprise, mais le simple plaisir de découvrir un thème sous une nouvelle lumière est indéniable. Que les autres comprennent bien que ces morceaux ont été repris non seulement pour leurs forces évocatrices, mais aussi pour leurs qualités musicales intrinsèques. Ce sont d'excellentes créations, tout simplement.