La séparation de la terre et du ciel est une clé de voûte de bien des civilisations actuelles et passées. On croise des interprétations dans plusieurs textes sacrés ou symboles culturels. Dans la fondation spirituelle de notre propre monde, ce phénomène apparaît très souvent comme nécessaire à la création de l'homme, indispensable scission entre le divin et le mortel, l'infini et le terrien. La mythologie de Baten Kaitos prend cette idée à rebrousse-poil. C'est précisément grâce à la disparition des océans et la montée des continents dans les cieux que les organismes vivants durent leur salut. Explications.
Peu après la genèse de ce monde, un clash opposa les hommes et leurs dieux. La cause de ce conflit est trouble. Les premiers semblaient demander plus de droits, dont celui de pouvoir justement fouler la terre des seconds. Mais la légende fait surtout cas du danger Malpercio. Ce dieu meurtrier, purement mauvais, aurait désobéi aux autres divinités, et notamment la grande Baleine, icône de la sagesse. La guerre entre Malpercio et le reste du monde, hommes et dieux, faillit pourrir à jamais tout ce qui avait été créé. Une assemblée de magiciens, les Enfants de la Terre, intervint. Elle neutralisa Malpercio, dont la puissance nocive et exacerbée avait déjà condamné l'Océan de la grande Baleine et était en passe d'empoisonner définitivement la terre. Humains, ces mages ne pouvaient tuer définitivement un dieu. La seule alternative fut de séparer sa puissance, de l'injecter dans cinq cartes magiques et d'utiliser ces artifices pour découper l'enveloppe terrestre en différents morceaux, avant d'envoyer le tout rejoindre la voûte céleste. En résultat donc plusieurs continents volants : Sadal Suud, Anuenue, Diadem, Alfard et Hassaleh pour les principaux. Cet archipel aérien est le monde de Baten Kaitos et les magiciens susdits peuvent en être considérés comme les pères fondateurs. Ils donnèrent d'ailleurs naissance à une caste dédiée à la préservation du monde, les Enfants de la Terre, et s'isolèrent pour occuper le seul morceau de terre encore empoisonné par la puissance de Malpercio. Sur les autres gigantesques lopins, les survivants reconstruisirent diverses sociétés et cultures. En réaction à leur nouvel environnement, ils matérialisèrent de grandes ailes sur leur dos, leur donnant des attributs d'anges. Ces membres, appelés Ailes du coeur et dont la taille est proportionnelle à la bonté de l'individu, représentent symboliquement le pont entre les dieux et ces hommes devenus corps célestes.
Voilà, très grossièrement, la préhistoire de ce monde, du moins comment elle nous est relatée lors des premières heures d'Origins, et pendant Baten Kaitos : Les Ailes Eternelles Et L'Océan Perdu (BK1). Le récit de ce dernier nous amenait alors au dénouement final, plus de 1000 ans après ces événements. Avec Baten Kaitos Origins, qui se déroule pourtant 20 années seulement avant BK1, les scénaristes de Monolith font le chemin inverse. Ils mènent le joueur vers le commencement, et chroniquent donc le mythe fondateur décrit plus haut. Le résultat n'a rien d'une redite. Si certains points concordent, le titre piétine allègrement plusieurs éléments et met en lumière un cheminement historique totalement différent, plus complexe et plus cohérent. In facto, c'est le même litige que peut entretenir la mythologie grecque avec la réalité historique. Il y a une base commune mais les Anciens écrivirent des légendes, et ne relatèrent donc pas tous les faits. Le résultat est forcément biaisé, déformé, voire embelli.
De toute façon, sur la seule connaissance des faits historiques exposés plus haut, il y a déjà de quoi se poser quelques questions. Comment Malpercio pouvait-il être aussi puissant ? Pourquoi était-il porté sur la destruction ? Qui étaient les autres dieux à part la Baleine ? Quid des Ailes du coeur : sont-elles vraiment le résultat d'une évolution "biologique" ? Toutes les réponses, et bien d'autres, seront exposées dans Origins.
Cette partie ne serait pas complète sans vous présenter de brève manière le cadre. Pour info, le terme Baten Kaitos est en réalité le nom d'une étoile de la constellation de la baleine. Ce monde à son origine - avant qu'il ne devienne un archipel d'îles flottantes - serait donc vraisemblablement cette étoile éloignée. Espérons que l'homme pourra le vérifier un de ces quatre ! Bref, voici les cinq principaux continents qui naquirent du cataclysme et que vous visiterez dans la première partie du jeu :
Alfard
Disons... le territoire principal et le plus commun. Il est rocailleux et sec, à tel point que sa partie méridionale est faite de déserts et de paysages décharnés par le soleil. Malgré tout, ce fut sans doute sur Alfard que les civilisations survivantes purent se remettre à flot le plus rapidement puisque ce continent abrite l'Empire, première puissance du monde moderne, 1000 ans après la catastrophe. Alfard se trouve au nord de l'archipel, au plus près du soleil.
Diadem
Le continent qui rivalise de beauté avec Anuenue. Diadem est entièrement bordé par des masses très compactes de nuages. A tel point que la zone semble reposer toute entière sur ce matelas cotonneux. Sa colonisation est cependant incomplète et il subiste au nord et au sud des endroits très dangereux. Diadem se trouve au sud-est de l'archipel, c'est un continent limitrophe qui a très vite choisi de fonctionner avec un système monarchique et féodal.
Anuenue
Un autre Eden, un continent qui impressionne par l'abondance et la vivacité de sa flore. C'est d'ailleurs, littéralement, "l'île des fleurs". Une désignation flatteuse qui dissimule la présence d'une vraie plaie : la jungle Holololo. Le nom est aussi comique que l'endroit peut être mortel. Le reste du territoire est plus tranquille et la prédominance du végétal est due à la présence de l'arbre Céleste. Ce majestueux prince vert communique son énergie à l'ensemble du territoire. Anuenue se trouve au sud-ouest de l'archipel.
Sadal Suud
Une île très isolée, à l'extrême-orient de l'archipel. C'est aussi un continent plutôt végétal, avec une alternance de bois, de vallées creusées par les ruisseaux, et de coteaux fruitiers. La civilisation est la moins évoluée de toutes, les habitants vivent simplement de leurs cultures. Sadal Suud comporte quelques zones assez risquées : la forêt Moonguile ou la vallée Nunki.
Hassaleh
Sans doute le continent le plus isolé, au nord-ouest de l'archipel. Il est pour le moins sauvage, en témoigne l'hostile forêt de Nunkood. Ses sites semblent terriblement anciens. Sa civilisation vit recluse et éloignée des mouvements du monde. Si je vous dis de surcroît qu'Hassaleh ne faisait pas partie de BK1, vous comprendrez que cette terre abrite quelques secrets.