Si vous passez votre temps à chantonner "I believe I can fly" en vous prenant pour Spider-Man, vous avez peut-être un point commun avec les développeurs de Gone North qui ont visiblement cherché à mettre en forme leur fantasme aérien dans A Story About My Uncle.
Pour déposer en douceur une fillette dans les bras de Morphée, un père attentionné accepte comme tant d'autres de lui raconter une histoire. Mais là où d'autres choisiraient de parler d'une princesse ou d'une licorne, le héros de A Story About My Uncle préfère raconter l'aventure qu'il a vécu en partant à la recherche de son oncle disparu dans un autre monde bien étrange où des îlots de roche flottent dans les airs. Inventeur merveilleux, tonton Fred n'a laissé derrière lui qu'un équipement étrange permettant à son neveu de le rejoindre et surtout de se balancer comme un petit Spider-Man high-tech.
Un grand grappin implique de grandes envolées
Accessoire coutumier des jeux d'aventure-puzzles à la première personne, le gant grappin sera ici votre meilleur ami et un jouet fort amusant puisqu'il permet de projeter une "liane" d'énergie capable de s'accrocher à n'importe quelle surface. Après quelques upgrades, le joueur obtient la possibilité de projeter 3 arcs successifs au cours d'une même envolée, le gant se rechargeant automatiquement dès qu'il touche le sol (ou que l'on cible des cristaux dans le dernier tiers du jeu). Si on parle de liane pour illustrer l'idée, il faut toutefois préciser qu'on ne se retrouve pas simplement suspendu mais plutôt dans un état de flottement, un peu en apesanteur. Le grappin attire le joueur vers son point d'ancrage tout en lui permettant de flotter dans les airs et de conserver une partie de son inertie une fois le fil énergétique tranché, ce qui permet de se propulser plus avant, puis de s'accrocher à un nouveau point d'ancrage. Plus tard (un peu trop d'ailleurs), un autre accessoire viendra compléter l'attirail : des bottes fusées utilisables une fois par vol et causant une puissante accélération. En somme, tout ce qu'il faut pour progresser de bloc en bloc ou de plate-forme mouvante en stalactite en chute libre.
Pas mal d'idées, pas assez de temps
Filer dans les airs à l'aide du grappin est un passe-temps particulièrement agréable, Gone North ayant réservé au joueur quelques séances de voltige pépère histoire qu'il puisse profiter pleinement de ses jouets, aussi bien à un rythme de croisière qu'à toute vitesse si le cœur lui en dit, enchaînant les sprints et les sauts en prenant à peine le temps de toucher le sol. Des temps de pause qui viennent s'intercaler entre des phases d'exploration où il faudra au choix faire preuve d'un peu de sens de l'orientation pour repérer son chemin dans le noir ou d'adresse et de vigilance pour ne pas se viander dans sa progression au sein d'un environnement qui ne laisse le grappin s'ancrer que sur certaines zones précises. Gone North a ainsi fait l'effort de proposer un peu de variété dans l'usage du grappin. Malheureusement, aucune idée n'a vraiment le temps de montrer pleinement son potentiel. A Story About My Uncle est en effet très court (comptez 4h30 pour une première traversée), ce qui laisse peu d'occasions au titre pour exploiter à fond son concept. Les fameuses bottes à propulsion ne seront par exemple disponibles que dans la seconde moitié du jeu, quant aux cristaux de recharge qui accompagnent les plus longues envolées au cours desquelles on ne touche plus le sol, il ne sont présents que dans le dernier tiers.
Skills hasardeuses
Le titre compense néanmoins ce défaut en se montrant plutôt adapté aux amateurs de speed run qui profiteront de ces environnements relativement ouverts pour tenter de dénicher voies détournées et opportunités de folles cascades. Un mode Time trial leur est d'ailleurs dédié. Ceux que la performance ne passionne pas peuvent en revanche considérer que lorsqu'ils seront arrivés au bout de l'histoire, ils ne reviendront sans doute jamais au jeu qui, une fois l'effet de surprise passé, expose un peu trop vite ses limites. En outre, quelques imprécisions dans la physique peuvent parfois rendre la progression confuse et une part de bricolage de dernière seconde remplace le plus souvent les skills pures et dures. Ce qui est assez paradoxal dans la mesure où, précisément, une boulette de dernière seconde peut également vous condamner à l'échec. Si par exemple vous avez le malheur de lâcher prise un rien trop tôt, vous perdrez vos chances d'accrocher la prochaine plate-forme. Or il n'est pas toujours évident de juger au pixel si on est ou pas suffisamment près. Pas de crise de nerfs à prévoir, mais il peut arriver à A Story About My Uncle de se montrer un tantinet frustrant.
On terminera sur le design global du titre, tantôt charmant quand il expose un peu de verdure ou un bout de ciel, tantôt banal quand il vous plonge dans un dédale de cavernes qui finissent par se parer d'un air un peu générique. Mais si l'aspect général du soft de Gone North est séduisant, celui des "hommes-grenouilles" est en revanche carrément repoussant. Si leur nom n'est déjà pas une invitation à la rêverie, leur aspect confirme les craintes. Ils sont ceci dit à l'avenant d'un scénario un peu enfantin qui, en dépit d'un bon fond, souffre surtout de doublages sans âme. Le héros ponctue en effet la progression de quelques monologues balancés froidement, parfois suivis de commentaires de sa fille. Le résultat laisse de marbre. Là encore, on sent qu'une bonne idée n'a pas été menée à son terme.
Points forts
- Les envolées aériennes
- De bonnes sensations
Points faibles
- Trop court (4h30 environ)
- Des idées sympas mais très peu exploitées
- Des imprécisions
- Le design des hommes-grenouilles assez flippant
Pour son premier jeu, Gone North Games tire une chouette carte en mettant dans les mains du joueur ce grappin magique. S'envoler de plate-forme en plate-forme offre d'agréables sensations malgré un manque de constance de la physique qui joue parfois des tours. Dommage toutefois que sur la courte durée de A Story About My Uncle, on ne fasse qu'effleurer des mécaniques qui mériteraient d'être plus développées, car au final, on a le sentiment d'avoir à peine commencé un voyage plaisant alors qu'on est déjà arrivé à la gare.