Le jeu vidéo n'est plus tout jeune et a connu, comme vous vous en doutez, nombre d'évolutions pour arriver là où il en est aujourd'hui. Mais savez-vous à quoi ressemblait un jeu vidéo il y a de ça 30 ans ? Non ? Eh bien, c'est ce que vous propose de découvrir Evoland à travers un jeu de rôle / action fortement inspiré par plusieurs ténors japonais et occidentaux. Idée lumineuse s'il en est, malheureusement ternie par plusieurs problèmes dont on peut difficilement passer outre.
Il était une fois un jeu développé en moins de 48 heures par un passionné, lors du Ludum Dare et dont la mouture qui nous intéresse ici n'est qu'une version... évoluée incluant le passage à la 3D et donc à l'ère 32 bits. Le principe d'Evoland réside par conséquent davantage dans son idée directrice que dans la volonté d'offrir un véritable gameplay aux joueurs. Ainsi, si le jeu s'évertue à apporter de l'originalité via les évolutions notables du média apparues dans les années 80 et 90, le paradoxe veut que de cette évolution naisse une grande frustration. En effet, Evoland effectue une mue, mais uniquement durant ses 30 premières minutes au terme desquelles il trouve sa forme définitive. De fait, le début du jeu est un pur régal puisqu'on passe allègrement d'un titre en noir & blanc pixélisé à son homologue en couleurs, de déplacements limités à une panoplie plus vaste, etc. Toutefois, on reprochera aux développeurs de ne pas avoir inclus quelques indications concernant les grandes étapes mises en avant via des dates ou des anecdotes.
Des références en pagaille
En somme, Evoland se savoure si l'on a suffisamment de bagages pour l'apprécier. En effet, si le soft a pour vocation de faire découvrir aux plus jeunes ce qu'était le jeu vidéo du temps de la NES et la SNES, il s'adresse davantage à ceux qui connaissent les références et qui auront donc connu l'évolution au centre du titre. Bien entendu, lesdites références, allant de Zelda à Secret of Mana aux Final Fantasy en passant par Le Seigneur des Anneaux ou Blade Runner, sont accessibles au plus grand nombre, mais si on fait abstraction de cette accessibilité, on se rend rapidement compte que ce côté référentiel représente au final la seule carotte pour le joueur. Il est certain qu'avec une aussi petite structure de développement (deux personnes), nous ne pouvions nous attendre à un jeu vaste et ambitieux, du moins dans sa longueur, car dans le fond, il l'est bel et bien. Mis une fois passé par les grandes étapes liées à l'évolution du RPG (apparition de l'inventaire, la map, combat au tour par tour, mode 7...), on se retrouve avec un schéma plus classique.
A ce stade, on s'amusera alors à chercher tous les coffres recelant chacun une petite réflexion sur des évolutions moins notables (apparition des noms des lieux, des PNJ) n'impactant pas le gameplay à proprement parlé. Bien entendu, il sera aussi question de trouver toutes les références cachées pour son plaisir personnel, tout en se remémorant de délicieux souvenirs vidéoludiques. De plus, si en continuant l'aventure, on passera d'un schéma à la Zelda (période Super NES) à un donjon s'inspirant davantage de Diablo, on regrettera de ne pouvoir constamment switcher entre l'univers 2D et 3D. Ceci sera néanmoins possible, mais à un endroit bien précis afin d'amener la résolution d'énigmes. L'idée est excellente mais paradoxalement, elle apporte autant de satisfaction que de frustration dans le sens où on aurait apprécié le faire à tout instant. On devra alors se contenter de jolis clins d'oeil à Final Fantasy VII, à la Grande Liste des Clichés du RPG ou de la recherche d'une vingtaine de cartes, indispensables pour profiter d'un jeu de cartes inspiré du Triple Triad apparu dans Final Fantasy VIII. Bien entendu, on aurait aimé pouvoir y jouer en online entre amis mais on ne pourra blâmer Shiro Games pour cette absence, compte tenu du fait que cela aurait impliqué des coûts supplémentaires.
Quelques soucis et beaucoup de nostalgie
En définitive, Evoland profite de bien des qualités dont la dernière en date est la gestion du GamePad puisque jusqu'alors, le jeu n'était jouable qu'au clavier. Notez toutefois que ce n'était pas un problème en soi dans le sens où la simplicité de la maniabilité, ne requérant que cinq touches, est parfaitement adaptée au concept. Au-delà de ça, on a souvent l'impression, en l'état, d'avoir droit à un embryon de jeu qui ne demande qu'à éclore pour pleinement donner ce qu'il a à offrir. Ainsi, on trouvera étrange que les combats au tour par tour (dont la fréquence est trop élevée) n'utilisent aucun point de magie, ceci rendant donc caduque la moindre notion de difficulté. Dans le même ordre d'idées, seules les potions de soin sont utilisables durant ces phases alors que ce n'est nullement utile puisque Kaeris, la demoiselle accompagnant le héros Clink, peut user d'un sort de soin comme bon lui semble. A l'inverse, on eut aimé en profiter durant les séquences singeant les Zelda sauf qu'ici, ce n'est pas prévu. Bref, ces quelques errances ne sauraient nous empêcher de poursuivre l'aventure le sourire aux lèvres, mais il y avait tellement à faire avec un tel projet qu'on ne peut au final qu'être déçu.
Points forts
- Le concept frais et original
- L'humour
- Les références
- Le jeu de cartes bonus
Points faibles
- L'évolution ne se déroule que durant les 30 premières minutes de jeu
- On retrouve certains défauts des jeux dont Evoland s'inspire
- Quelques erreurs de conception
- La durée de vie (entre 3 et 6 heures)
- Le prix trop élevé
- Aucun document annexe sur les périodes charnières du jeu vidéo ou les inspirations des développeurs
Si Evoland part d'un excellent concept, ce dernier s'estompe malheureusement au bout de trente minutes pour laisser la place à un jeu plus lambda. Bien que le tout soit bourré d'humour et milite pour le côté référentiel qui engendre une nostalgie fort agréable, le projet s'enferme de lui-même dans un carcan difficilement accessible à toute une frange de jeunes joueurs, qui ne saisiront peut-être pas tous les clins d'oeil. De plus, le titre est trop cher compte tenu de sa faible durée de vie et montre quelques soucis propres aux jeux dont il s'inspire. Dommage, vraiment dommage, car avec un tel potentiel, un temps de gestation plus important et une ambition plus grande, nous aurions sans doute tenu là un petit bijou d'originalité.