Originellement sorti sur borne arcade en 1989, Cadash est un jeu d'action-plates-formes assez différent de ce qu'on avait l'habitude de voir à l'époque. En effet, si l'univers d'heroic-fantasy dans lequel le joueur évolue était déjà très en vogue, il faut bien avouer que peu de titres pouvaient se vanter d'incorporer de nombreux éléments issus de RPG. Cadash sera porté en 1991 sur PC Engine et une année plus tard sur Megadrive, et c'est sur cette dernière version que nous allons nous pencher présentement. Aiguisez vos glaives et préparez vos meilleures invocations, des orques, harpies et autres dragons n'attendent que vous pour se livrer à une lutte sans merci.
Il était une fois le royaume de Dirzak, un havre de paix qui respire la joie de vivre et où les habitants mènent une existence paisible à l'abri des soucis. Il fait tellement bon y vivre que l'on oublierait presque qu'il y a des milliers d'années de cela, ces terres verdoyantes ont été le témoin d'une guerre sanglante opposant les hommes aux monstres. Vaincus sur le champ de bataille et blessés dans leur amour-propre, les vilains envoyés des ténèbres n'eurent d'autre choix que de battre en retraite et d'aller trouver refuge dans le monde souterrain, un endroit sombre et malfamé à l'abri des regards. Terrés dans leur repère, ils n'eurent de cesse de fomenter leur revanche en formant une armée et en développant des nouvelles techniques de guerre. Et soudain, ils sont passés à l'attaque, ont répandu chaos et désolation sur leur passage et n'ont fait qu'une bouchée des chevaliers de la garde royale qui n'avaient plus connu de guerre depuis des milliers d'années. Pour asseoir sa domination, Balrog, puissant mage et chef des monstres, décide de kidnapper la princesse Salassa et de l'enfermer au plus profond de son château. Bien conscient de l'urgence de la situation, le roi de Dirzar réunit ses quatre meilleurs guerriers et les somme de partir au combat.
Hop hop hop ! Attendez une minute ! Comment ça quatre guerriers ? Pourquoi je n'en vois que deux moi ? Voilà une remarque très pertinente. Il est important de préciser que la version Megadrive se distingue de l'originale sur de nombreux points. Si la plupart d'entre eux sont relativement anecdotiques (en tout cas suffisamment pour qu'on ne prenne pas la peine de les énumérer ici), la grosse différence est que deux des quatre protagonistes ont tout bonnement disparu. Nul ne sait si cela est dû à un choix réfléchi de la part des développeurs, d'un manque de temps ou d'une contrainte technique. Mais ce qui est sûr en revanche, c'est qu'il faudra vous contenter de deux personnages, à savoir deux grands classiques des jeux moyenâgeux : le puissant barbare à la musculature saillante et le vieux mage à la chevelure grisonnante. Comme on peut s'en douter, chacun d'entre eux possède des capacités bien distinctes. Grâce à son agilité et sa grande puissance offensive, le barbare ravira les néophytes qui veulent commencer à s'amuser sans trop se prendre la tête. Bien que très lent, peu résistant et doté d'une faible puissance physique, le magicien est en revanche capable de lancer des sortilèges dévastateurs. Son maniement est donc un peu plus compliqué et il convient de le réserver aux joueurs expérimentés.
Loin du jeu de plates-formes classique, Cadash se range plutôt dans la catégorie des jeux d'action-aventure mâtinés de beat'em all et empruntant des éléments de RPG. Vous voilà donc dans un vaste monde où les différentes zones sont toutes reliées entre elles. Ainsi, au fur et à mesure de sa progression, le joueur dialoguera avec des villageois, explorera des donjons, vaincra des boss et mettra la main sur différents objets qui lui permettront de débloquer des nouveaux chemins (il pourra se déplacer dans l'eau où encore se transformer en nain pour se faufiler dans des endroits exigus). Néanmoins, il faut bien admettre que vous ne jouirez pas d'une grande liberté d'action, le jeu ne dévoilant jamais qu'un seul et unique chemin à suivre à la fois et minimisant au possible les énigmes et l'exploration. En fait, la règle d'or est la suivante : « Il faut aller vers l'est ». De cette façon, vous tomberez sur un donjon rempli de monstre, puis un nouveau village où reprendre des forces et faire des emplettes, puis un nouveau donjon etc.
Lors des phases de combat, Cadash fait énormément penser à un beat'em all à la sauce Altered Beast. Comprenez par là que vous devrez vous frayer un chemin à travers des hordes de monstres générés aléatoirement, qui vous assailliront de tous côtés. Etant donné que nous avons affaire à un titre développé à l'origine pour borne arcade, c'est la simplicité qui est à l'honneur. Ainsi, nos héros sont capables de marcher, de sauter et de s'accroupir tout en donnant des coups d'épée (ou de bâton pour le mage) dans chacune de ces trois positions. Ce n'est pas énorme mais cela suffira à rosser la plupart de vos opposants : certains protègeront une partie de leur corps à l'aide d'un bouclier, d'autres voleront dans les airs ou ramperont sur le sol. Les deux protagonistes sont néanmoins très rigides et peu maniables, ce qui ne vous permettra pas d'exploiter énormément les possibilités offertes par vos réflexes.
Cela est d'autant plus vrai lors des affrontements face aux boss de fin de donjon : des ignobles créatures plus ou moins inspirées de divers contes mythologiques. Ces derniers sont très imposants à l'écran et attaquent à la vitesse de l'éclair, aussi n'espérez pas compter sur vos réflexes bruts et envisagez plutôt d'étudier et d'apprendre leurs mouvements par cœur. C'est d'ailleurs ici que le magicien dévoilera enfin l'étendue de ses capacités. Ses sortilèges ont en effet l'avantage d'être surpuissants et de balayer une grande partie de l'écran, ce qui est idéal contre les boss, dont les sprites sont de taille imposante. Votre barre de HP étant très grande, n'ayez d'ailleurs pas peur d'user de vos magies à tort et à travers lors de l'exploration des donjons. Soulignons également que leur utilisation n'est pas spécialement aisée : il faut garder la touche d'attaque enfoncée, attendre que le symbole du sort apparaisse au dessus de votre tête, le sélectionner et puis finalement le lancer. La meilleure solution reste encore de les déclencher au petit bonheur la chance, et de cette façon, vous annihilerez la plupart des adversaires sans même vous en apercevoir.
Finalement, Cadash puise son originalité dans la possibilité de sillonner l'intégralité du monde de Dirzak simultanément avec un ami. Mais le hic, c'est que cela rendra la progression beaucoup plus pénible. Pourquoi ? Parce que les deux protagonistes feront alors « compte à part ». Ainsi, les vies, crédits, points d'expérience et pièces d'or ne seront pas communs aux deux joueurs, lesquels devront les récolter chacun de leur côté. Et alors qu'en solo, la progression est plutôt fluide, attendez-vous cette fois à vous adonner à quelques joyeuses séances de leveling et à devoir faire des économies pour acheter l'armure ou l'arme tant convoitée dans l'armurerie du coin. Avant de se rendre en territoire hostile, il est également conseillé de dévaliser (au sens figuré) les boutiques pour accumuler un maximum de potions et autres antidotes qui s'avèreront extrêmement utiles. Mais le gros problème de Cadash, c'est qu'il est impossible de sauvegarder sa progression… Faire du leveling, c'est bien beau, mais tout reprendre à zéro à chaque mise sous tension de la console, avouons que ce n'est pas très agréable. Voilà qui est vraiment dommageable et qui retire beaucoup d'intérêt au soft.
- Graphismes13/20
Adaptation relativement fidèle de la version arcade, Cadash n'en reste pas moins visuellement dépassé quand on le compare aux meilleures productions Megadrive. Le jeu est en effet terne, extrêmement pixellisé et les environnements souffrent d'un manque évident de détails. Néanmoins, on appréciera que les sprites, aussi bien ceux des protagonistes que des ennemis (plus particulièrement des boss), soient très grands à l'écran. Les décors traversés sont également diversifiés et vous transporteront dans des lieux divers et variés : geôles d'un château, sinistre tanière de monstres, volcan rempli de lave ou encore cimetière infesté de morts vivants. Dommage que les animations soient aussi minimalistes et nous rappellent par moment la médiocrité d'un Last Battle.
- Jouabilité13/20
Loin d'un jeu d'action-aventure classique, Cadash emprunte de nombreux éléments de RPG en saupoudrant le tout de phases de combat se présentant sous la forme de beat'em all. Ainsi, chaque monstre tué vous rapportera de l'expérience destinée à vous faire monter de niveau et ainsi augmenter votre barre de PV et de HP. Pour ce qui est des capacités offensives et défensives, il faudra améliorer votre équipement dans les armureries qui se trouvent dans chaque ville. Les deux protagonistes se jouent de façon très différente mais ont un point en commun : leur rigidité qui transforme les quelques rares phases de plates-formes en véritable calvaire. Le gameplay rappelle à nouveau un certain Last Battle, et avouons-le, la comparaison n'est pas franchement flatteuse.
- Durée de vie13/20
Au niveau de la longévité, Cadash présente un paradoxe plutôt étrange. Bien qu'il porte l'étiquette d'un jeu d'exploration dans un environnement ouvert, vous n'aurez que peu de liberté d'action et vous contenterez de suivre le seul et unique chemin qui se dresse devant vous. De plus, de longues séances de leveling seront nécessaires et vous n'aurez pas la possibilité de sauvegarder votre progression. Un deuxième joueur peut vous prêter main forte mais cela risque juste de vous compliquer encore plus la tâche. En effet, vous partagerez absolument tout : nombre de vies, crédits, points d'expérience, etc. Mieux vaut donc jouer seul que mal accompagné.
- Bande son13/20
Il ne faut pas beaucoup de temps avant de comprendre ce que les compositeurs ont tenté d'accomplir, à savoir donner à leur bande-son toute la puissance et l'envergure de celle d'un film d'heroic fantasy. Malheureusement, le processeur sonore de la Megadrive n'a jamais brillé par son potentiel et ce n'est pas Cadash qui y changera quoi que ce soit. Certains sons sortent tout droit d'une autre galaxie, vous feront sursauter et briseront totalement l'ambiance que les développeurs ont tenté en vain d'installer. Toutefois, même s'ils ont sans doute vu un peu trop grand, on ne peut qu'applaudir l'effort.
- Scénario13/20
Expédié en quelques lignes en début de partie, le scénario très classique peut se résumer de cette façon : un vil et infâme sorcier répand le chaos sur le royaume de Dirzar et il vous revient d'aller le corriger et tant que vous y êtes, de libérer la princesse qu'il a kidnappé. Vous aurez la possibilité de parler à de nombreux villageois, même si ces dialogues ne seront pas vraiment passionnants puisqu'ils se contenteront de dévoiler de vagues informations sur les différentes étapes de la quête que vous êtes en train d'accomplir. Rien de bien fascinant donc, mais c'est tout de même mieux que dans la plupart des jeux de l'époque.
Cadash est l'exemple type du jeu rempli de bonnes intentions mais qui n'est pas à la hauteur des trop nombreux et ambitieux objectifs qu'il s'est fixés. Il faut dire qu'il était à l'époque assez rare de voir un beat'em all se dérouler dans un mode ouvert et reprendre à son compte quelques éléments de RPG. Malheureusement, les moyens mis en œuvre ne sont pas à la hauteur. Graphismes moyens, jouabilité limitée, scénario relégué au second plan et progression qui exige des séances de leveling sans offrir la possibilité de sauvegarder sa partie, tout cela empêche Cadash d'entrer au panthéon très sélectif des hits intemporels. Si toutefois vous êtes friand de ce style de jeu, nous ne saurions trop vous conseiller le très bon Wonder Boy in Monster World, sorti sur la même machine et qui est, lui, une valeur sûre.