L'histoire se déroule dans le monde fantastique de Dragotaka. Humains et dragons y vivaient en paix et en harmonie, jusqu'à ce que le perfide dragon Elga décide de trahir le Grand Seigneur Dragon en levant une armée destinée à anéantir l'humanité. Durant ce conflit, cinq héros humains se distinguèrent en aidant les nobles Seigneurs Dragons à vaincre le maléfique Elga et à l'enfermer dans une forteresse bien gardée. Le problème, c'est que mille ans plus tard, une mystérieuse sorcière a la mauvaise idée de libérer Elga de sa prison, déclenchant une nouvelle ère de ténèbres sur le monde de Dragotaka. Corrompues par cette force maléfique, les créatures inoffensives qui peuplaient le monde commencent à attaquer les humains. Vu et revu (et présentant de troublantes similitudes avec celui des Chroniques de la Guerre de Lodoss), le scénario de Dragonica a toutefois le mérite d'exister et de s'illustrer via une jolie cinématique d'introduction entièrement traduite en français.

Puis vient le moment de créer votre personnage. Vous devez effectuer un choix parmi quatre classes : le guerrier, le mage, l'archer et le voleur, sachant que chacun de ces archétypes propose une spécialisation une fois le niveau 20 atteint. Ainsi, le voleur pourra devenir acrobate ou assassin. Et ce n'est pas tout : au niveau 40, votre personnage connaîtra une seconde évolution dans la voie que vous lui aurez choisie. L'assassin, par exemple, deviendra un ninja. Typique des MMORPG coréens, ce système d'évolution reste plaisant, même si les férus de construction de personnages trouveront ici matière à reproche. Vos différentes caractéristiques (force, intelligence, vitesse...) évoluent en effet automatiquement à chaque gain de niveau, vous contraignant à vous rabattre sur les arbres de compétences pour y trouver un certain espace de liberté. Ces arbres vous permettent d'acquérir et d'améliorer des compétences spécifiques à votre classe (vous obtenez donc un arbre supplémentaire aux niveaux 20 et 40). Dommage qu'il y ait trop de compétences "incontournables", qui nuisent quelque peu à la variété des builds. Quelques mots, enfin, sur la personnalisation graphique : aussi sommaire que de coutume (avec seulement quelques choix de visages et de coupes de cheveux), elle souffre surtout du manque de variété des armes et des armures.

Dragonica est donc un MMORPG classique dans ses fondements, mais il se pare d'une vue latérale avec scrolling horizontal qui lui confère une grande part d'originalité. L'application de ce type de représentation à un jeu massivement multijoueur a déjà été expérimentée avec succès par Maple Story, à ceci près que Dragonica est réalisé en 3D. Cela lui permet d'afficher des décors colorés et chatoyants dans lesquels les personnages peuvent se déplacer un peu en profondeur, ou encore utiliser des échelles ou des trampolines pour passer d'un plan à l'autre. Il faut un petit temps d'adaptation pour s'y faire, mais vous finirez par retrouver vos réflexes de vieux routard du jeu de plates-formes en 2D, d'autant que le level-design se montre suffisamment convaincant pour susciter l'adhésion des plus réfractaires. Le problème, c'est que ce type de représentation ne va pas sans son lot de contraintes. Le monde est scindé en une pléiade de petites zones de jeu reliées entre elles par des téléporteurs, si bien qu'on n'a pas vraiment l'impression d'évoluer dans un MMO. Corollaire à cela : la progression très linéaire vous condamne à suivre toujours le même cheminement pour vous rendre à un endroit donné ; il vous faut donc supporter de pénibles allers-retours, même si des parchemins permettent de se déplacer plus rapidement.

Mais là où Dragonica marque des points, c'est indéniablement au niveau des combats, qui s'inscrivent dans la tradition des beat'em all de la grande époque. Si vous disposez d'une attaque de base qui vous permet de porter l'essentiel de vos coups, ainsi que de diverses compétences qui viennent renforcer votre puissance de feu, c'est votre capacité à placer des combos qui fera souvent la différence. Vous avez en effet la possibilité d'enchaîner, sans aucun temps mort, les coups et les pouvoirs de façon à causer le plus de dégâts possible à vos adversaires. Ainsi, après avoir propulsé un ou plusieurs ennemis dans les airs, vous pouvez opter pour un combo aérien ou bien le(s) frapper au sol pendant qu'il(s) se relève(nt) péniblement de sa (leur) chute. Il en résulte un aspect arcade aussi réjouissant que confus, surtout en groupe. Mais la dynamique des combats ne s'arrête pas là. Comme les monstres que vous affrontez surgissent souvent en nombre, il vous faut faire preuve d'une dextérité inhabituelle pour ne pas vous laisser submerger : vous devez reculer, charger, sauter, esquiver... Dommage que l'ensemble de ces actions doivent être effectuées par le biais du clavier, qui n'est tout de même pas l'outil le plus approprié. Il vous arrivera souvent de vous emmêler dans vos raccourcis, d'autant qu'ils ne sont pas pleinement paramétrables.

Le problème de Dragonica, c'est que sous sa forme originale et attrayante se cache une vérité qui l'est beaucoup moins : le jeu est tout entier centré sur le monster bashing. Pour commencer, les quêtes secondaires sont aussi ridicules que décevantes : plus bavards que de coutume, les PNJ finissent systématiquement par vous envoyer tuer des monstres, même si cela n'a qu'un rapport très secondaire avec ce qu'ils viennent de raconter. Plus grave : la trame principale vous conduit très régulièrement à des points d'intérêt nommés Zones de Missions, qui consistent à aligner des séries de donjons instanciés se ressemblant tous plus ou moins, truffés de groupes de créatures à éliminer à la chaîne. Amusantes au début, mais vite lassantes en raison de leur caractère ultra-répétitif, ces missions instanciées ont toutefois un double intérêt : elles vous permettent de récolter des items intéressants et suscitent le jeu en groupe. Chaque mission se conclut en effet par un affrontement contre un boss qu'il est préférable de négocier à plusieurs, d'autant qu'il est accompagné de sbires qui ne sont autres que les boss des missions précédentes ! Et au cas où vous ne seriez pas rassasié par ces instances, un compteur situé à droite de l'écran vous incite à poursuivre votre farming intensif en vous offrant une récompense au bout de 100, 300, 500, 700 et 1000 créatures massacrées

Que le monster bashing vous soit servi à toutes les sauces, ce n'est pas vraiment une surprise en soi dans un MMORPG coréen, mais on attendait sans doute autre chose de Dragonica. La vraie question, c'est de savoir si le jeu propose une véritable alternative à ceux qui finiraient par se lasser de ces séances de grind intensives. Et là, c'est un peu la soupe à la grimace. Le traditionnel système d'artisanat se résume ici à sa plus simple expression, avec la possibilité de cuisiner des ingrédients... trouvés sur les monstres. Vous pouvez également renforcer une pièce d'équipement, l'enchanter ou révéler ses propriétés spéciales : de ce côté-là les options ne manquent pas, même si elles restent assujetties à des taux d'échecs destinés à favoriser l'arrivée de l'Item Shop. Quant au mode PvP, il ne nous a pas vraiment convaincus : très classique, il consiste à livrer des matchs à mort (seul ou en groupe) dans des arènes sans grande originalité. En attendant de pouvoir prendre part à des guerres de guilde, il garde cependant un petit intérêt : celui de gagner des points de combat (CP) servant à acquérir de l'équipement spécifique chez son maître de classe. Les autres fonctionnalités (système de couple, housing, boutiques) ne sont pas assez développées et confirment que Dragonica n'a pas grand-chose d'autre à offrir que des heures de farming intensif. Par chance, il le fait plutôt bien.