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Test No More Heroes

No More Heroes : Trailer

No More Heroes
29 575 vues
Profil de pixelpirate,  Jeuxvideo.com
pixelpirate - Journaliste jeuxvideo.com

Après l'inénarrable Killer7 sur Gamecube, Goichi Suda récidive sur Wii en nous offrant à nouveau un trip violent et décalé. Plus accessible que son prédécesseur, No More Heroes n'en reste pas moins une expérience unique, baignant dans la pop-culture et transpirant la cinéphilie par tous les pores. Quel plaisir que de retrouver une oeuvre de cette trempe sur une console qui n'a pas toujours été aussi gâtée de la part des éditeurs tiers.

No More Heroes

Travis Touchdown est un otaku comme mille autres : il passe ses journées à regarder des dessins animés japonais, à nourrir son chat et à soigner son look. Il ne quitte guère son motel minable que pour enfourcher son roadster et aller s'acheter les dernières fringues à la mode. Comme il faut bien faire quelque chose de sa vie, l'acquisition d'un sabre laser sur E-Bay lui a permis dernièrement de se lancer dans la profession d'assassin. Mais tuer des gens l'ennuie profondément, et il aurait eu du mal à sortir de sa vie de raté s'il n'avait rencontré cette fille au Death Match Bar. Agent canon de l'United Assassins Association, elle lui a confié un contrat qui l'a propulsé 11ème meilleur assassin de Santa Destroy. Et bien entendu, Travis n'a pas envie de s'arrêter en si bon chemin, ne serait-ce que dans l'espoir d'une nuit avec la belle. Il se met donc en tête de devenir le numéro 1 en éliminant les dix autres.

No More Heroes
Pas de doute : Travis est un véritable otaku.
No More Heroes est architecturé autour de dix chapitres, consacrés chacun à l'élimination d'un des dix tueurs à gages. Chacun de ces dix assassins est un peu le "boss" final d'un niveau truffé de yakuzas à occire au préalable, même s'il paraît un peu réducteur de parler en ces termes étant donné l'abandon des conventions qui caractérise le jeu. Branché, grotesque, torturé, extravagant ou déjanté : chaque boss possède un style et une personnalité uniques. Certains sont très tarantinesques (on pense au Dr. Peace ou à Shinobu), d'autres sont directement issus de la culture manga (Death Metal, Holly Summers) ou des comics américains (Destroyman). Chacune de ces rencontres bénéficie d'une mise en scène originale et soignée, et se voit précédée de préliminaires tout simplement jouissifs, que l'on passera sous silence pour éviter de vous priver du plaisir de la découverte. Les affrontements eux-mêmes sont autant de moments d'anthologie : on n'avait pas pris autant de plaisir à lutter contre un boss depuis Shadow of the Colossus. On regrettera par contre la disparition de l'aspect gore présent dans la version US du jeu : les démembrements et les gerbes de sang ont disparu, emportant avec eux la violence kitsch des mises à mort et leur dimension transgressive à la Takashi Miike.

No More Heroes
Le parti pris graphique risque une fois de plus de diviser les foules.
Grasshoper a toutefois réussi à préserver un certain esthétisme, puisque les effusions de sang ont été remplacées par des effets rétro très stylés : les ennemis se dispersent dans une explosion de pixels avant de retomber en poussière sur le sol, pendant que des pièces de monnaie sortent de leur corps pour aller rejoindre notre cagnotte. C'est à la fois insolite et nihiliste, décalé et jubilatoire. Cet aspect rétrogaming est d'ailleurs omniprésent, des menus du jeu aux séquences de power-up, en passant par l'incursion dans les décors d'icônes tout droit sorties de nos vieux Atari 2600. Le style graphique de No More Heroes est un hommage au pixel, aussi bien au niveau artistique que technique : la 3D volontairement obsolète, faite de modèles anguleux et de textures minimalistes, n'est qu'un prétexte à la mise en place d'un aspect visuel inimitable hérité de Killer7. Dans les faits, le cel shading se révèle l'arme idéale pour renforcer le rendu comic-book kitsch tout en fluidifiant l'animation. Le jeu témoigne d'une vraie démarche artistique héritée de Eric Chahi, où priment la mise en scène et l'aspect cinématographique.

No More Heroes
La conduite de la moto est plutôt rigide.
A côté de ça, Suda 51 a réussi le tour de force d'exploiter de façon tout à fait concluante les capacités de la Wii : la jouabilité à la Wiimote et au Nunchuk, qui ne souffre d'aucune critique, est au centre d'un système de combat à la fois simple et complet, mais surtout très dynamique. Travis dispose de plusieurs types d'attaques portées à l'aide de son katana laser, mais il bénéficie aussi de mouvements complémentaires destinés à se protéger ou à percer les défenses des ennemis : coup de pied, parade, esquive, prise de lutte... Un système de lock plutôt convaincant vient en appui à cette panoplie de mouvements. Mais là où les combats deviennent particulièrement fun, c'est qu'on ne peut faire taire définitivement ses adversaires qu'au terme de finish moves facilement exécutables : il suffit de bouger la télécommande dans le sens indiqué par la flèche. Un gameplay aussi simple que grisant quand on commence à évoluer parmi les ennemis en enchaînant les coups fatals et en ne laissant plus que cendres derrière soi. Ceci dit, No More Heroes sait toujours rappeler le joueur à l'ordre en assaisonnant cette épopée meurtrière d'une bonne dose de dérision. En témoigne la façon de recharger votre sabre laser en agitant frénétiquement la Wiimote, tandis qu'à l'écran Travis prend une posture évoquant furieusement un geste d'onanisme.

No More Heroes
L'utilisation de la Wiimote est toujours pertinente.
Jusque-là, No More Heroes fait donc un sans-faute, mais l'expérience de jeu incomparable qu'il procure se voit hélas ternie par un curieux parti pris. Entre chacun des dix chapitres, Travis doit déambuler dans Santa Destroy à la recherche de petits boulots pour financer son prochain combat. Il faut alors parcourir à pied ou en moto, à la manière d'un GTA, une ville aussi vaste que peu animée. En outre, si les petits jobs "réglo" (ramasser des noix de coco, tondre la pelouse...) se révèlent plutôt amusants et apportent la touche de dérision que l'on évoquait plus haut, il n'en est pas de même des missions d'assassinat, rébarbatives et répétitives. On s'en acquitte tant bien que mal pour glaner les précieux dollars, dont on dépensera la moitié en tombant, au coin d'une rue, sur une boutique à l'enseigne attrayante : magasin de vêtements, vidéoclub, fabrique d'armes, salle d'entraînement... Le jeu offre mille occasions de dilapider son précieux magot, et Travis pourra conserver dans sa chambre toutes les babioles accumulées. Il reste que ces phases en ville hachent terriblement la narration et le rythme du jeu, et offrent au héros une pseudo-liberté d'action qui noie un peu le propos.

Si l'on ajoute à ce gros point noir quelques problèmes de caméra particulièrement agaçants, on se rend compte qu'une fois de plus, Grasshopper ne fait que frôler l'excellence. No More Heroes est un vrai jeu d'auteur, radical et artistiquement engagé, qui ne plaira certainement pas à tous car il n'a rien du jeu vidéo parfait. En revanche, il a tout pour devenir un titre-culte et se frayer une place à part dans le coeur des joueurs.

Les notes
  • Graphismes16/20

    Difficile de juger l'aspect graphique de No More Heroes, si ce n'est en distinguant l'aspect technique de l'aspect artistique : le premier est aussi décevant qu'anecdotique, le second aussi brillant qu'essentiel. Le résultat est un vrai régal visuel, à mi-chemin entre le comic-book et le pop-art, qui pourra cependant faire fuir les inconditionnels de Bump Mapping et d'Antialiasing.

  • Jouabilité15/20

    Le gameplay simple et nerveux ne souffre d'aucun problème de jouabilité : Suda 51 et son équipe ont su tirer parti sans en abuser des possibilités offertes par les contrôles de la Wii. On regrette néanmoins que le jeu soit doté d'une caméra capricieuse, que le bouton de recentrage ne suffit pas toujours à dompter.

  • Durée de vie12/20

    Avec sa quinzaine d'heures de jeu, on aurait tendance à dire que la durée de vie n'est pas le point fort de No More Heroes, d'autant que les phases dans la ville étaient fortement dispensables. Mais il faut penser à tous les collectionneurs et autres fashion victims qui apprécient de vaquer à droite et à gauche pour rassembler les objets les plus variés : ceux-là auront quelques heures de plus à se mettre sous la dent.

  • Bande son16/20

    La bande-son, qui alterne avec bonheur entre morceaux pop, rock et électro, participe beaucoup au plaisir de jeu, de même que les bruitages en combat qui ne manquent pas d'impact. Les voix d'origine en anglais (sous-titrées en français) sont quant à elles tout à fait convaincantes.

  • Scénario15/20

    Moins barrée et plus structurée que celle d'un Killer 7, l'intrigue de No More Heroes n'en demeure pas moins jouissive grâce à son ton décalé et ses multiples références ludiques et cinématographiques. La personnalité des différents tueurs à gages y est pour beaucoup.

Moins torturé, moins transgressif et plus accessible qu'un Killer 7, No More Heroes n'en reste pas moins le jeu original et mature qui faisait défaut à la Wii. Son ton décalé, son style visuel unique, son inventivité constante et son gameplay convaincant concourent à procurer une expérience de jeu inégalable, bien qu'entachée de quelques problèmes techniques et de chutes de rythme regrettables.
Sans conteste un des meilleurs jeux de la console.

Note de la rédaction

16
15.6

L'avis des lecteurs (200)

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