En 2006, Shadowgrounds avait créé la surprise chez les amateurs d'action débridée. Malgré son scénario digne d'un nanar de série B et sa durée de vie faiblarde, le jeu des Finlandais de Frozenbyte avait su se tailler un petit succès auprès des nostalgiques d'Alien Breed, reprenant à son compte la formule du shoot d'aliens en vue de dessus. C'est donc logiquement que les développeurs remettent le couvert avec ce stand-alone sous-titré Survivor.
Pour ceux qui ne connaissent pas Shadowgrounds, revenons tout d'abord sur son univers. L'histoire se passe sur Ganymède, une lune de Jupiter qui, en l'an de grâce 2096, est habitée par quelques milliers de colons humains. C'est évidemment le moment que choisit une armada d'aliens pour surgir des profondeurs et décimer la population. Le héros devait alors éradiquer la menace à l'aide d'un arsenal classique (fusil à pompe, minigun, lance-roquettes...), traversant de sombres coursives métalliques jonchées de cadavres et de bidons explosifs rouges à l'aide de sa lampe torche... Bref, on remplace Mars par Ganymède, les démons par des aliens, et on obtient une sorte de Doom 3 en vue de dessus.
Aucun changement de contexte dans Survivor, puisqu'il ne s'agit pas d'une suite mais plutôt d'un spin-off. Le jeu se déroule donc en parallèle aux événements du premier, à la manière d'Opposing Force pour Half-Life par exemple. Conséquence directe de ce choix : on n'incarne plus Wesley Tyler. A la place, on a droit à trois personnages bien différents, qu'on joue tour à tour au fil des niveaux. Une bonne idée, car au lieu d'un seul héros tout puissant, on a trois personnages complémentaires avec chacun leurs forces mais aussi leurs faiblesses, ce qui est plus réaliste. Luke Giffords est le soldat équilibré de base, armé d'un fusil d'assaut, d'un lance-roquettes et de grenades classiques. Bruno Lastmann est le bourrin de l'équipe, avec son lance-flammes et sa rotative, il dynamite, il ventile, il disperse. Il est aussi équipé de grenades toxiques. Quant à Isabel Larose, c'est une tireuse d'élite : railgun et fusil plasma n'ont plus de secret pour elle, de même que l'utilisation de grenades électromagnétiques.
Mais la principale innovation de Shadowgrounds Survivor, c'est que ces trois lascars peuvent évoluer. Ils gagnent de l'expérience, des niveaux et donc des capacités spéciales. Certaines sont communes à tous les personnages (plus de vie, tirs critiques), d'autres sont spécifiques. Luke pourra ainsi recharger plus vite tandis qu'Isabel aura des grenades améliorées pouvant étourdir plusieurs ennemis. Enfin, chacun a aussi droit à une attaque spéciale, comme un anneau de feu pour Bruno ou une sorte de bullet-time pour Isabel. Combiné au système d'amélioration des armes, ça renforce le côté hack'n slash du titre. En effet, on retrouve la possibilité de customiser son arsenal, une des bonnes idées du premier épisode. Chargeur de plus grande capacité, dégâts accrus et même tir secondaire, de quoi transformer la plus basique pétoire en distributeur de mort high-tech. Il est par contre regrettable qu'une seule nouvelle arme ait fait son apparition, et que certaines anciennes aient même disparu.
De toutes façons, à part l'évolution des personnages, tout est extrêmement identique à Shadowgrounds dans Survivor : mêmes environnements, mêmes monstres, mêmes objectifs basiques... Un peu de renouvellement de ce côté-là n'aurait pas été du luxe. Le moteur graphique reprend aussi du service et s'en sort toujours aussi bien dans le rendu des ombres. Le moteur physique est également impressionnant même si certains éléments du décor paraissent avoir un poids dérisoire. En tout cas, il fera la joie des possesseurs de dual core avec force explosions et chutes d'objets en tout genre. Alors bien sûr, on n'échappe pas non plus à quelques problèmes hérités du jeu original, comme la linéarité des niveaux (à quelques trop rares exceptions près) et la durée de vie un peu faible. Quant au sympathique mode coopératif, il n'est toujours pas jouable en LAN ou en ligne. On note quand même l'ajout d'un mode Survival qui, comme son nom le laisse subtilement supposer, consiste à résister le plus longtemps possible à des vagues d'aliens toujours plus nombreuses. Bref, si Shadowgrounds Survivor n'est pas exempt de défauts, il n'en reste pas moins un shoot sympathique, et même un poil meilleur que son ancêtre. Disponible pour une vingtaine de dollars seulement sur Steam (et 25 en pack avec son grand frère), il serait dommage de s'en priver, surtout au cours actuel.
- Graphismes12/20
Peu de changement à ce niveau-là : c'est correct, la gestion des lumières est bonne et les effets d'explosions ou de flammes sont jolis. Excepté quelques nouveaux décors, la plupart des environnements traversés ressemblent à ceux déjà vus dans Shadowgrounds et souffrent des mêmes problèmes de textures redondantes.
- Jouabilité14/20
La prise en main est toujours aussi particulière, il faut donc un petit temps d'adaptation pour s'habituer à la visée. L'action est intense, on passe l'essentiel du temps à tirer, mais le gameplay n'est pas si basique grâce au système d'amélioration des personnages et des armes. L'intelligence artificielle et surtout le level-design auraient tout de même mérité meilleur traitement.
- Durée de vie12/20
L'aventure est trop courte, malgré la présence d'un mode coopératif pour rallonger un peu la sauce. Il aurait fallu qu'il soit jouable en LAN ou Online pour représenter un réel intérêt. Le mode Survival est sympa mais vite oublié une fois quelques records battus. Reste que pour ce prix-là, le contenu est tout à fait honnête, d'autant que les outils d'édition sont fournis.
- Bande son14/20
L'ambiance sonore est encore une réussite et soutient parfaitement l'action. Le doublage anglais est dans la moyenne, on pouvait espérer plus convaincant, mais la faute incombe aussi aux écrivains responsables des dialogues...
- Scénario10/20
Ce n'est pas le point fort de la série comme le confirme "brillamment" ce spin-off. Disons qu'il s'agit plus d'un prétexte pour défourailler à tout va.
Une fois encore, Frozenbyte parvient à nous scotcher à l'écran durant quelques heures d'action frénétique avec Shadowgrounds Survivor. Ce stand-alone dégrossit la pépite qui sommeillait dans le jeu original pour en révéler tout l'éclat. Certes, le joyau est encore un peu brut, mais il a déjà subi un beau polissage.